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02/02/2023 | FRANCE | N°21LY02910

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 02 février 2023, 21LY02910


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés du 22 juillet 2021 E... lesquels le préfet de la Haute-Savoie l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, a fixé le pays de destination, d'une part, et l'a assigné à résidence d'autre part.

E... un jugement n° 2104887-2104888 du 30 juillet 2021, la magistrate désignée du tribunal administratif d

e Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

E... une requête, enregistré...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés du 22 juillet 2021 E... lesquels le préfet de la Haute-Savoie l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, a fixé le pays de destination, d'une part, et l'a assigné à résidence d'autre part.

E... un jugement n° 2104887-2104888 du 30 juillet 2021, la magistrate désignée du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

E... une requête, enregistrée le 31 août 2021, M. B..., représenté E... Me Maingot, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler les arrêtés du préfet de la Haute-Savoie du 22 juillet 2021;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Savoie de lui délivrer un titre de séjour et à défaut de réexaminer sa demande dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sans délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement attaqué, la magistrate désignée du tribunal administratif de Grenoble a omis de statuer sur les moyens soulevés à l'encontre de l'assignation à résidence ;

Sur la légalité externe des arrêtés :

- les arrêtés ont été signés E... une autorité incompétente ;

- les décisions sont insuffisamment motivées ;

- il n'a pas été mis à même de présenter des observations ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur de fait ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur la légalité de la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire :

- la décision est entachée d'une contrariété de motifs avec ceux fondant l'assignation à résidence ;

Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et son signalement dans l'espace Schengen :

- la décision méconnaît l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle a pour effet de séparer les membres de la cellule familiale ;

- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'une contrariété de motifs avec ceux fondant l'assignation à résidence ;

Sur la légalité de l'assignation à résidence :

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

En application de l'article R. 611-8 du code de justice administrative, la requête a été dispensée d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Caraës, première conseillère,

- et les observations de M. B... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant du Kosovo né le 26 avril 1976, est entré une première fois en France le 19 janvier 2011. Le 3 février 2011, il a sollicité le bénéfice de l'asile. L'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande E... une décision du 30 avril 2012, confirmée E... la Cour nationale du droit d'asile le 29 mai 2013. E... un arrêté du 26 juin 2013, dont la légalité a été confirmée E... une ordonnance du président de la cour administrative d'appel de Lyon du 13 mai 2014, le préfet de la Haute-Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français. M. B... a fait l'objet d'un nouvel arrêté le 1er août 2014 E... lequel le préfet de la Haute-Savoie l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et l'a assigné à résidence dans le département de la Haute-Savoie. M. B... a mis à exécution cette mesure d'éloignement. Le 27 décembre 2014, il est revenu sur le territoire français. Le 20 avril 2015, il a sollicité le bénéfice de l'asile. Estimant que sa demande relevait d'un autre Etat de l'Union européenne, le préfet de la Haute-Savoie a refusé, E... une décision du 16 juin 2015, de l'admettre provisoirement au séjour et, E... un arrêté du 17 août 2015, a décidé de le remettre aux autorités hongroises, responsables de l'examen de sa demande d'asile et l'a assigné à résidence à compter du 16 octobre 2015. Le 14 décembre 2015, il a été déclaré en fuite. A la suite de son interpellation, le préfet de la Haute-Savoie l'a, le 21 août 2018, obligé à quitter le territoire français sans délai et a prononcé à son encontre une interdiction de retour pour une durée d'un an et l'a assigné à résidence. M. B... ne s'est pas présenté à l'embarquement à l'aéroport aux fins d'exécution de la mesure d'éloignement prononcée à son encontre. Le 23 avril et le 22 novembre 2019, il a sollicité le réexamen de sa demande d'asile. L'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté ses demandes E... des décisions du 29 mai et du 6 décembre 2019, décisions confirmées E... la Cour nationale du droit d'asile les 14 octobre 2019 et 25 juin 2020. E... un arrêté du 6 janvier 2020, dont la légalité a été confirmée E... une ordonnance du président de la cour administrative d'appel de Lyon du 14 décembre 2020, le préfet de la Haute-Savoie a refusé son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Après son interpellation, le préfet de la Haute-Savoie l'a obligé, E... des arrêtés du 22 juillet 2021, à quitter le territoire français sans délai, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et l'a assigné à résidence dans le département de la Haute-Savoie pour une durée de quarante-cinq jours. M. B... relève appel du jugement du 30 juillet 2021 E... lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort du dossier de première instance que le magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble s'est prononcé sur les moyens soulevés dirigés contre l'assignation à résidence prise à l'encontre de M. B.... E... suite, ce jugement n'est entaché d'aucune irrégularité.

Sur les moyens communs aux arrêtés :

3. Les arrêtés contestés sont signés E... M. C... D..., directeur de cabinet du préfet de la Haute-Savoie. E... l'article 1er de l'arrêté du 16 avril 2021 régulièrement publié au recueil des actes administratifs à la même date, le préfet de la Haute-Savoie a accordé une délégation de signature dans le cadre de la permanence à M. C... D... à l'effet de " signer toute décision nécessitée E... une situation d'urgence et pour toutes les matières suivantes (...) 12° arrêtés, décisions, requêtes, recours ou tout autre acte de procédure pris en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et en particulier : les obligations de quitter le territoire français, les arrêtés fixant le pays de destination ; (...) les arrêtés d'assignation à résidence ; les interdictions de retour sur le territoire français (...) ". Ainsi, M. D... bénéficiait d'une délégation de signature, peu important la circonstance que ce terme n'apparaisse pas dans les arrêtés contestés, pour signer l'obligation de quitter le territoire, l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, la décision fixant le pays de renvoi et l'assignation à résidence. E... suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire des arrêtés en litige doit être écarté.

4. Le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions E... lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français ainsi que les décisions qui l'accompagnent. E... suite, les articles L. 121-1 et L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration ne sauraient être utilement invoqués à l'encontre des décisions en litige.

Sur les moyens propres à l'obligation de quitter le territoire français :

5. Il ressort de la rédaction de la décision en litige que celle-ci vise les considérations de droit qui en constituent le fondement, notamment les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et comporte également l'énoncé des éléments de fait relatifs à la situation personnelle de M. B..., lesquels ne sont pas stéréotypés. E... suite, le préfet de la Haute-Savoie, qui n'était pas tenu de mentionner l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, n'a pas entaché la décision en litige d'un défaut de motivation.

6. Si la décision en litige mentionne que M. B... ne justifie pas d'attaches familiales proches en France à l'exception de sa concubine et de leur enfant mineur alors que ses parents, ses sœurs et son frère résident en France, cette erreur ne suffit pas à établir que le préfet se serait abstenu de procéder à un examen sérieux de sa situation alors qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet aurait pris la même décision s'il avait pris en compte la présence de ses parents, de ses sœurs et de son frère en France.

7. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue E... la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. M. B... fait valoir qu'il réside en France depuis plus de dix ans, que sa compagne et sa fille résident également en France ainsi que ses parents, ses deux sœurs et son frère. Toutefois, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne garantit pas à l'étranger le droit de choisir le lieu le plus approprié pour développer une vie privée et familiale. Le préfet a indiqué devant le tribunal administratif de Grenoble, sans être sérieusement contesté, que M. B... est entré en France pour la dernière fois le 14 décembre 2018 après avoir exécuté l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre le 21 août 2018. Il a fait l'objet de refus de titre de séjour assortis d'obligations de quitter le territoire français les 26 juin 2013 et 6 janvier 2020 et d'obligations de quitter le territoire français les 1er août 2014 et 21 août 2018. La compagne de M. B..., de même nationalité, a également fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français le 6 janvier 2020. Si ses parents, ses sœurs et son frère vivent en France, il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales au Kosovo. Rien ne s'oppose à ce que la vie familiale de M. B... se poursuive au Kosovo, pays dont tous les membres de la famille ont la nationalité. E... suite, et alors que M. B... ne peut utilement se prévaloir à l'encontre de la décision critiquée des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine, l'obligation de quitter le territoire français ne porte pas au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Le requérant n'est dès lors pas fondé à soutenir que la mesure d'éloignement prise à son encontre méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, la décision contestée n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.

9. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

10. La décision contestée n'a pas pour effet de séparer M. B... de son enfant né le 14 septembre 2019. Il résulte E... ailleurs de ce qui a été dit au point 8 du présent arrêt que la cellule familiale peut se reconstituer au Kosovo. E... suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.

Sur le moyen propre à la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire :

11. Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " E... dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : (...) 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet. " Aux termes de l'article L. 612-3 du même code : " Le risque mentionné au 3° de l'article L. 612-2 peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) 4° L'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français ; 5° L'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) "

12. La circonstance que pour justifier le bien-fondé de la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire, le préfet de la Haute-Savoie a fait état de l'existence d'un risque que M. B... se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français et que ce risque était établi sur le fondement du 4° et du 5° de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que l'intéressé avait explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français et s'était soustrait à une précédente mesure d'éloignement du 6 janvier 2020 alors qu'il justifiait l'assignation à résidence prise à l'encontre de M. B... E... le motif tiré de ce qu'en raison de sa domiciliation, l'intéressé présentait des garanties propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français est sans incidence sur la légalité de la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire qui a une finalité distincte de la décision assignant un étranger à résidence sur le fondement du 1° de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. E... suite, le moyen tiré de la contrariété des motifs justifiant la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire avec ceux justifiant l'assignation à résidence doit être écarté.

Sur les moyens propres à la décision fixant le pays de destination :

13. L'arrêté en litige, en tant qu'il fixe le pays de renvoi, énonce les considérations de droit, en visant notamment l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et les éléments de fait propres à la situation personnelle de M. B... qui en constituent le fondement. E... suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision en litige doit être écarté.

14. Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". Cet article énonce que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".

15. Si M. B... fait état de ce qu'il s'expose à des risques en cas de retour au Kosovo en raison d'une altercation avec un commandant de l'armée de libération du Kosovo dans laquelle il s'était engagé et de menaces en résultant, il n'apporte à l'appui de ses affirmations aucun élément de nature à établir la réalité, à la date de la décision contestée, des risques de tortures ou traitements inhumains et dégradants auxquels il serait personnellement exposé en cas de retour dans son pays d'origine. E... suite, en fixant le Kosovo comme pays à destination duquel M. B... est susceptible d'être reconduit d'office, le préfet de la Haute-Savoie n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

16. Pour les mêmes motifs que ceux qui ont été exposés ci-dessus, la décision fixant le pays de renvoi ne méconnaît pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Sur les moyens propres à l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an :

17. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée E... l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. " Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".

18. La motivation de la décision portant interdiction de retour doit attester de la prise en compte E... l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères ainsi prévus, sans qu'aucune règle n'impose que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère, ni encore que le préfet fasse expressément état, après analyse de ces éléments et de la situation particulière de l'étranger, des raisons pour lesquelles il décide de ne pas retenir que la présence de l'intéressé sur le territoire représente une menace pour l'ordre public ou des raisons pour lesquelles, en l'absence d'élément particulier dans la situation de l'intéressé, il considère qu'aucune circonstance exceptionnelle ne justifie qu'une interdiction de retour ne soit pas prononcée.

19. La décision d'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an critiquée vise l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et rappelle notamment que la durée de cette interdiction de retour ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de M. B... au regard de sa vie privée et familiale dans la mesure où, même si sa présence ne constitue pas une menace à l'ordre public, il ne justifie pas d'attaches familiales proches en France à l'exception de sa concubine et de leur enfant qui se trouvent dans la même situation administrative que la sienne, qu'il n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales au Kosovo où il a vécu jusqu'à l'âge de 38 ans et qu'il s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement prise à son encontre le 6 janvier 2020. Ainsi, cette décision, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée.

20. Les faits que M. B... travaille et que sa compagne vive en France, alors qu'elle est également en situation irrégulière et a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, ne constituent pas des circonstances humanitaires de nature à faire obstacle à ce qu'une interdiction de retour soit prononcée à son encontre dès lors notamment que la décision n'a pas pour effet de séparer les membres de la cellule familiale. En outre, il ressort des pièces du dossier que M. B... n'a pas déféré à une précédente mesure d'éloignement, prise le 6 janvier 2020. Il ne démontre pas être dépourvu de toute attache privée et familiale dans son pays d'origine. E... suite, et compte tenu de l'ensemble de ces éléments, le préfet de Haute-Savoie n'a pas, en prononçant une mesure d'interdiction de retour sur le territoire d'une durée d'un an, fait une inexacte application de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

21. Le moyen tiré de la contrariété de motifs de la décision refusant d'octroi d'un délai de départ volontaire avec ceux justifiant l'arrêté portant assignation à résidence est sans incidence sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français.

Sur les moyens propres à l'arrêté assignant M. B... à résidence :

22. Aux termes de l'article L. 731-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut assigner à résidence l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, dans les cas suivants : / 1° L'étranger fait l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français, prise moins d'un an auparavant, pour laquelle le délai de départ volontaire est expiré ou n'a pas été accordé ; (...) ".

23. La décision litigieuse comporte les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement. E... suite, elle est suffisamment motivée.

24. La circonstance que pour justifier le bien-fondé de la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire, le préfet de la Haute-Savoie a fait état de l'existence d'un risque que M. B... se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français et que ce risque était établi sur le fondement du 4° et du 5° de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que l'intéressé avait explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français et s'était soustrait à une précédente mesure d'éloignement du 6 janvier 2020 n'est pas de nature à affecter la légalité de la décision l'assignant à résidence, qui précise que, pour un motif distinct tiré de sa domiciliation, M. B... présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français.

25. M. B..., qui est assigné dans le département de la Haute-Savoie où il réside avec sa compagne et doit se présenter deux fois E... semaine, les mardis et jeudis, à la brigade de gendarmerie de Meythat, ne fait état d'aucune circonstance propre à sa situation qui permettrait d'estimer que le préfet, en prenant à son encontre la mesure contestée d'assignation à résidence, aurait porté une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale ou méconnu l'intérêt supérieur de son enfant. Pour les mêmes motifs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Haute-Savoie aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.

26. Les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont sans incidence sur la légalité de l'assignation à résidence prise à son encontre.

27. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, E... le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. E... voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B....

Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 12 janvier 2023, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Courbon, présidente-assesseure,

Mme Caraës, première conseillère.

Rendu public E... mise à disposition au greffe, le 2 février 2023.

La rapporteure,

R. Caraës

Le président,

D. PruvostLa greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY02910


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY02910
Date de la décision : 02/02/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Rozenn CARAËS
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : MAINGOT

Origine de la décision
Date de l'import : 12/02/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-02-02;21ly02910 ?
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