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31/05/2023 | FRANCE | N°20LY02669

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 31 mai 2023, 20LY02669


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B..., a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler la décision par laquelle le maire de Tarare a rejeté sa demande de protection fonctionnelle ;

2°) d'enjoindre au maire de Tarare de l'admettre au bénéfice de la protection fonctionnelle ;

3°) de condamner la commune de Tarare à lui verser la somme totale de 20 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Tarare une somme de 2 000 euros au t

itre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1902806 du 16 ju...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B..., a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler la décision par laquelle le maire de Tarare a rejeté sa demande de protection fonctionnelle ;

2°) d'enjoindre au maire de Tarare de l'admettre au bénéfice de la protection fonctionnelle ;

3°) de condamner la commune de Tarare à lui verser la somme totale de 20 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Tarare une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1902806 du 16 juillet 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 13 septembre 2020, M. B..., représenté par Me Flandin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 16 juillet 2020 ;

2°) d'annuler la décision par laquelle le maire de Tarare a rejeté sa demande de protection fonctionnelle ;

3°) d'enjoindre au maire de Tarare de l'admettre au bénéfice de la protection fonctionnelle ;

4°) de condamner la commune de Tarare à lui verser la somme totale de 20 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Tarare une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal administratif a commis une erreur d'appréciation sur les faits qui lui ont été soumis ;

- les faits invoqués sont constitutifs de harcèlement moral ;

- le préjudice physique et le préjudice moral qui ont résulté de ce harcèlement moral peuvent être évalués à 20 000 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mars 2021, la commune de Tarare représentée par la Selarl Cabinet d'avocats Philippe Petit et Associés, agissant par Me Cottignies :

1°) conclut au rejet de la requête ;

2°) demande qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens présentés par la requérante ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 17 mai 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 21 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Fédi, président-assesseur,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me Flandin, représentant M. B..., et celles de Me Garaudet, représentant la commune de Tarare ;

Considérant ce qui suit :

1. Adjoint technique principal de 1ère classe employé par la commune de Tarare, M. B... a sollicité de son employeur le bénéfice de la protection fonctionnelle en se prévalant du harcèlement moral dont il estime être victime à raison de ses conditions d'emploi. M. B... fait appel du jugement du 16 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision par laquelle le maire de la commune a rejeté sa demande et la condamnation de cette collectivité à l'indemniser du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de ce harcèlement moral allégué.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 6 quinquiès de la loi du 13 juillet 1983 susvisée, issu de la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / (...). ". Aux termes de l'article 11 de la même loi : " I.- A raison de ses fonctions et indépendamment des règles fixées par le code pénal et par les lois spéciales, le fonctionnaire ou, le cas échéant, l'ancien fonctionnaire bénéficie, dans les conditions prévues au présent article, d'une protection organisée par la collectivité publique qui l'emploie à la date des faits en cause ou des faits ayant été imputés de façon diffamatoire (...). / IV. de la personne, les violences, les agissements constitutifs de harcèlement, les menaces, les injures, les diffamations ou les outrages dont il pourrait être victime sans qu'une faute personnelle puisse lui être imputée. Elle est tenue de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté (...). ".

3. D'une part, les dispositions de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 établissent à la charge des collectivités publiques, au profit des fonctionnaires et des agents publics non titulaires lorsqu'ils ont été victimes d'attaques dans l'exercice de leurs fonctions, une obligation de protection à laquelle il ne peut être dérogé, sous le contrôle du juge, que pour des motifs d'intérêt général. Si cette obligation peut avoir pour objet, non seulement de faire cesser les attaques auxquelles le fonctionnaire ou l'agent public est exposé, mais aussi de lui assurer une réparation adéquate des torts qu'il a subis, laquelle peut notamment consister à assister, le cas échéant, l'agent concerné dans les poursuites judiciaires qu'il entreprend pour se défendre, il appartient dans chaque cas à la collectivité publique d'apprécier, sous le contrôle du juge et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce au vu des éléments dont elle dispose à la date de la décision, notamment de la question posée au juge et du caractère éventuellement manifestement dépourvu de chances de succès des poursuites entreprises, les modalités appropriées à l'objectif poursuivi.

4. D'autre part, il appartient à un agent public, qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, lorsqu'il entend contester le refus opposé par l'administration, dont il relève, à une demande de protection fonctionnelle fondée sur de tels faits de harcèlement, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se déterminant au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. Pour être qualifiés de harcèlement moral, de tels agissements répétés doivent excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique. Dès lors qu'elle n'excède pas de telles limites, une simple modification des attributions justifiée par l'intérêt du service, n'est pas constitutive d'un harcèlement moral au sens des dispositions précitées.

5. A la suite d'un audit du service des espaces verts réalisé en 2016, entrainant la modification de fonctions de plusieurs agents et visant à améliorer la propreté et l'entretien du parc Thivel, la commune de Tarare a décidé d'affecter sur ce site M. B... et de le rattacher au service " voirie-propreté-manifestation ". Contrairement à ce qui est soutenu, il ne ressort pas des pièces du dossier, que la réorganisation des services mise en œuvre au sein de la collectivité et le changement d'affectation de M. B..., qui répondaient à une nécessité de service, auraient entrainé une modification substantielle de ses attributions, alors au demeurant qu'il n'est pas sérieusement contesté que ses nouvelles missions sont, en grande partie, liées aux espaces verts et que le compte-rendu d'entretien professionnel du 5 mars 2018, précisait que l'agent était satisfait de sa nouvelle affectation. Par ailleurs, la seule circonstance, que l'appelant, qui n'exerçait aucune fonction d'encadrement, ait présenté, sans succès, une demande de poste d'agent de maitrise au sein du service des espaces verts en 2016 et que le 13 mai 2017 la commune de Tarare ait publié trois offres d'emploi, ne permet pas de caractériser une situation de harcèlement moral. Enfin en se bornant à soutenir que le parc Thivel, représenterait une surface de 80 513 m2 qu'il doit gérer seul avec plus de 30 000 m2 de surfaces hors espaces verts, M. B... n'établit pas que sa charge de travail se serait alourdie, alors d'une part, qu'il n'est pas contesté que les travaux de tonte et d'élagage ont été confiés, pour une part substantielle, à une entreprise privée, M. B... n'étant chargé que de la partie restant située à proximité de l'enclos des daims représentant environ 14 000 m² et, d'autre part, qu'il est constant que la commune a précisé les tâches de M. B... et son champ d'intervention en matière de tonte. Par suite, ces éléments de fait, allégués mais non établis par les pièces versées au dossier, ne sont pas susceptibles de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral.

6. Alors que M. B... ne justifie pas avoir informé la commune qu'il avait contracté la maladie de Lyme et que des restrictions médicales à l'exercice de ses fonctions auraient été décidées par la médecine du travail, il ne ressort pas des pièces du dossier que le local mis à sa disposition serait insalubre, ni que le véhicule utilisé pour l'entretien du parc serait particulièrement dangereux ou impropre à sa destination, ni même qu'il ne disposerait pas du matériel adapté, notamment une tondeuse, nécessaire à la bonne exécution de sa mission, alors que les réponses apportées aux propositions d'amélioration du service formulées par l'agent ne peuvent être regardées comme des refus de demande de matériels. En outre, M. B... n'établit ni avoir évacué " à la main " des pierres et des feuilles situées dans le parc des daims, tâche qui a été réalisée par une entreprise extérieure, ni qu'il aurait été privé des outils nécessaires à la réalisation de ses missions lors de sa reprise d'activité le 6 novembre 2018. Par ailleurs, la double circonstance d'une part, que lors de l'entretien professionnel annuel pour 2017, une notation " satisfaisant " lui a été attribuée, alors qu'il fait l'objet d'une notation " très satisfaisant " depuis de nombreuses années, d'autre part, que l'intéressé ait été victime d'un accident de service le 3 mai 2018, ne saurait caractériser une situation de harcèlement moral.

7. Dans ces conditions, les agissements allégués, pris isolément ou dans leur ensemble, ne permettent pas d'établir que M. B... aurait été victime de faits constitutifs d'un harcèlement moral. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le maire de Tarare aurait fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 et commis une erreur d'appréciation en refusant de lui accorder le bénéfice de la protection fonctionnelle qu'il avait sollicité. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à condamner la commune de Tarare à lui verser la somme de 20 000 euros, en réparation du préjudice moral qu'il allègue avoir subi et ses conclusions aux fins d'injonction, ne peuvent qu'être rejetées.

8. Il résulte de tout ce qui précède, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

9. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par les parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Tarare présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de Tarare.

Délibéré après l'audience du 16 mai 2023, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2023.

Le rapporteur,

Gilles FédiLe président,

Jean-Yves TallecLa greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne à la préfète du Rhône en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 20LY02669


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY02669
Date de la décision : 31/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Statuts - droits - obligations et garanties - Garanties et avantages divers - Protection contre les attaques.

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: M. Gilles FEDI
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : FLANDIN THIBAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-05-31;20ly02669 ?
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