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06/01/2023 | FRANCE | N°21LY02112

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 06 janvier 2023, 21LY02112


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... E... a saisi le tribunal administratif de Lyon de conclusions à fin de condamnation de la ville de Lyon à lui verser la somme de 547 634,96 euros en réparation des préjudices que lui a causé une chute survenue le 6 octobre 2011.

La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Loire a saisi le tribunal administratif de Lyon de conclusions à fin de condamnation de la ville de Lyon à lui verser la somme de 66 081,06 euros au titre de ses débours liés à la chute de Mme E..., outre l'indemn

ité forfaitaire de gestion.

Mme D... B... épouse C... a saisi le tribunal adm...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... E... a saisi le tribunal administratif de Lyon de conclusions à fin de condamnation de la ville de Lyon à lui verser la somme de 547 634,96 euros en réparation des préjudices que lui a causé une chute survenue le 6 octobre 2011.

La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Loire a saisi le tribunal administratif de Lyon de conclusions à fin de condamnation de la ville de Lyon à lui verser la somme de 66 081,06 euros au titre de ses débours liés à la chute de Mme E..., outre l'indemnité forfaitaire de gestion.

Mme D... B... épouse C... a saisi le tribunal administratif de Lyon de conclusions à fin de condamnation de la ville de Lyon à lui verser la somme de 488 217,58 euros en réparation des préjudices que lui a causé une chute survenue le 6 octobre 2011.

La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Loire a saisi le tribunal administratif de Lyon de conclusions à fin de condamnation de la ville de Lyon à lui verser la somme de 270 311,89 euros au titre de ses débours liés à la chute de Mme C..., outre l'indemnité forfaitaire de gestion.

La ville de Lyon a formé des conclusions d'appel en garantie dirigées contre l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1 et la société Nexim 1.

Par un jugement n° 1603759 du 4 mai 2021, le tribunal administratif de Lyon, d'une part, a condamné la ville de Lyon à verser à Mme E... la somme de 156 175,93 euros, à Mme C... la somme de 83 699,53 euros, et à la CPAM de la Loire la somme de 66 081,06 euros au titre de ses débours liés à l'accident de Mme E... ainsi que la somme de 269 118,40 euros au titre de ses débours liés à l'accident de Mme C..., outre les indemnités forfaitaires de gestion, d'autre part, a rejeté les conclusions d'appel en garantie formées par la ville de Lyon.

Procédure devant la cour :

I°) Par une requête enregistrée le 25 juin 2021 sous le n° 21LY02112, Mme D... B... épouse C..., représentée par la SELARL JAC, demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 1603759 du 4 mai 2021 du tribunal administratif de Lyon en tant qu'il n'a fait droit que partiellement à ses conclusions indemnitaires ;

2°) de condamner la ville de Lyon à lui verser la somme totale de 533 425,88 euros en réparation des préjudices que lui a causés une chute survenue le 6 octobre 2011 ;

3°) de mettre à la charge de la ville de Lyon une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme C... soutient que :

* c'est à bon droit que le tribunal a retenu le principe de la responsabilité de la ville de Lyon ;

* elle conteste uniquement le jugement en ce qui concerne l'indemnisation des pertes de revenus professionnels, de l'incidence professionnelle concernant la retraite, du déficit fonctionnel temporaire et du préjudice d'agrément.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 septembre 2021, la ville de Lyon représentée par la SELARL Abeille et associés, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme C... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La ville de Lyon soutient que :

* elle a elle-même formé, par une requête n° 21LY02190, un appel contre le jugement ;

* la requête de Mme C... est en tout état de cause infondée concernant les chefs de préjudice qu'elle conteste.

Par un mémoire enregistré le 14 septembre 2021, la SASU Tem Partners exerçant sous l'enseigne Auberger-Favre, représentée par la SELARL Constructiv'avocats, conclut :

1°) au rejet des conclusions qui pourraient être dirigées contre elle ;

2°) subsidiairement, à ce que l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1, la société Nexim 1, la société OPM Gestion, la société Eiffage Energie Systèmes - Clévia Centre Est anciennement dénommée Eiffage Energie Thermie Centre Est et la société Mercier-Lavault soient condamnées à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle.

La SASU Tem Partners soutient que :

* aucune conclusion n'est en l'état dirigée contre elle ;

* elle ne peut se voir imputer le mauvais état de la grille ;

* subsidiairement, elle devrait être garantie par le propriétaire de la grille, et le cas échéant par les sociétés qui ont réalisé une intervention en 2011 ;

* très subsidiairement la requête de Mme C... est infondée.

Par un mémoire enregistré le 25 septembre 2021, la SA Mercier-Lavault, représentée par Me Lanfranchi, conclut :

1°) au rejet des conclusions qui pourraient être dirigées contre elle et notamment les conclusions d'appel en garantie formées par la société Auberger-Favre ;

2°) à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la ville de Lyon sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Mercier-Lavault soutient que :

* ni Mme C... ni la ville de Lyon ne recherchent sa responsabilité ;

* ni Mme C... ni la ville de Lyon ne recherchent la responsabilité de la société Auberger-Favre, dont l'appel en garantie à son encontre est dès lors dénué d'objet ;

* en tout état de cause, elle ne peut se voir imputer le mauvais état de la grille.

Par un mémoire enregistré le 15 novembre 2021 et un mémoire complémentaire enregistré le 2 décembre 2021, la société Eiffage Energie Thermie Centre Est, représentée par la SELARL Piras et associés, conclut :

1°) au rejet des conclusions qui pourraient être dirigées contre elle ;

2°) subsidiairement, à ce que l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1, la société OPM Gestion et la société Auberger-Favre soient condamnées à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle ;

3°) à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de " tout succombant " sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Eiffage Energie Thermie Centre Est soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

* elle ne peut se voir imputer le mauvais état de la grille ;

* subsidiairement, la requête de Mme C... est infondée ;

* les conclusions de la mutuelle Aésio sont également infondées en ce qui la concerne ;

* très subsidiairement, elle doit être garantie par l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1, la société OPM Gestion et la société Auberger-Favre.

Par un mémoire enregistré le 23 novembre 2021 et un mémoire complémentaire enregistré le 7 avril 2022, la mutuelle Aésio, venant aux droits de la mutuelle Eovi Mcd, représentée par le cabinet Weil et associés, conclut :

1°) à ce que la ville de Lyon soit condamnée à lui verser la somme de 9 577,88 euros, outre intérêts au taux légal, au titre des dépenses engagées pour Mme E... ;

2°) à ce que la ville de Lyon soit condamnée à lui verser la somme de 16 845,27 euros, outre intérêts au taux légal, au titre des dépenses engagées pour Mme C... ;

3°) à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la ville de Lyon sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La mutuelle Aésio soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

* son intervention est recevable ;

* c'est à juste titre que le tribunal a retenu la responsabilité de la ville de Lyon ;

* elle a droit à obtenir le remboursement des dépenses complémentaires de santé qu'elle a exposées pour Mme E... ;

* elle a droit à obtenir le remboursement des dépenses complémentaires de santé qu'elle a exposées pour Mme C....

Par un mémoire enregistré le 8 mars 2022, la société OPM Gestion agissant comme mandataire de l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1, représentée par la SELARL Michel Teboul, conclut :

1°) au rejet des conclusions qui pourraient être dirigées contre elle ou contre l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1 ;

2°) à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de " tout succombant " sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société OPM Gestion soutient que :

* l'intervention de la mutuelle Aésio est irrecevable dès lors qu'elle présente des conclusions propres ;

* ni elle ni l'association syndicale libre dont elle gère les biens ne peuvent se voir imputer le mauvais état de la grille ;

* subsidiairement, la requête de Mme C... est infondée et les sommes qui lui ont été allouées sont excessives.

Par un mémoire enregistré le 24 mars 2022, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Loire, représentée par la SELARL Axiome avocats, conclut :

1°) à la confirmation du jugement ;

2°) à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la ville de Lyon sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La CPAM de la Loire soutient que c'est à bon droit que le tribunal a condamné la ville de Lyon à lui rembourser les débours exposés pour Mme C..., ainsi qu'à lui verser l'indemnité forfaitaire de gestion.

Par un mémoire enregistré le 8 avril 2022, la SAS Nexim 1, représentée par la SCP Baulieux Bohe Chouvellon Mugnier Rinck, conclut :

1°) au rejet des conclusions qui pourraient être dirigées contre elle ;

2°) à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la ville de Lyon et de Mme C... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Nexim 1 soutient que :

* les conclusions de la mutuelle Aésio sont irrecevables comme nouvelles en appel ;

* l'action dirigée contre elle est prescrite ;

* si la grille appartient à la ville de Lyon, elle ne peut se voir imputer son mauvais état, et si elle ne lui appartient pas, les conclusions d'appel en garantie de la ville de Lyon à son encontre deviennent sans objet ; même dans cette dernière hypothèse elle ne pourrait en tout état de cause se voir imputer le mauvais état de la grille ;

* subsidiairement, les victimes doivent être regardées comme ayant commis une faute exonératoire en utilisant l'ouvrage de façon inappropriée ;

* subsidiairement, la requête de Mme C... est infondée.

Par un mémoire enregistré le 11 avril 2022, l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1, représentée par la SELARL Rebotier Rossi et associés, conclut :

1°) au rejet des conclusions qui pourraient être dirigées contre elle ;

2°) à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la ville de Lyon sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'association syndicale libre de la cite internationale de Lyon 1 soutient que :

* l'intervention de la mutuelle Aésio est irrecevable dès lors qu'elle présente des conclusions propres ;

* elle ne peut se voir imputer le mauvais état de la grille, dont elle n'était ni propriétaire ni responsable de l'entretien ; l'intervention de livraison de 2011 est sans lien avec la dégradation de la grille ;

* la transaction invoquée par la société Nexim 1 ne concerne pas la grille en litige ;

* elle s'en rapporte aux écriture de la société OPM Gestion pour ce qui est de la requête de Mme C....

Par un courrier du 14 octobre 2022, les parties ont été informées que la Cour est susceptible de se fonder sur le moyen, relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions indemnitaires de la mutuelle Aésio comme nouvelles en appel.

Par ordonnance du 10 février 2022, l'instruction a été close au 11 mars 2022 à 16h30. Par ordonnance du 9 mars 2022, la clôture de l'instruction a été reportée au 11 avril 2022 à 16h30. Par ordonnance du 11 avril 2022, la clôture de l'instruction a été reportée au 11 mai 2022 à 16h30.

Un mémoire complémentaire, présenté pour la société Tem Partners et enregistré le 14 décembre 2021, n'a pas été communiqué.

Un mémoire complémentaire, présenté pour la société OPM Gestion et enregistré le 3 mai 2022, n'a pas été communiqué.

II°) Par une requête enregistrée le 2 juillet 2021 sous le n° 21LY02190 et régularisée le 30 juillet 2021, et des mémoires complémentaires enregistrés les 10 mars 2022 et 1er avril 2022, la ville de Lyon, représentée par la SELARL Abeille et associés, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 1603759 du 4 mai 2021 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) de rejeter les conclusions de Mme C..., de Mme E... et de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Loire comme portées devant un ordre de juridictions incompétent pour en connaître ;

3°) subsidiairement, de rejeter les conclusions de Mme C..., de Mme E... et de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Loire ou à tout le moins de réformer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à verser des montants excessifs ;

4°) subsidiairement, de condamner la société Tem Partners, la société Mercier-Lavault, la société Eiffage énergie thermie, l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1, la société OPM Gestion et la société Nexim 1 à la garantir des condamnations prononcées contre elle ;

5°) de mettre à la charge de " tout succombant " une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La ville de Lyon soutient que :

* le jugement n'est pas motivé sur le principe de la responsabilité de la ville et ne tient pas compte de tous les éléments du dossier ;

* la grille en litige n'est pas un ouvrage public lui appartenant et son mauvais état ne peut lui être imputé ; la grille n'est pas l'accessoire des voies de circulation ;

* le tribunal ne pouvait, sans relever d'office un moyen qui n'était pas invoqué, utiliser la théorie de l'accessoire pour qualifier la grille d'ouvrage public ; il a en outre méconnu l'article L. 2111-2 du code général de la propriété des personnes publiques qui concerne la théorie de l'accessoire en matière de domanialité publique ;

* le tribunal a omis de statuer sur le moyen en défense tiré du vice de conception et sur les appels en garantie ;

* le défaut d'entretien est imputable au seul propriétaire de l'ouvrage, soit la société SPAICIL, aux droits de laquelle vient la société Nexim 1 en application de l'article L. 221-1 du code de commerce, qui doit donc garantir la ville de Lyon en tant que de besoin ;

* la société OPM Gestion, qui agissait pour l'association syndicale libre et utilisait les grilles, connaissait le mauvais état de la grille en litige et avait demandé un renforcement en urgence de sa fixation, qui n'a pas été réalisé ;

* le mauvais état de la grille est également imputable à la mauvaise réalisation de l'ouvrage, dont doit également répondre la société Nexim 1 ;

* l'état de la grille a été aggravé par l'intervention de manutention d'avril 2011, réalisée sous la responsabilité de l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1 et de son gestionnaire de biens la société OPM Gestion, par les sociétés Auberger-Favre, Eiffage énergie thermie et Mercier-Lavault ; à tout le moins, les sociétés, qui ne peuvent pas ne pas avoir noté le mauvais état de la grille, ne l'ont pas signalé, ce qui constitue une faute de négligence ;

* la ville de Lyon ne peut se voir imputer un mauvais entretien de la voirie, qui relève de la compétence de la métropole de Lyon en application de l'article L. 3641-1 du code général des collectivités territoriales ;

* les victimes ont commis une faute d'imprudence en marchant sur la grille ;

* le tribunal a accordé une indemnisation excessive à Mme E... en ce qui concerne les frais d'assistance à expertise, l'assistance temporaire par tierce personne, les pertes de revenus et le préjudice esthétique temporaire ;

* le tribunal a accordé une indemnisation excessive à Mme C... en ce qui concerne l'assistance temporaire par tierce personne, les pertes de revenus et le préjudice esthétique temporaire.

Par un mémoire enregistré le 14 septembre 2021, la SASU Tem Partners exerçant sous l'enseigne Auberger-Favre, représentée par la SELARL Constructiv'avocats, conclut :

1°) au rejet des conclusions qui pourraient être dirigées contre elle ;

2°) subsidiairement, à ce que l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1, la société Nexim 1, la société OPM Gestion, la société Eiffage Energie Systèmes - Clévia centre Est anciennement dénomméeEiffage Energie Thermie Centre Est et la société Mercier-Lavault soient condamnées à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle ;

3°) à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la ville de Lyon sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La SASU Tem Partners soutient que :

* la ville de Lyon n'a pas formé de conclusions à son encontre en première instance et le tribunal n'a pas retenu sa responsabilité ;

* elle ne peut se voir imputer le mauvais état de la grille ;

* très subsidiairement, elle devrait en tant que de besoin être garantie par l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1, la société Nexim 1, la société OPM Gestion, la société Eiffage Energie Systèmes et la société Mercier-Lavault.

Par un mémoire enregistré le 25 septembre 2021 et un mémoire complémentaire enregistré le 4 avril 2022, la SA Mercier-Lavault, représentée par Me Lanfranchi, conclut :

1°) au rejet des conclusions qui pourraient être dirigées contre elle et notamment des conclusions d'appel en garantie formées par la société Auberger-Favre et par la ville de Lyon ;

2°) à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la ville de Lyon sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Mercier-Lavault soutient que :

* elle ne peut se voir imputer le mauvais état de la grille, notamment au titre d'une opération de manutention ;

* les conclusions d'appel en garantie formées par la ville de Lyon contre la société Tem Partners, la société Mercier-Lavault, la société Eiffage énergie thermie, l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1, la société OPM Gestion et la société Nexim 1, sont nouvelles en appel et donc irrecevables ; elles sont en tout état de cause infondées.

Par un mémoire en défense enregistré le 18 octobre 2021, Mme A... E..., représentée par la SELARL JAC, conclut :

1°) au rejet de la requête de la ville de Lyon ;

2°) à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la ville de Lyon sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme E... soutient que :

* c'est à juste titre que le tribunal a retenu la responsabilité de la ville ;

* ses préjudices n'ont pas été évalués de façon excessive.

Par un mémoire en défense enregistré le 18 octobre 2021, Mme D... B... épouse C..., représentée par la SELARL JAC, conclut :

1°) au rejet de la requête de la ville de Lyon ;

2°) à ce que les sommes que la ville de Lyon a été condamnée à lui verser soient portées au montant total de 533 425,88 euros ;

3°) à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la ville de Lyon sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme C... soutient que :

* c'est à juste titre que le tribunal a retenu la responsabilité de la ville ;

* ses préjudices n'ont pas été évalués de façon excessive ;

* les sommes qui lui ont été allouées au titre des pertes de revenus professionnels, de l'incidence professionnelle concernant la retraite, du déficit fonctionnel temporaire et du préjudice d'agrément, doivent au contraire être majorées.

Par un mémoire enregistré le 15 novembre 2021 et un mémoire complémentaire enregistré le 2 décembre 2021, la société Eiffage Energie Thermie Centre Est, représentée par la SELARL Piras et associés, conclut :

1°) au rejet des conclusions qui pourraient être dirigées contre elle ;

2°) subsidiairement, à ce que l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1, la société OPM Gestion et la société Auberger-Favre soient condamnées à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées contre elle ;

3°) à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de " tout succombant " sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Eiffage Energie Thermie Centre Est soutient que :

* elle ne peut se voir imputer le mauvais état de la grille ;

* subsidiairement, les conclusions indemnitaires de Mme E... sont excessives ;

* subsidiairement, les conclusions indemnitaires de Mme C... sont excessives ;

* subsidiairement, elle doit en tant que de besoin être garantie par l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1, la société OPM Gestion et la société Auberger-Favre ;

* les conclusions de la mutuelle Aésio doivent également être rejetées.

Par un mémoire enregistré le 23 novembre 2021 et un mémoire complémentaire enregistré le 7 avril 2022, la mutuelle Aésio, venant aux droits de la mutuelle Eovi Mcd, représentée par le cabinet Weil et associés, conclut :

1°) à ce que la ville de Lyon soit condamnée à lui verser la somme de 9 577,88 euros, outre intérêts au taux légal, au titre des dépenses engagées pour Mme E... ;

2°) à ce que la ville de Lyon soit condamnée à lui verser la somme de 16 845,27 euros, outre intérêts au taux légal, au titre des dépenses engagées pour Mme C... ;

3°) à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la ville de Lyon sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La mutuelle Aésio soutient, dans le dernier état de ses écritures, que :

* c'est à juste titre que le tribunal a retenu la responsabilité de la ville de Lyon ;

* elle a droit à obtenir le remboursement des dépenses complémentaires de santé qu'elle a exposées pour Mme E... ;

* elle a droit à obtenir le remboursement des dépenses complémentaires de santé qu'elle a exposées pour Mme C... ;

* son intervention est recevable.

Par un mémoire enregistré le 8 mars 2022, la société OPM Gestion agissant comme mandataire de l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1, représentée par la SELARL Michel Teboul, conclut :

1°) au rejet des conclusions qui pourraient être dirigées contre elle ou contre l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1 ;

2°) à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de " tout succombant " sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société OPM Gestion soutient que :

* l'intervention de la mutuelle Aésio est irrecevable dès lors qu'elle présente des conclusions propres ;

* ni elle ni l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1 ne peuvent se voir imputer le mauvais état de la grille, dont elles n'étaient pas propriétaires, dont elles n'ont pas assuré l'entretien et sur laquelle elles ne sont pas intervenues ;

* subsidiairement, les conclusions indemnitaires de Mme E... sont excessives ;

* subsidiairement, les conclusions indemnitaires de Mme C... sont excessives.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 mars 2022, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Loire, représentée par la SELARL Axiome avocats, conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la ville de Lyon sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La CPAM de la Loire soutient que c'est à bon droit que le tribunal a condamné la ville de Lyon à lui rembourser les débours exposés pour Mme E... et pour Mme C..., ainsi qu'à lui verser l'indemnité forfaitaire de gestion.

Par un mémoire enregistré le 8 avril 2022, la SAS Nexim 1, représentée par la SCP Baulieux Bohe Chouvellon Mugnier Rinck, conclut :

1°) au rejet des conclusions qui pourraient être dirigées contre elle et notamment de l'appel en garantie formé par la ville de Lyon ;

2°) à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la ville de Lyon et de Mme C... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Nexim 1 soutient que :

* les conclusions de la mutuelle Aésio sont irrecevables comme nouvelles en appel ;

* l'action dirigée contre elle est prescrite ;

* si la grille appartient à la ville de Lyon, elle ne peut se voir imputer son mauvais état, et si elle ne lui appartient pas, les conclusions d'appel en garantie de la ville de Lyon à son encontre deviennent sans objet ; même dans cette dernière hypothèse elle ne pourrait en tout état de cause se voir imputer le mauvais état de la grille ;

* subsidiairement, les victimes doivent être regardées comme ayant commis une faute exonératoire en utilisant l'ouvrage de façon inappropriée ;

* subsidiairement, les conclusions indemnitaires d'appel de Mme C... sont infondées.

Par un mémoire enregistré le 11 avril 2022, l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1, représentée par la SELARL Rebotier Rossi et associés, conclut :

1°) au rejet des conclusions qui pourraient être dirigées contre elle et notamment les conclusions d'appel en garantie de la ville de Lyon, ainsi que des sociétés Eiffage, Tem Partners et Nexim 1 ;

2°) à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la ville de Lyon sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

L'association syndicale libre de la cite internationale de Lyon 1 soutient que :

* l'intervention de la mutuelle Aésio est irrecevable dès lors qu'elle présente des conclusions propres ;

* l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1 ne peut se voir imputer le mauvais état de la grille, dont elle n'était ni propriétaire, ni responsable de l'entretien ; l'intervention de livraison de 2011 est sans lien avec la dégradation de la grille ;

* la transaction invoquée par la société Nexim 1 ne concerne pas la grille en litige ;

* elle s'en rapporte aux écriture de la société OPM Gestion pour ce qui est de la requête de Mme C....

Par un courrier du 14 octobre 2022, les parties ont été informées que la Cour est susceptible de se fonder sur les moyens, relevés d'office, tirés : de l'irrecevabilité des conclusions d'appel en garantie formées par la ville de Lyon à l'encontre de la société Tem Partners, de la société Mercier-Lavault, de la société Eiffage énergie thermie et de la société OPM Gestion, comme nouvelles en appel ; de l'irrecevabilité des conclusions indemnitaires de la mutuelle Aésio comme nouvelles en appel ; de l'incompétence de la juridiction administrative pour connaître des conclusions d'appel en garantie dirigées contre la société Nexim 1 et l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1, qui sont des personnes morales de droit privé et dont la responsabilité, telle qu'elle est recherchée, ne relève pas d'un régime de droit public ; et de l'irrégularité du jugement en tant qu'il a statué sur les conclusions d'appel en garantie dirigées contre la société Nexim 1 et l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1, sans décliner la compétence de la juridiction administrative.

Par un mémoire enregistré le 21 octobre 2022, la ville de Lyon a présenté des observations sur les moyens d'ordre public.

Par ordonnance du 10 février 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 11 mars 2022 à 16h30.

Par ordonnance du 9 mars 2022, la clôture de l'instruction a été reportée au 11 avril 2022 à 16h30.

Par ordonnance du 11 avril 2022, la clôture de l'instruction a été reportée au 11 mai 2022 à 16h30.

Un mémoire complémentaire, présenté pour la société Tem Partners et enregistré le 14 décembre 2021, n'a pas été communiqué.

Un mémoire complémentaire, présenté pour la société OPM Gestion et enregistré le 2 mai 2022, n'a pas été communiqué.

Un mémoire complémentaire, présenté pour la ville de Lyon et enregistré le 3 mai 2022, n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

* le code civil ;

* le code général des collectivités territoriales ;

* le code de la mutualité ;

* le code de la santé publique ;

* le code de la sécurité sociale ;

* le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

* le rapport de M. Stillmunkes, président-assesseur,

* les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique,

* les observations de Me Pontier, représentant la ville de Lyon,

* les observations de Me Bosquet, substituant Me Teboul, représentant la société OPM Gestion,

* les observations de Me Lanfranchi, représentant la société Mercier-Lavault,

* les observations de Me Broux, substituant Me Chouvellon, représentant la société Nexim 1,

* et les observations de Me Bernetiere, substituant Me Gras, représentant l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E... et Mme C... ont été victimes d'une chute le 6 octobre 2011, au sein de Cité internationale de Lyon, à hauteur du 62 quai du général de Gaulle, après qu'une grille numérotée 36, qui constituait une des grilles de ventilation et d'accès d'un couloir technique, ait cédé sous leur poids. Elles ont chacune chuté de plusieurs mètres dans ce couloir technique et ont été victimes de dommages corporels importants. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a condamné la ville de Lyon à les indemniser, ainsi qu'à rembourser les débours exposés pour chacune d'elles par la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Loire. Par le même jugement, le tribunal a par ailleurs rejeté les conclusions d'appel en garantie formées par la ville de Lyon à l'encontre de l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1 et de la société Nexim 1.

2. Par une première requête, Mme C... sollicite la majoration des sommes qui lui ont été allouées. Par une seconde requête, la ville de Lyon conclut à l'annulation du jugement et aux rejets des conclusions de Mme E..., de Mme C... et de la CPAM de la Loire ainsi que, subsidiairement et dans le dernier état de ses écritures, à ce qu'elle soit en tant que de besoin garantie par la société Tem Partners, par la société Mercier-Lavault, par la société Eiffage énergie thermie, par l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1, par la société OPM Gestion et par la société Nexim 1. Ces deux requêtes présentent à juger des questions communes et il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt.

Sur la recevabilité des conclusions d'appel :

3. En premier lieu, les conclusions d'appel en garantie formées par la ville de Lyon à l'encontre de la société Tem Partners (Auberger-Favre), de la société Mercier-Lavault, de la société Eiffage énergie thermie et de la société OPM Gestion, sont irrecevables comme nouvelles en appel.

4. En second lieu, les conclusions indemnitaires présentées par la mutuelle Aésio, venant aux droits de la mutuelle Eovi Mcd, sont irrecevables comme nouvelles en appel.

Sur la régularité du jugement :

En ce qui concerne la motivation :

5. Contrairement à ce que soutient la ville de Lyon, le jugement est régulièrement motivé. Les circonstances que la ville conteste l'analyse retenue par le tribunal et que celui-ci n'a pas répondu à tous les arguments invoqués par la ville ne caractérisent pas un défaut de motivation.

En ce qui concerne l'office du juge :

6. Contrairement à ce que soutient la ville de Lyon, il appartenait au tribunal, pour régler le litige, de trancher les questions posées, au vu des éléments résultant de l'instruction. Ainsi, en utilisant la théorie de l'accessoire pour déterminer si l'ouvrage en litige pouvait, comme cela était débattu, être qualifié d'ouvrage public pour les besoins de la mise en œuvre du régime des dommages de travaux publics qui était invoqué, le tribunal n'a pas soulevé d'office un moyen nouveau, mais s'est borné à apprécier le bien-fondé des conclusions dont il était saisi en donnant à l'ouvrage, dont le statut était discuté, la qualification qu'il estimait exacte.

En ce qui concerne l'omission à statuer :

7. Contrairement à ce que soutient la ville de Lyon, le jugement, qui a rappelé que le fait du tiers n'est pas exonératoire en matière de dommages de travaux publics pour défaut d'entretien normal, a pu en conséquence et sans irrégularité ne pas retenir un moyen en défense tiré du vice de conception, qui était invoqué à titre exonératoire et était dès lors inopérant. Le tribunal n'a par ailleurs pas omis de statuer sur les appels en garantie formés par la ville de Lyon.

En ce qui concerne les conclusions indemnitaires principales :

8. Mme E... et Mme C... recherchent chacune, sur le fondement du régime des dommages de travaux publics, la responsabilité de la ville de Lyon au titre d'un défaut d'entretien normal de la grille n° 36 précitée. Quel que soit le bien-fondé de leur action, celle-ci, qui est dirigée contre une collectivité publique sur le fondement du régime des dommages de travaux publics, relève de la compétence de la juridiction administrative.

En ce qui concerne les conclusions d'appel en garantie :

9. Il n'appartient en principe qu'au juge judiciaire de connaître de conclusions tendant à mettre en cause la responsabilité d'une personne privée au titre de son activité.

S'agissant des conclusions dirigées par la ville de Lyon contre l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1 :

10. Si la ville de Lyon a entendu imputer à l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1, en tant que propriétaire du lot n° 4, le mauvais entretien et la dégradation de la grille en litige, cette association syndicale libre, qui est une personne morale de droit privé, et qui n'a au demeurant acquis la propriété du lot n° 4 que plusieurs années après l'accident, ne peut en tout état de cause être regardée comme ayant agi comme mandataire d'une personne publique, ni comme ayant participé à une opération de travaux publics. Par ailleurs, la livraison, par des sociétés privées, de matériel commandé par un mandataire de gestion de l'association syndicale libre ne peut être regardée comme constituant une opération de travaux publics. Les conclusions d'appel en garantie dirigées contre l'association syndicale libre doivent, dès lors, être rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaitre et c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon s'est prononcé sur le bien-fondé de ces conclusions.

S'agissant des conclusions dirigées par la ville de Lyon contre la société Nexim 1 :

11. La société Nexim 1 est appelée en garantie par la ville de Lyon en qualité d'ancien actionnaire unique de la SNC société privée d'aménagement et d'investissement de la Cité internationale de Lyon (SPAICIL), qui a été dissoute et était propriétaire du lot n° 4 à la date de l'accident, survenu le 6 octobre 2011. La société SPAICIL n'a en effet cédé le lot n° 4 à l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1 qu'en vertu d'un acte de vente dressé le 17 juillet 2014. Pour autant, la société SPAICIL, pas davantage que la société Nexim 1, ne peuvent être regardées comme ayant agi pour l'entretien de la grille en litige en qualité de mandataire d'une personne publique, ni comme ayant participé à une opération de travaux publics portant sur la grille en litige et en lien direct avec l'accident. En particulier, les travaux de construction de l'ouvrage, par la société SPAICIL, et le défaut d'entretien de cet ouvrage, par la même société, ne peuvent être regardés comme constituant une opération de travaux publics relevant de la juridiction administrative. Les conclusions d'appel en garantie dirigées contre la société Nexim 1 doivent, dès lors, être rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître et c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon s'est prononcé sur le bien-fondé de ces conclusions.

12. Il résulte de ce qui vient d'être dit que le jugement est irrégulier en tant seulement qu'il statue sur les conclusions d'appel en garantie dirigées par la ville de Lyon contre l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1 et la société Nexim 1. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer sur ces conclusions, qui doivent être rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Sur la responsabilité :

13. Il résulte de l'instruction que la chute dont Mme E... et Mme C... ont été victimes résulte du mauvais état d'entretien de la grille n° 36. Il résulte des quatre expertises successivement diligentées par le juge pénal entre 2011 et 2019 pour éclairer les questions de la propriété de la grille et de l'identification de la personne responsable de cet entretien, et confiées à un architecte et à deux géomètres experts, que l'ensemble immobilier complexe que constitue la Cité internationale de Lyon se divise en propriété en plusieurs volumes. La grille en litige se situe à l'interface de deux de ces volumes. D'une part, le volume n° 4, qui correspond à des locaux techniques enterrés, appartenait au moment de l'accident à la SNC Société privée d'aménagement et d'investissement de la Cité internationale de Lyon (SPAICIL), qui l'a ultérieurement cédé à l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1 en vertu d'un acte de vente dressé le 17 juillet 2014, soit postérieurement à l'accident en litige survenu le 6 octobre 2011. D'autre part, le volume n° 18, qui correspond à un espace libre côté Rhône, avait été cédé à la ville de Lyon le 5 octobre 1999, à destination en particulier d'espaces verts et d'aménagements paysagers. La grille n° 36, qui est située en surface à hauteur du volume n° 18, surplombe le volume souterrain n° 4. Elle fait partie d'un ensemble de grilles, situé en bordure d'une voie de circulation piétonne, qui est séparé de la voie et délimité par des chasse-roues. Elles ont en particulier vocation à permettre, d'une part, l'aération d'installations techniques, d'autre part, l'accès à la fosse technique et à des locaux techniques. L'ensemble de la fosse technique est en effet surplombé de grilles caillebotis amovibles permettant sa ventilation et constituant un accès. Ainsi que le rappelle le point 2-3B2 du document annexé à l'acte de vente du volume n° 4, une servitude privée d'accès à des installations techniques est d'ailleurs prévue, au bénéfice d'autres volumes, et à la charge du volume n° 4, ainsi regardé comme fonds servant, pour permettre de rejoindre les locaux techniques, notamment par le biais de trappes, dont l'une est au demeurant située à proximité immédiate de la grille n° 36. Un cahier des règles d'usage et d'occupation, établi en 1997, a enfin été annexé à l'état descriptif de division en volumes, qui définit l'étendue des différents volumes dont se compose la cité internationale et qui a été publié au bureau des hypothèques. Les différents actes de vente renvoient aux volumes ainsi définis. Ce cahier contient notamment une clause consacrée à l'étendue du droit de propriété, qui prévoit en particulier que : " Les équipements de surface tels que les grilles, les caniveaux, les chasse-roues, sans que cette énonciation soit limitative, constituent des accessoires du volume construit ". En l'espèce, compte tenu de son emplacement et de sa fonction, la grille n° 36 en litige, qui n'a pas été spécialement aménagée pour la circulation piétonne ni ne sert d'espace vert, et ne se rattache donc pas fonctionnellement au volume n° 18, apparaît comme constituant en réalité un accessoire nécessaire des locaux techniques qu'elle surplombe, c'est-à-dire du volume construit n° 4, qu'elle permet notamment de ventiler et de desservir. L'architecte expert désigné par le juge pénal a ainsi précisé que ces grilles ont été créées pour satisfaire aux nécessités de ventilation et d'accès des installations techniques enterrées, ce que les autres experts admettent. L'objet de la grille est manifestement de permettre la ventilation et la desserte technique du volume n° 4, et en particulier la livraison d'équipements pondéreux. L'absence de servitude de circulation piétonne à la charge du volume n° 4, sur l'ensemble des grilles en cause, que tous les experts ont relevée, est d'ailleurs cohérente avec le fait que ces grilles n'ont pas été mises en place pour les besoins d'une telle circulation. Bien plutôt, elles surplombent des installations techniques auxquelles elles se rattachent, et les seules servitudes prévues, qui sont stipulées à la charge du lot n° 4, portent uniquement sur l'accès aux installations techniques de ce dernier lot. Il s'agit dans ces conditions d'ouvrages à vocation exclusivement technique, liés et nécessaires pour l'accès au volume technique construit n° 4. La quatrième expertise, confiée à un géomètre expert, relève en ce sens, sans trancher en elle-même la question de droit du statut d'accessoire, que la grille est totalement nécessaire au fonctionnement du volume n° 4 et qu'elle est de ce fait indissociable de ce volume. Ainsi, la grille n° 36 doit être regardée, en application des stipulations précitées du cahier des règles d'usage et d'occupation qui précise la consistance des différents volumes, comme étant rattachée au volume construit n° 4, dont elle constitue un accessoire nécessaire, et non au volume n° 18 non construit, auquel elle ne se rattache pas fonctionnellement et dont elle ne peut être regardée comme étant l'accessoire. La grille n° 36 doit, dès lors, être regardée comme un ouvrage relevant du volume n° 4, qui était la propriété privée de la société SPAICIL au moment de l'accident, celle-ci étant en conséquence la personne normalement en charge d'en assurer l'entretien, et non la ville de Lyon. Par ailleurs, cette grille n'est pas incorporée dans la voie publique, mais en est simplement voisine, sans lien nécessaire de rattachement. L'expert architecte, dans la troisième expertise, a d'ailleurs souligné que les grilles n'ont aucune fonction ni utilité pour le volume n° 18 relevant de la ville, et n'ont en particulier aucune vocation à être regardées comme une voie de circulation piétonne, alors notamment qu'elles sont au contraire isolées et séparées de la voie par un ensemble de chasse-roues. Enfin, si, en tant que propriétaire du volume n° 18, la ville de Lyon bénéficiait, au même titre que les propriétaires de plusieurs autres volumes, d'une servitude privée d'accès à des locaux techniques souterrains, par l'intermédiaire notamment d'une trappe située à proximité immédiate de la grille n° 36, voire par les grilles en tant que de besoin, il ne résulte pas de l'instruction et il n'est d'ailleurs pas allégué que la grille n° 36 aurait été endommagée au cours de travaux publics réalisés par la ville de Lyon. A cet égard, il est en réalité constant que la ville de Lyon n'est jamais intervenue sur la grille, qui se rattache à un espace technique délimité, qui ne se confond pas avec les espaces ouverts au public aménagés et pris en charge par la ville. La ville de Lyon est dès lors fondée à soutenir que c'est à tort que, pour retenir sa responsabilité, le tribunal a estimé que cette grille constituerait un ouvrage public relevant de la ville de Lyon et que l'accident dont ont été victimes Mme E... et Mme C... constituerait un dommage de travaux publics imputable à la ville de Lyon.

14. Il résulte de tout ce qui précède que la ville de Lyon est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon l'a condamnée à indemniser Mme E..., Mme C... et la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire.

Sur les dépens :

15. Dans les circonstances particulières de l'espèce, les dépens liés aux deux expertises médicales ordonnées en référé par le tribunal administratif de Lyon sont maintenus à la charge de la ville de Lyon.

Sur les frais de l'instance :

16. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par les parties sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1603759 du 4 mai 2021 du tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : Les conclusions de Mme E..., de Mme C... et de la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions d'appel en garantie dirigées par la ville de Lyon contre l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1 et la société Nexim 1 sont rejetées comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaitre.

Article 4 : Les dépens liés aux deux expertises médicales ordonnées par le tribunal administratif de Lyon, taxés et liquidés à hauteur des sommes respectives de 2 850 euros et de 1 600 euros par ordonnances du 18 octobre 2017 et du 12 juillet 2017 du président du tribunal administratif de Lyon, sont maintenus à la charge définitive de la ville de Lyon.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C..., à Mme E..., à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire, à la ville de Lyon, à l'association syndicale libre de la Cité internationale de Lyon 1, à la société Nexim 1, à la société OPM Gestion, à la société Auberger-Favre (Tem Partners), à la société Eiffage Energie Thermie Centre Est, à la société Mercier-Lavault et à la mutuelle Aésio.

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président,

M. Stillmunkes, président assesseur,

Mme Bentéjac, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 janvier 2023.

Le rapporteur,

H. Stillmunkes

Le président,

F. Pourny

La greffière,

F. Abdillah

La République mande et ordonne au préfet du Rhône, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY02112 - 21LY02190


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY02112
Date de la décision : 06/01/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Procédure - Voies de recours - Appel - Conclusions recevables en appel - Conclusions nouvelles.

Travaux publics - Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics - Notion de dommages de travaux publics.

Travaux publics - Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics - Personnes responsables.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Henri STILLMUNKES
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : CONSTRUCTIV'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 11/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-01-06;21ly02112 ?
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