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27/04/2023 | FRANCE | N°21LY02920

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 27 avril 2023, 21LY02920


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société CBTS a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision de résiliation prise par la commune de Montceau-les-Mines le 16 décembre 2019 relative au marché de travaux qu'elle avait passé pour la construction d'un skate-park, d'ordonner la reprise des relations contractuelles et, à titre subsidiaire, d'annuler partiellement la décision de résiliation en ce qu'elle est prononcée aux frais et risques du titulaire.

Par un jugement n° 2000204 du 2 juillet 2021, le tribunal a re

jeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société CBTS a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision de résiliation prise par la commune de Montceau-les-Mines le 16 décembre 2019 relative au marché de travaux qu'elle avait passé pour la construction d'un skate-park, d'ordonner la reprise des relations contractuelles et, à titre subsidiaire, d'annuler partiellement la décision de résiliation en ce qu'elle est prononcée aux frais et risques du titulaire.

Par un jugement n° 2000204 du 2 juillet 2021, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés le 30 août 2021 et le 22 février 2022, la société CBTS, représentée par Me Melmoux, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision de résiliation de la commune de Montceau-les-Mines du 16 décembre 2019 et d'ordonner la reprise des relations contractuelles ou, à titre subsidiaire, d'annuler partiellement la décision de résiliation en ce qu'elle est prononcée aux frais et risques du titulaire ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Montceau-les-Mines la somme de 10 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a insuffisamment motivé la réponse au moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- à défaut de mention du nom et prénom du signataire de l'acte, la décision de résiliation méconnaît les dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- le délai de six jours qui lui a été imparti pour formuler ses observations dans le courrier du 25 octobre 2019 la mettant en demeure de remédier aux malfaçons constatées avant le 29 novembre 2019 était manifestement insuffisant, ce qui méconnaît le principe du contradictoire ;

- en méconnaissance de l'article 47.1.1 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux (CCAG travaux), la décision de résiliation n'a pas été précédée du procès-verbal des constatations relatives aux ouvrages et parties d'ouvrages exécutés, à l'inventaire des matériaux approvisionnés ainsi qu'à l'inventaire descriptif du matériel et des installations de chantier ;

- il ne ressort d'aucun élément du dossier que la commune de Montceau-les-Mines n'aurait pas méconnu le droit de suivi dont elle bénéficiait sur le marché de substitution qui a ensuite été passé en application de l'article 48.5 du CCAG travaux ;

- sa situation n'entrait dans aucun des cas prévus à l'article 46.3.1 du CCAG travaux permettant de prononcer la résiliation du marché ;

- dès lors qu'une solution réparatoire était possible, sans démolition et reconstruction et que les malfaçons sont dues à une faute du maître d'œuvre qui agissait pour le compte du maître d'ouvrage, la résiliation ne pouvait être prononcée à ses frais et risques.

Par un mémoire, enregistré le 26 décembre 2022, la commune de Montceau-les-Mines, représentée par la SELARL Borel et Del Prete, conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par la société CBTS ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'arrêté du 8 septembre 2009 portant approbation du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, première conseillère,

- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public,

- et les observations de Me Guillemin pour la commune de Montceau-les-Mines.

Considérant ce qui suit :

1. Par un marché notifié le 28 janvier 2019, la commune de Montceau-les-Mines a confié à la société CBTS les travaux d'aménagement d'un skate-park en béton. A la suite de malfaçons constatées sur le chantier, la commune a refusé de réceptionner les travaux et mis en demeure la société CBTS, par courrier du 25 octobre 2019, de mettre l'ouvrage en conformité avec les spécifications du marché en procédant en partie à sa démolition et à sa reconstruction avant le 29 novembre 2019 sous peine de résiliation du marché à ses frais et risques. Par décision du 16 décembre 2019, la maire de Montceau-les-Mines a prononcé cette résiliation. La société CBTS a alors demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler cette décision ou, subsidiairement de l'annuler en tant que la résiliation a été prononcée à ses frais et risques. Le tribunal, qui a interprété la demande de la société CBTS comme un recours de plein contentieux contestant la validité de la décision de résiliation et tendant à la reprise des relations contractuelles, a, par un jugement du 2 juillet 2021 dont la société relève appel, rejeté sa demande.

2. Le juge du contrat, saisi par une partie d'un litige relatif à une mesure d'exécution d'un contrat, peut seulement, en principe, rechercher si cette mesure est intervenue dans des conditions de nature à ouvrir droit à indemnité. Toutefois, une partie à un contrat administratif peut, eu égard à la portée d'une telle mesure d'exécution, former devant le juge du contrat un recours de plein contentieux contestant la validité de la résiliation de ce contrat et tendant à la reprise des relations contractuelles. Il appartient au juge administratif, lorsqu'il est saisi de conclusions " aux fins d'annulation " d'une mesure de résiliation, de les regarder comme un recours de plein contentieux contestant la validité de la résiliation du contrat et tendant à la reprise des relations contractuelles.

3. Il incombe au juge du contrat, saisi par une partie d'un recours de plein contentieux contestant la validité d'une mesure de résiliation et tendant à la reprise des relations contractuelles, lorsqu'il constate que cette mesure est entachée de vices relatifs à sa régularité ou à son bien-fondé, de déterminer s'il y a lieu de faire droit, dans la mesure où elle n'est pas sans objet, à la demande de reprise des relations contractuelles, à compter d'une date qu'il fixe, ou de rejeter le recours, en jugeant que les vices constatés sont seulement susceptibles d'ouvrir, au profit du requérant, un droit à indemnité.

4. Dans sa requête d'appel, la société CBTS persiste, sans pour autant contester la requalification de ses conclusions par le tribunal en recours de plein contentieux contestant la validité de la résiliation du contrat et tendant à la reprise des relations contractuelles, à demander l'annulation de la décision de résiliation ou subsidiairement l'annulation de cette décision en tant qu'elle prononce cette résiliation à ses frais et risques. Comme l'avait fait le tribunal, il y a lieu de regarder les conclusions aux fins d'annulation de la société CBTS comme un recours de plein contentieux contestant la validité de la résiliation du contrat et tendant à la reprise des relations contractuelles.

5. En premier lieu, si la mesure de résiliation du 16 décembre 2019 ne comporte pas les nom et prénom de son signataire immédiatement à côté de la signature en dernière page du document, il est précisé que le signataire est le représentant du pouvoir adjudicateur habilité à signer le marché lequel est désigné, en première page du document, comme la maire de Montceau-les-Mines, Mme B... A.... Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration, auquel le tribunal a répondu de façon suffisamment motivée, doit, en tout état de cause, être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 46.3.2 du CCAG travaux dans sa version applicable au litige : " Sauf dans les cas prévus aux g, i, k et l du 46.3.1 ci-dessus, une mise en demeure, assortie d'un délai d'exécution, doit avoir été préalablement notifiée au titulaire et être restée infructueuse. / Dans le cadre de la mise en demeure, le représentant du pouvoir adjudicateur informe le titulaire de la sanction envisagée et l'invite à présenter ses observations. ".

7. Il résulte de l'instruction que dans la mise en demeure qui lui a été adressée par courrier du 25 octobre 2019, la commune de Montceau-les-Mines a informé la société CBTS de la sanction de résiliation envisagée et l'a invitée à présenter ses observations, conformément aux stipulations précitées de l'article 46.3.2 du CCAG travaux. Le délai de six jours qui lui a été accordé pour présenter ses observations n'était pas, en l'espèce, compte tenu des nombreux échanges déjà intervenus entre les parties, insuffisant. Au demeurant, il résulte de l'instruction que la société a pu présenter des observations écrites par des courriers des 7 novembre, 19 novembre, 25 novembre et 28 novembre 2019, reçus par la commune avant le prononcé de la résiliation le 16 décembre 2019. Il ne résulte pas de l'instruction que la commune n'aurait pas pris en compte ses observations au motif qu'elles auraient été présentées au-delà du délai qui lui avait été imparti. Par suite, le moyen tiré de ce que le délai de six jours pour formuler des observations était insuffisant, ce qui méconnaitrait le principe du contradictoire, doit être écarté.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article 47.1.1 du CCAG travaux dans sa version applicable au litige : " En cas de résiliation, il est procédé, le titulaire ou ses ayants droit, tuteur, administrateur ou liquidateur, dûment convoqués dans les conditions prévues par les documents particuliers du marché, aux constatations relatives aux ouvrages et parties d'ouvrages exécutés, à l'inventaire des matériaux approvisionnés ainsi qu'à l'inventaire descriptif du matériel et des installations de chantier. Il est dressé procès-verbal de ces opérations dans les conditions prévues à l'article 12. Ce procès-verbal comporte l'avis du maître d'œuvre sur la conformité aux dispositions du marché des ouvrages ou parties d'ouvrages exécutés. (...) ".

9. Il résulte de l'instruction que les constatations relatives aux ouvrages et parties d'ouvrages exécutés, à l'inventaire des matériaux approvisionnés ainsi qu'à l'inventaire descriptif du matériel et des installations de chantier ont eu lieu le 6 janvier 2020 en présence de la société CBTS, dûment convoquée à ces opérations dans la décision du 16 décembre 2019 portant résiliation du contrat. Les stipulations de l'article 47.1.1 précitées ne font pas obstacle à ce que, comme en l'espèce, ces constatations aient lieu après le prononcé de la résiliation. Par suite, le moyen tiré de ce qu'en méconnaissance de l'article 47.1.1 du CCAG travaux, la décision de résiliation n'a pas été précédée du procès-verbal des constatations relatives aux ouvrages et parties d'ouvrages exécutés, à l'inventaire des matériaux approvisionnés ainsi qu'à l'inventaire descriptif du matériel et des installations de chantier doit, en tout état de cause, être écarté.

10. En quatrième lieu, la société CBTS reprend en appel le moyen qu'elle avait invoqué en première instance tiré de ce que sa situation n'entrait dans aucun des cas prévus à l'article 46.3.1 du CCAG travaux permettant de prononcer la résiliation du marché et qu'en conséquence la résiliation ne pouvait être prononcée. Il y a lieu, par adoption des motifs exposés par le tribunal aux points 10 à 16 du jugement, d'écarter ce moyen.

11. En cinquième lieu, si le cocontractant défaillant doit être mis à même de suivre l'exécution du marché de substitution conclu conformément à l'article 48.5 du CCAG travaux, la société CTBS ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance de ces stipulations pour contester la régularité de la mesure de résiliation, ces stipulations visant seulement à permettre au cocontractant de l'administration de veiller à la sauvegarde de ses intérêts financiers après le prononcé de la mesure de résiliation. Par suite, le moyen tiré de ce que la commune de Montceau-les-Mines aurait méconnu son droit de suivi sur le marché de substitution ne peut qu'être écarté.

12. En dernier lieu, eu égard à l'objet du présent litige, qui n'a pas pour objet de traiter des conséquences financières de la résiliation, la société CBTS ne peut utilement faire valoir que la résiliation ne pouvait être prononcée à ses frais et risques dès lors qu'une solution réparatoire était possible et que les malfaçons résultaient d'une faute du maître d'œuvre qui agissait pour le compte du maître d'ouvrage.

13. Il résulte de ce qui précède que la société CBTS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions.

14. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société CBTS une somme à verser à la commune de Montceau-les-Mines en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société CBTS est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Montceau-les-Mines présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société CBTS, à la SELARL Etude Balincourt, es qualité de liquidateur judiciaire de la société CBTS, et à la commune de Montceau-les-Mines.

Délibéré après l'audience du 30 mars 2023, à laquelle siégeaient :

Mme Evrard, présidente de formation de jugement,

Mme Duguit-Larcher, première conseillère,

Mme Psilakis, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 avril 2023.

La rapporteure,

A. Duguit-Larcher La présidente,

A. Evrard

Le greffier,

J. Billot

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

Le greffier,

2

N° 21LY02920


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY02920
Date de la décision : 27/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme EVRARD
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : VERBATEAM MONTPELLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 14/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-04-27;21ly02920 ?
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