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08/08/2022 | FRANCE | N°20LY01944

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 08 août 2022, 20LY01944


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013, ainsi que des pénalités correspondantes, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1905940 du 12 juin 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes.

Proc

édure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 juillet 2020 et ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013, ainsi que des pénalités correspondantes, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1905940 du 12 juin 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 23 juillet 2020 et le 31 mai 2021, M. A..., représenté par Me Chareyre, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013, ainsi que des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- s'agissant des revenus distribués, il n'était pas le maître de la société Coco and Co, dont il n'a été gérant que pendant un mois et demi et dont il n'a jamais eu le contrôle, aucune somme provenant de la société n'ayant d'ailleurs été encaissée sur ses comptes bancaires ;

- s'agissant des revenus d'origine indéterminée, il a justifié de l'origine de ses crédits bancaires ;

- les pénalités ne sont pas justifiées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 décembre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Le Frapper, première conseillère,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. A l'issue d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, l'administration fiscale a assujetti M. A..., selon proposition de rectification du 24 août 2015, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2012 et 2013, assorties de pénalités, au titre notamment de revenus d'origine indéterminée. Par une seconde proposition de rectification du 17 décembre 2015, elle l'a assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, assorties de pénalités, au titre des mêmes années, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, du fait de la réintégration de revenus réputés distribués par l'EURL Coco and Co, dont M. A... a été le gérant du 16 juillet 2012 au 30 août 2012, date de clôture de sa liquidation amiable. Les rectifications ayant été pour l'essentiel maintenues, M. A... a saisi le tribunal administratif de Lyon d'une demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des impositions en litige. Il relève appel du jugement du 12 juin 2020 par lequel ce tribunal a rejeté ses demandes.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne les revenus réputés distribués :

2. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices (...) ".

3. Pour soumettre le rehaussement des résultats d'une société à l'impôt sur le revenu entre les mains de son bénéficiaire, sur le fondement du 2° précité du 1 de l'article 109 du code général des impôts, il incombe à l'administration d'établir que de tels revenus ont été mis à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts. La circonstance que le contribuable que l'administration entend imposer soit le maître de l'affaire est à cet égard sans incidence.

4. Il résulte de l'instruction que, pour imposer M. A... à l'impôt sur le revenu, sur le seul fondement du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, du fait des sommes correspondant aux rectifications notifiées à l'EURL Coco and Co pour la période postérieure au 16 juillet 2012 en matière d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée, l'administration fiscale, qui ne conteste pas, par ailleurs, l'absence de ces sommes sur les comptes bancaires personnels de M. A..., s'est bornée à faire valoir que le contribuable était le véritable maître de l'affaire. Elle n'apporte ainsi pas la preuve, qui lui incombe, de l'appréhension effective par l'intéressé, qui la conteste, des revenus réputés distribués par l'EURL Coco and Co.

5. Par suite, M. A... est fondé à demander la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013 dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers du fait des revenus réputés distribués par l'EURL Coco and Co, et la réformation sur ce point du jugement attaqué.

En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée :

6. M. A..., qui ne conteste pas avoir été régulièrement taxé d'office en application des articles L. 16 et L. 69 du même livre, supporte la charge de la preuve en application de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales.

7. En premier lieu, M. A... n'apporte toujours aucune justification se rapportant au dépôt d'un chèque de 1 250 euros le 4 avril 2012, et reconnaît ne pas être en mesure d'identifier à quelle opération correspond la remise d'un chèque de 940 euros le 24 mai 2013.

8. En deuxième lieu, M. A... soutient que des dépôts de chèques de 1 850 euros, 2 235 euros, 8 000 euros, 3 000 euros, 750 euros, 850 euros et 1 250 euros correspondent à des ventes de divers meubles d'occasion, bibelots, ou encore d'un portail en fer forgé avec pilier en pierre, et produit en appel des attestations d'acquéreurs. Il ne justifie toutefois pas de la propriété antérieure des biens en cause, et ne démontre en particulier ni avoir été en droit de vendre un fauteuil provenant d'un bar dont il n'était plus associé, ni être entré en possession de certains biens du fait de l'activité de brocanteurs qui aurait été exercée par ses parents. En outre, contrairement à ce qui est soutenu, les discordances constatées à deux reprises entre le nom de l'acquéreur allégué et le nom pour le compte duquel a été établi le chèque en cause est de nature à contredire utilement les allégations de M. A... quant à l'origine des sommes correspondantes. Par suite, la cause de ces différents crédits bancaires est insuffisamment justifiée.

9. En troisième lieu, M. A... soutient qu'un crédit de 20 000 euros en provenance de la société L'Osmose, le 18 février 2012, correspond au paiement des parts sociales de cette société, cédées le 28 décembre 2011, simultanément avec celles de son associé, à deux personnes physiques. En se bornant à produire l'acte de cession, M. A..., qui détenait 51% des parts de la société et ne devait percevoir, à ce titre, qu'une somme de 10 200 euros, ne démontre pas que le crédit bancaire en litige correspondrait effectivement au produit de cette cession, dont le contrat de vente prévoyait d'ailleurs un paiement échelonné en cinq mensualités. Si M. A... fait en outre valoir que la circonstance que l'émetteur du virement soit la société cédée, et non les acquéreurs, s'expliquerait par le crédit de leurs comptes courants d'associés par les acquéreurs, il n'en justifie pas davantage. La cause de ce crédit bancaire est, dès lors, insuffisamment justifiée.

10. En quatrième lieu, si M. A... soutient qu'un autre crédit de 20 000 euros aurait été émis par le vendeur d'un bien immobilier qu'il aurait acquis avec sa compagne, en dédommagement du sous-dimensionnement d'une fosse septique, il ne justifie ni de l'origine de cette somme ni de la réalité d'un tel accord transactionnel par la seule production du chèque et d'une copie d'un courrier qu'il aurait adressé, ce qui n'est pas justifié, au vendeur du bien. La cause de ce crédit bancaire demeure ainsi injustifiée.

11. En cinquième lieu, M. A... ne démontre pas, faute de justification du débit correspondant, avoir avancé à un cousin une somme de 3 500 euros susceptible de justifier la remise ultérieure au requérant d'un chèque de 3 450 euros émis par l'acquéreur d'un véhicule vendu d'occasion par ce cousin. La cause de ce crédit bancaire demeure, dès lors, insuffisamment justifiée.

12. En sixième lieu, M. A... soutient que deux chèques de 20 000 euros et 15 000 euros correspondraient à des prêts sans intérêt lui ayant été consentis respectivement en 2012 et 2013 par l'EURL Grande pharmacie de la Part-Dieu, d'une part, et par un particulier, d'autre part, sans contrats de prêt. La réalité de ces prêts est toutefois insuffisamment justifiée par les seules attestations des prêteurs allégués, alors notamment qu'il n'est pas soutenu qu'ils auraient été intégralement remboursés à l'échéance indiquée sur ces attestations.

13. En septième lieu, la seule production d'une attestation d'un invité est insuffisante à justifier que des dépôts d'espèces de 500 et 300 euros intervenus les 8 mars 2012 et 6 juin 2012 correspondraient aux participations financières qui auraient été demandées par M. A... aux convives d'une fête qu'il prétend avoir organisée le 17 mars 2012. Ces crédits bancaires sont en conséquence insuffisamment justifiés.

14. En dernier lieu, eu égard à la concordance des dates et des montants ainsi qu'aux mentions non contestées portées sur un relevé d'opérations bancaires et sur un extrait du site Infogreffe, M. A... justifie suffisamment que deux remises d'espèces du 23 janvier 2013 d'un montant total de 2 500 euros correspondent à la contrevaleur d'un chèque de banque tiré sur son compte personnel dans le cadre de la constitution par les frères du requérant d'une société civile immobilière dénommée " Les deux frères ". Par suite, M. A... est fondé à demander la réduction de sa base imposable du montant en cause ainsi que la décharge, en droits et pénalités, des impositions correspondantes.

15. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté l'intégralité de ses demandes.

Sur les pénalités :

16. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".

17. Les rectifications opérées en matière de revenus d'origine indéterminée ont été assorties d'une pénalité sur le fondement des dispositions précitées, motivée par le caractère incomplet et non justifié de la réponse apportée à la demande d'éclaircissements, ainsi que par le caractère régulier des versements non déclarés et par l'importance disproportionnée des sommes en cause au regard des revenus déclarés par l'intéressé. L'administration établit ainsi suffisamment l'intention délibérée de M. A... d'éluder l'impôt.

Sur les frais liés au litige :

18. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : M. A... est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012 et 2013, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, au titre des revenus réputés distribués par l'EURL Coco and Co, ainsi que des pénalités correspondantes.

Article 2 : La base imposable à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales fixée à M. A... au titre de l'année 2013 est réduite d'une somme de 2 500 euros.

Article 3 : M. A... est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2013 conformément à la réduction de la base d'imposition prévue à l'article 2 du présent arrêt, ainsi que des pénalités correspondantes.

Article 4 : Le jugement n° 1905940 du tribunal administratif de Lyon du 12 juin 2020 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le surplus des conclusions est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2022, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Le Frapper, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 août 2022.

La rapporteure,

M. Le Frapper

Le président,

F. Bourrachot

La greffière,

S. Lassalle

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

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N° 20LY01944

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