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13/07/2023 | FRANCE | N°22LY03337

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 13 juillet 2023, 22LY03337


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 25 janvier 2022 par lequel le préfet de Saône-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par jugement n° 2200479 du 28 juin 2022, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant

la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 16 novembre 2022 et 29 mars 2023, M. ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 25 janvier 2022 par lequel le préfet de Saône-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Par jugement n° 2200479 du 28 juin 2022, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 16 novembre 2022 et 29 mars 2023, M. D..., représenté par Me Clemang, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 juin 2022 ainsi que les décisions susvisées ;

2°) d'enjoindre au préfet de Saône-et-Loire de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- il est demandé la communication du dossier médical de son enfant qui a servi à l'édiction de l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) en litige ;

- l'avis rendu par le collège des médecins de l'OFII est irrégulier faute de collégialité ;

- la décision portant refus de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour ;

- l'interdiction de retour sur le territoire français en litige est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation.

Par un courrier du 17 mars 2023, la cour a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la décision à intervenir était susceptible d'être fondée sur un moyen soulevé d'office, tiré de la nécessité de substituer aux dispositions de l'article L. 611-1 3° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile appliquées par le préfet de Saône-et-Loire les dispositions de l'article L. 611-1 1° du même code.

L'Office français de l'immigration et de l'intégration a présenté des observations par courrier du 20 mai 2023 qui ont été communiquées aux parties.

La requête a été communiquée au préfet de Saône-et-Loire qui n'a pas produit d'observations.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 12 octobre 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère ;

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant de nationalité macédonienne né le 12 mars 1984, déclare être entré irrégulièrement en France le 18 septembre 2016, accompagné de son épouse et de leurs quatre enfants mineurs nés en 2006, 2008, 2011, 2014. Dans le cadre de l'examen de sa demande d'asile, les autorités allemandes ont accepté la demande de reprise en charge en application de l'article 18 du règlement (UE) n°604/2013 du parlement européen et du conseil du 26 juin 2013. Par un arrêté du 16 décembre 2016 pris par le préfet de Saône-et-Loire, M. D... a fait l'objet d'une remise aux autorités allemandes, mais ne s'est pas présenté à sa convocation en préfecture, le 20 mars 2017. L'arrêté portant remise n'a pas été exécuté. Le 12 novembre 2017, son épouse a donné naissance à leur cinquième enfant. Le 2 mai 2018, la France est devenue responsable de la demande d'asile de l'intéressé. Le 15 janvier 2021, M. D... a demandé la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en qualité d'accompagnant d'un enfant mineur malade. Il relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 janvier 2022 par lequel le préfet de Saône-et-Loire a refusé de lui délivrer le titre de séjour demandé, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an.

Sur la légalité du refus de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions prévues à l'article L. 425-9 (...) se voient délivrer, sous réserve qu'ils justifient résider habituellement en France avec lui et subvenir à son entretien et à son éducation, une autorisation provisoire de séjour d'une durée maximale de six mois. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / Cette autorisation provisoire de séjour ouvre droit à l'exercice d'une activité professionnelle. / Elle est renouvelée pendant toute la durée de la prise en charge médicale de l'étranger mineur, sous réserve que les conditions prévues pour sa délivrance continuent d'être satisfaites. / Elle est délivrée par l'autorité administrative, après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans les conditions prévues à l'article L. 425-9. ". Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. (...). / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ". Aux termes de l'article R. 425-11 du même code : " Pour l'application de l'article L. 425-9, le préfet délivre la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'office et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". Aux termes de l'article R. 425-12 du même code : " Le rapport médical (...) est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) ". L'article R. 425-13 de ce code dispose que : " Le collège à compétence nationale mentionné à l'article R. 425-12 est composé de trois médecins, il émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du même article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. (...) ". Aux termes de l'article 5 de l'arrêté du 27 décembre 2016 pris pour l'application de ces dispositions : " Le collège de médecins à compétence nationale de l'office comprend trois médecins instructeurs des demandes des étrangers malades, à l'exclusion de celui qui a établi le rapport. (...) ". Enfin, aux termes de l'article 6 du même arrêté : " (...) un collège de médecins (...) émet un avis (...) précisant : a) si l'état de santé du demandeur nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / (...) / Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. / L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

3. En vertu des articles L. 425-9, R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des articles 3 et 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dont l'avis est requis préalablement à la décision du préfet relative à la délivrance de la carte de séjour prévue à l'article L. 425-9, doit émettre son avis dans les conditions fixées par l'arrêté du 27 décembre 2016, au vu notamment du rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. S'il est saisi, à l'appui de conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus, d'un moyen relatif à l'état de santé du demandeur, aux conséquences de l'interruption de sa prise en charge médicale ou à la possibilité pour lui d'en bénéficier effectivement dans le pays dont il est originaire, il appartient au juge administratif de prendre en considération l'avis médical rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Si le demandeur entend contester le sens de cet avis, il appartient à lui seul de lever le secret relatif aux informations médicales qui le concernent, afin de permettre au juge de se prononcer en prenant en considération l'ensemble des éléments pertinents, notamment l'entier dossier du rapport médical au vu duquel s'est prononcé le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, en sollicitant sa communication, ainsi que les éléments versés par le demandeur au débat contradictoire.

4. Il ressort des pièces du dossier que l'avis émis le 23 juillet 2021 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) concernant le jeune C..., fils A... et Mme D..., né le 29 juillet 2008, indique que si l'état de santé de l'enfant nécessite une prise en charge médicale, un éventuel défaut de soins ne devrait pas être de nature à entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Les dispositions citées au point 2, issues de la loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France et de ses textes d'application, ont modifié l'état du droit antérieur pour instituer une procédure particulière aux termes de laquelle le préfet statue sur la demande de titre de séjour présentée par l'étranger malade au vu de l'avis rendu par trois médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, qui se prononcent en répondant par l'affirmative ou par la négative aux questions figurant à l'article 6 précité de l'arrêté du 27 décembre 2016, au vu d'un rapport médical relatif à l'état de santé du demandeur établi par un autre médecin de l'Office, lequel peut le convoquer pour l'examiner et faire procéder aux examens estimés nécessaires. Cet avis commun, rendu par trois médecins et non plus un seul, au vu du rapport établi par un quatrième médecin, le cas échéant après examen du demandeur, constitue une garantie pour celui-ci. Les médecins signataires de l'avis ne sont pas tenus, pour répondre aux questions posées, de procéder à des échanges entre eux, l'avis résultant de la réponse apportée par chacun à des questions auxquelles la réponse ne peut être qu'affirmative ou négative. Par suite, la circonstance que, dans certains cas, ces réponses n'aient pas fait l'objet de tels échanges, oraux ou écrits, est sans incidence sur la légalité de la décision prise par le préfet au vu de cet avis. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance de la garantie liée au caractère collégial de la délibération du collège de médecins de l'OFII doit être écarté.

5. Il ressort des pièces produites que le jeune C... D... souffre d'une surdité profonde bilatérale, diagnostiquée à l'âge de six ans en Allemagne où l'enfant a été appareillé. Il ressort des mêmes pièces que le handicap de l'enfant a engendré un retard de langage et de développement cognitif et que son état de santé nécessite un suivi spécialisé. Il a à ce titre été admis au sein de l'institut des jeunes sourds pour l'année 2021-2022. Toutefois, le bilan unique d'évaluations de stage de cet institut daté du 29 mars 2021 précise, au niveau du bilan psychologique, que l'enfant est " fortement entravé dans sa communication et sa compréhension par le fait qu'il soit allophone " et l'évaluation orthophonique a conclu qu'il était indispensable de choisir la langue de communication de l'enfant pour lui permettre d'échanger avec le monde extérieur. Ces éléments, qui attestent de la nécessité d'un accompagnement spécifique de l'enfant, ne permettent toutefois pas de remettre en cause les termes de l'avis du collège des médecins de l'OFII que le préfet de Saône-et-Loire s'est approprié. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entre et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de ce que la décision en litige serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

6. En outre, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il ne ressort pas des pièces produites au dossier que la décision susvisée méconnaitrait l'intérêt supérieur de l'enfant C... dès lors que l'évolution favorable de sa situation nécessite un suivi dans une structure spécialisée réalisée dans la langue de son pays d'origine, également parlée par l'ensemble des membres de la famille. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté.

7. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ".

8. M. D... se prévaut de sa présence en France depuis 5 ans et de la scolarisation de ses enfants. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé s'est soustrait à l'exécution de la décision de transfert aux autorités allemandes du 16 décembre 2016. Il n'a effectué aucune démarche de régularisation entre 2017 et 2021 et s'est donc maintenu sur le territoire français en situation irrégulière. Il ne justifie d'aucune attache privée ou familiale en France ni ne démontre une intégration d'ordre sociale ou professionnelle. Il se borne à ce titre à produire une promesse d'embauche en qualité d'aide-mécanicien du 3 février 2022, postérieure à la date de la décision en litige. Son épouse est également en situation irrégulière sur le territoire français. Rien ne fait obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue dans le pays d'origine de l'intéressé dont tous les membres de la famille ont la nationalité et où les enfants A... D... et son épouse pourront poursuivre leur scolarité. Par suite, eu égard aux conditions d'entrée et de séjour en France A... D..., le refus de séjour en litige n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations susmentionnées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit ainsi être écarté. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. Compte tenu de la légalité de la décision portant refus de séjour opposée à M. D..., ce dernier n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

10. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / 1° L'étranger, ne pouvant justifier être entré régulièrement sur le territoire français, s'y est maintenu sans être titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents ; (...). "

11. La décision portant obligation de quitter le territoire français, fondée à tort sur les dispositions du 3°) de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui ne visent pas le cas des parents d'enfant étranger malade qui se sont vu refuser une première autorisation provisoire de séjour pouvait être légalement prise par l'administration sur le fondement du 1°) du même article, en vertu du même pouvoir d'appréciation et sans que l'intéressé ne soit privé d'une garantie liée à l'application de ce dernier texte, dès lors que M. D... est entré irrégulièrement sur le territoire français. Par suite, il y a lieu, après en avoir averti les parties, de procéder à une substitution de la base légale de la décision litigieuse.

Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

12. La décision portant obligation de quitter le territoire français étant légale, M. D... ne saurait soutenir que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français serait illégale pour défaut de base légale.

13. Aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 ainsi que pour la prolongation de l'interdiction de retour prévue à l'article L. 612-11 ".

14. Il résulte de ces dispositions que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux.

15. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

16. En l'espèce, pour prononcer une interdiction de retour d'une durée d'un an, le préfet de Saône-et-Loire a tenu compte de la durée de présence A... D... en France, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, ainsi que de l'absence de mesure d'éloignement et de menace à l'ordre public. Eu égard aux éléments, rappelés notamment au point 8, caractérisant la situation de l'intéressé, qui ainsi qu'il a été rappelé a fait l'objet d'une décision de transfert vers l'Allemagne à l'exécution de laquelle il s'est soustrait, le préfet de Saône-et-Loire n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées en prononçant une interdiction de retour sur le territoire d'une durée d'un an à l'encontre de l'intéressé.

17 Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé, par les moyens invoqués, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande. Les conclusions qu'il présente aux mêmes fins en appel doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête A... D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de Saône-et-Loire et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

Délibéré après l'audience du 22 juin 2023, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 juillet 2023.

La rapporteure,

V. Rémy-NérisLe président,

F. Bourrachot

La greffière,

A-C Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY03337

lc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY03337
Date de la décision : 13/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : SCP CLEMANG

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-07-13;22ly03337 ?
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