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17/05/2023 | FRANCE | N°21LY03738

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 17 mai 2023, 21LY03738


Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures

I. Par une requête enregistrée sous le numéro 1901526, la communauté de communes du Clunisois, la commune de Berzé-le-Châtel, la commune de Bray, la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles de Saône-et-Loire, le groupement agricole d'exploitation en commun La Ferme du Mont Rouge, le groupement agricole d'exploitation en commun Jean-Luc Carrette et Sébastien Pocheron, M. A... F..., l'exploitation agricole à responsabilité limitée Dumonceau, M. E... G..., le groupement agricole d

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Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures

I. Par une requête enregistrée sous le numéro 1901526, la communauté de communes du Clunisois, la commune de Berzé-le-Châtel, la commune de Bray, la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles de Saône-et-Loire, le groupement agricole d'exploitation en commun La Ferme du Mont Rouge, le groupement agricole d'exploitation en commun Jean-Luc Carrette et Sébastien Pocheron, M. A... F..., l'exploitation agricole à responsabilité limitée Dumonceau, M. E... G..., le groupement agricole d'exploitation en commun de la Chèvrerie de la Trufière, le groupement agricole d'exploitation en commun Rocher, le groupement agricole d'exploitation en commun de Pierre Bise, M. B... C..., M. B... D... et l'entreprise agricole à responsabilité limitée La Ferme des Coteaux ont demandé au tribunal administratif de Dijon :

1°) d'annuler l'arrêté du 27 mars 2019 du ministre de l'agriculture et de l'alimentation et du ministre de l'économie et des finances portant délimitation des zones agricoles défavorisées ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

II. Par une requête, enregistrée sous le numéro 1903329, la Confédération paysanne de Saône-et-Loire a demandé au tribunal administratif de Dijon :

1°) d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l'agriculture et de l'alimentation a refusé de procéder à la publication au Journal officiel de l'annexe de l'arrêté du 27 mars 2019 portant délimitation des zones agricoles défavorisées ;

2°) d'annuler l'arrêté du 27 mars 2019 portant délimitation des zones agricoles défavorisées, en tant qu'il ne classe pas en zone soumise à des contraintes naturelles les communes de Berzé-le-Châtel, Blanot, Cortambert, Donzy-le-Pertuis, La Chapelle-sous-Brancion et Lacrost, et en zone soumise à des contraintes spécifiques la commune de Bray, ensemble la décision portant rejet de son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'agriculture et de l'alimentation de procéder à la publication au Journal officiel de la République française de l'annexe de l'arrêté du 27 mars 2019 portant délimitation des zones agricoles défavorisées ;

4°) d'enjoindre au ministre de l'agriculture et de l'alimentation de modifier l'annexe de l'arrêté du 27 mars 2019 portant délimitation des zones agricoles défavorisées en classant les communes de Berzé-le-Châtel, Blanot, Cortambert, Donzy-le-Pertuis, La Chapelle-sous-Brancion et Lacrost, en zone soumise à des contraintes naturelles et la commune de Bray en zone soumise à des contraintes spécifiques.

Par un jugement nos 1901526, 1903329 du 21 septembre 2021, le tribunal administratif de Dijon a joint ces demandes et a :

1°) annulé l'arrêté du 27 mars 2019 du ministre de l'agriculture et de l'alimentation et du ministre de l'économie et des finances portant délimitation des zones agricoles défavorisées en tant qu'il ne classe pas les communes de Donzy-le-Pertuis, La Chapelle-sous-Brancion et Lacrost en zone soumise à des contraintes naturelles ;

2°) annulé la décision implicite de rejet du recours gracieux de la Confédération paysanne de Saône-et-Loire en tant qu'elle ne classe pas les communes de Donzy-le-Pertuis, La Chapelle-sous-Brancion et Lacrost en zone soumise à des contraintes naturelles ;

3°) mis à la charge de l'Etat les sommes de 200 euros à verser à la communauté de communes du Clunisois, à la commune de Berzé-le-Châtel, à la commune de Bray, à la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles de Saône-et-Loire, au groupement agricole d'exploitation en commun La Ferme du Mont Rouge, au groupement agricole d'exploitation en commun Jean-Luc Carrette et Sébastien Pocheron, à M. A... F..., à l'exploitation agricole à responsabilité limitée Dumonceau, à M. E... G..., au groupement agricole d'exploitation en commun de la Chèvrerie de la Trufière, au groupement agricole d'exploitation en commun Rocher, au groupement agricole d'exploitation en commun de Pierre Bise, à M. B... C..., à M. B... D... et à l'entreprise agricole à responsabilité limitée La Ferme des Coteaux, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 22 novembre 2021 et un mémoire enregistré le 28 octobre 2022, la communauté de communes du Clunisois, désignée représentante unique, la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles de Saône-et-Loire, le groupement agricole d'exploitation en commun La Ferme du Mont Rouge, le groupement agricole d'exploitation en commun Jean-Luc Carrette et Sébastien Pocheron, M. A... F..., l'exploitation agricole à responsabilité limitée Dumonceau, M. E... G..., le groupement agricole d'exploitation en commun de la Chèvrerie de la Trufière, le groupement agricole d'exploitation en commun Rocher, le groupement agricole d'exploitation en commun de Pierre Bise, M. B... C..., M. B... D..., l'entreprise agricole à responsabilité limitée La Ferme des Coteaux et la Confédération paysanne de Saône-et-Loire, représentés par Me Chareyre (SELARL GC Avocat), avocat, demandent à la cour :

1°) d'annuler les articles 4 et 5 de ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 21 septembre 2021 rejetant le surplus de leurs conclusions ;

2°) d'annuler l'arrêté du 27 mars 2019 portant délimitation des zones agricoles défavorisées, en tant qu'il ne classe pas en zones agricoles défavorisées les communes de Berzé-le-Châtel, de Blanot, de Cortambert, de Bray et de Chissey-les-Mâcon ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les sommes de 800 euros à verser à la communauté de communes du Clunisois et à la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles de Saône-et-Loire et les sommes de 200 euros à verser à chacun des autres appelants, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les communes en cause doivent être intégrées à la " petite région agricole " (PRA) du Clunisois, et non à celle du Mâconnais, laquelle est fortement hétérogène ;

S'agissant des communes de Berzé-le-Châtel, de Blanot et de Cortambert :

- leur classement en ZSCN est justifié par application du critère de la production brute standard (PBS) en raisonnant en moyenne par hectare de surface agricole utile dans la PRA du Clunisois ;

S'agissant de la commune de Bray :

- son classement en ZSCS est justifié dès lors qu'elle respecte les critères biophysiques combinés et que la PRA du Clunisois respecte le critère de la PBS ;

S'agissant de la commune de Chissey-les-Mâcon :

- son classement en ZSCS est justifié, en application du critère de l'autonomie fourragère et que la PRA du Clunisois respecte le critère de la PBS.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 septembre 2022, le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire conclut au rejet de la requête et demande à la cour, par la voie de l'appel incident, d'annuler l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Dijon du 21 septembre 2021 annulant partiellement l'arrêté du 27 mars 2019.

Il expose que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le respect des critères de classement doit être apprécié par référence aux PRA en vertu du décret du 27 mars 2019 dont la légalité, notamment en ce qui concerne cette méthode, a été validée par le Conseil d'Etat.

Par ordonnance du 28 octobre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée, en dernier lieu, au 28 novembre 2022.

Par courrier du 4 avril 2023, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour est susceptible de soulever d'office l'irrecevabilité des conclusions présentées, par la voie de l'appel incident, par le ministre en charge de l'agriculture et tendant à l'annulation du jugement attaqué en ce qu'il a partiellement annulé l'arrêté du 27 mars 2019, celles-ci soulevant un litige distinct de l'appel principal formé par la communauté de communes du Clunisois et autres.

Par deux mémoires enregistrés les 5 et 13 avril 2023, la communauté de communes du Clunisois et autres ont présenté des observations en réponse à ce moyen d'ordre public.

Ils exposent que les conclusions du ministre soulevant un litige distinct de l'appel principal, elles sont irrecevables.

Par un mémoire enregistré le 12 avril 2023, le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire a présenté des observations en réponse à ce moyen d'ordre public.

Il expose que son appel incident, qui ne soulève pas de litige distinct de l'appel principal, est recevable.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 1305/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 ;

- le règlement (UE) n° 808/2014 de la Commission du 17 juillet 2014 ;

- la décision d'exécution C (2019) 1769 de la Commission européenne du 27 février 2019 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 ;

- le décret n° 2015-445 du 16 avril 2015 ;

- le décret n° 2019-243 du 27 mars 2019 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère ;

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;

- et les observations de Me Chareyre, avocat, représentant la communauté de communes du Clunisois et autres ;

Une note en délibéré, enregistrée le 3 mai 2023, a été produite pour la communauté de communes du Clunisois et autres et n'a pas été communiquée.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 27 mars 2019, les ministres en charge de l'économie et de l'agriculture ont énuméré les communes classées comme " zones soumises à des contraintes naturelles " (ZSCN) et comme " zones soumises à des contraintes spécifiques " (ZSCS), en application de l'article 32 du règlement du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 et de l'article D. 113-15 du code rural et de la pêche maritime, dans sa version issue du décret du 27 mars 2019, afin de permettre le versement de l'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) aux exploitants agricoles installés dans ces zones. Saisi par la communauté de communes du Clunisois, la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles de Saône-et-Loire et la Confédération paysanne de Saône-et-Loire, accompagnées de communes et d'exploitants agricoles du département, le tribunal administratif de Dijon a, par un jugement du 21 septembre 2021, annulé cet arrêté en ce qu'il ne classait pas les communes de Donzy-le-Pertuis, La Chapelle-sous-Brancion et Lacrost en ZSCN et a rejeté le surplus de leurs demandes. La communauté de communes du Clunisois, la fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles de Saône-et-Loire, la confédération paysanne de Saône-et-Loire et onze exploitants agricoles relèvent appel de ce jugement en ce qu'il a ainsi rejeté le surplus de leurs demandes concernant cinq autres communes de la Saône-et-Loire, en ses articles 4 et 5. Par la voie de l'appel incident, le ministre en charge de l'agriculture demande l'annulation de ce même jugement en ce qu'il a partiellement annulé l'arrêté du 27 mars 2019.

Sur l'appel incident du ministre en charge de l'agriculture :

2. Un appel incident est recevable, sans condition de délai, s'il ne soumet pas au juge d'appel un litige distinct de celui qui a été soulevé par l'appel principal.

3. Par son mémoire en défense enregistré le 28 septembre 2022, le ministre en charge de l'agriculture demande, par la voie de l'appel incident, l'annulation du jugement du tribunal administratif de Dijon du 21 septembre 2021 en tant qu'il a partiellement annulé l'arrêté du 27 mars 2019. L'annulation ainsi prononcée par le tribunal administratif portant sur le défaut de classement de trois communes de la Saône-et-Loire, distinctes de celles visées par l'appel principal présenté par la communauté de communes du Clunisois et autres, ces conclusions incidentes soulèvent un litige distinct de l'appel principal. Ayant été introduites au-delà du délai d'appel, ces conclusions sont, par suite, irrecevables.

Sur l'appel principal de la communauté de communes du Clunisois et autres :

4. En premier lieu, aux termes, d'une part, de l'article 31 du règlement du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 relatif au soutien au développement rural par le Fonds européen agricole pour le développement rural (Feader) : " 1. Les paiements destinés aux agriculteurs situés dans des zones de montagne et d'autres zones soumises à des contraintes naturelles ou autres contraintes spécifiques sont accordés annuellement par hectare de surface agricole, afin d'indemniser les agriculteurs pour tout ou partie des coûts supplémentaires et de la perte de revenu résultant de ces contraintes pour la production agricole dans la zone concernée (...) ". Le paragraphe 3 de l'article 32 de ce même règlement, relatif aux ZSCN, dispose que : " Afin de pouvoir bénéficier des paiements prévus à l'article 31, les zones autres que les zones de montagne sont considérées comme soumises à des contraintes naturelles importantes lorsqu'au moins 60 % de la surface agricole remplit au moins l'un des critères énumérés à l'annexe III, à la valeur seuil indiquée. / Le respect de ces conditions est assuré au niveau des unités administratives locales (niveau "UAL 2") ou au niveau d'une unité locale nettement délimitée qui couvre une zone géographique clairement d'un seul tenant et dotée d'une identité économique et administrative définissable. / Lorsqu'ils délimitent les zones concernées par le présent paragraphe, les États membres procèdent à un exercice d'affinement basé sur des critères objectifs, afin d'exclure les zones dans lesquelles des contraintes naturelles importantes, visées au premier alinéa, ont été démontrées, mais ont été surmontées par des investissements ou par l'activité économique, ou par une productivité normale des terres dûment attestée, ou dans lesquelles les méthodes de production ou les systèmes agricoles ont compensé la perte de revenus ou les coûts supplémentaires visés à l'article 31, paragraphe 1 ". Enfin, le paragraphe 4 de ce même article, relatif aux ZSCS, dispose que : " Les zones autres que celles visées aux paragraphes 2 et 3 peuvent bénéficier des paiements prévus à l'article 31 si elles sont soumises à des contraintes spécifiques et lorsque la poursuite de la gestion des terres est nécessaire pour assurer la conservation ou l'amélioration de l'environnement, l'entretien du paysage rural et la préservation du potentiel touristique de la zone ou pour protéger le littoral. / Les zones soumises à des contraintes spécifiques comprennent les surfaces agricoles dans lesquelles les conditions naturelles de production sont similaires et dont la superficie totale ne dépasse pas 10 % du territoire de l'État membre concerné. / En outre, des zones peuvent également bénéficier des paiements au titre du présent paragraphe si: / - 60 % au moins de la surface agricole remplit au moins deux des critères énumérés à l'annexe III, avec une marge ne dépassant pas 20 % de la valeur seuil indiquée, ou / - 60 % au moins de la surface agricole est composée de zones qui remplissent au moins l'un des critères énumérés à l'annexe III à la valeur seuil indiquée et de zones remplissant au moins deux des critères énumérés à l'annexe III, avec pour chacune d'elles une marge ne dépassant pas 20 % de la valeur seuil indiquée. / Le respect de ces conditions est assuré au niveau des UAL de niveau 2 ou au niveau d'une unité locale clairement définie qui couvre une seule zone géographique précise d'un seul tenant ayant une identité économique et administrative définissable. Lorsqu'ils délimitent les zones concernées par le présent alinéa, les États membres procèdent à un exercice d'affinement, comme prévu à l'article 32, paragraphe 3. Les zones considérées admissibles au titre du présent alinéa sont prises en considération pour le calcul de la limite de 10 % visée au deuxième alinéa ".

5. Aux termes, d'autre part, de l'article D. 113-15 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction issue du décret du 27 mars 2019 relatif à la révision des critères de délimitation des zones agricoles défavorisées autres que les zones de montagne : " Les autres zones agricoles défavorisées sont constituées : - des zones autres que les zones de montagne qui sont soumises à des contraintes naturelles importantes, dites ZSCN, telles que définies au 3 de l'article 32 du règlement (UE) n° 1305/2013 du 13 décembre 2013 ; / - des autres zones soumises à des contraintes spécifiques, dites ZSCS, telles que définies au 4 de l'article 32 du règlement (UE) n° 1305/2013 du 13 décembre 2013. / Leurs éléments de définition sont ceux précisés dans le cadre national, pris en application du 3 de l'article 6 du règlement (UE) n° 1305/2013 du 13 décembre 2013, approuvé par la décision d'exécution C (2019) 1769 de la Commission du 27 février 2019 ".

6. Dans le cadre de la révision des zones défavorisées rendue nécessaire par l'entrée en vigueur des dispositions des articles 31 et 32 du règlement n° 1305/2013 relatifs aux paiements en faveur des zones soumises à des contraintes naturelles et des zones soumises à des contraintes spécifiques et à leur désignation, la France a présenté à la Commission européenne une demande de modification du cadre national selon la procédure prévue au b) de l'article 11 de ce règlement. Les points 5.2.7.3.2 et 5.2.7.3.3 de ce document précisent, en application des dispositions combinées du 3 de l'article 6 du règlement et de l'annexe I du décret du 16 avril 2015, les conditions d'admissibilité, les montants et les taux d'aide applicables ainsi que les critères d'affinement visés à l'article 32 de ce même règlement. Les annexes intitulées " Définitions et méthodologie dans l'Hexagone pour les ZSCN (sous-mesure 13.2) et pour les ZSCS (sous-mesure 13.3) " et " Définition des ZSCN et ZSCS en Corse, Guyane, Guadeloupe, Martinique, La Réunion et Mayotte " décrivent la méthode et les données utilisées afin de délimiter les zones dans lesquelles les exploitants agricoles peuvent bénéficier de l'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN), conformément aux critères fixés par le règlement du 17 décembre 2013 et les points précités du cadre national. Par une décision d'exécution du 27 février 2019, la Commission européenne a approuvé le cadre national ainsi modifié. Par les dispositions précédemment rappelées du décret du 27 mars 2019 relatif à la révision des critères de délimitation des zones agricoles défavorisées autres que les zones de montagne, le Premier ministre a donné effet aux éléments de définition des zones soumises à des contraintes naturelles et des zones soumises à des contraintes spécifiques contenus dans le cadre national. Sur le fondement de ce décret, l'arrêté litigieux du 27 mars 2019 portant délimitation des zones agricoles défavorisées a fixé la liste des communes et parties de communes classées au titre de ces deux types de zones.

7. Il résulte de ces dispositions, et notamment de celles du cadre national, que le classement d'une commune en ZSCN, comme en ZSCS, que ce soit, dans ce dernier cas, par application combinée des critères biophysiques ou par la méthode dite " hors critères combinés ", est subordonné à un " exercice d'affinement ", destiné à exclure de ces classements les zones considérées comme ayant surmonté les contraintes naturelles ou spécifiques auxquelles elles sont soumises. En vertu du cadre national, plus particulièrement de ses annexes, le respect des critères mis en œuvre pour cet exercice d'affinement, à l'exception de celui tiré des investissements réalisés, est apprécié à l'échelle des " petites régions agricoles " (PRA), ou, pour les 10 % de PRA les plus grandes, à l'échelle cantonale. Parmi les critères ainsi appréciés à l'échelle de la PRA, figure celui subordonnant le classement à un niveau de production brute standard par hectare (PBS/ha) inférieur ou égal à 80 ou 85 % de la moyenne nationale. Subsidiairement, est substitué à cet indicateur celui dit de la " PBS restreinte ", si les productions à forte valeur ajoutée représentent plus de 50 % de la valeur de la PBS et que la valeur des productions résiduelles reste significative, en représentant plus de 10 % de la PBS, au sein de la PRA en cause.

8. Il est constant que le classement des cinq communes concernées par l'appel de la communauté de communes du Clunisois et autres a été notamment refusé au stade de l'exercice d'affinement.

9. Pour contester l'appréciation du respect de ces critères d'affinement, notamment celui de la PBS " standard ", à l'échelle de la PRA du Mâconnais, dont les communes en cause relèvent, la communauté de communes du Clunisois et autres soutiennent que l'hétérogénéité de cette PRA fait obstacle à ce qu'elle soit retenue, en préconisant leur rattachement à la PRA voisine du Clunisois. Toutefois, ils ne peuvent utilement se prévaloir, pour contester la pertinence de l'échelle ainsi retenue en l'espèce, du deuxième alinéa du 3. de l'article 32 du règlement, qui exige la délimitation d' " unités administratives locales " ou " d'une unité locale nettement délimitée qui couvre une zone géographique clairement d'un seul tenant et dotée d'une identité économique et administrative définissable ", celui-ci n'étant applicable qu'à la première étape de la définition des zones, et non à la seconde que constitue l'exercice d'affinement. Par ailleurs, ils ne sauraient utilement se plaindre des disparités, tenant à la part de cultures à forte valeur ajoutée telles que la viticulture, existant entre les communes de cette PRA, le critère subsidiaire dit de la " PBS restreinte " ayant précisément pour objet de neutraliser la PBS liée à ces cultures au stade de l'exercice d'affinement. Dans ces conditions, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que l'examen d'affinement aurait été, à tort, opéré à l'échelle de la PRA du Mâconnais.

10. En conséquence, la communauté de communes du Clunisois et autres ne pouvant se prévaloir de la zone constituée par la PRA du Clunisois élargie aux communes en cause comme échelle de l'exercice d'affinement et ne contestant pas que la PRA du Mâconnais ne satisfait pas à cet exercice, ils ne sont pas fondés à soutenir que les communes de Berzé-le-Châtel, de Blanot et de Cortambert devaient être classées en ZSCN, ni davantage que celles de Bray et de Chissey-les-Mâcon devaient être classées en ZSCS, par application, respectivement, des méthodes des critères biophysiques combinés et " hors critères combinés ".

11. Il résulte de tout ce qui précède que la communauté de communes du Clunisois et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté le surplus de leurs demandes concernant les communes de Berzé-le-Châtel, de Blanot, de Cortamber, de Bray et de Chissey-les-Mâcon.

Sur les frais liés au litige :

12. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le paiement des frais exposés par la communauté de communes du Clunisois et autres en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la communauté de communes du Clunisois et autres est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire par la voie de l'appel incident sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté de communes du Clunisois, au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 2 mai 2023, à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 mai 2023.

La rapporteure,

Sophie CorvellecLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Sandra BertrandLa République mande et ordonne au ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY03738


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY03738
Date de la décision : 17/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Agriculture et forêts - Exploitations agricoles - Aides de l’Union européenne.

Communautés européennes et Union européenne - Règles applicables - Politique agricole commune.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Sophie CORVELLEC
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SELARL GC AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-05-17;21ly03738 ?
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