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08/11/2022 | FRANCE | N°21LY04043

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 08 novembre 2022, 21LY04043


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 19 novembre 2019 par laquelle le directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'admission au statut d'apatride.

Par jugement n° 2001145 du 12 octobre 2021, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 9 décembre 2021 et un mémoire enregistré le 13 octobre 2022 et non communiqué, M.

A... B..., représenté par Me Schürmann, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 oc...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 19 novembre 2019 par laquelle le directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'admission au statut d'apatride.

Par jugement n° 2001145 du 12 octobre 2021, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 9 décembre 2021 et un mémoire enregistré le 13 octobre 2022 et non communiqué, M. A... B..., représenté par Me Schürmann, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 octobre 2021 ;

2°) d'annuler la décision du 19 novembre 2019 par laquelle le directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'admission au statut d'apatride ;

3°) d'enjoindre à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides de lui accorder le statut d'apatride ;

4°) de mettre à la charge de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le versement à son conseil de la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de celles de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision en litige méconnaît les dispositions de l'article L. 812-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 1er de la convention de New York du 28 septembre 1954 relative au statut des apatrides en ce qu'il justifie des démarches effectuées pour se voir reconnaître la nationalité macédonienne, qu'il ne peut obtenir ;

- la décision en litige est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et d'une erreur de fait.

Par un mémoire enregistré le 22 juin 2022, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, représenté par Me Cano, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge du requérant le versement de la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

M. A... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 9 mars 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de New York du 28 septembre 1954 relative au statut des apatrides, publiée par le décret n° 60-1066 du 4 octobre 1960 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Burnichon, première conseillère,

- et les conclusions de M. Laval, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B... déclare être né le 19 septembre 1978 à Strumica, dans la République socialiste de Macédoine. Cette dernière, qui faisait alors partie de la République fédérative socialiste de Yougoslavie, est devenue la République de Macédoine, dénommée également " Ancienne république yougoslave de Macédoine " (ARYM), pour devenir enfin la " République de la Macédoine du Nord ". Il soutient avoir rejoint l'Italie en 1990, où il aurait vécu avec ses parents et ses quatre enfants, avant d'entrer irrégulièrement en France le 26 janvier 2010. Sa demande d'asile, au titre de laquelle il est constant qu'il avait soutenu être originaire du Kosovo, a été définitivement rejetée par la Cour nationale du droit d'asile le 3 avril 2012, et il a fait l'objet d'une mesure d'éloignement le 3 juillet 2012. Suite à un premier rejet de sa demande de reconnaissance du statut d'apatride le 6 mai 2015, décision confirmée, en dernier lieu, par l'arrêt du 24 novembre 2016 de la Cour administrative d'appel de Lyon, il a présenté une demande de titre de séjour au titre de sa vie privée et familiale, qui a été rejetée par un arrêté du 30 décembre 2015 du préfet de l'Isère l'obligeant à quitter le territoire et lui interdisant le retour pour une durée de deux ans, et les recours introduits ont été rejetés, en dernier lieu, par une ordonnance de la Cour administrative d'appel de Lyon du 28 décembre 2016. Il a alors de nouveau sollicité la reconnaissance du statut d'apatride, et cette demande a été rejetée par une décision du 19 novembre 2019 du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Par un jugement du 12 octobre 2021 dont il relève appel, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

2. D'une part, aux termes de l'article L. 812-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " La qualité d'apatride est reconnue à toute personne qui répond à la définition de l'article 1er de la convention de New-York, du 28 septembre 1954, relative au statut des apatrides. Ces personnes sont régies par les dispositions applicables aux apatrides en vertu de cette convention ". Aux termes de l'article 1er de la convention de New-York du 28 septembre 1954 relative au statut des apatrides : " (...) Le terme " apatride " désigne une personne qu'aucun Etat ne considère comme son ressortissant par application de sa législation (...) ".

3. D'autre part, selon l'article L.812-2 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " L'Office français de protection des réfugiés et apatrides reconnaît la qualité d'apatride aux personnes remplissant les conditions mentionnées à l'article L. 812-1, au terme d'une procédure définie par décret en Conseil d'Etat ". Il incombe à toute personne se prévalant de la qualité d'apatride d'apporter la preuve qu'en dépit de démarches répétées et assidues, l'Etat de la nationalité duquel elle se prévaut a refusé de donner suite à ses démarches.

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B... a lui-même déclaré, lors de sa première demande d'asile, être ressortissant du Kosovo. S'il fait désormais valoir que cette déclaration était inexacte, ayant été faite sur le conseil des passeurs, et qu'il entend obtenir la nationalité de son pays de naissance, la République de la Macédoine du Nord, l'attestation de la représentation consulaire de Macédoine du 2 février 2016 ainsi que les deux documents du ministère de l'intérieur macédonien des 14 juillet 2016 et 13 avril 2018 se bornent à relever qu'il n'est pas inscrit dans le registre des ressortissants macédoniens, sans faire état de démarches qu'il aurait engagées pour accéder à cette nationalité.

5. En second lieu, il ressort de la loi de nationalité de la République de Macédoine de 1992, qu'il produit, que la nationalité peut s'acquérir notamment en raison de son origine et de sa naissance sur le territoire de la République, et que l'enfant peut lui-même acquérir cette nationalité lorsque ses parents, ou un de ses parents, a cette nationalité. Il n'apporte toutefois pas suffisamment d'éléments sur son parcours, et ne précise pas plus la nature et le fondement précis de la demande de nationalité qu'il aurait présentée aux autorités de la République de Macédoine du Nord, et les justificatifs qu'il aurait apportés au soutien de ses démarches. S'il produit une traduction d'un courrier de l'Ambassade lui transmettant une décision du 21 septembre 2020 du ministre de l'intérieur de la République de Macédoine du Nord qui aurait rejeté sa demande de nationalité, une telle pièce est toutefois postérieure à la décision en litige et ne peut ainsi être de nature à entacher la décision du directeur de l'OFPRA. Il est en outre relevé, de manière surabondante, d'une part, que ce document n'établit pas un rejet définitif de sa demande, en l'absence d'éléments sur le recours qu'il pouvait introduire devant les juridictions de la République de Macédoine du Nord, et, d'autre part, qu'il y est précisé que la demande a été présentée au titre d'une naturalisation et non d'une naissance sur le territoire de la République, que seule la nationalité de sa mère, d'ailleurs présentée comme une citoyenne de la République de Serbie, est indiquée, sans que l'intéressé ne donne d'indication sur l'impossibilité d'obtenir la nationalité serbe. Si M. B... produit également une décision de l'OFPRA du 16 septembre 2021 reconnaissant la qualité d'apatride à Mme B... F..., ainsi que le titre de séjour de Mme C... épouse E... obtenu en 2017, il n'apporte pas d'éléments suffisants sur son lien de parenté avec chacune d'elle ni sur leurs parcours communs respectifs.

6. Il résulte de ce qui a été exposé précédemment que l'appelant ne démontre pas entrer dans le champ d'application des stipulations précitées de l'article 1er de la convention de New-York du 28 septembre 1954 ni que la décision contestée serait entachée d'une erreur de droit ou de fait ni d'une erreur d'appréciation du directeur général de l'OFPRA au regard de ces stipulations et des dispositions précitées de l'article L. 812-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 19 novembre 2019. L'ensemble de ses conclusions, y compris, par voie de conséquence, celles aux fins d'injonction et celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, doit être rejeté.

8. Dans les circonstances de l'espèce et alors que M. B... est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de l'OFPRA tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'OFPRA présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides.

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,

Mme Camille Vinet, présidente assesseure,

Mme Claire Burnichon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 novembre 2022.

La rapporteure,

C. BurnichonLa présidente,

M. D...

La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 21LY04043 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21LY04043
Date de la décision : 08/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-05-01 Étrangers. - Réfugiés (voir : Asile) et apatrides. - Qualité d`apatride.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: Mme Claire BURNICHON
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : SCHURMANN

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-11-08;21ly04043 ?
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