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11/05/2023 | FRANCE | N°21LY00375

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 11 mai 2023, 21LY00375


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner l'Etat à lui rembourser la somme de 1 119,11 euros, outre les intérêts au taux de 5 % à compter du 6 mai 2008, en réparation du préjudice financier, et à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral, qu'il estime avoir subis du fait des fautes commises par l'administration fiscale en ne lui notifiant pas, en sa qualité de débiteur solidaire, l'ensemble des actes de procédure relatifs aux impositions supplém

entaires mises à la charge de la SARL Argos Révision Conseil.

Par un jugeme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner l'Etat à lui rembourser la somme de 1 119,11 euros, outre les intérêts au taux de 5 % à compter du 6 mai 2008, en réparation du préjudice financier, et à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral, qu'il estime avoir subis du fait des fautes commises par l'administration fiscale en ne lui notifiant pas, en sa qualité de débiteur solidaire, l'ensemble des actes de procédure relatifs aux impositions supplémentaires mises à la charge de la SARL Argos Révision Conseil.

Par un jugement n° 1808026 du 4 décembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande et a mis à sa charge une amende de 2 000 euros en application de l'article R. 741-12 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 8 février 2021 et 15 mars 2022, M. B..., représenté par Me Brügger, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la condamnation demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier car insuffisamment motivé, les premiers juges ayant omis de se prononcer sur l'applicabilité de la doctrine et de la jurisprudence citées dans sa requête et sur le caractère non contradictoire des procédures ;

- l'administration a commis une faute en s'abstenant de lui notifier les actes de procédure, alors qu'il a été déclaré responsable solidaire du paiement des dettes fiscales de la SARL Argos Révision Conseil en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée par un arrêt de la Cour d'appel de Chambéry du 15 février 2006, et que cette obligation, qui permet d'assurer le respect du contradictoire, résulte d'une jurisprudence établie de la Cour de cassation et a été reprise dans la doctrine administrative ;

- cette faute lui a causé un préjudice financier justifiant le remboursement de la somme de 1 119,11 euros saisie sur son compte bancaire ;

- il a également subi un préjudice moral, résultant de l'obligation dans laquelle il se trouve de multiplier les procédures pour faire valoir ses droits ;

- l'amende pour recours abusif qui lui a été infligée par le tribunal administratif est injustifiée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er mars 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 25 juillet 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 6 septembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Courbon, présidente-assesseure,

- et les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Argos Révision Conseil, société de droit suisse dont M. A... B... est le gérant, a fait l'objet d'une procédure de visite et de saisie sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, puis d'une vérification de comptabilité, à l'issue de laquelle l'administration l'a assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, de contribution sur l'impôt sur les sociétés et d'imposition forfaitaire annuelle au titre des années 1997 à 1999 et lui a réclamé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 1997 au 31 janvier 2001, impositions mises en recouvrement les 30 avril et 18 juin 2002. Par deux jugements du 28 novembre 2007 (nos 0302052 et 0304930), le tribunal administratif de Grenoble a rejeté les demandes de la société tendant à la décharge de ces impositions. Par un arrêt du 30 novembre 2010 (nos 08LY01714 - 08LY01716), la cour administrative d'appel de Lyon a confirmé ce jugement. Le pourvoi en cassation formé par la société Argos Révision Conseil contre l'arrêt de la cour a fait l'objet d'une décision de non admission en date du 23 juillet 2012.

2. Parallèlement, saisie en matière pénale, la cour d'appel de Chambéry, par un arrêt du 15 février 2006, confirmé par la cour de cassation le 17 janvier 2007, a déclaré M. B... solidairement responsable, avec la société Argos Révision Conseil, des impositions mises à la charge de cette dernière, sur le fondement de l'article 1745 du code général des impôts, à concurrence de la somme de 144 182 euros au titre de l'impôt sur les sociétés afférent aux exercices 1998 et 1999 et de la somme de 34 227,54 euros au titre de la taxe sur la valeur ajoutée relative à la même période.

3. Le 9 octobre 2008, la SARL Argos Révision Conseil a contesté à nouveau devant l'administration, en vain, les impositions qui lui ont été réclamées. Par deux jugements du 19 juillet 2011 (n° 0900215 et n° 0900216), le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande en décharge. Le 12 septembre 2014, la société a, une troisième fois, contesté ces impositions et sollicité l'indemnisation des préjudices qu'elle estimait avoir subis du fait de l'action de l'administration. Par deux ordonnances du 22 janvier 2015, la présidente de la 7ème chambre du tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes. Par deux arrêts du 27 septembre 2016 (nos 15LY00928 et 15LY00933), la cour administrative d'appel de Lyon a donné acte à la SARL Argos Révision Conseil du désistement de ses conclusions aux fins de décharge, a annulé ces ordonnances en tant qu'elles statuaient sur ses conclusions indemnitaires et rejeté ses demandes indemnitaires.

4. En parallèle, M. B... a, à titre personnel, introduit plusieurs requêtes devant le tribunal administratif de Grenoble, puis la cour administrative d'appel de Lyon, tendant à la décharge de l'obligation de payer des sommes correspondant aux impositions mises à la charge de la SARL Argos Révision Conseil dont il a été déclaré solidairement responsable du paiement, et dont l'administration poursuivait le recouvrement, sans obtenir gain de cause. Il a également présenté une demande indemnitaire tendant à la réparation des préjudices qu'il estimait avoir subis du fait de l'irrégularité de la procédure de recouvrement suivie à son encontre. Par un jugement n° 1705132 du 19 octobre 2018, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

5. Le 24 septembre 2018, M. B... a présenté une nouvelle demande indemnitaire, implicitement rejetée par l'administration. Il relève appel du jugement du 4 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a, d'une part, rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui rembourser la somme de 1 119,11 euros, outre les intérêts au taux de 5 % à compter du 6 mai 2008, en réparation du préjudice financier et à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral qu'il estime avoir subis du fait des fautes commises par l'administration fiscale en ne lui notifiant pas, en sa qualité de débiteur solidaire, l'ensemble des actes de procédure relatifs aux impositions supplémentaires mises à la charge de la SARL Argos Révision Conseil, et, d'autre part, l'a condamné au paiement d'une somme de 2 000 euros en application de l'article R. 741-12 du code de justice administrative.

Sur la régularité du jugement :

6. Le tribunal administratif de Grenoble, qui n'était pas tenu de se prononcer sur chacun des arguments développés par M. B... à l'appui du moyen tiré de la faute commise par l'administration à ne pas lui avoir personnellement notifié, en sa qualité de redevable solidaire, les différents actes de procédure, a répondu de manière suffisamment motivée à ce moyen aux points 8 et 9 du jugement contesté. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que ce jugement serait irrégulier.

Sur les conclusions indemnitaires :

7. En premier lieu, M. B... ne conteste pas l'irrecevabilité opposée par les premiers juges aux conclusions de sa demande de première instance tendant au versement d'une somme de 1 119,11 euros, outre les intérêts au taux de 5 % à compter du 6 mai 2008, en réparation du préjudice financier résultant de la saisie de cette somme sur son compte bancaire par l'effet d'un avis à tiers détenteur émis par l'administration le 6 mai 2008. Par suite, les conclusions de M. B... tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser cette somme ne peuvent qu'être rejetées.

8. Ainsi qu'il a été dit au point 2 ci-dessus, M. B... a été déclaré solidairement responsable, avec la SARL Argos Révision Conseil, du paiement d'une partie des impositions mises à la charge de cette dernière, sur le fondement de l'article 1745 du code général des impôts, par un arrêt de la Cour de cassation du 17 février 2007. Aucune disposition législative ou réglementaire, ni aucun " principe de loyauté " n'impose à l'administration de notifier au débiteur solidaire d'une imposition les actes de la procédure adressés à l'autre débiteur solidaire. Il s'ensuit qu'en s'abstenant de notifier à M. B... " l'ensemble des actes de la procédure autres que les notifications de redressements " adressés à la SARL ARGOS Révision Conseil, l'administration n'a commis aucune faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat dont M. B... pourrait se prévaloir devant le juge administratif.

9. M. B... ne peut, en tout état de cause, utilement se prévaloir des énonciations des paragraphes 20 et 160 de l'instruction référencée BOI-ENR-DG-50-10-20 du 27 février 2014 et du paragraphe 510 de l'instruction du même jour référencée BOI-CF-IOR-10-30 qui concernent les droits d'enregistrement.

10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Sur l'amende prévue à l'article R. 741-12 du code de justice administrative appliquée par le tribunal administratif :

11. En se fondant, pour infliger à M. B... une amende de 2 000 euros, sur l'objet de sa requête et les moyens qui y étaient développés, le tribunal administratif de Grenoble a, dans les circonstances particulières de l'espèce, fait une exacte application des dispositions de l'article R. 741-12 du code de justice administrative.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, au titre des frais liés au litige exposé par M. B... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 20 avril 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Courbon, présidente de la formation de jugement,

Mme Caraës, première conseillère,

M. Pin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 mai 2023.

La présidente-rapporteure,

A. Courbon

L'assesseure la plus ancienne,

R. Caraës

La greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY00375


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00375
Date de la décision : 11/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

60-01 Responsabilité de la puissance publique. - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité.


Composition du Tribunal
Président : Mme COURBON
Rapporteur ?: Mme Audrey COURBON
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : BRUGGER

Origine de la décision
Date de l'import : 14/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-05-11;21ly00375 ?
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