Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme A... E... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 29 novembre 2018 par lequel le maire d'Ecully a refusé de lui délivrer un permis de détention d'un chien de 2ème catégorie, ensemble la décision implicite rejetant son recours gracieux.
Par jugement n° 1903076 du 10 juin 2020, le tribunal a fait droit à sa demande et a enjoint au maire d'Ecully de délivrer un permis de détention pour un chien de 2ème catégorie dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 3 août 2020, la commune d'Ecully, représentée par Me Lamouille, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme E... devant le tribunal ;
3°) de mettre à la charge de Mme E... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier dans la mesure où le tribunal a relevé d'office, sans en informer les parties en méconnaissance de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration ;
- l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration n'a pas lieu de s'appliquer aux demandes de permis de détention d'un chien de 2ème catégorie ;
- il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le chien était à jour des obligations de vaccination antirabique et que Mme E... disposait d'un casier B2 vierge de toute mention ;
- il pouvait, sur le fondement de ses pouvoirs de police générale, refuser le permis sollicité compte tenu du risque avéré d'atteinte à la sécurité publique liée à la présence de chiens dangereux sur le territoire de la commune et du fait que le chien de Mme E... appartient à une race de chiens dangereux.
Par mémoire enregistré le 16 novembre 2020, Mme E..., représentée par Me Combaret, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la commune d'Ecully une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- les moyens soulevés par la commune d'Ecully ne sont pas fondés ;
- contrairement à ce qu'a indiqué le tribunal, le certificat de vaccination était bien joint au dossier de demande adressé à la commune.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- les conclusions de M. Savouré, rapporteur public,
- les observations de Me Lamouille pour la commune d'Ecully, et celles de Me Perrouty pour Mme E... ;
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 29 novembre 2018, le maire d'Ecully a refusé de délivrer un permis de détention d'un chien de 2ème catégorie à Mme E..., habitante de la commune et propriétaire d'un mâle de race Rottweiler né le 1er septembre 2017. A la demande de l'intéressée, le tribunal administratif de Lyon a, par un jugement du 10 juin 2020, dont la commune d'Ecully relève appel, annulé cet arrêté et enjoint au maire de lui délivrer le permis de détention sollicité.
Sur la régularité du jugement :
2. Le tribunal a indiqué que la commune d'Ecully n'était pas fondée à demander que soit substitué au motif figurant dans l'arrêté litigieux le motif tiré de ce que la demande de Mme E... n'était pas complète dans la mesure où la commune n'avait pas mis en œuvre la procédure prévue à l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration. Ce faisant, le tribunal n'a pas relevé d'office un moyen qu'il aurait été tenu de communiquer aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, mais s'est borné à examiner le bien-fondé de la demande de substitution de motif dont l'avait saisi la commune d'Ecully.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. Aux termes de l'article L. 211-14 du code rural et de la pêche maritime : " I.- (...) la détention des chiens mentionnés à l'article L. 211-12 est subordonnée à la délivrance d'un permis de détention par le maire de la commune où le propriétaire ou le détenteur de l'animal réside (...) / II.- La délivrance du permis de détention est subordonnée à la production : 1° De pièces justifiant : (...) / b) De la vaccination antirabique du chien en cours de validité (...) / 2° De l'évaluation comportementale prévue au II de l'article L. 211-13-1 (...) / Si les résultats de l'évaluation le justifient, le maire peut refuser la délivrance du permis de détention (...) ". Aux termes de l'article D. 211-3-2 de ce code : " Le vétérinaire en charge de l'évaluation comportementale classe le chien à l'un des quatre niveaux de risque de dangerosité suivants : Niveau 1 : le chien ne présente pas de risque particulier de dangerosité en dehors de ceux inhérents à l'espèce canine. Niveau 2 : le chien présente un risque de dangerosité faible pour certaines personnes ou dans certaines situations. Niveau 3 : le chien présente un risque de dangerosité critique pour certaines personnes ou dans certaines situations. Niveau 4 : le chien présente un risque de dangerosité élevé pour certaines personnes ou dans certaines situations. / Selon le niveau de classement du chien, le vétérinaire propose des mesures préventives visant à diminuer la dangerosité du chien évalué et émet des recommandations afin de limiter les contacts avec certaines personnes et les situations pouvant générer des risques (...) ".
4. Pour refuser de délivrer à Mme E... le permis de détention qu'elle avait sollicité, le maire d'Ecully s'est fondé sur le fait que des arrêtés municipaux réglementant la circulation des chiens sur le territoire de la commune avaient été adoptés en mars 2010 et qu'il avait été constaté de plus en plus d'incivilités et d'infractions à ces règles. Il a noté que le chien de l'intéressée était un chien de catégorie 2, ce qui signifie que c'est un chien dangereux au sens de la loi et que l'évaluation comportementale du chien, qui l'avait classé en niveau 1 sur 4, conseillait au propriétaire de faire un stage de connaissance de l'animal et de poursuivre son éducation et notait que le chien présentait les risques inhérents de l'espèce canine. Le maire en a conclu qu'il n'était pas certain que le chien ne présente pas de risque pour son propriétaire et la population de la commune et qu'il convenait, en application du principe de précaution et de l'intérêt général, de refuser d'accorder le permis sollicité.
5. Il ressort des pièces du dossier, ainsi que l'a indiqué le tribunal, que le chien de Mme E... a été classé au niveau 1 de risque de dangerosité de l'animal, c'est-à-dire, d'après les dispositions de l'article D. 211-3-2 du code rural et de la pêche maritime précitées, qu'il ne présente pas de risque particulier en dehors de ceux inhérents à l'espèce canine. Par ailleurs, le vétérinaire en charge de son examen n'a préconisé aucune mesure préventive spéciale mais seulement conseillé à sa propriétaire de suivre un stage de connaissance du chien et de parfaire à son éducation par toute méthode adéquate. Dans ces conditions, et alors que la délivrance du permis de détention d'un chien ne relève pas des pouvoirs de police générale du maire, mais de ses pouvoirs de police spéciale tels que prévus à l'article L. 211-14 du code rural et de la pêche maritime précité et que les cas dans lesquels une telle demande peut être rejetée sont énumérés par cet article, c'est à juste titre que le tribunal a estimé qu'en retenant, pour refuser la délivrance du permis, " qu'il n'est pas certain que le chien de Mme E... ne présente pas de risque pour son propriétaire ou pour la population éculloise ", le maire d'Ecully a entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.
6. Devant le tribunal, le maire d'Ecully a sollicité que soit substitué au motif initial de l'arrêté le motif tiré de ce que le dossier de Mme E... n'était pas complet car il ne comportait pas la pièce justifiant la vaccination antirabique du chien et l'extrait B2 du casier judiciaire de la requérante. Toutefois, d'une part, il ne ressort pas des pièces du dossier que la pièce justifiant la vaccination antirabique du chien n'avait pas été produite par Mme E... à l'appui de sa demande dans la mesure où le formulaire CERFA qu'elle a rempli faisait état de la présence de cette pièce dans son dossier et que la commune ne lui a pas, au moment du dépôt de sa demande, réclamé cette pièce. D'autre part, et ainsi que l'a indiqué le tribunal, la production de l'extrait B2 du casier judiciaire n'est pas exigée par l'article L. 211-14 du code rural et de la pêche maritime. Par suite, et alors au demeurant que les dispositions de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration, qui étaient applicables en l'espèce, imposent à l'administration d'inviter l'auteur d'une demande à fournir les pièces qui doivent accompagner sa demande à peine d'illégalité de la décision de rejet motivée par l'absence de ces pièces, c'est à juste titre que le tribunal a rejeté cette demande de substitution de motifs.
7. Devant la cour, le maire fait valoir qu'il n'est pas établi que le chien était à jour des obligations de vaccination antirabique et que Mme E... disposait d'un casier B2 vierge de toute mention. Toutefois, d'une part, le passeport pour animal de compagnie de l'animal, qui fait apparaître qu'il était à jour de ses vaccinations antirabiques a été produit devant le tribunal. D'autre part, si en application de l'article 777-2 du code de procédure pénale, toute personne peut obtenir communication orale du relevé intégral des mentions du casier judiciaire la concernant, la copie de ce relevé intégral ne peut être délivrée qu'à certaines autorités publiques et à certains employeurs. Ainsi, il ne saurait être fait grief à Mme E..., qui a attesté que son casier judiciaire était vierge de toute mention, de ne pas l'établir. Par suite, il ne peut être fait droit à cette nouvelle demande de substitution de motifs.
8. Il résulte de ce qui précède que la commune d'Ecully n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a fait droit à la demande de Mme B... C... en annulant l'arrêté en litige et en enjoignant au maire de lui délivrer le permis sollicité. La requête de la commune doit être rejetée en toutes ses conclusions. Il y a lieu, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à sa charge la somme de 2 000 euros à verser à Mme E....
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune d'Ecully est rejetée.
Article 2 : La commune d'Ecully versera à Mme E... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... E... et à la commune d'Ecully.
Délibéré après l'audience du 15 septembre 2022, à laquelle siégeaient :
M. Arbarétaz, président,
Mme Evrard, présidente assesseure,
Mme Duguit-Larcher, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 octobre 2022.
La rapporteure,
A. D...Le président,
Ph. Arbarétaz
Le greffier,
J. Billot
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
Le greffier,
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N° 20LY02153