Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme L... et M. H... I..., M. N... E..., Mme K... et M. B... C..., Mme F... et M. G... D..., M. A... J... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 28 février 2020 par lequel le maire de la commune des Contamines-Montjoie a délivré un permis de construire deux bâtiments comprenant 21 logements à la SCCV du Grand Plane, situés chemin du Grand Plane aux Contamines-Montjoie.
Par un jugement n° 2002986 du 22 avril 2021, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 juin 2021 et 23 décembre 2021, Mme L... et M. H... I..., M. A... J..., M. N... E..., Mme K... et M. B... C..., Mme F... et M. G... D..., représentés par Me Dursent, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 22 avril 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 28 février 2020 ;
3°) de rejeter les conclusions de la SCCV du Grand Plane présentées au titre de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
4°) de mettre à la charge de la commune des Contamines-Montjoie et, le cas échéant, de la SCCV du Grand Plane, le versement d'une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le projet en litige méconnaît les dispositions de l'article L. 152-1 du code de l'urbanisme en ce qu'il est incompatible avec les orientations de l'OAP du Plane afférentes à la qualité de l'insertion architecturale, urbaine et paysagère, afférentes à la qualité environnementale et afférentes aux cheminements doux ; il est incompatible avec les orientations de l'OAP " cheminements doux " ;
- le projet en litige méconnaît les dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme et celles de l'article R. 111-2 du même code ;
- les dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ne peuvent être mises en œuvre, les illégalités induisant une annulation totale du permis en litige.
Par mémoire enregistré le 4 août 2021, la SCCV du Grand Plane, agissant par son représentant légal, représentée par Me Brand, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit fait application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, et, en tout état de cause, à ce que soit mis à la charge solidaire des requérants le versement de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 4 janvier 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 janvier 2022.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Burnichon, première conseillère ;
- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,
- les observations de Me Dursent, représentant les requérants et de Me Dandan substituant Me Brand pour la SCCV du Grand Plane.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 28 février 2020, le maire de la commune des Contamines-Montjoie a délivré un permis de construire à la SCCV du Grand Plane autorisant la construction de deux bâtiments comptant respectivement 11 et 10 logements, avec des garages en sous-sol, sur un terrain situé chemin du Grand Plane, au lieu-dit " Le Plane ", et cadastré section .... M. D... et autres relèvent appel du jugement du 22 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité du permis de construire du 28 février 2020 :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 152-1 du code de l'urbanisme : " L'exécution par toute personne publique ou privée de tous travaux, constructions, aménagements, (...) sont conformes au règlement et à ses documents graphiques. / Ces travaux ou opérations sont, en outre, compatibles, lorsqu'elles existent, avec les orientations d'aménagement et de programmation. ". Aux termes du chapitre 3 du plan local d'urbanisme de la commune des Contamines Montjoie " Zone à urbaniser AU a " : " Cette zone fait l'objet de l'OAP n° 3 valant règlement en application de l'article R. 151-8 du code de l'urbanisme (voir le dossier n° 3 des OAP) ". Enfin, l'article R. 151-8 du code précité prévoit que : " Les orientations d'aménagement et de programmation des secteurs de zones urbaines ou de zones à urbaniser mentionnées au deuxième alinéa du R. 151-20 dont les conditions d'aménagement et d'équipement ne sont pas définies par des dispositions réglementaires garantissent la cohérence des projets d'aménagement et de construction avec le projet d'aménagement et de développement durables. Elles portent au moins sur : /1° La qualité de l'insertion architecturale, urbaine et paysagère ;/(...)/3° La qualité environnementale et la prévention des risques ;/(...) ". En application de ces dispositions, dans l'hypothèse où le règlement du plan local d'urbanisme ne comprend pas de dispositions règlementaires régissant la zone mais renvoie expressément à des dispositions suffisamment précises des orientations d'aménagement et de programmation, il appartient au juge de rechercher si l'opération projetée répond aux principes et règles retenus par les orientations d'aménagement et de programmation.
3. Tout d'abord, il ressort des pièces du dossier que l'orientation d'aménagement et de programmation (OAP) du Plane a prévu un schéma d'aménagement à mettre en œuvre sur trois îlots, l'îlot n° 3, situé au Sud-Est, qui porte sur trois parcelles, comprenant celle supportant le projet en litige. Cette orientation prévoit que : " Volumétrie, implantation des constructions : - L'opération devra accueillir un habitat diversifié : petit collectif, habitat intermédiaire (habitat individuel jumelé ou accolé) / - Les bâtiments seront implantés le long des voiries (existantes ou créées) afin d'organiser une continuité bâtie, et de laisser libres de grandes surfaces en herbe / - Les constructions - par leur composition et leur accès - doivent s'adapter au terrain naturel, sans modification importante des pentes de celui-ci. En fin de chantier, les talus de terre doivent être adoucis, lissés et enherbés. Autorisés pour les murs de soutènement : murs en pierres avec la même technique de construction que les murs de pierre traditionnels, murs en béton texturé. - Les constructions doivent avoir un volume compact, de plan orthogonal simple. /Elles comporteront au moins 2 niveaux (c'est à dire au moins R + 1) sans dépasser le R + 2 + combles ". De plus, l'OAP conditionne la réalisation de l'opération d'aménagement d'ensemble, et notamment de l'îlot 3, à la prise en compte de l'enveloppe urbaine existante, la préservation des vues et des ambiances rurales, la reprise des modèles locaux et volumétries traditionnelles, et elle mentionne une hauteur maximale exprimée sur quatre niveaux (R + 2 + Combles).
4. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, le secteur où se situe le terrain d'assiette du projet, sans homogénéité particulière, comprend d'autres constructions en R + 2+Comble et la société pétitionnaire a obtenu d'autres permis de construire à proximité immédiate portant notamment sur la construction de bâtiments de logements collectifs de volumétrie similaire. Il ressort également du dossier de demande de permis de construire, et notamment du plan de masse et des plans des façades des deux immeubles autorisés, que les deux bâtiments sont d'un volume compact et simple et seront implantés à proximité de la voie de desserte à créer. Il en ressort aussi que le projet comprend la réalisation de garages en sous-sol, qui ne sont toutefois que partiellement enterrés en façade Ouest, où un accès de plain-pied est prévu. Cet agencement s'inscrit dans l'objectif prévu par le schéma d'aménagement de limiter la modification de la pente du terrain et d'adapter le projet au terrain naturel. Dans ce contexte et compte tenu de la pente du terrain et de l'objectif recherché dans l'OAP, ces garages ne peuvent être considérés comme un niveau à prendre en compte dans le calcul du nombre de niveaux maximal prévu dans l'orientation du schéma d'aménagement, étant également relevé que l'OAP renvoie, pour préfigurer l'aménagement du secteur, à différents modèles de constructions de petits collectifs existants dans la zone qui disposent de garages enterrés ou semi-enterrés qui ne sont pas considérés comme des niveaux au sens de cette orientation. Il suit de là, et contrairement à ce que soutiennent les requérants, que le projet en litige répond aux principes et règles d'aménagement énoncés par l'orientation précitée.
5. Ensuite, l'orientation d'aménagement et de programmation du Plane prévoit également que : " Qualité environnementale et prévention des risques / Qualité environnementale / -L'aménagement doit prévoir une proportion d'espaces de pleine terre de l'ordre de 30 %. / (...) / - Gestion et valorisation des déchets : l'aménagement doit prévoir un point de tri sélectif et l'emplacement d'un point de composte mutualisé. / - Les cheminements piétons - vélos et arrêts de bus doivent être conçus pour constituer une alternative à la voiture. ". Ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges, la notice paysagère jointe à la demande de permis de construire prévoit la présence d'un emplacement pour les " ordures ménagères ", par des conteneurs enterrés à réaliser par la commune qui en définira l'emplacement et qui seront mutualisés pour les trois opérations prévues par l'OAP du Plane, et un petit abri avec composteur étant également prévu sur le secteur 2 au centre de l'opération globale, dans les espaces communs. La circonstance alléguée par les appelants tenant à la nécessité, pour les habitants des logements, de prendre leur véhicule pour utiliser ces équipements, à la supposer établie, n'est pas de nature à démontrer que le projet en litige ne respecterait pas les principes énoncés par l'orientation précitée.
6. Enfin, l'OAP thématique " Cheminements doux ", qui concerne l'ensemble du territoire communal, ne comporte pas d'objectifs portant sur le terrain d'assiette du projet en litige, renvoyant à cet égard à l'OAP spécifique. L'OAP du Plane comprend également un volet relatif aux circulations douces qui précise que : " L'aménagement doit prévoir des cheminements dédiés aux piétons et/ou vélos reliant les différentes opérations entre elles./ Des cheminements dédiés aux piétons et/ou vélos doivent également permettre de relier les différentes parties du secteur au centre village et à l'école. ", l'objectif étant de " relier l'opération à l'école et au centre village par des cheminements doux ", et l'OAP comprend une carte où figure un tracé précisant la mise en œuvre de cet objectif.
7. Il ressort d'une lecture combinée des pièces du dossier, et notamment, d'une part, de la carte de l'OAP du Plane et, d'autre part, du plan de masse joint à la demande de permis de construire, que les " liaisons douces à créer " sur l'îlot 3 sont prévues en dehors de la parcelle d'assiette du projet, les obligations en résultant ne pouvant de ce fait être supportées par le bénéficiaire du permis litigieux à supposer même que les parcelles adjacentes auraient été vendues à des tiers dans des conditions de nature à faire obstacle à la réalisation effective de ces cheminements. Si des " déplacements doux prévus vers le centre et l'école " doivent être réalisés sur le terrain d'assiette du projet, il ressort des pièces du dossier que des cheminements sont prévus en bordure de la voie d'accès, entre les deux bâtiments à réaliser et en dehors de l'emprise de ces bâtiments, et le projet litigieux ne fait ainsi pas obstacle à la réalisation de la portion de cette liaison douce prévue par l'OAP. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le projet en litige ne répond pas aux principes contenus dans les OAP précitées doit être écarté.
8. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation ou leurs dimensions, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique. Il en est de même si les constructions projetées, par leur implantation à proximité d'autres installations, leurs caractéristiques ou leur situation, sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique. ".
9. Il ressort des pièces du dossier que la voie d'accès à créer pour les dessertes des immeubles autorisés par le permis en litige dispose, avant l'arrivée sur la voie publique, d'une aire de retournement de près de 18 mètres sur plus de 22 mètres permettant, compte tenu de sa surface, le croisement des véhicules et une sortie, moyennant une vitesse réduite, sur une surface plane. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le projet en litige est de nature à porter atteinte à la sécurité publique au sens de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et que le permis litigieux est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.
10. En dernier lieu, les requérants se bornent à réitérer en appel, sans apporter d'éléments nouveaux, le moyen tiré de la méconnaissance par le projet des dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme, applicable au permis en litige en vertu de son article R. 111-1 du même code, qu'il y a dès lors lieu d'écarter par les motifs retenus par les premiers juges.
11. Il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 février 2020 par lequel le maire de la commune des Contamines-Montjoie a délivré un permis de construire à la SCCV du Grand Plane.
Sur les frais d'instance:
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions des requérants, qui sont la partie perdante, tendant au remboursement des frais non compris dans les dépens qu'ils ont exposés. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants la somme de 1 500 euros à verser à la SCCV du Grand Plane au titre des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... et autres est rejetée.
Article 2 : M. D... et autres verseront à la SCCV du Grand Plane la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... et M. G... D..., représentant unique des requérants en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article R. 751-3 du code de justice administrative, à la SCCV du Grand Plane et à la commune des Contamines-Montjoie.
Délibéré après l'audience du 4 octobre 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,
Mme Camille Vinet, présidente assesseure,
Mme Claire Burnichon, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 octobre 2022.
La rapporteure,
C. Burnichon La présidente,
M. M...
La greffière,
F. Prouteau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
N° 21LY02068 2