La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/09/2022 | FRANCE | N°21LY03288

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 29 septembre 2022, 21LY03288


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 30 novembre 2020 par lequel la préfète de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2100191 du 17 mai 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 octobre 2021, Mme B..., représentée par Me

Messaoud, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;

2°) d'enjoindre à la préfè...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 30 novembre 2020 par lequel la préfète de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2100191 du 17 mai 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 12 octobre 2021, Mme B..., représentée par Me Messaoud, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;

2°) d'enjoindre à la préfète de l'Ain de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande après lui avoir délivré une autorisation provisoire de séjour ; à titre infiniment subsidiaire, en cas d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, d'enjoindre à la préfète de l'Ain de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa situation ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

Sur le refus de titre de séjour :

- les stipulations du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ont été méconnues ;

- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;

- les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ont été méconnues ainsi que celles du 2° et du 3° de l'article 24 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

- elle est illégale en raison de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense enregistré le 18 mars 2022, la préfète de l'Ain conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 septembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Bentéjac, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante algérienne née le 13 février 1983, est entrée en France le 13 mars 2018, accompagnée de son époux et de leurs trois enfants mineurs. A la suite du décès de son époux le 6 janvier 2020, Mme B... a sollicité son admission au séjour. Par un arrêté du 30 novembre 2020, la préfète de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme B... relève appel du jugement du 17 mai 2021 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Aux termes de l'article 24 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " (...) 2. Dans tous les actes relatifs aux enfants, qu'ils soient accomplis par des autorités publiques ou des institutions privées, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. 3. Tout enfant a le droit d'entretenir régulièrement des relations personnelles et des contacts directs avec ses deux parents, sauf si cela est contraire à son intérêt. ".

3. Mme B... fait valoir qu'elle est entrée sur le territoire français en 2018, accompagnée de ses trois enfants mineurs, nés en 2004, 2008 et 2013, scolarisés en France, et de son époux, qui a bénéficié de soins sur le territoire français jusqu'à son décès le 6 janvier 2020. Toutefois, Mme B... n'a été admise au séjour que le temps nécessaire aux soins nécessités par l'état de santé de son époux. Elle est entrée récemment sur le territoire français et n'établit pas être dépourvue d'attaches privées et familiales dans son pays d'origine, où elle a vécu pour l'essentiel. En outre, la requérante ne justifie pas, par la seule production d'une promesse d'embauche et la circonstance qu'elle aurait participé à des actions de bénévolat, d'une intégration particulière dans la société française. Il ne ressort pas des pièces du dossier que ses enfants, scolarisés à la date de la décision attaquée respectivement en classe de seconde professionnelle " systèmes numériques ", de cinquième et première année de cours élémentaire, ne pourraient pas poursuivre leur scolarité dans leur pays d'origine, où ils ont été scolarisés jusqu'en 2018, et où la cellule familiale, composée de la requérante et de ses trois enfants, tous de même nationalité, peut se reconstituer. Au vu de l'ensemble de ces circonstances, et notamment de la durée et des conditions de séjour de l'intéressée, la décision contestée n'a pas porté au droit de Mme B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts qu'elle poursuit. Dès lors, cette décision n'a méconnu ni les stipulations du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien, ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, la décision portant refus de titre de séjour opposé à la requérante, qui n'a ni pour objet ni pour effet de la séparer de ses enfants, n'a pas porté, à l'intérêt supérieur de ceux-ci, une atteinte méconnaissant les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant ou celles de l'article 24 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

4. En premier lieu, il résulte de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé que Mme B... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de ce refus à l'encontre de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.

5. En deuxième lieu, en l'absence de toute argumentation supplémentaire, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été énoncés au point 3, le moyen tiré de la méconnaissance, par la décision portant obligation de quitter le territoire français, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

6. En troisième lieu, il résulte des circonstances de fait énoncées au point 3 qu'en obligeant Mme B... à quitter le territoire français, la préfète de l'Ain n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

7. Il résulte de l'examen de la légalité de l'obligation de quitter le territoire français que Mme B... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de cette mesure d'éloignement à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision désignant le pays de renvoi. Cette dernière décision n'ayant été prise ni en application ni sur le fondement du refus de titre de séjour, Mme B... ne saurait utilement exciper de l'illégalité de ce refus à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée à la préfète de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 8 septembre 2022, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Stillmunkes, président assesseur,

Mme Bentéjac, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 septembre 2022.

La rapporteure,

C. Bentéjac

Le président,

F. PournyLa greffière,

F. Abdillah

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY03288


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY03288
Date de la décision : 29/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: Mme Caroline BENTEJAC
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : MESSAOUD

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-09-29;21ly03288 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award