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13/09/2023 | FRANCE | N°22LY00468

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 13 septembre 2023, 22LY00468


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 10 mars 2021 par lesquelles la préfète de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2104371 du 15 octobre 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enreg

istrée le 14 février 2022, M. B..., représenté par Me Royon, avocat, demande à la cour :

1°) d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 10 mars 2021 par lesquelles la préfète de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2104371 du 15 octobre 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 14 février 2022, M. B..., représenté par Me Royon, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 15 octobre 2021 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler les décisions de la préfète de la Loire du 10 mars 2021 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Loire, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", ou, subsidiairement, de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai de deux mois et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans le délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son avocate d'une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

- cette décision n'est pas suffisamment motivée ;

- la préfète de la Loire n'a pas préalablement procédé à un examen particulier de sa situation personnelle et a entaché sa décision d'une erreur de fait en visant un avis du 3 février 2021 ;

- à défaut de produire l'avis émis par le collège des médecins de l'OFII, la préfète de la Loire ne démontre ni l'avoir consulté, ni la régularité de la procédure suivie ;

- la préfète de la Loire s'est à tort estimée tenue de suivre cet avis et a ainsi méconnu l'étendue de sa compétence ;

- cette décision méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle procède d'une erreur manifeste d'appréciation.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- cette décision méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle procède d'une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- cette décision n'est pas suffisamment motivée en fait.

Par ordonnance du 15 décembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er février 2023.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 janvier 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Joël Arnould, premier conseiller.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... relève appel du jugement du 15 octobre 2021 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa requête tendant à l'annulation des décisions de la préfète de la Loire du 10 mars 2021 rejetant sa demande de titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement.

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".

3. En premier lieu, il résulte de l'avis et de la fiche de transmission versés au dossier par la préfète de la Loire que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a été consulté et s'est ainsi prononcé, par un avis du 3 février 2021, au vu d'un rapport médical communiqué le 15 janvier 2021. Si M. B... s'interroge sur la procédure suivie et le dossier médical examiné, il n'assortit ce moyen d'aucune autre précision. Par suite, les moyens tirés de l'irrégularité de la procédure suivie et de l'erreur de fait dont serait entachée la décision litigieuse en visant un avis du 3 février 2021 doivent être écartés.

4. En deuxième lieu, en rappelant le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en relevant, après avoir repris les termes de l'avis émis par le collège de médecins de l'OFII le 3 février 2021 concluant que M. B... peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé en cas de retour dans son pays d'origine, qu'aucune pièce ne contredit cet avis, la préfète de la Loire, qui n'était pas tenue de rappeler l'avis médical et le jugement intervenus dans le cadre d'une précédente procédure, et n'avait pas davantage à se prononcer sur l'existence de circonstances humanitaires ou d'un motif exceptionnel, a énoncé les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de sa décision. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse n'est pas suffisamment motivée.

5. En troisième lieu, il ressort des termes mêmes de la décision litigieuse, ainsi motivée, que la préfète de la Loire a, contrairement à ce que prétend M. B..., préalablement procédé à un examen de sa situation particulière, sans s'estimer tenue de suivre l'avis émis par le collège de médecins de l'OFII le 3 février 2021. Les moyens tirés du défaut d'un tel examen ainsi que de l'erreur de droit commise par la préfète de la Loire quant à l'étendue de sa compétence manquent en fait et doivent être écarté.

6. En quatrième lieu, pour rejeter la demande dont elle était saisie, la préfète de la Loire s'est approprié le sens de l'avis médical émis par le collège des médecins de l'OFII le 3 février 2021, selon lequel si l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale, dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, celui-ci peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, au vu de l'offre de soins et des caractéristiques du système de santé congolais. S'il ressort, d'une part, des pièces du dossier que M. B... souffre de diabète non insulino-dépendant et d'hypertension artérielle, aucun des certificats médicaux qu'il produit n'indique que ces pathologies ne peuvent être prises en charge, et le traitement qu'elles nécessitent effectivement fourni, dans son pays d'origine. Si M. B... soutient, d'autre part, souffrir de troubles psychiques constitutifs d'un stress post-traumatique, en se prévalant de certificats médicaux faisant état d'un lien avec un vécu traumatique dans son pays d'origine, tant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, que la Cour nationale du droit d'asile ont considéré, pour rejeter sa demande d'asile, que la réalité des événements qu'il invoque n'était pas établie et ont écarté l'existence d'un lien entre les constatations faites et les événements invoqués. M. B... ne produit, dans la présente instance, aucune pièce de nature à contredire cette appréciation. Dès lors, il n'est pas établi que l'origine de ses troubles exclurait toute prise en charge de sa pathologie dans son pays d'origine. Ainsi, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour en raison de son état de santé, la préfète de la Loire a méconnu les dispositions précitées.

7. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) ".

8. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., ressortissant congolais né le 14 septembre 1978 et entré en France le 4 août 2015, n'y résidait ainsi que depuis six ans à la date de la décision litigieuse, après avoir vécu près de trente-sept ans dans son pays d'origine. A l'exception d'un frère et d'une sœur, il n'y dispose d'aucune attache privée ou familiale, alors que son épouse et ses cinq enfants demeurent en République démocratique du Congo. Enfin, il n'établit nullement la réalité de l'intégration dont il se prévaut. Dans ces circonstances, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, la préfète de la Loire a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnu les stipulations précitées. Pour ces mêmes motifs, cette dernière n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. B....

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. En premier lieu, comme indiqué ci-dessus, la décision refusant de délivrer un titre de séjour à M. B... n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de ce refus de titre doit être écarté.

10. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux ci-dessus mentionnés, M. B..., qui n'a pas développé d'autres arguments, n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni davantage qu'elle procède d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Sur la légalité de la décision désignant le pays de destination :

11. En visant l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en rappelant la nationalité de M. B..., la préfète de la Loire, qui a en outre examiné l'absence de risque encouru par l'intéressé en cas de retour dans son pays d'origine et n'avait pas, pour fixer le pays de destination de la mesure d'éloignement, à rappeler ses attaches en France, a mentionné les considérations, notamment de fait, qui fondent sa décision, laquelle est ainsi suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision être écarté.

12. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

13. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction sous astreinte et celles de son conseil tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 1er septembre 2023, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,

M. Joël Arnould, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 septembre 2023.

Le rapporteur,

Joël ArnouldLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY00468


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY00468
Date de la décision : 13/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Joël ARNOULD
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : ROYON

Origine de la décision
Date de l'import : 24/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-09-13;22ly00468 ?
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