Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner le centre hospitalier de Villefranche-sur-Saône à lui verser la somme de 10 000 euros au titre du préjudice moral et du préjudice financier qu'il a subis ainsi que la somme de 9 750 euros qui lui est due au titre de jours de congés qu'il n'a pas pris, assorties des intérêts capitalisés.
Par un jugement n° 2003149 du 28 mai 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 27 juillet 2021, M. A..., représenté par Me Robbe, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 28 mai 2021 ;
2°) de condamner le centre hospitalier de Villefranche-sur-Saône à lui verser les sommes susmentionnées ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Villefranche-sur-Saône une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de le condamner aux entiers dépens.
Il soutient que :
- il a droit au paiement de 32,5 jours de travail qui auraient dû lui être payés au titre de son compte épargne-temps, composé de 9,5 jours déjà inscrits et de 23 jours acquis en 2007 dont l'inscription a été omise ;
- le centre hospitalier a commis une faute en l'ayant privé de pouvoir bénéficier d'une prolongation d'activité.
Par un mémoire enregistré le 9 septembre 2022, le centre hospitalier de Villefranche-sur-Saône, représenté par Me Calvet-Baridon, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge du requérant en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'intéressé a bénéficié de l'indemnisation du solde exact des jours figurant sur son compte épargne-temps ;
- aucune disposition ne lui imposait d'informer l'intéressé de la survenance de l'âge limite et des conditions à respecter pour bénéficier d'une prolongation d'activité.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté ;
- la loi n° 87-588 du 30 juillet 1987 ;
- la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 ;
- le décret n° 2002-1358 du 18 novembre 2002 ;
- le décret n° 2012-1481 du 27 décembre 2012 ;
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure,
- les conclusions de Mme Le Frapper, rapporteure publique,
- les observations de Me Goirand, représentant M. A... et de Me Calvet-Baridon, représentant le centre hospitalier de Villefranche-sur-Saône ;
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., praticien hospitalier, a été recruté en qualité de chirurgien des hôpitaux en gynécologie obstétrique au centre hospitalier de Villefranche-sur-Saône, le 1er septembre 2007. Alors qu'il avait atteint la limite d'âge et n'avait présenté aucune demande de maintien en activité, par un arrêté du 8 avril 2019, la directrice du Centre National de Gestion l'a autorisé à cesser ses fonctions pour faire valoir ses droits à la retraite et l'a rayé des cadres à compter du 1er mars 2019. A compter de cette dernière date et jusqu'au 30 juin 2019, il a été recruté par le centre hospitalier par contrat à durée déterminée. Le 14 janvier 2020, M. A... a saisi le centre hospitalier d'une demande d'indemnisation du solde des jours épargnés sur son compte épargne-temps à la date de ce départ ainsi que du préjudice subi à raison de la faute commise par son employeur au regard de son droit à bénéficier d'une prolongation d'activité. Cette demande a été implicitement rejetée. M. A... relève appel du jugement du 28 mai 2021 par lequel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la condamnation du centre hospitalier de Villefranche-sur-Saône à lui verser les sommes réclamées.
Sur la responsabilité du centre hospitalier au regard du droit de l'intéressé à bénéficier d'une prolongation d'activité :
2. Aux termes de l'article 135 de la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique : " A compter du 1er janvier 2004, les praticiens visés à l'article L. 6152-1 du code de la santé publique peuvent être autorisés à prolonger leur activité dans un établissement de santé après la limite d'âge qui leur est applicable, dans la limite de trente-six mois maximum, sous réserve d'aptitude médicale. / Les conditions d'application du présent article sont définies par voie réglementaire (...) ".
3. Il résulte de l'article R. 6152-328 du code de la santé publique, qui met en œuvre ces dispositions, que la limite d'âge en principe applicable à M. A..., né en 1953, est fixée par ces dispositions à " 66 ans et 2 mois ", limite qu'il a atteint le 1er mars 2019.
4. Aux termes des dispositions du deuxième alinéa de l'article 4 de la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté alors en vigueur, aujourd'hui reprises à l'article L. 556-3 du code général de la fonction publique et rendues applicables aux praticiens hospitaliers par l'article 46 de la loi du 30 juillet 1987 portant diverses mesures d'ordre social : " Les limites d'âge seront également reculées d'une année pour tout fonctionnaire et employé civil qui, au moment où il atteignait sa cinquantième année, était parent d'au moins trois enfants vivants, à la condition qu'il soit en état de continuer à exercer son emploi (...) ".
5. Pour la mise en œuvre de ce recul, l'article R. 6152-329 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable au litige, prévoyait que : " Les praticiens hospitaliers régis par les sections 1 et 2 qui souhaitent bénéficier d'une prolongation d'activité doivent en faire la demande auprès du directeur général du Centre national de gestion et concomitamment auprès du directeur de l'établissement, six mois au moins avant la date à laquelle ils atteindront la limite d'âge (...) / La prolongation est accordée par périodes de six mois ou un an sous réserve d'aptitude physique et mentale attestée par un certificat délivré par un médecin agréé (...) ".
6. Il ressort des dispositions de l'article R. 6152-329 du code de la santé publique que les praticiens hospitaliers souhaitant bénéficier d'une prolongation d'activité doivent en faire la demande six mois avant la date à laquelle ils atteindront la limite d'âge.
7. Il résulte de l'instruction que ce n'est que par un courrier du 23 avril 2019, soit bien après la date à laquelle il avait atteint la limite d'âge, que M. A... a présenté au centre hospitalier une demande de prolongation d'activité en se prévalant de ce qu'il avait toujours des enfants à charge. Eu égard à la tardivité de cette demande intervenue au-delà du délai de six mois prévu par les dispositions précitées de l'article R. 6152-329 du code de la santé publique qui, contrairement à ce que soutient le requérant étaient applicables à sa situation, le centre hospitalier était tenu de ne pas y faire droit. Si le requérant se prévaut de l'article L. 161-17 du code de la sécurité sociale concernant l'obligation d'information des droits à la retraite des agents publics, ces dispositions ne font pas peser une telle obligation sur les employeurs.
Sur les conclusions en indemnisation du solde du compte épargne-temps de M. A... :
8. En premier lieu, aux termes de l'article R. 6152-813 du code de la santé publique : " Lorsqu'un praticien, quelle que soit sa position au regard du statut qui lui est applicable, cesse définitivement d'exercer son activité, les jours accumulés sur son compte épargne-temps doivent être soldés sous forme de congés avant la date de cette cessation. / Dans le cas où l'impossibilité de solder avant cette date les jours inscrits sur le compte résulte d'un éloignement du service consécutif à un placement en recherche d'affectation, à un congé pour maladie, à une nomination à titre permanent dans un corps de personnels enseignants et hospitaliers ou à des impératifs de continuité ou de permanence des soins attestés par le directeur, les jours inscrits au compte épargne-temps font l'objet d'une indemnisation selon les dispositions fixées par l'article R. 6152-807-3 ". Aux termes de l'article R. 6152-807-3 du même code : " Chaque jour concerné par l'option mentionnée au 1° de l'article R. 6152-807-2 est indemnisé à hauteur d'un montant fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la santé, de la fonction publique et du budget ". L'article 2 de l'arrêté du 27 décembre 2012 pris en application du décret n° 2012-1481 du 27 décembre 2012 modifiant certaines dispositions relatives au compte épargne-temps et aux congés annuels des personnels médicaux, pharmaceutiques et odontologiques des établissements publics de santé a fixé ce montant à 300 euros bruts par jour.
9. M. A... soutient que sur les 193,5 jours inscrits sur son compte épargne-temps, il n'a été indemnisé que de 184 jours. Toutefois, il résulte de l'instruction qu'en juillet 2019, il a bénéficié d'une indemnisation supplémentaire correspondant à vingt jours au titre du solde de son compte épargne-temps. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le centre hospitalier ne l'aurait pas indemnisé du solde restant de jours épargnés sur son compte épargne-temps.
10. En second lieu, aux termes de l'article 19 du décret du 27 décembre 2012 modifiant certaines dispositions relatives au compte épargne-temps et aux congés annuels des personnels médicaux, pharmaceutiques et odontologiques des établissements publics de santé : " Pour les jours inscrits sur le compte épargne-temps au 31 décembre 2012 et excédant le seuil mentionné à l'article R. 6152-807-1 du code de la santé publique dans sa rédaction issue du présent décret, le praticien opte, dans les proportions qu'il souhaite :1° Pour une indemnisation dans les conditions de l'article R. 6152-807-3 du même code dans sa rédaction issue du présent décret ; 2° Pour le maintien sur le compte épargne-temps pour une utilisation sous forme de congé, sous réserve du plafond prévu au 2° de l'article R. 6152-807-4 du même code dans sa rédaction issue du présent décret. Le nombre maximal de jours pouvant être utilisés par le praticien au titre du 1° est fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la santé, de la fonction publique et du budget. L'indemnisation qui en résulte s'effectue en quatre fractions annuelles d'un nombre égal de jours. Toutefois, si l'agent cesse définitivement son activité, le solde éventuel lui est versé à la date de cette cessation. ". Aux termes de l'article 20 du même décret : " Le nombre de jours acquis au 31 décembre 2012 n'entre pas en compte pour l'application de l'article R. 6152-807-1 du code de la santé publique dans sa rédaction issue du présent décret. ". L'article 21 précise que : " En l'absence d'exercice, par le titulaire du compte, de l'option mentionnée à l'article 19 du présent décret avant le premier jour du sixième mois suivant la publication du présent décret, les jours excédant le seuil mentionné à l'article R. 6152-807-1 du code de la santé publique dans sa rédaction issue du présent décret sont maintenus sur le compte épargne-temps du praticien et ne pourront être utilisés que sous forme de congés. ".
11. Les dispositions des articles 19 et suivants du décret du 27 décembre 2012 prévoient des mesures transitoires pour les jours inscrits sur le compte épargne-temps au 31 décembre 2012, aux termes desquelles l'agent peut opter pour une indemnisation ou bien pour un maintien des jours sur le compte épargne-temps. Si ces dispositions ouvrent la possibilité d'obtenir le paiement des jours ainsi cumulés, c'est sous réserve d'une demande présentée par le titulaire du compte avant le 1er juin 2013.
12. Le requérant soutient qu'il a droit à l'indemnisation de 23 jours de congés supplémentaires au titre de jours de récupération de temps de travail non pris en 2007 alors qu'il exerçait ses fonctions au centre hospitalier de Tarare. Toutefois, les documents qu'il produit ne permettent pas d'établir qu'il disposait de jours de congés non pris devant figurer sur son compte épargne-temps. Au surplus, il ne résulte pas de l'instruction que l'intéressé en aurait demandé la monétisation au centre hospitalier, avant le 1er juin 2013. Par suite, les 23 jours que le requérant prétend avoir épargné sur son compte épargne-temps avant 2012, ne peuvent, en tout état de cause, donner lieu à indemnisation.
Sur les frais liés à l'instance :
13. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier de Villefranche-sur-Saône, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. A... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... le versement de frais au centre hospitalier de Villefranche-sur-Saône sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier de Villefranche-sur-Saône présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au centre hospitalier de Villefranche-sur-Saône.
Délibéré après l'audience du 9 mars 2023 à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Dèche, présidente-assesseure,
Mme Rémy-Néris, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 mars 2023.
La rapporteure,
P. DècheLe président,
F. Bourrachot
La greffière,
A.-C. Ponnelle
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, au le ministre de la santé et de la prévoyance, en ce qui les concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 21LY02569
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