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06/10/2022 | FRANCE | N°21LY03173

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 06 octobre 2022, 21LY03173


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... B... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2020 par lequel le préfet de la Loire a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2100100 du 17 mai 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 27 septembre 2021, Mme C..

., représentée par Me Vray, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler ces...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... B... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2020 par lequel le préfet de la Loire a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2100100 du 17 mai 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 27 septembre 2021, Mme C..., représentée par Me Vray, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Loire de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir et de la munir, dans un délai de huit jours, d'une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat et au bénéfice de son conseil une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- elle méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 août 2022, la préfète de la Loire conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 août 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Courbon, présidente-assesseure,

- et les observations de Me Vray, représentant Mme C... ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante albanaise née le 23 mars 1966, est entrée irrégulièrement en France le 3 octobre 2017, selon ses déclarations, et a sollicité la reconnaissance du statut de réfugié. Sa demande a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 19 février 2018, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 18 juillet 2018. Le préfet de la Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination par un arrêté du 25 octobre 2019. Le 25 mars 2019, Mme C... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a été admise au séjour du 25 novembre 2019 au 21 avril 2020. Le 20 mai 2020, elle a de nouveau sollicité son admission au séjour sur le même fondement. Par un arrêté du 24 juillet 2020, le préfet de la Loire a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement du 17 mai 2021, dont Mme C... relève appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, l'arrêté contesté vise le 1° de l'article L. 313-11 et le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il indique que par un avis du 16 juillet 2020, le collège de médecins de l'office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que si l'état de santé de Mme C... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressée, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays dont elle est originaire, peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, et précise qu'aucune pièce ne vient contredire utilement cet avis. Dans ces conditions, cet arrêté comporte l'énoncé des circonstances de fait et de droit qui en constituent le fondement, et est, par suite, suffisamment motivé, alors même qu'il ne rappelle pas la situation administrative des enfants de l'intéressée résidant sur le territoire français.

3. En deuxième lieu, il ne ressort ni des termes de l'arrêté contesté ni d'aucune pièce du dossier que le préfet de la Loire se serait abstenu de procéder à un examen particulier de la situation de Mme C... avant de refuser de l'admettre au séjour.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".

5. Mme C... fait valoir qu'elle a présenté, en mai 2018, une brutale altération de son état de santé associée à des symptômes prodromaux comportant un repli sur soi, des céphalées, des troubles mnésiques, un mutisme puis une perte du langage et une perte des interactions relationnelles, qu'elle bénéficie depuis lors d'un traitement médicamenteux à base d'anxiolytiques et d'antidépresseurs et qu'elle est dépendante pour la vie quotidienne de l'aide apportée par sa famille. Il ressort toutefois des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit au point 2, que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé, dans son avis du 16 juillet 2020, que si l'état de santé de Mme C... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressée peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. A l'appui de sa demande, Mme C... a produit des certificats médicaux établis par des médecins psychiatres du centre hospitalier universitaire de Saint-Etienne ainsi que des ordonnances des médicaments qui lui sont prescrits. Toutefois, ni ces certificats, qui se bornent à décrire les symptômes présentés par l'intéressée et à indiquer que sa famille s'est opposée à tout examen complémentaire et qu'elle n'est pas apte à effectuer des démarches administratives, ni ces ordonnances ne permettent d'établir que les soins rendus nécessaires par l'état de santé de Mme C... ne pourraient lui être prodigués en Albanie, ni qu'elle ne pourrait voyager vers ce pays. Si la requérante fait valoir qu'elle a été admise au séjour pour motifs de santé du 25 novembre 2019 au 21 avril 2020, cette circonstance, compte tenu notamment de l'évolution de sa pathologie et du système de santé dans son pays d'origine, n'est pas de nature à démontrer qu'elle ne pouvait bénéficier, à la date de la décision attaquée, d'un traitement approprié en Albanie. En outre Mme C..., dont la demande d'asile, a, au demeurant, été rejetée, n'établit pas que son état de santé serait en lien avec des évènements traumatisants vécus dans son pays d'origine, ni qu'un retour dans ce pays serait susceptible d'aggraver sa pathologie. Enfin, si la requérante fait état du caractère selon elle inégalitaire du système de santé en Albanie, elle ne produit à l'appui de ses affirmations aucune précision, notamment sur ses propres revenus, de nature à démontrer qu'elle ne pourrait bénéficier effectivement dans son pays d'origine d'un traitement approprié à son état de santé. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 ne peut qu'être écarté.

6. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. Mme C... se prévaut de la présence sur le sol français de son mari, M. A... C..., ainsi que de sa fille, qui réside en France sous couvert d'une carte de résident et de son fils, dont la situation administrative est en cours de régularisation. Il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme C... n'a été admise au séjour en France que durant l'examen de sa demande d'asile puis, compte tenu de son état de santé, durant une période de six mois. Si l'arrêté portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français dont son époux a fait l'objet a été annulé par un arrêt de la cour du 6 mai 2021, cette décision implique uniquement, comme elle le mentionne expressément, un réexamen de la situation de l'intéressé et ne lui reconnaît pas un droit au séjour. En outre, le fils de la requérante fait également l'objet d'une décision portant refus de titre de séjour assortie d'une mesure d'éloignement dont la légalité a été confirmée par un arrêt de ce jour. Mme C... ne produit par ailleurs aucun élément permettant d'établir que sa fille serait la seule personne pouvant lui apporter l'assistance rendue nécessaire par son état de santé, ni qu'elle ne pourrait bénéficier d'une assistance suffisante dans son pays d'origine. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que la requérante ne pourrait poursuivre sa vie privée et familiale avec son époux en Albanie, où elle-même a vécu jusqu'à l'âge de cinquante-et-un an et où elle a nécessairement conservé des attaches familiales et personnelles. Par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision de refus de délivrance de titre de séjour contestée ne porte pas au droit de Mme C... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La requérante n'est pas davantage fondée à soutenir que cette décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

DÉCIDE:

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié Mme D... B... épouse C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de la Loire.

Délibéré après l'audience du 15 septembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Courbon, présidente assesseure,

Mme Caraës, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 octobre 2022.

La rapporteure,

A. Courbon

Le président,

D. Pruvost

La greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY03173


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY03173
Date de la décision : 06/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Audrey COURBON
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : VRAY

Origine de la décision
Date de l'import : 16/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-10-06;21ly03173 ?
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