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12/07/2023 | FRANCE | N°21LY00214

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 12 juillet 2023, 21LY00214


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A..., épouse C..., a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) au besoin après expertise ordonnée avant-dire droit, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté n° 2018-01-007 pris par le maire de Villette-d'Anthon le 26 janvier 2018, en tant que cet arrêté a refusé de reconnaître imputables au service les troubles anxio-dépressifs dont elle souffre et la place en conséquence en congé de maladie ordinaire, ainsi que les arrêtés successifs en découlant ;

2°) d'enjoindr

e au maire de Villette-d'Anthon, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B... A..., épouse C..., a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) au besoin après expertise ordonnée avant-dire droit, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté n° 2018-01-007 pris par le maire de Villette-d'Anthon le 26 janvier 2018, en tant que cet arrêté a refusé de reconnaître imputables au service les troubles anxio-dépressifs dont elle souffre et la place en conséquence en congé de maladie ordinaire, ainsi que les arrêtés successifs en découlant ;

2°) d'enjoindre au maire de Villette-d'Anthon, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, de reconnaître imputable au service l'accident du 21 décembre 2016 et de procéder à la suite à la reconstitution de sa carrière et de ses traitements à compter de cette même date ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Villette-d'Anthon une somme de 1 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1801769 du 17 novembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté n° 2018-01-007 et a enjoint au maire de Villette-d'Anthon, dans les deux mois à compter de la notification du jugement, de placer rétroactivement Mme C... en congés de maladie imputable au service à plein traitement à compter du 22 décembre 2016.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 22 janvier 2021 et le 2 février 2021, la commune de Villette-d'Anthon, représentée par la Scp Desseigne et Zotta, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 17 novembre 2020 ;

2°) de mettre à la charge de Mme C... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune de Villette-d'Anthon soutient que :

- les avis de la commission de réforme qui sont consultatifs, et ne lient pas l'administration, ne sont pas de nature à fonder une annulation ;

- les attestations présentées par Mme C... sont incomplètes et irrégulières en la forme ;

- il n'existe pas de lien de causalité entre le syndrome anxio-dépressif dont souffre l'agent et le service ;

- Mme C... a eu un comportement inapproprié et a fait preuve d'insubordination.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 février 2022, Mme C... représentée par Me Kummer :

1°) conclut au rejet de la requête ;

2°) demande d'annuler l'arrêté n° 2018-01-007 pris par le maire de Villette-d'Anthon le 26 janvier 2018, en tant que cet arrêté refuse de reconnaître imputables au service les troubles anxio-dépressifs dont elle souffre et la place en conséquence en congé de maladie ordinaire, ainsi que les arrêtés successifs en découlant ;

3°) demande qu'il soit enjoint au maire de Villette-d'Anthon de reconnaître imputable au service l'accident du 21 décembre 2016 et de la placer rétroactivement en congés de maladie imputable au service à plein traitement à compter de cette date ;

4°) à titre subsidiaire, demande qu'il soit ordonné, avant dire droit, une expertise médicale confiée à un expert psychiatre, dont les frais seront mis à la charge de son employeur ;

5°) demande qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la commune de Villette-d'Anthon sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens présentés par la collectivité ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 17 mai 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 23 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Fédi, président-assesseur,

- et les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. La commune de Villette-d'Anthon fait appel du jugement du tribunal administratif de Grenoble qui a annulé l'arrêté du 26 janvier 2018 du maire de Villette-d'Anthon en tant qu'il a refusé à Mme C... de reconnaître imputables au service ses troubles anxio-dépressifs et a enjoint à son maire, dans les deux mois à compter de la notification du jugement, de placer rétroactivement l'agent en congés de maladie imputable au service à plein traitement à compter du 22 décembre 2016.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) Toutefois, si la maladie provient (...) d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) ".

3. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet événement du service, le caractère d'un accident de service. Sauf à ce qu'il soit établi qu'il aurait donné lieu à un comportement ou à des propos excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique, constitue un accident de service un évènement survenu à une date certaine, par le fait ou à l'occasion du service, dont il est résulté une lésion, quelle que soit la date d'apparition de celle-ci, sauf si des circonstances particulières ou une faute personnelle du fonctionnaire titulaire ou stagiaire détachent cet événement du service. Il appartient dans tous les cas au juge administratif, saisi d'une décision de l'autorité administrative compétente refusant de reconnaître l'imputabilité au service d'un tel événement, de se prononcer au vu des circonstances de l'espèce.

4. Il ressort des pièces du dossier que l'affection psychologique dont souffre Mme C... et qui a justifié son placement en congé de maladie à compter du 22 décembre 2016, s'est manifestée à la suite d'un différend sur les heures de récupération, survenu le 21 décembre 2016, au cours duquel la collectivité ne conteste pas sérieusement que la directrice générale des services a tenu à l'encontre de l'agent des propos excédant l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. Cet incident, qui s'est produit sur le lieu et dans le temps de service, dans un contexte de dysfonctionnement du service, attesté par plusieurs témoignages concordants, que la commune ne remet pas en cause en se prévalant de prétendues irrégularités de présentation formelle des attestations produites, a au demeurant donné lieu à une reconnaissance d'imputabilité au service pour la douleur lombaire basse et au coude droit consécutive à la chute de Mme C... survenue le même jour. Par ailleurs, il ne résulte d'aucune des pièces médicales produites que l'intéressée présentait des antécédents auxquels pourraient être attribués l'apparition puis le développement de sa maladie, alors que la commission de réforme a donné, le 18 janvier 2018, un avis favorable à la demande d'imputabilité au service de l'événement du 21 décembre 2016. Enfin, si la commune de Villette-d'Anthon soutient, d'une part, que Mme C... aurait eu un comportement inapproprié et aurait fait preuve d'insubordination, sans toutefois l'établir, d'autre part, que l'agent ne produit aucun arrêt de travail ou certificat médical antérieur au 21 décembre 2016, aucune circonstance particulière ni aucune faute personnelle de l'agent ne permet de détacher cet événement du service. Dans ces conditions, l'accident survenu le 21 décembre 2016 doit être regardé comme imputable au service. Dès lors, le maire de la commune de Villette-d'Anthon, qui a fait une inexacte appréciation de la situation de l'intéressée, a méconnu les dispositions précitées de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 en refusant d'admettre l'imputabilité au service du syndrome anxio-dépressif dont souffre l'intéressée. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que Mme C... était fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 26 janvier 2018.

5. Il résulte de tout ce qui précède, que la commune de Villette-d'Anthon n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 26 janvier 2018 et a enjoint au maire de Villette-d'Anthon de placer rétroactivement Mme C... en congés de maladie imputable au service à plein traitement à compter du 22 décembre 2016.

Sur les frais liés au litige :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme C..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la commune de Villette-d'Anthon. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la collectivité territoriale une somme de 2 000 euros à verser à Mme C..., au titre de ces mêmes dispositions.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Villette-d'Anthon est rejetée.

Article 2 : La commune de Villette-d'Anthon versera à Mme C... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... épouse C... et à la commune de Villette-d'Anthon.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2023, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 juillet 2023.

Le rapporteur,

Gilles FédiLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne au préfet de l'Isère en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY00214


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00214
Date de la décision : 12/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01 Fonctionnaires et agents publics. - Positions. - Congés. - Congés de maladie.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Gilles FEDI
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SCP DESSEIGNE ET ZOTTA

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-07-12;21ly00214 ?
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