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09/02/2023 | FRANCE | N°22LY01591

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 09 février 2023, 22LY01591


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par deux demandes, Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'annulation de la décision implicite de la préfète de l'Allier refusant de l'admettre au séjour suite à sa demande adressée le 20 août 2018 (demande n° 1901138) ainsi que celle des arrêtés du 22 février 2021 par lesquels la préfète de l'Allier a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français sans délai et l'a assignée à résidence pour une durée de quarante-cinq j

ours (demande n° 2100523).

Par jugement n° 1901138, 2100523 du 23 novembre 2021, le tr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par deux demandes, Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'annulation de la décision implicite de la préfète de l'Allier refusant de l'admettre au séjour suite à sa demande adressée le 20 août 2018 (demande n° 1901138) ainsi que celle des arrêtés du 22 février 2021 par lesquels la préfète de l'Allier a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français sans délai et l'a assignée à résidence pour une durée de quarante-cinq jours (demande n° 2100523).

Par jugement n° 1901138, 2100523 du 23 novembre 2021, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a, dans un article 1er, rejeté les conclusions de la demande enregistrée sous le n° 2100523 tendant à l'annulation de la décision du 22 février 2021 lui refusant le séjour et, dans un article 2, constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la demande enregistrée sous le n° 1901138 tendant à l'annulation de la décision implicite de la préfète de l'Allier refusant de l'admettre au séjour suite à sa demande adressée le 20 août 2018.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 20 mai 2022, Mme C..., représentée par Me Faure Cromarias, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 23 novembre 2021 ainsi que la décision implicite et la décision du 22 février 2021 portant refus de séjour susvisées pris à son encontre ;

2°) d'enjoindre à la préfète de l'Allier, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à lui verser en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ou la somme de 3 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision du 22 février 2021 portant refus de séjour est entachée d'incompétence ;

- elle est entachée d'erreur de fait et d'un défaut d'examen de sa situation ;

- cette décision est entachée de vices de procédure en l'absence d'avis du collège médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, ou d'un avis régulier ;

- elle est entachée d'un défaut de motivation ou d'une insuffisance de motivation ;

- elle méconnaît l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée à ce titre d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

La préfète de l'Allier a présenté un mémoire, enregistré le 18 janvier 2023, postérieurement à la clôture automatique de l'instruction trois jours francs avant la date d'audience, qui n'a pas été communiqué.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 13 avril 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante arménienne née le 14 mai 1981, est entrée en France en septembre 2015 selon ses déclarations, avec son époux et leurs deux enfants. Les demandes d'asile des époux C... ont été définitivement rejetées par décisions de la Cour nationale du droit d'asile le 28 septembre 2017. Les intéressés ont déposé chacun une demande de titre de séjour lesquelles ont été rejetées par décisions du préfet de l'Allier du 20 octobre 2017 assorties d'une obligation de quitter le territoire français, dont la légalité a été confirmée par jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 27 mars 2018. Par courrier du 20 août 2018, ils ont de nouveau sollicité l'attribution d'un titre de séjour. Mme C... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a, dans un article 1er, rejeté les conclusions de sa demande enregistrée sous le n° 2100523 tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 février 2021 pris à son encontre par la préfète de l'Allier rejetant sa demande de titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français sans délai et, dans un article 2, constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de sa demande enregistrée sous le n° 1901138 tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née au terme d'un délai de quatre mois à la suite de sa demande.

2. En premier lieu, si Mme C... soutient que la décision du 22 février 2021 portant refus de séjour est entachée d'incompétence, il ressort d'un arrêté n° 1996-2020 du 19 août 2020 de la préfète de l'Allier, publié le même jour au recueil des actes administratifs spécial n° 03-2020-126 de la préfecture et qui est en outre disponible sur internet, que Mme Hélène Demolombe-Tobie, secrétaire générale de la préfecture de l'Allier, a reçu délégation pour signer la décision contestée. Par suite, le moyen soulevé ne peut qu'être écarté.

3. En deuxième lieu, la décision du 22 février 2021 portant refus de séjour comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. La préfète de l'Allier a notamment précisé les motifs relatifs à sa situation personnelle justifiant le rejet de la demande de séjour présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation et de l'insuffisante motivation du refus de séjour en litige doit être écarté. En outre, cette décision du 22 février 2021 dûment motivée s'étant substituée à la décision implicite initialement intervenue, le moyen tiré du défaut de motivation de cette dernière décision ne peut qu'être écarté.

4. En troisième lieu, contrairement à ce que soutient Mme C..., la préfète de l'Allier a pris en compte sa situation personnelle et familiale et a, dans la décision attaquée, fait état des motifs afférents à cette situation justifiant le rejet des demandes de séjour présentées par l'intéressée en sa qualité d'épouse d'étranger malade et de parent d'enfant étranger malade, ainsi que sur le fondement des articles L. 313-11 7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision en litige serait entachée d'erreur de fait ou d'un défaut d'examen de sa situation particulière.

5. En quatrième lieu, si Mme C... soutient que la préfète de l'Allier ne justifie pas d'un avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) concernant l'état de santé de sa fille A... préalablement à la naissance de la décision implicite de rejet de sa demande de titre de séjour, un tel moyen ne peut qu'être écarté dès lors qu'il a été rappelé que la décision explicite de rejet de la demande de séjour édictée le 22 février 2021 s'est substituée à la décision implicite de rejet initialement intervenue. Contrairement à ce qu'allègue l'intéressée, la préfète de l'Allier a versé au dossier les avis du collège des médecins de l'OFII des 7 décembre 2018 concernant la jeune A... C... et 19 décembre 2018 concernant l'époux de Mme C... indiquant que l'état de santé des intéressés nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que les intéressés peuvent effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans leur pays d'origine. Si la requérante indique contester la régularité de ces avis et leur date d'émission, elle n'apporte aucune précision à l'appui de son moyen et ne produit aucun élément de nature à remettre en cause les mentions de ces avis et ne soutient pas d'ailleurs que l'état de santé de la jeune A... a évolué entre la date d'émission de l'avis et celle de la décision contestée.

6. En cinquième lieu, aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) une autorisation provisoire de séjour est délivrée aux parents étrangers de l'étranger mineur qui remplit les conditions mentionnées au 11° de l'article L. 313-11 (...) / L'autorisation provisoire de séjour (...), qui ne peut être d'une durée supérieure à six mois, est délivrée par l'autorité administrative, après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (...) ". Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 313-11 du même code : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger (...), si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ".

7. Afin de contester le refus d'autorisation provisoire de séjour pris par la préfète de l'Allier au vu de l'avis rendu le 7 décembre 2018 par le collège des médecins de l'OFII concernant la jeune A..., Mme C... se borne à produire un certificat médical du 23 mai 2018 mentionnant que l'état de santé de sa fille nécessite un suivi psychothérapeutique et que la pédopsychiatrie n'est pas développée dans son pays d'origine. Ce certificat, qui n'est appuyé et étayé d'aucun élément probant concernant notamment l'existence ou l'absence de structures de soins ou de spécialistes en capacité de prendre en charge le type de pathologie développée par la jeune A... dans son pays d'origine, est insuffisant pour remettre en cause les mentions de l'avis du collège des médecins de l'OFII. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation de l'état de santé de la fille de la requérante doivent être écartés.

8. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable à la date de l'arrêté contestée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ". Aux termes de l'article L. 313-14 du même code dans sa version alors en vigueur : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ".

9. Mme C... se prévaut de sa présence en France depuis plus de 5 ans et de l'état de santé de sa fille mineure. Si, par un arrêt du même jour, la cour a annulé le refus de séjour opposé à son époux en raison d'un vice de procédure entachant l'avis rendu par le collège des médecins de l'OFII concernant l'état de santé de leur fille, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de la fille de Mme C... nécessiterait qu'elle demeure en France et l'époux de Mme C..., même au regard de l'annulation prononcée dans l'arrêt rendu à son encontre, ne dispose pas, pour autant, d'un droit au séjour, sa demande ayant uniquement vocation à être réexaminée. La requérante se prévaut également de son activité en qualité d'aide à domicile auprès de particuliers. Toutefois, cette intégration professionnelle est récente à la date de la décision attaquée et établie uniquement à compter de juillet 2019. En outre, il ressort des pièces du dossier et il n'est pas contesté que la requérante dispose toujours d'attaches familiales dans son pays d'origine, pays où elle a vécu jusqu'à l'âge de 34 ans. Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que, par sa décision portant refus de séjour en litige, la préfète de l'Allier a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code précité et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, elle n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de celle-ci sur la situation personnelle de l'intéressée. Enfin, compte tenu des éléments susvisés, Mme C... ne justifie pas de motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires de nature à considérer que la préfète de l'Allier aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne faisant pas application de son pouvoir de régularisation au titre des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

10. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté ses demandes. Les conclusions qu'elle présente aux mêmes fins en appel doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... E... épouse C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de l'Allier.

Délibéré après l'audience du 19 janvier 2023 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 février 2023.

La rapporteure,

V. Rémy-NérisLe président,

F. Bourrachot

La greffière,

A-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY01591

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY01591
Date de la décision : 09/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : FAURE CROMARIAS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-02-09;22ly01591 ?
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