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11/10/2022 | FRANCE | N°21LY00884

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 11 octobre 2022, 21LY00884


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Prolimm a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 5 juin 2019 par laquelle le maire de Saint-Michel-sur-Rhône a contesté la conformité des travaux qu'elle a déclarés le 19 mars 2019, portant sur une partie des travaux autorisés par un permis tacite, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1909090 du 19 janvier 2021, le tribunal administratif de Lyon a annulé cette décision du 5 juin 2019 et la décision de rejet de s

on recours gracieux, et mis à la charge de la commune de Saint-Michel-sur-Rhône la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La société Prolimm a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 5 juin 2019 par laquelle le maire de Saint-Michel-sur-Rhône a contesté la conformité des travaux qu'elle a déclarés le 19 mars 2019, portant sur une partie des travaux autorisés par un permis tacite, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1909090 du 19 janvier 2021, le tribunal administratif de Lyon a annulé cette décision du 5 juin 2019 et la décision de rejet de son recours gracieux, et mis à la charge de la commune de Saint-Michel-sur-Rhône la somme de 1 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 19 mars 2021, la commune de Saint-Michel-sur-Rhône, représentée par la Selarl Carnot avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 19 janvier 2021 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) de rejeter la demande de la société Prolimm ;

3°) de mettre à la charge de la société Prolimm la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé, s'agissant des motifs qui l'ont conduit à estimer que le permis tacite n'était pas périmé et qu'un achèvement partiel des travaux était possible ;

- le permis d'aménager tacite était caduc à la date du dépôt de la déclaration attestant l'achèvement et la conformité des travaux, la seule crainte de se retrouver en infraction aux règles d'urbanisme, du fait du refus du maire de délivrer un certificat tacite, ne pouvant constituer un motif de suspension du délai de validité ; la situation dont se prévaut la société Prolimm n'entre dans aucun des cas prévus à l'article R. 424-19 du code de l'urbanisme justifiant la suspension du délai de validité du permis ;

- les travaux faisant l'objet de la déclaration n'étaient pas divisibles du reste de l'opération et ne pouvaient faire l'objet d'une déclaration d'achèvement partiel.

La requête a été communiquée à la société Prolimm, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

La clôture d'instruction a été fixée au 7 juin 2022, par une ordonnance en date du 6 mai 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Camille Vinet, présidente-assesseure,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- les observations de Me Arnaud, représentant la commune de Saint-Michel-sur-Rhône ;

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 10 février 2011, le maire de la commune de Saint-Michel-sur-Rhône a refusé de délivrer le permis d'aménager sollicité par la société Prolimm en vue de la création d'un lotissement destiné à la réalisation de 21 maisons. Par un jugement du 12 novembre 2013, le tribunal administratif de Lyon a annulé ce refus et a enjoint au maire de réexaminer la demande de la société Prolimm. Par un arrêté du 7 janvier 2014, le maire de Saint-Michel-sur-Rhône a opposé un sursis à statuer à la demande dont il était ainsi ressaisi au motif que le projet était de nature à compromettre l'exécution du plan local d'urbanisme en cours de révision. Par un jugement du 24 janvier 2017 le tribunal administratif de Lyon a rejeté le recours introduit par la société Prolimm contre cet arrêté et le rejet implicite du recours gracieux du 25 février 2014 reçu le 27 février 2014, en relevant notamment que la société ne pouvait se prévaloir des dispositions de l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme, à défaut d'avoir confirmé sa demande. La société Prolimm a confirmé sa demande de permis d'aménager, par un courrier du 29 avril 2014 reçu en mairie le 2 mai suivant, en se prévalant des dispositions de cet article L. 600-2. La société Prolimm a contesté le refus implicite qu'elle estimait être intervenu, ainsi que la décision tacite de refus de délivrance du certificat de permis tacite demandé par un courrier du 10 mars 2017, reçu le 13 mars 2017. Le tribunal administratif de Lyon, par un second jugement du 16 octobre 2018, a rejeté les conclusions dirigées contre le refus implicite de permis d'aménager, relevant à cet égard qu'un permis tacite était né le 2 mai 2014 à la suite de la confirmation de la demande par la société Prolimm, mais a annulé le refus implicite de délivrance d'un certificat de permis tacite, en enjoignant à la commune de lui délivrer ce certificat. Un appel a été introduit contre ces deux jugements des 24 janvier 2017 et 16 octobre 2018. Par un arrêt du 9 juillet 2019 devenu définitif, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé le jugement du 24 janvier 2017 du tribunal administratif de Lyon, a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté de sursis à statuer du 7 janvier 2014 au motif qu'un permis tacite était né le 2 août 2014, et a rejeté le surplus des conclusions.

2. La société Prolimm a décidé de mettre en œuvre en 2019 ce permis d'aménager tacite né le 2 août 2014 et, le 19 mars 2019, a déposé en mairie de Saint-Michel-sur-Rhône une déclaration attestant l'achèvement et la conformité des travaux concernant les lots n° 1 et 6 supportant chacun une maison d'habitation. Par une décision du 5 juin 2019, le maire de la commune a contesté la conformité de ces travaux. Par un jugement du 19 janvier 2021, le tribunal administratif de Lyon, estimant que le permis d'aménager n'était pas périmé et qu'il s'agissait d'une tranche de travaux divisible, a annulé cette décision ainsi que le rejet du recours gracieux qu'avait formé la société Prolimm. La commune de Saint-Michel-sur-Rhône relève appel de ce dernier jugement.

Sur la légalité de la décision du 5 juin 2019 :

3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme, dans sa version applicable : " Le permis de construire, d'aménager ou de démolir est périmé si les travaux ne sont pas entrepris dans le délai de trois ans à compter de la notification mentionnée à l'article R. 424-10 ou de la date à laquelle la décision tacite est intervenue. / Il en est de même si, passé ce délai, les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année (...) ". Selon l'article R. 424-19 du même code : " En cas de recours devant la juridiction administrative contre le permis ou contre la décision de non-opposition à la déclaration préalable ou de recours devant la juridiction civile en application de l'article L.480-13, le délai de validité prévu à l'article R.424-17 est suspendu jusqu'au prononcé d'une décision juridictionnelle irrévocable./ Il en va de même, en cas de recours contre une décision prévue par une législation connexe donnant lieu à une réalisation différée des travaux dans l'attente de son obtention. ".

4. Ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus au point 1, la société Prolimm est titulaire d'un permis d'aménager tacite né le 2 août 2014 du silence gardé sur la confirmation de sa demande de permis d'aménager. Ce permis était dès lors périmé le 2 août 2017 en application des dispositions précitées, la société Prolimm n'ayant entrepris qu'à partir de l'année 2019 les travaux autorisés. Si elle reprend la chronologie des différents contentieux engagés, aucun recours n'a été introduit contre ce permis d'aménager tacite et elle ne peut ainsi, en tout état de cause, bénéficier des dispositions de l'article R. 424-19 du code de l'urbanisme. Il ne ressort pas plus des pièces du dossier que la société Prolimm ait pu estimer se trouver dans une situation d'incertitude juridique justifiant qu'elle s'abstienne d'entreprendre les travaux d'aménagement autorisés. S'il est vrai que le maire a rejeté implicitement sa demande de certificat de permis d'aménager reçue le 13 mars 2017, et si le conseil de la commune a également contesté l'existence d'une autorisation tacite par un courrier du 10 juillet 2017, ces circonstances, intervenues au demeurant peu de temps avant l'expiration du délai de péremption de trois ans et qui n'avaient pas pour effet, par elles-mêmes, de faire obstacle au démarrage des travaux, ne peuvent être regardées comme constitutives d'un fait de l'administration de nature à interrompre le délai de péremption. La société Prolimm ne peut enfin utilement faire état des indications données par la commune après le 2 août 2017, date à laquelle le permis tacite était caduc. Dans ces conditions, le permis tacite était caduc à la date à laquelle la société intimée a réalisé ses travaux. Le maire de Saint-Michel-sur-Rhône était par suite fondé à contester pour ce motif la déclaration attestant l'achèvement et la conformité des travaux déposée par la pétitionnaire et c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que le fait de l'administration avait interrompu le délai de péremption du permis.

5. En second lieu, aux termes de l'article L. 462-1 du code de l'urbanisme : " À l'achèvement des travaux de construction ou d'aménagement, une déclaration attestant cet achèvement et la conformité des travaux au permis délivré ou à la déclaration préalable est adressée à la mairie ". Aux termes de l'article R. 462-2 du code de l'urbanisme : " La déclaration précise si l'achèvement concerne la totalité ou une tranche des travaux. / (...) ".

6. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les deux lots pour lesquels l'achèvement a été déclaré comporteraient tous les réseaux nécessaires, ni que les accès auraient été réalisés, de sorte qu'ils auraient pu être regardés comme une tranche de travaux divisible de l'ensemble de l'opération. Par suite, c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que le maire de la commune de Saint-Michel-sur-Rhône ne pouvait opposer à la société Prolimm l'absence de caractère divisible des travaux réalisés pour contester sa déclaration d'achèvement et de conformité des travaux.

7. Aucun autre moyen n'a été invoqué devant le tribunal administratif de Lyon par la société Polimm à l'appui de sa demande, dont la cour se trouverait saisie par l'effet dévolutif de l'appel.

8. Il résulte de ce qui précède que la commune de Saint-Michel-sur-Rhône est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 5 juin 2019 de son maire contestant l'achèvement et la conformité des travaux.

Sur les frais d'instance :

9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la commune de Saint-Michel-sur-Rhône tendant à la mise à la charge de la société Prolimm des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1909090 du 19 janvier 2021 du tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Lyon par la société Prolimm est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Saint-Michel-sur-Rhône au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Michel-sur-Rhône et à la société Prolimm.

Délibéré après l'audience du 20 septembre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,

Mme Camille Vinet, présidente-assesseure,

Mme Burnichon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 octobre 2022.

La rapporteure,

C. VinetLa présidente,

M. A...

La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY00884


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00884
Date de la décision : 11/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-02-04-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Procédures d'intervention foncière. - Lotissements. - Réalisation du lotissement.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: Mme Camille VINET
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : CARNOT AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-10-11;21ly00884 ?
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