Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part, d'annuler la décision du 19 décembre 2019 par laquelle la ministre de la transition écologique et solidaire a confirmé sur recours administratif préalable obligatoire l'interdiction d'accès aux centrales nucléaires de production d'électricité relevant d'EDF, d'autre part, de condamner l'Etat à lui verser une somme de 50 000 euros.
Par un jugement n° 2001284 du 14 septembre 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 11 novembre 2021 et complétée le 7 janvier 2022, M. C... A... B..., représenté par Me Lamamra, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2001284 du 14 septembre 2021 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler la décision du 19 décembre 2019 par laquelle la ministre de la transition écologique et solidaire a confirmé sur recours administratif préalable obligatoire l'interdiction d'accès aux centrales nucléaires de production d'électricité relevant d'EDF ;
3°) d'enjoindre au ministre de lui délivrer une autorisation d'accès aux centres nucléaires de production d'énergie, dans le délai d'un mois et sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 50 000 euros en réparation du préjudice causé par la décision précitée ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 600 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision n'est pas motivée ;
- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et se fonde sur des faits dont la matérialité n'est pas établie ;
- il a subi un préjudice d'incidence professionnelle et un préjudice moral du fait de cette décision.
Par un mémoire en défense enregistré le 4 novembre 2022, le ministre de la transition énergétique conclut au rejet de la requête au motif que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la défense ;
- le code de l'énergie ;
- le code de l'environnement ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Stillmunkes, rapporteur,
- et les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par décision en date du 12 septembre 2019, EDF a opposé un refus à la demande de la société Assystem engineering et operation d'autoriser l'accès de M. A... B... au centre nucléaire de production d'électricité de Chinon. M. A... B... ayant formé le recours préalable obligatoire prévu par l'article R. 1332-3 du code de la défense, la ministre de la transition écologique et solidaire a confirmé le 19 décembre 2019 l'interdiction d'accès aux centrales nucléaires de production d'électricité relevant d'EDF. Par le jugement attaqué en date du 14 septembre 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté les conclusions de M. A... B... tendant, d'une part à l'annulation de la décision ministérielle, d'autre part, à la condamnation de l'Etat à l'indemniser au titre d'un préjudice professionnel et moral.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " (...) doivent être motivées les décisions qui : / (...) / 7° Refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a au f du 2° de l'article L. 311-5 (...) ". Le d) du 2° de l'article L. 311-5 auquel il est ainsi renvoyé vise : " 2° Les autres documents administratifs dont la consultation ou la communication porterait atteinte : / (...) / d) A la sûreté de l'Etat, à la sécurité publique, à la sécurité des personnes ou à la sécurité des systèmes d'information des administrations (...) ". Pour les motifs retenus par le tribunal et que la cour fait siens, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 1332-2-1 du code de la défense : " L'accès à tout ou partie des établissements, installations et ouvrages désignés en application du présent chapitre est autorisé par l'opérateur qui peut demander l'avis de l'autorité administrative compétente dans les conditions et selon les modalités définies par décret en Conseil d'Etat. / L'avis est rendu à la suite d'une enquête administrative qui peut donner lieu à la consultation du bulletin n° 2 du casier judiciaire et de traitements automatisés de données à caractère personnel relevant de l'article 31 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, à l'exception des fichiers d'identification. / La personne concernée est informée de l'enquête administrative dont elle fait l'objet ". Aux termes de l'article R. 1332-22 du même code, dans sa rédaction applicable : " Avant d'autoriser l'accès d'une personne à tout ou partie d'un point d'importance vitale qu'il gère ou utilise, l'opérateur d'importance vitale peut demander par écrit, selon le cas, l'avis : / (...) / 2° De l'autorité désignée par le ministre de l'intérieur pour les opérateurs d'importance vitale du sous-secteur nucléaire ou pour les opérateurs d'importance vitale exploitant les installations nucléaires intéressant la dissuasion ne relevant pas du ministre de la défense au sens de l'article R.* 1411-9 (...) / Cette demande peut justifier que soit diligentée sous le contrôle de l'autorité concernée une enquête administrative destinée à vérifier que les caractéristiques de la personne physique ou morale intéressée ne sont pas incompatibles avec l'accès envisagé et pouvant donner lieu à la consultation des traitements automatisés de données personnelles mentionnés à l'article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 (...) ".
4. Le ministre a exposé en première instance que le refus est fondé sur le risque de radicalisation islamique, identifié depuis plusieurs années et relevé de façon concordante par une note du 4 novembre 2020 de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) et par une fiche établie par le commandement spécialisé pour la sécurité nucléaire (COSSEN) après instruction de la demande. Eu égard à la gravité du risque tenant à l'accès à une installation nucléaire d'importance vitale par une personne soupçonnée de radicalisation, et alors que ce risque est corroboré de façon concordante par un ensemble d'indices dont l'essentiel n'est pas sérieusement contesté, les dénégations générales formulées par le requérant ne sont pas de nature à établir que la décision aurait été prise sur la base de faits matériellement inexacts ou qu'elle procéderait d'une erreur d'appréciation. En particulier, si le requérant conteste le motif de son licenciement antérieur par une autre société, il n'apporte pas d'éléments sur son comportement alors relevé, qui est le motif réel du refus. Par ailleurs, alors qu'a notamment été relevé sa présence dans une mosquée de Bruxelles-Mollenbeek connue comme étant un lieu de culte particulièrement radical, il se borne à contester la radicalité de la mosquée, sans contester s'y rendre.
5. Il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du 19 décembre 2019.
Sur les conclusions indemnitaires :
6. M. A... B... n'ayant pas établi l'illégalité de la décision du 19 décembre 2019, il n'est pas fondé à soutenir que son édiction serait constitutive d'une faute. Ses conclusions indemnitaires doivent, en conséquence, être rejetées, sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité.
7. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Ses conclusions relatives aux frais de l'instance doivent, par voie de conséquence, être également rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. C... A... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B... et au ministre de la transition énergétique.
Délibéré après l'audience du 10 novembre 2022, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Stillmunkes, président assesseur,
Mme Bentéjac, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 novembre 2022.
Le rapporteur,
H. Stillmunkes
Le président,
F. Pourny La greffière,
F. Abdillah
La République mande et ordonne au ministre de la transition énergétique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 21LY03603