Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2016 et 2017 à raison des plus-values réalisées sur la vente de deux biens immobiliers sis 115 et 117 rue des Apôtres à Ambérieu-en-Bugey.
Par un jugement n° 2000215 du 25 mai 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 26 juillet 2021, M. et Mme A..., représentés par Me Fanget, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 25 mai 2021 ;
2°) de les décharger des impositions et pénalités susmentionnées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens en application de l'article R. 207-1 du livre des procédures fiscales, ainsi qu'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- s'agissant de l'évaluation du prix du terrain d'assiette, l'administration n'apporte pas la preuve de l'insuffisance de la valeur retenue, le vérificateur ne pouvait retenir des biens comparables situés dans une zone géographique hors la commune d'Ambérieux en Bugey et le 5ème du II de l'article 150 VB du code général des impôts et la doctrine administrative (BOIRFPI-PVI-20-10-20-20-2013122 n°410) prévoient que les frais de voirie, réseaux et distribution exposés sur des terrains à bâtir viennent en majoration du prix d'acquisition, qu'ils soient ou non imposés par les collectivités territoriales ou leurs groupements ;
- s'agissant de l'évaluation du prix d'acquisition des constructions, l'administration aurait dû appliquer en priorité une méthode de comparaison des prix du marché, et aurait dû retenir toutes les factures de construction qui lui ont été présentées.
- les pénalités pour manquement délibéré sont insuffisamment motivées et ne sont pas justifiées.
Par un mémoire enregistré le 23 février 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par les requérants n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure ;
- les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique,
Considérant ce qui suit :
1. Par acte du 9 octobre 2009, M. et Mme A... ont acquis, pour un montant de 106 000 euros, un terrain à bâtir à Ambérieu-en-Bugey, qu'ils ont divisé en deux lots, sur chacun desquels un immeuble à usage d'habitation a été édifié. Par actes des 3 mai 2016 et 3 mars 2017, les requérants ont cédé ces biens immobiliers moyennant des prix respectifs de 140 000 euros et 143 200 euros. Les plus-values qu'ils ont réalisées à cette occasion ont été placées sous le régime de l'exonération prévu au 1° du II de l'article 150 U du code général des impôts. A la suite d'un contrôle sur pièces, l'administration a remis en cause cette exonération au motif que ces constructions ne pouvaient être regardées comme la résidence principale des intéressés au jour de leurs cessions. Par une proposition de rectification en date du 3 septembre 2018, l'administration leur a notifié des impositions supplémentaires en matière d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre des deux années 2016 et 2017, assorties de pénalités pour manquement délibéré et manœuvres frauduleuses. M. et Mme A... qui ont accepté le principe de l'imposition, relèvent appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à la décharge de ces impositions et pénalités.
2. Aux termes de l'article 150 U du code général des impôts : " I.- Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices agricoles et aux bénéfices non commerciaux, les plus-values réalisées par les personnes physiques ou les sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 ter, lors de la cession à titre onéreux de biens immobiliers bâtis ou non bâtis ou de droits relatifs à ces biens, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH. (...) II.- Les dispositions du I ne s'appliquent pas aux immeubles, aux parties d'immeubles ou aux droits relatifs à ces biens : / 1° Qui constituent la résidence principale du cédant au jour de la cession (...) ".
3. Aux termes de l'article 150 V du code général des impôts : " La plus ou moins-value brute réalisée lors de la cession de biens ou droits mentionnés aux articles 150 U à 150 UC est égale à la différence entre le prix de cession et le prix d'acquisition par le cédant ". Aux termes de l'article 150 VB du même code : " I.- Le prix d'acquisition est le prix effectivement acquitté par le cédant, tel qu'il est stipulé dans l'acte, étant précisé que ce prix s'entend de l'existant et des travaux dans le cas d'une acquisition réalisée selon le régime juridique de la vente d'immeuble à rénover (...) II.- Le prix d'acquisition est, sur justificatifs, majoré : (...) 3° Des frais afférents à l'acquisition à titre onéreux définis par décret, que le cédant peut fixer forfaitairement à 7, 5 % du prix d'acquisition dans le cas des immeubles à l'exception de ceux détenus directement ou indirectement par un fonds de placement immobilier mentionné à l'article 239 nonies ; 4° Des dépenses de construction, de reconstruction, d'agrandissement ou d'amélioration, supportées par le vendeur et réalisées par une entreprise depuis l'achèvement de l'immeuble ou son acquisition si elle est postérieure, lorsqu'elles n'ont pas été déjà prises en compte pour la détermination de l'impôt sur le revenu et qu'elles ne présentent pas le caractère de dépenses locatives. Lorsque le contribuable, qui cède un immeuble bâti plus de cinq ans après son acquisition, n'est pas en état d'apporter la justification de ces dépenses, une majoration égale à 15 % du prix d'acquisition est pratiquée. (...) 5° Des frais de voirie, réseaux et distribution en ce qui concerne les terrains à bâtir (...) ".
4. Il résulte de l'instruction que pour déterminer le montant des plus-values en litige, l'administration a procédé à la ventilation du prix de cession de chaque lot entre la valeur du terrain actualisée à la date de la vente et la valeur de la construction, et que la valeur actualisée des terrains a été déterminée par comparaison avec des cessions de terrains présentant des caractéristiques similaires, réalisées dans des communes voisines. Pour chacun des deux lots, l'administration a établi des tableaux mentionnant le montant des dépenses de construction, les frais et taxes supportés par le vendeur, le prix de vente de la construction calculé par différence avec le prix du terrain évalué selon la méthode comparative et le prix de vente du lot, et, compte tenu de ces éléments, la plus-value nette imposable afférente d'une part à la construction, d'autre part au terrain.
Sur la charge de la preuve :
5. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque (...) s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. ".
6. Il résulte de l'instruction que les services postaux ont présenté le 7 septembre 2018, le pli contenant la notification de redressement à l'adresse des requérants. Ces derniers, qui n'ont pas réclamé ce pli ont présenté leurs observations postérieurement au délai de trente jours qui leur était imparti pour ce faire par la proposition de rectification qui doit être regardée comme ayant été régulièrement notifiée le 7 septembre 2018. Par suite, en application des dispositions précitées, M. et Mme A... supportent la charge de la preuve de l'exagération des impositions contestées, la circonstance que le service ait néanmoins accepté de répondre à leurs observations tardives demeurant sans incidence sur la dévolution de la charge de la preuve.
Sur l'évaluation des terrains d'assiette :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
7. D'une part, il résulte de l'instruction que, pour déterminer le prix de cession des terrains, l'administration a procédé à leur évaluation par comparaison avec des ventes de biens similaires, notamment en termes de surface et de viabilisation, intervenues avant le fait générateur. En l'absence de biens similaires situés sur la commune d'Ambérieux en Bugey, l'administration s'est fondée sur des ventes réalisées sur des communes voisines, telles Dagnon, Dagneux, Saint-Maurice-de-Gourdans, Béligneux ou Nievroz. Si les requérants font valoir que les prix des terrains cédés ne peuvent être comparés aux prix des terrains des communes choisies par le service vérificateur, qui ne correspondent pas à la même zone géographique et qui ne reflètent en aucun cas les prix du marché de la commune d'Ambérieux en Bugey, ils n'apportent aucun élément permettant d'établir que les termes de comparaison choisis ne seraient pas pertinents. D'autre part, et alors que, contrairement à ce qu'ils soutiennent, l'administration a bien pris en compte les frais d'acquisition de ces terrains pour déterminer les plus-values réalisées, les requérants n'apportent aucun élément de nature à justifier la nature et le montant des dépenses de travaux de viabilisation réalisés lors de l'acquisition des terrains susceptibles de venir majorer le prix d'acquisition. Par suite, M. et Mme A... n'établissent pas que les terrains litigieux, avaient, au moment de la vente, une valeur bien supérieure à celle retenue par l'administration.
En ce qui concerne l'interprétation de la loi fiscale :
8. M. et Mme A... ne sont pas fondés à se prévaloir du paragraphe 410 de l'instruction référencée BOIRFPI-PVI-20-10-20-20-2013122 concernant la possibilité de retenir les frais d'aménagement et de viabilisation d'un terrain, supportés par un contribuable dans le cadre d'une opération de lotissement, pour le calcul de la plus-value imposable, qui ne peut être regardé comme comportant une interprétation différente de la loi fiscale dont il a été fait application ci-dessus.
Sur l'évaluation du prix d'acquisition des constructions :
9. En premier lieu, si les requérants se prévalent de la règle selon laquelle la valeur du terrain doit être déterminée prioritairement à partir de comparaisons reposant sur des transactions réalisées sur des terrains nus situés dans la même zone géographique que ce bien et que ce n'est qu'à défaut, qu'elle peut évaluer la valeur de la construction à partir de son coût de reconstruction, une telle règle qui concerne la remise en cause de valeurs constatées dans un bilan par des contribuables n'a pas vocation à s'appliquer en l'espèce.
10. En second lieu, en application des dispositions précitées de l'article 150 VB du code général des impôts, le cédant d'un immeuble peut majorer, pour la détermination du montant de sa plus-value immobilière, le prix d'acquisition de ce dernier du montant des dépenses qu'il a exposées pour y faire réaliser, par une entreprise, une ou plusieurs des prestations de travaux qu'elles mentionnent. Il résulte cependant de la lettre même de ces dispositions qu'elles font obstacle à ce que le cédant puisse majorer ce prix d'acquisition des dépenses qu'il a supportées pour acquérir lui-même les matériaux nécessaires à la réalisation de ces travaux, dès lors que ces dépenses ne sont pas des dépenses exposées par une entreprise dans le cadre des prestations prévues par ces dispositions. Est sans incidence à cet égard la circonstance que le cédant confie à une entreprise la réalisation de travaux en vue desquels il a procédé à cette acquisition.
11. Si les requérants font valoir que les travaux qu'ils ont réalisés eux-mêmes doivent être pris en compte en majoration du prix d'acquisition, dès lors que M. A... est un professionnel du bâtiment, ils ne produisent en tout état de cause, aucun document permettant d'établir qu'ils auraient engagé des dépenses d'un montant supérieur à celui qui a été finalement retenu par l'administration.
Sur les pénalités :
12. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt (...) entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".
13. Il ressort des termes de la proposition de rectification du 3 septembre 2018 adressée à M. et Mme A... que l'administration fiscale a indiqué que ces derniers qui ne pouvaient être regardés comme occupant le bien cédé à titre de résidence principale, au regard des consommations d'eau, de gaz et d'électricité relevées, ont sciemment déclaré que ce bien constituait leur résidence principale, pour bénéficier de l'exonération de la plus-value résultant de la vente de ce bien sur le fondement du 1° du II de l'article 150 U du code général des impôts et que cette fausse déclaration a nécessairement eu pour but d'éluder l'imposition. L'administration a ainsi suffisamment motivé la majoration en litige, laquelle est par ailleurs justifiée, dès lors que la circonstance sur laquelle elle s'est fondée n'est plus contestée par les intéressés.
14. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi qu'au titre de l'article R. 207-1 du livre des procédures fiscales doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 22 juin 2023 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Dèche, présidente assesseure,
Mme Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 juillet 2023.
La rapporteure,
P. Dèche
Le président,
F. Bourrachot,
La greffière,
A-C. Ponnelle
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
2
N° 21LY02547
lc