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23/03/2023 | FRANCE | N°21LY02227

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 23 mars 2023, 21LY02227


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 6 septembre 2019 par laquelle le directeur interrégional des services pénitentiaires de Dijon a rejeté son recours administratif préalable obligatoire à l'encontre de la sanction disciplinaire qui lui a été infligée le 29 juillet 2019 par le président de la commission de discipline du centre pénitentiaire de Varennes le Grand.

Par un jugement n° 2000864 du 30 avril 2021, le tribunal a fait droit à sa demande.
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Par une requête enregistrée le 5 juillet 2021, le garde de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. D... A... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 6 septembre 2019 par laquelle le directeur interrégional des services pénitentiaires de Dijon a rejeté son recours administratif préalable obligatoire à l'encontre de la sanction disciplinaire qui lui a été infligée le 29 juillet 2019 par le président de la commission de discipline du centre pénitentiaire de Varennes le Grand.

Par un jugement n° 2000864 du 30 avril 2021, le tribunal a fait droit à sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 5 juillet 2021, le garde des Sceaux, ministre de la justice demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de M. A....

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a fait droit au moyen tiré de la méconnaissance des droits de la défense ;

- les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal ne sont pas fondés.

M. A... auquel la requête a été régulièrement communiquée n'a pas présenté d'observations.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de procédure pénale ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme G...,

- et les conclusions de M. Savouré, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. M. D... A..., incarcéré au centre pénitentiaire de Varennes le Grand, s'est vu infliger par une décision du 29 juillet 2019 une sanction de quatorze jours de cellule disciplinaire dont sept jours avec sursis au motif qu'il a refusé d'obtempérer aux injonctions du personnel de l'établissement et d'intégrer la cellule dans laquelle il avait été affecté. Par une décision du 6 septembre 2019, le directeur interrégional des services pénitentiaires de Dijon a rejeté le recours administratif préalable obligatoire formé par M. A... à l'encontre de cette sanction qu'il a confirmée. Le garde des Sceaux, ministre de la justice relève appel du jugement du 30 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Dijon a annulé la décision du 6 septembre 2019.

Sur le motif d'annulation :

2. Aux termes de l'article R. 57-7-16 du code de procédure pénale alors en vigueur : " (...) II. - La personne détenue dispose de la faculté de se faire assister par un avocat de son choix ou par un avocat désigné par le bâtonnier de l'ordre des avocats et peut bénéficier à cet effet de l'aide juridique (...) ". Si ces dispositions impliquent que l'intéressé ait été informé en temps utile de la possibilité de se faire assister d'un avocat, possibilité dont il appartient à l'administration pénitentiaire d'assurer la mise en œuvre lorsqu'un détenu en fait la demande, la circonstance que l'avocat dont l'intéressé a ainsi obtenu l'assistance ne soit pas présent lors de la réunion de la commission de discipline, dès lors que cette absence n'est pas imputable à l'administration, est sans incidence sur la régularité de la procédure dès lors que l'administration pénitentiaire avait rempli ses obligations en mettant à même l'intéressé d'être assisté d'un avocat dont elle avait obtenu la désignation et qu'elle avait convoqué en temps utile.

3. Il ressort des pièces du dossier que le 26 juillet 2019, M. A..., informé de la date et de l'heure de la séance de la commission de discipline, a émis le souhait d'être assisté par son avocat, Me Ciaudo, " ou en cas d'indisponibilité par un avocat désigné par le bâtonnier ". L'administration justifie avoir informé Me Ciaudo dès le 26 juillet 2019. Celui-ci a fait savoir par retour de courriel du même jour qu'il ne pourrait pas se déplacer. Pour la première fois en appel, l'administration justifie de la saisine le 26 juillet 2019 du bâtonnier aux fins de désignation d'un autre avocat conformément à la demande de M. A... et de ce qu'aucun avocat n'était disponible le 29 juillet 2019. Dans ces conditions, et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A..., qui faisait l'objet à titre préventif d'un placement en cellule disciplinaire, ait sollicité le report de la commission de discipline, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a fait droit au moyen tiré de ce que l'administration pénitentiaire avait méconnu les droits de la défense.

4. Toutefois, il appartient à la cour, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les autres moyens présentés par M. A... devant le tribunal.

Sur les autres moyens :

5. En premier lieu, aux termes de l'article R. 57-7-18 du code de procédure pénale, alors en vigueur : " Le chef d'établissement ou son délégataire peut, à titre préventif et sans attendre la réunion de la commission de discipline, décider le confinement en cellule individuelle ordinaire ou le placement en cellule disciplinaire d'une personne détenue, si les faits constituent une faute du premier ou du deuxième degré et si la mesure est l'unique moyen de mettre fin à la faute ou de préserver l'ordre à l'intérieur de l'établissement (...) ".

6. La sanction disciplinaire n'est pas prise pour l'application de la décision de placement provisoire de l'intéressé en cellule disciplinaire, laquelle ne constitue pas la base légale de cette sanction. M. A... ne peut donc utilement invoquer, à l'encontre de la sanction de quatorze jours de cellule disciplinaire dont sept avec sursis prononcée à son encontre, l'illégalité de la décision du 25 juillet 2019 par laquelle il a été placé à titre provisoire en cellule disciplinaire.

7. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 57-7-5 du code de procédure pénale, alors en vigueur : " Pour l'exercice de ses compétences en matière disciplinaire, le chef d'établissement peut déléguer sa signature à son adjoint, à un directeur des services pénitentiaires ou à un membre du corps de commandement du personnel de surveillance placé sous son autorité ". Aux termes de l'article R. 57-7-15 du même code, alors en vigueur : " Le chef d'établissement ou son délégataire apprécie, au vu des rapports et après s'être fait communiquer, le cas échéant, tout élément d'information complémentaire, l'opportunité de poursuivre la procédure. ".

8. Il ressort des pièces du dossier que les poursuites disciplinaires ont été engagées par M. F... B..., lieutenant pénitentiaire, à qui la directrice du centre pénitentiaire de Varennes le Grand avait consenti une délégation à l'effet d'engager les poursuites disciplinaires par décision du 24 juin 2019, publiée le 5 juillet 2019 au recueil des actes administratifs de la préfecture de Saône-et-Loire. Par, suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'autorité qui a engagé les poursuites disciplinaires doit être écarté.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 57-7-6 du code de procédure pénale alors en vigueur : " La commission de discipline comprend, outre le chef d'établissement ou son délégataire, président, deux membres assesseurs. " En application de l'article R. 57-7-8 du même code alors en vigueur : " Le président de la commission de discipline désigne les membres assesseurs. / Le premier assesseur est choisi parmi les membres du premier ou du deuxième grade du corps d'encadrement et d'application du personnel de surveillance de l'établissement (...) ". Aux termes de l'article R. 57-7-13 de ce code alors en vigueur : " En cas de manquement à la discipline de nature à justifier une sanction disciplinaire, un compte rendu est établi dans les plus brefs délais par l'agent présent lors de l'incident ou informé de ce dernier. L'auteur de ce compte rendu ne peut siéger en commission de discipline ".

10. Il ressort des pièces du dossier que la commission de discipline a été présidée par M. E... C..., chef de détention, qui disposait d'une délégation à cet effet par décision du 24 juin 2019, publiée le 5 juillet 2019 au recueil des actes administratifs de la préfecture de Saône-et-Loire. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que le rédacteur du compte-rendu d'incident, dont les initiales sont E. B., n'a pas participé à la commission de discipline en qualité de premier assesseur, les initiales de ce dernier étant P. V. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la composition de la commission de discipline doit être écarté.

11. En dernier lieu, aux termes de l'article R. 57-7-2 du code de procédure pénal alors en vigueur : " Constitue une faute disciplinaire du deuxième degré le fait, pour une personne détenue : 1° De refuser de se soumettre à une mesure de sécurité définie par une disposition législative ou réglementaire, par le règlement intérieur de l'établissement pénitentiaire ou par toute autre instruction de service ou refuser d'obtempérer immédiatement aux injonctions du personnel de l'établissement (...) ". Aux termes de l'article R. 57-7-47 du même code, alors en vigueur : " (...) la durée de la mise en cellule disciplinaire ne peut excéder vingt jours pour une faute disciplinaire du premier degré, quatorze jours pour une faute disciplinaire du deuxième degré et sept jours pour une faute disciplinaire du troisième degré (...) ".

12. M. A... ne conteste pas avoir catégoriquement refusé le 25 juillet 2019 de procéder au changement de cellule qui lui était demandé. S'il fait valoir que son refus était justifié par ses craintes pour sa vie, ses allégations ne sont appuyées d'aucun commencement de preuve. Le refus qu'il a ainsi manifesté constitue une faute disciplinaire de deuxième degré pour laquelle il pouvait faire l'objet d'une mise en cellule disciplinaire d'une durée de quatorze jours maximum. La sanction de mise en cellule disciplinaire pendant une durée de quatorze jours dont sept jours avec sursis n'est pas, compte tenu de la gravité des faits, disproportionnée.

13. Il résulte de ce qui précède que le garde des Sceaux, ministre de la justice est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a annulé la décision du 6 septembre 2019 par laquelle le directeur interrégional des services pénitentiaires de Dijon a rejeté le recours administratif préalable obligatoire formé par M. A... à l'encontre de cette sanction.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2000864 du tribunal administratif de Dijon en date du 30 avril 2021 est annulé.

Article 2 : La demande de M. A... tendant à l'annulation de la décision du 6 septembre 2019 par laquelle le directeur interrégional des services pénitentiaires de Dijon a rejeté son recours administratif préalable obligatoire est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au garde des Sceaux, ministre de la justice et à M. D... A....

Délibéré après l'audience du 2 mars 2023, à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président,

Mme Evrard, présidente assesseure,

Mme Duguit-Larcher, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 mars 2023.

La rapporteure,

A. G...Le président,

Ph. Arbarétaz

Le greffier,

J. Billot

La République mande et ordonne au garde des Sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

Le greffier,

2

N° 21LY02227


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY02227
Date de la décision : 23/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

37-05-02-01 Juridictions administratives et judiciaires. - Exécution des jugements. - Exécution des peines. - Service public pénitentiaire.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. SAVOURE

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-03-23;21ly02227 ?
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