Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La SELAS Sudelvet Conseil et M. B... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du préfet de la Drôme du 26 octobre 2018 portant suspension de l'habilitation sanitaire du Dr B... pour une durée de trois mois et celle du 30 novembre 2018 portant extension de cette suspension au-delà du département.
Par un jugement n° 1808193 du 22 mars 2021, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 21 mai 2021 et un mémoire enregistré le 3 octobre 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. B... et la SELAS Sudelvet Conseil, représentés par la SELARL d'avocats Fayol et associés, agissant par Me Blanc, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 22 mars 2021 ;
2°) d'annuler la décision du préfet de la Drôme du 26 octobre 2018 portant suspension de l'habilitation sanitaire du Dr B... pour une durée de trois mois ;
3°) d'annuler la décision du préfet de la Drôme du 30 novembre 2018 portant extension de cette suspension au-delà du département ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la décision du 26 octobre 2018, qui constitue une sanction administrative, a été adoptée au terme d'une procédure irrégulière, M. B... n'ayant pas été informé de son droit d'accès au son dossier, ce dossier lui ayant été communiqué tardivement et de façon incomplète ;
- la sanction prononcée est disproportionnée.
Par un mémoire en défense enregistré le 25 août 2022, le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire conclut au rejet de la requête.
Il expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 26 août 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 3 octobre 2022.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Joël Arnould, premier conseiller,
- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de Me Blanc, avocat, représentant M. B... et la société Sudelvet Conseil.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ainsi que la société Sudelvet Conseil dont il est le président, relèvent appel du jugement du 22 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à l'annulation, d'une part, de la décision du préfet de la Drôme du 26 octobre 2018 suspendant l'habilitation sanitaire de celui-ci pour une durée de trois mois et, d'autre part, de celle du 30 novembre 2018 précisant la portée géographique de cette suspension.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes, d'une part, de l'article L. 203-1 du code rural et de la pêche maritime : " Les interventions auxquelles un détenteur d'animaux ou un responsable de rassemblement temporaire ou permanent d'animaux est tenu de faire procéder par un vétérinaire (...) ne peuvent être exécutées que par une personne (...), habilitée à cet effet par l'autorité administrative. Le titulaire de cette habilitation est dénommé " vétérinaire sanitaire " ". L'article R. 203-15 du même code prévoit que : " II. ' L'autorité administrative (...) peut suspendre ou retirer tout ou partie de l'habilitation dans les cas suivants : (...) 4° En cas de non-respect, par le vétérinaire sanitaire : (...) b) Des modalités techniques, administratives et, le cas échéant, financières de mise en œuvre des mesures de prévention, de surveillance ou de lutte dont l'autorité administrative prescrit, en application de l'article L. 203-1, qu'elles doivent être réalisées par un vétérinaire sanitaire (...). III. ' Préalablement à l'exécution des mesures mentionnées aux I et II du présent article, sauf en cas d'urgence, l'intéressé est mis à même de présenter ses observations ".
3. D'autre part, aux termes de l'article L. 122-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les mesures mentionnées à l'article L. 121-1 à caractère de sanction ne peuvent intervenir qu'après que la personne en cause a été informée des griefs formulés à son encontre et a été mise à même de demander la communication du dossier la concernant ".
4. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
5. Il ressort des pièces du dossier que, par courrier du 27 juillet 2018, le préfet de la Drôme a informé M. B... de son intention de suspendre, pour une durée de trois mois, son habilitation sanitaire spécialisée pour les élevages de la filière volailles, en raison de l'irrégularité de certains prélèvements opérés, en l'invitant à présenter ses éventuelles observations écrites et à participer à un entretien le 4 septembre 2018. A ce courrier, étaient jointes certaines pièces, constitutives du manquement reproché. A la demande du conseil de M. B... formulée par courrier du 24 août 2018, ces pièces ont été complétées, le 31 août 2018, du reste du dossier de l'intéressé. M. B..., qui n'a pas, dans ces circonstances, été privé d'une garantie du seul fait que le préfet ne l'a pas informé de son droit à obtenir communication de son dossier, a ainsi disposé d'un délai suffisant avant l'adoption de la décision de suspension litigieuse, sans qu'il ne puisse utilement invoquer la date à laquelle un entretien a été organisé. Est également dépourvu d'incidence le défaut, dans le dossier ainsi communiqué, d'une précédente habilitation de l'intéressé, étrangère aux motifs de cette décision. Par suite, aucune irrégularité l'ayant privé d'une garantie ou susceptible d'avoir exercé une influence sur le sens de la décision de suspension litigieuse ne résulte des conditions dans lesquelles son dossier lui a été communiqué.
6. En second lieu, pour suspendre, pour une durée de trois mois, l'habilitation sanitaire dont disposait M. B..., le préfet de la Drôme a retenu qu'ayant omis de transmettre, dans le délai imparti, des prélèvements opérés comme vétérinaire sanitaire, celui-ci a maquillé cet oubli en modifiant la date des prélèvements et l'âge des animaux concernés sur le document accompagnant leur envoi au laboratoire d'analyse. M. B... ne conteste ni la réalité de ces faits, ni sa parfaite connaissance des obligations lui incombant comme vétérinaire sanitaire, au demeurant spécialisé dans ce secteur. Par son caractère délibéré et ayant eu pour conséquence de fragiliser la fiabilité des analyses et, par suite, la prévention de la salmonellose et la préservation de la santé publique, ce manquement revêt une particulière gravité, laquelle ne saurait être minorée par l'épuisement et l'anxiété invoqués par M. B.... En outre, ce manquement n'était pas isolé, l'administration ayant précédemment, par un courrier du 11 avril 2018, constaté des anomalies et des difficultés au cours de l'assainissement d'un foyer de salmonelle avicole à Savasse, pour lequel M. B... avait été désigné vétérinaire sanitaire en octobre 2017, et l'ayant averti de ce que le manquement aux instructions qui lui étaient adressées ou le constat de nouvelles anomalies pourrait entraîner la suspension de son habilitation sanitaire. Dans ces conditions, et eu égard à la durée limitée de la suspension prononcée, M. B... et la SELAS Sudelvet Conseil ne sont pas fondés à soutenir que, portant sur l'ensemble de son habilitation, cette suspension est disproportionnée.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... et la SELAS Sudelvet Conseil ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. B... et la SELAS Sudelvet Conseil.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... et de la SELAS Sudelvet Conseil est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à la SELAS Sudelvet Conseil et au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.
Délibéré après l'audience du 1er septembre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,
Mme Emilie Felmy, présidente-assesseure,
M. Joël Arnould, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 septembre 2023.
Le rapporteur,
Joël ArnouldLe président,
Jean-Yves Tallec
La greffière,
Sandra Bertrand
La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 21LY01590