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01/06/2023 | FRANCE | N°23LY00148

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 01 juin 2023, 23LY00148


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 25 février 2022 par lequel le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de douze mois.

Par jugement n° 2205251 du 16 septembre 2022, le tribu

nal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 25 février 2022 par lequel le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours, a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de douze mois.

Par jugement n° 2205251 du 16 septembre 2022, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 12 janvier 2023, M. B..., représenté par Me Zoccali, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 septembre 2022 ainsi que les décisions susvisées ;

2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision portant refus de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 30 novembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant arménien né le 8 septembre 1969, déclare être entré en France le 5 mai 2013. Sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) par décision du 23 janvier 2014 puis par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) par décision du 28 octobre 2014. Par décisions du 26 mai 2015, le préfet du Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicables, décision assortie d'une obligation de quitter le territoire français avec fixation du pays de renvoi. M. B... s'est maintenu sur le territoire français et a, à nouveau, sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade le 30 janvier 2017. Par un arrêté du 30 avril 2019, le préfet du Rhône a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un arrêt du 7 janvier 2021, la cour a annulé le jugement du 9 décembre 2019 du tribunal administratif de Lyon rejetant la demande d'annulation de ces décisions du 30 avril 2019 et a enjoint au préfet du Rhône de procéder au réexamen de la demande présentée par l'intéressé. Par un nouvel arrêté du 25 février 2022, le préfet du Rhône a refusé la délivrance à M. B... du titre de séjour sollicité, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de douze mois. M. B... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :

2. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...). / Si le collège des médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée ".

3. La partie qui justifie de l'avis d'un collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié et effectivement accessible dans le pays de renvoi.

4. Dans son avis du 28 juin 2021, le collège de médecins de l'OFII a estimé que si l'état de santé du requérant nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, toutefois, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Le requérant soutient qu'il est atteint d'une pathologie rénale chronique particulièrement grave, qu'il a fait l'objet d'une transplantation rénale en avril 2019 au sein du service de transplantation, néphrologie et immunologie clinique de l'hôpital Édouard Herriot de Lyon et doit bénéficier d'une prise en charge médicale et d'un traitement médicamenteux non disponibles en Arménie. A ce titre, il produit divers documents médicaux et notamment une " fiche Clima " du 5 avril 2022 et un certificat médical du 6 septembre 2022 d'un médecin du service de transplantation, néphrologie et immunologie clinique de l'hôpital Edouard Herriot de Lyon, documents quelque peu postérieurs à la décision en litige mais qui décrivent un état antérieur, attestant de la nécessité d'un traitement médicamenteux notamment un traitement immunosuppresseur à prendre à vie et d'un suivi régulier dans un centre de transplantation afin de détecter d'éventuelles complications en lien avec ce traitement. Toutefois, aucun des documents ne fait état de l'indisponibilité de ce traitement médicamenteux en Arménie ni de l'impossibilité d'y bénéficier d'un suivi médical approprié à l'état de santé de l'intéressé. Par suite, les documents dont fait état l'intéressé ne permettent pas de remettre en cause l'appréciation portée par le collège des médecins de l'OFII, que le préfet du Rhône s'est approprié en prenant la décision contestée. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

5. Compte tenu de la légalité de la décision portant refus de séjour opposée à M. B..., ce dernier n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré en France à l'âge de 43 ans et qu'il conserve dans son pays d'origine son épouse et ses enfants ainsi que plusieurs membres de sa fratrie. Il y a également nécessairement conservé des attaches privées après y avoir vécu la majeure partie de sa vie. Il ne fait état en revanche d'aucune attache familiale en France ni n'y justifie d'une intégration socioprofessionnelle excepté au niveau associatif. Ainsi, le refus de titre de séjour qui lui a été opposé ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision a été prise. Par suite, le moyen tiré de ce que cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

8. Si M. B... soutient que la décision litigieuse méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il ne pourra bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé en Arménie, un tel moyen n'est pas opérant à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français qui n'a ni pour objet ni pour effet d'éloigner l'intéressé vers l'Arménie.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

9. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

10. Ainsi qu'il a été dit au point 4, M. B..., qui peut effectivement disposer d'un traitement médicamenteux et d'un suivi médical approprié à son état de santé en Arménie, n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant l'Arménie comme pays de renvoi l'exposerait à des traitements inhumains et dégradants et méconnaîtrait à ce titre l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

11. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Les conclusions qu'il présente aux mêmes fins en appel doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et celles présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.

Délibéré après l'audience du 11 mai 2023, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er juin 2023.

La rapporteure,

V. Rémy-NérisLe président,

F. Bourrachot

La greffière,

A-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

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N° 23LY00148

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 23LY00148
Date de la décision : 01/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : ZOCCALI

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-06-01;23ly00148 ?
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