Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme C... A..., M. F... A..., Mme B... A... et M. D... A... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la délibération du 19 décembre 2019 par laquelle le conseil communautaire de Haut-Bugey Agglomération a approuvé le plan local d'urbanisme tenant lieu de programme local de l'habitat, ainsi que la décision du 30 juillet 2020 rejetant leur recours gracieux.
Par un jugement n° 2006837 du 22 juillet 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur requête.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 20 septembre 2021, Mme C... A..., M. F... A..., Mme B... A... et M. D... A..., représentés par Me Ramdenie, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 22 juillet 2021 ;
2°) d'annuler cette délibération du 19 décembre 2019, ensemble le rejet de leur recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de la communauté d'agglomération Haut-Bugey Agglomération la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le jugement attaqué est irrégulier en ce que les premiers juges ont omis de statuer sur les moyens relatifs à l'erreur manifeste d'appréciation entachant le classement des parcelles A nos ... en zone naturelle ;
- les dispositions de l'article R. 123-19 du code de l'environnement ont été méconnues en ce que la commission d'enquête n'a pas répondu aux observations de M. D... A..., et que ces observations n'ont pas été répertoriées dans son rapport et ses conclusions ;
- le rapport de présentation du plan local d'urbanisme est insuffisant et méconnaît les dispositions de l'article L. 151-4 du code de l'urbanisme en raison de l'obsolescence des données et en raison de l'absence d'analyse des capacités de densification ;
- le classement en zone naturelle des parcelles A nos ... est entaché d'erreur manifeste d'appréciation et révèle une rupture d'égalité avec les parcelles situées à proximité.
Par un mémoire en défense enregistré le 18 février 2022, la communauté d'agglomération Haut-Bugey Agglomération, représentée par Me Maurice, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête d'appel n'est fondé.
Par ordonnance du 12 avril 2022, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Burnichon, première conseillère,
- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,
- les observations de Me Cadet, substituant Me Maurice pour la communauté d'agglomération Haut-Bugey Agglomération.
Considérant ce qui suit :
1. Par délibération du 17 décembre 2015, le conseil de la communauté d'agglomération du Haut-Bugey a prescrit son plan local d'urbanisme intercommunal tenant lieu de plan local d'habitat (PLUiH) sur le territoire de trente-six communes dont celles de Montréal-la-Cluse. Après enquête publique du 9 septembre au 9 octobre 2019, le plan local d'urbanisme intercommunal tenant lieu de plan local d'habitat (PLUiH) a été adopté par délibération du 19 décembre 2019. Mmes et MM. A... ont demandé au tribunal administratif de Lyon l'annulation de cette délibération et de la décision du 30 juillet 2020 rejetant leur recours gracieux. Ils relèvent appel du jugement du 22 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur requête.
Sur la régularité du jugement :
2. Il ressort des pièces du dossier que les requérants, bien que propriétaires de la seule parcelle cadastrée section A n° ... située à Montreal-La-Cluse, ont également invoqué devant le tribunal administratif l'illégalité du classement en zone naturelle des parcelles cadastrées section A nos ... situées sur le territoire de cette même commune, en raison de l'erreur manifeste d'appréciation dont il serait entaché. Un tel moyen, qui n'était ni inopérant ni, contrairement aux allégations de la commune, irrecevable dès lors que tous les habitants d'une commune justifient d'un intérêt leur donnant qualité à contester le plan local d'urbanisme dans l'ensemble de ses dispositions, n'a pas été examiné par le jugement attaqué, lequel est ainsi entaché d'une irrégularité et doit, dans cette mesure, être annulé.
3. Il y a lieu, par suite, pour la cour de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation sur le moyen tiré de l'illégalité du classement en zone naturelle des parcelles cadastrées section A nos ... et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur leur demande d'annulation des autres dispositions du plan local d'urbanisme intercommunal tenant lieu de plan local d'habitat (PLUiH) en litige.
Sur la légalité de la délibération du 19 décembre 2019 :
4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 123-15 du code de l'environnement : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête rend son rapport et ses conclusions motivées dans un délai de trente jours à compter de la fin de l'enquête. (...) / Le rapport doit faire état des observations et propositions qui ont été produites pendant la durée de l'enquête ainsi que des réponses éventuelles du maître d'ouvrage. ". Aux termes de l'article R. 123-19 du même code : " Le commissaire enquêteur ou la commission d'enquête établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. / Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public. (...) ".
5. Si M. D... A... a présenté des observations lors de l'enquête publique concernant le classement projeté de la parcelle cadastrée A n° ... antérieurement classée en zone 2AU, qui ont été reprises dans le procès-verbal de synthèse entre deux autres observations, et si l'annexe au rapport de la commission d'enquête n'a pas reproduit, en raison d'une erreur matérielle, cette observation, les dispositions précitées n'imposent pas à la commission d'enquête de répondre à chacune des observations présentées lors de l'enquête publique, mais l'obligent seulement à indiquer, au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de son avis. Par ailleurs, en tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que si la commission d'enquête n'a pas retranscrit intégralement, à la suite d'une erreur matérielle, l'observation de l'intéressé, elle y a répondu, par un avis défavorable inséré, ainsi que le démontre le numéro d'ordre des observations, entre les réponses à deux autres observations inscrites dans le procès-verbal de synthèse. A cet égard, la commission d'enquête a repris la définition de l'enveloppe urbaine et des zones d'extensions futures du PLUiH dans le cadre des objectifs de consommation foncière maximale définie par le PADD pour chaque commune. Il suit de là que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la délibération en litige est entachée d'irrégularité en raison de la méconnaissance des dispositions précitées du code de l'environnement par la commission d'enquête.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 151-4 du code de l'urbanisme, dans sa version alors applicable : " Le rapport de présentation explique les choix retenus pour établir le projet d'aménagement et de développement durables, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement./Il s'appuie sur un diagnostic établi au regard des prévisions économiques et démographiques et des besoins répertoriés en matière de développement économique, de surfaces et de développement agricoles, de développement forestier, d'aménagement de l'espace, d'environnement, notamment en matière de biodiversité, d'équilibre social de l'habitat, de transports, de commerce, d'équipements et de services./ (...)/ Il analyse la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers au cours des dix années précédant l'approbation du plan ou depuis la dernière révision du document d'urbanisme et la capacité de densification et de mutation de l'ensemble des espaces bâtis, en tenant compte des formes urbaines et architecturales. Il expose les dispositions qui favorisent la densification de ces espaces ainsi que la limitation de la consommation des espaces naturels, agricoles ou forestiers. Il justifie les objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain compris dans le projet d'aménagement et de développement durables au regard des objectifs de consommation de l'espace fixés, le cas échéant, par le schéma de cohérence territoriale et au regard des dynamiques économiques et démographiques. /(...) ".
7. D'une part, si les requérants soutiennent que le rapport de présentation se fonde sur des données démographiques de l'INSEE de 2012 qui seraient obsolètes, ce qui ferait obstacle à une réelle justification pour les années à venir du parti d'urbanisme retenu, il ne ressort pas des pièces du dossier que les données de 2017 dont ils se prévalent auraient été rendues publiques avant l'approbation du PLUiH en litige. Aucune disposition législative ou règlementaire n'impose par ailleurs, en l'absence de bouleversement substantiel des données fondant les études et rapports réalisés et les partis d'aménagement en résultant, d'actualiser les documents du PLUiH, et notamment le rapport de présentation, en cours de procédure d'élaboration du document d'urbanisme. Enfin et en tout état de cause, d'une part, le PLUiH reprend également d'autres données d'évolutions démographiques, produites dans le cadre du Schéma de cohérence territoriale (SCOT) Pays du Haut-Bugey approuvé le 23 mars 2017 et qui avaient été actualisées, et, d'autre part, il ressort des données de 2017 dont se prévalent les requérants que les évaluations en termes démographiques, de composition des ménages et des besoins de logements ou encore de dynamique d'augmentation de la population dans certaines communes de la frange urbaine sur la période 2012-2016 ne sont pas significatives, ni de nature à remettre en cause le diagnostic qui a été posé et la justification des choix d'aménagements retenus.
8. D'autre part, il ressort du rapport de présentation que la communauté d'agglomération du Haut-Bugey a mené une étude des capacités de densification à partir des données et des objectifs du SCOT et notamment des perspectives d'évolution de la consommation foncière par rapport à celle autorisée par le SCOT et la nécessité d'un calibrage du PLUiH par rapport aux perspectives du SCOT sur une période de douze ans avec l'objectif de conforter le " chapelet urbain " en permettant un accroissement démographique. Ce même rapport reprend à l'échelle du territoire de la communauté d'agglomération, l'armature territoriale du Haut-Bugey définie par le SCOT au niveau des différentes communes, relevant, après identification au sein d'un zonage du territoire couvert par le PLUiH, du chapelet urbain, de la frange urbaine ou de l'espace rural afin notamment, dans l'axe 1, d'organiser un développement de l'offre en logements conforme à l'armature territoriale, ou, dans l'axe 3, de diversifier l'offre de logements pour accompagner les habitants actuels et à venir dans leur parcours résidentiel, améliorer la qualité du parc existant et favoriser le renouvellement urbain, par une action soutenue de lutte contre la vacance. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 151-4 du code de l'urbanisme, en ce que le rapport de présentation ne comprendrait pas de diagnostic démographique et d'analyse des capacités de densification suffisants, doit être écarté.
9. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison :/1° Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ;/2° Soit de l'existence d'une exploitation forestière ;/3° Soit de leur caractère d'espaces naturels ;/4° Soit de la nécessité de préserver ou restaurer les ressources naturelles ;/ (...) ".
10. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir sur le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces points ne peut être censurée par le juge administratif que si elle repose sur des faits matériellement inexacts ou si elle est entachée d'erreur manifeste.
11. D'une part, il ressort des pièces du dossier que les parcelles cadastrées section A nos ... se situent à Montréal-La-Cluse, à 650 mètres du centre-bourg et au sein d'une vaste zone naturelle à l'ouest de la rue de Senoche, et leur classement en zone naturelle assure la continuité entre la zone naturelle située à l'ouest sur le secteur " Sur Plano " et celle située à l'est sur le secteur " Sur le Molard de Riai ". Les constructions qu'elles supportent ne peuvent, contrairement à leurs allégations, être regardées comme un hameau. Par ailleurs, ces parcelles sont situées entre deux zones agricoles au nord et au sud et leur classement en zone naturelle répond à l'objectif de développer un urbanisme de qualité et économe en foncier et notamment de favoriser et privilégier l'urbanisation des dents creuses et la densification au sein de l'enveloppe urbaine existante, et à celui de prioriser les capacités de développement au sein des zones existantes, dernier objectif qui relève de l'axe 4 du PADD tendant à favoriser le développement économique du territoire en affirmant sa vocation industrielle, agricole et forestière. Par suite, et alors même que ces parcelles, enserrées dans un vaste espace naturel, sont partiellement bâties, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que leur classement en zone naturelle est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
12. D'autre part, s'agissant de la parcelle cadastrée section A n° ... appartenant aux requérants, située sur le territoire de cette même commune au lieudit " sous Charrières ", et d'une superficie de 7 465 m², elle est dépourvue de toute construction, est située à plus de 650 mètres du centre-ville et est entourée à l'ouest de parcelles classées en zone naturelle, classement remontant jusqu'au secteur " Sur Plano " et ouvrant à l'est et au nord sur une vaste zone naturelle. Compte tenu des objectifs précités du PADD, l'absence de boisements de " valeur naturelle particulière " ou encore d'enjeu environnemental ou paysager identifié, ne sauraient faire obstacle à ce classement en zone naturelle. Par ailleurs, compte tenu du caractère peu urbanisé de ce secteur, les circonstances que ces parcelles seraient desservies par la rue de Senoche et le chemin de Grande Montagne ou encore qu'un groupe de parcelles supportant des constructions, situé au sud-est de la parcelle en litige, ait été classé en zone U5, ne sont pas suffisantes pour établir que le classement en zone N de la parcelle en litige serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
13. En dernier lieu, le classement des parcelles en litige ne reposant pas sur une erreur manifeste d'appréciation, ainsi qu'il a été dit, il ne porte pas d'atteinte au principe d'égalité.
14. Il résulte de ce qui précède que, d'une part, Mmes et MM. A... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande d'annulation de la délibération du 19 décembre 2019 par laquelle le conseil communautaire de Haut-Bugey Agglomération a approuvé le plan local d'urbanisme tenant lieu de programme local de l'habitat en tant qu'elle classe en zone N les parcelles cadastrées section A nos .... D'autre part, leurs conclusions tendant à l'annulation de la délibération du 19 décembre 2019 en tant qu'elle classe en zone N les parcelles cadastrées section A nos ... sont rejetées.
Sur les frais d'instance :
15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la communauté d'agglomération Haut-Bugey Agglomération, qui n'est pas la partie perdante pour l'essentiel, verse à Mmes et MM. A... la somme qu'ils demandent au titre des frais non compris dans les dépens qu'ils ont exposés. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la communauté d'agglomération Haut-Bugey Agglomération au titre des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2006837 du 22 juillet 2021 du tribunal administratif de Lyon est annulé en tant qu'il n'a pas examiné la légalité du classement en zone naturelle des parcelles cadastrées section A nos ....
Article 2 : Les conclusions de Mmes et MM. A... tendant à l'annulation de la délibération du 19 décembre 2019 en tant qu'elle classe en zone naturelle les parcelles cadastrées section A nos ... sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête d'appel de Mmes et MM. A... est rejeté.
Article 4 : Les conclusions présentées par la communauté d'agglomération Haut-Bugey Agglomération tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A..., M. F... A..., Mme B... A... et M. D... A... et à la communauté d'agglomération Haut-Bugey Agglomération.
Délibéré après l'audience du 17 janvier 2023 à laquelle siégeaient :
Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,
Mme Camille Vinet, présidente assesseure,
Mme Claire Burnichon, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 février 2023.
La rapporteure,
C. BurnichonLa présidente,
M. E...
La greffière,
Fabienne Prouteau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
N° 21LY03090