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22/09/2022 | FRANCE | N°20LY03507

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 22 septembre 2022, 20LY03507


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... et Mme D... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011, 2012 et 2013, ainsi que des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1802091 du 2 octobre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 1er décembre 2

020 et le 15 septembre 2021, M. C... et Mme D..., représentés par Me Fouquet-Chabert, demandent à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. C... et Mme D... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011, 2012 et 2013, ainsi que des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1802091 du 2 octobre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 1er décembre 2020 et le 15 septembre 2021, M. C... et Mme D..., représentés par Me Fouquet-Chabert, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la réduction de ces impositions et des pénalités correspondantes ;

3°) d'en ordonner le remboursement assorti des intérêts moratoires ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la procédure d'imposition suivie avec la SAS Lecheres Invests est irrégulière au regard de l'article L. 57 A du livre des procédures fiscales, l'administration n'ayant pas respecté le délai de soixante jours pour répondre à ses observations au titre des exercices clos en 2013 et 2014 ;

- certaines des dépenses de la SAS Lecheres Invests, considérées comme des revenus taxables entre ses mains, ont été exposées pour les besoins de l'activité de cette société et non dans l'intérêt personnel de M. C... ;

- la majoration pour manquement délibéré n'est pas fondée.

Par un mémoire, enregistré le 3 juin 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par les appelants ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 7 juin 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 8 juillet 2022 en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pin, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Lecheres Invests, dont M. C... était président et détenait 90 % des parts, qui avait pour activité la location de machines industrielles, la ventes d'outils et la fourniture de prestations annexes à destination d'un unique client, la société Bamarec SRL, société de droit roumain, filiale de la société Bamarec Precision Components Europe, dont M. C... détenait également 20 % des parts, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant, en matière d'impôt sur les sociétés, sur les exercices clos les 31 décembre 2011, 2012 et 2013, à l'issue de laquelle le vérificateur a réintégré dans les résultats de chacun de ces exercices, des dépenses à caractère personnel de ses deux associés prises en charge par cette société. Tirant les conséquences de ces constatations sur la situation personnelle de M. C..., l'administration a inclus dans ses revenus imposables des années 2011, 2012 et 2013, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, les sommes correspondant aux dépenses personnelles de l'intéressé qu'elle a regardées comme des distributions occultes imposables entre ses mains sur le fondement du c. de l'article 111 du code général des impôts. En conséquence, M. C... et son épouse ont été assujettis, selon la procédure contradictoire, à des compléments d'impôt sur le revenu au titre de ces années et à des contributions sociales, assortis des intérêts de retard et de la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue par le a. de l'article 1729 du code général des impôts. Par un jugement du 2 octobre 2020, dont M. C... et Mme D... relèvent appel, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à la réduction de ces impositions et des pénalités correspondantes.

Sur la régularité de la procédure d'imposition suivie avec la SAS Lecheres Invests :

2. L'irrégularité de la procédure d'imposition suivi avec une société imposable à l'impôt sur les sociétés est sans influence sur la régularité des compléments d'impôt sur le revenu mis à la charge des associés, alors même qu'ils procèdent d'une rectification des bases de cette société à l'impôt sur les sociétés. Ainsi, M. C... et Mme D... ne peuvent utilement se prévaloir d'une irrégularité dans la procédure d'imposition suivie avec la SAS Lecheres Invests pour contester la régularité de la procédure d'imposition suivie à leur encontre.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

3. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ". Aux termes de l'article 54 bis du même code : " Les contribuables visés à l'article 53 A (...) doivent obligatoirement inscrire en comptabilité, sous une forme explicite, la nature et la valeur des avantages en nature accordés à leur personnel ". Il résulte de ces dispositions que les avantages en nature accordés par une société à son personnel, y compris ses dirigeants, doivent être, conformément aux prescriptions de l'article 54 bis du code général des impôts, inscrits explicitement comme tels en comptabilité. A défaut, ils constituent des avantages occultes au sens de c. de l'article 111 du code général des impôts, imposables entre les mains du bénéficiaire dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers et non déductibles des bénéfices de la société.

4. Il résulte de l'instruction, en particulier de la proposition de rectification du 22 décembre 2014 adressée à M. C... et à Mme D..., qu'après avoir rappelé que des charges, d'un montant de 18 310 euros en 2011, 34 585 euros en 2012 et 42 845 euros en 2013 correspondant à des dépenses de déplacements et de réception ainsi qu'à des dépenses à caractère personnel de ses deux associés, avaient été réintégrées dans les résultats de la SAS Lecheres Invests au motif qu'elles n'avaient pas été exposées dans l'intérêt direct de l'entreprise, l'administration a considéré que celles de ces sommes correspondant aux frais de déplacement, d'hôtellerie et de restauration exposées au profit de M. C..., son dirigeant, pour des montants de 4 595 euros en 2011, 5 407 euros en 2012 et 9 813 euros en 2013, représentaient des avantages en nature qui, n'étant pas identifiés comme tels dans la comptabilité de l'entreprise, constituaient des avantages occultes imposables au nom de M. C..., leur bénéficiaire, sur le fondement du c. de l'article 111 du code général des impôts.

5. Pour considérer que ces frais n'avaient pas été exposés dans l'intérêt direct de l'entreprise, l'administration a relevé que ces dépenses n'étaient assorties d'aucune pièce justificative permettant d'identifier leur caractère professionnel et ce alors que les frais de restauration, comprenant pour certains des " menus enfant " ainsi que les frais d'hôtellerie avaient été exposés en Suisse ou en Haute-Savoie, les week-ends, et que les frais de déplacement à Paris n'étaient pas assortis des pièces justificatives permettant d'identifier l'objet de ces déplacements et des rencontres alléguées. Si M. C... reconnaît que la plupart des dépenses en cause, prises en charge par la SAS Lecheres Invests, présentent un caractère personnel, il fait valoir, pour certaines d'entre elles, que la circonstance que des repas ont été organisés le week-end, en présence des épouses et enfants de ses partenaires d'affaires, n'enlève en rien leur caractère professionnel. Les pièces qu'il produit, qui consistent en des tickets de caisse et des notes de frais, sont toutefois insuffisantes à permettre de tenir pour établi l'objet professionnel des frais de restauration et d'hôtellerie en litige. En outre, s'il soutient que parmi les sommes dont l'administration considère qu'elles doivent être imposées entre ses mains, figure une dépense de 688,12 euros correspondant à une facture d'hôtel aux Etats-Unis dont il s'avère qu'elle a été refacturée à la société Bamarec SRL en 2017, il ne produit toutefois pas la facture originelle dont s'agit. Enfin, s'il produit à l'instance une attestation du président de la société Akya Consulting faisant état de sa participation à des réunions au cours des années 2012 et 2013 dans les locaux de cette entreprise à Paris, cette attestation, rédigée le 12 février 2015 pour les besoins de la cause, n'est pas suffisante à justifier du caractère professionnel des frais de déplacements de M. C... à destination de Paris, non plus que la circonstance que ces frais ont été, en 2017, refacturés à la société Bamarec SRL. Il en résulte que l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe, que les frais en litige, qui présentent le caractère de dépenses personnelles, n'ont pas été engagées dans l'intérêt de l'entreprise. Il est constant que ces frais n'ont pas été comptabilisés conformément aux dispositions de l'article 54 bis du code général des impôts. C'est par suite à bon droit que l'administration a inclus les sommes en litige dans les revenus imposables des années 2011, 2012 et 2013 de M. C... et de Mme D... sur le fondement du c. de l'article 111 du code général des impôts.

Sur les pénalités :

6. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".

7. Pour justifier l'application de la majoration de 40 % prévue au a. de l'article 1729 du code général des impôts aux compléments d'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquels M. C... et Mme D... ont été assujettis au titre des années 2011, 2012 et 2013, l'administration s'est fondée sur la nature des dépenses en cause prises en charge par la SAS Lecheres Invests correspondant à des frais et retraits d'espèces non justifiés par des factures, des frais de déplacement dont le caractère strictement professionnel n'est pas démontré et des frais de restauration le week-end avec " menu enfant ", ainsi que sur les fonctions de dirigeant exercées par M. C..., qui ne pouvait ignorer ni l'existence d'avantages occultes ni le fait que ces sommes étaient imposables entre ses mains au titre de chacune des années concernées, et le caractère répété des faits sur les années 2011 à 2013. Ce faisant, l'administration doit être regardée comme ayant établi la volonté des contribuables d'éluder les impositions dont ils étaient redevables, justifiant ainsi l'application de la majoration pour manquement délibéré en litige sans que les appelants puissent utilement se prévaloir de ce que l'autre associée aurait remboursé la SAS Lecheres Invest, à hauteur de 50 000 euros, dès 2014.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande. Leurs conclusions tendant au remboursement des impositions en litige assorti des intérêts moratoires et celles présentées au titre des frais du litige doivent en conséquence être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... et Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et Mme A... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 1er septembre 2022 à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président,

Mme Courbon, présidente-assesseure,

M. Pin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 septembre 2022.

Le rapporteur,

F.-X. PinLe président,

D. Pruvost

La greffière,

A.-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 20LY03507


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY03507
Date de la décision : 22/09/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-03-01 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. - Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. François-Xavier PIN
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : JOUANJAN et PARTNERS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-09-22;20ly03507 ?
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