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04/08/2022 | FRANCE | N°22LY00576

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 04 août 2022, 22LY00576


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand, d'une part, d'annuler l'arrêté du 16 octobre 2020 par lequel la préfète de l'Allier a rejeté sa demande de carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " en qualité de parent d'enfant français, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé Les Comores, État dont elle a la nationalité, comme pays de destination, d'autre part, d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer une car

te de séjour temporaire.

Par jugement n° 2100145 du 30 septembre 2021, le tribu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme D... a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand, d'une part, d'annuler l'arrêté du 16 octobre 2020 par lequel la préfète de l'Allier a rejeté sa demande de carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " en qualité de parent d'enfant français, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé Les Comores, État dont elle a la nationalité, comme pays de destination, d'autre part, d'enjoindre à cette autorité de lui délivrer une carte de séjour temporaire.

Par jugement n° 2100145 du 30 septembre 2021, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 18 février 2022, Mme B..., représentée par Me Presle, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ainsi que l'arrêté du 16 octobre 2020 ;

2°) d'enjoindre à la préfète de l'Allier de lui délivrer une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté litigieux est insuffisamment motivé ;

- en lui opposant l'absence de détention d'un visa de court séjour et l'absence de relation avec le père français de son enfant, le refus de délivrance de carte de séjour de plein droit en qualité de parent de Français méconnaît l'article L. 832-2 et le 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La requête a été communiquée à la préfète de l'Allier qui n'a pas présenté d'observations.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 19 janvier2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Le rapport de M. Arbarétaz, président ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

Sur les conclusions à fins d'annulation et d'injonction :

1. Mme B..., ressortissante comorienne titulaire d'un titre de séjour valable à Mayotte, mère d'une enfant française née à Mayotte en 2017, est entrée sur le territoire métropolitain, en mai 2019. En décembre 2019, elle a saisi la préfète de l'Allier d'une demande de carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " de plein droit en qualité de mère de Français. L'arrêté litigieux a rejeté sa demande au motif qu'elle n'avait pas été présentée sous couvert du visa de court séjour exigé des ressortissants comoriens séjournant régulièrement à Mayotte à leur entrée en métropole, d'une part, et que n'existait aucun lien affectif et éducatif avec le père français de son enfant, d'autre part.

2. En premier lieu, l'arrêté litigieux mentionne la référence des dispositions et énonce les motifs qui en constituent le fondement, permettant à Mme B... A... le contester utilement. Il répond ainsi aux exigences de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, et le moyen tiré de l'insuffisance de sa motivation doit être écarté comme manquant en fait.

3. En second lieu et d'une part, aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 832-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) / Les ressortissants de pays figurant sur la liste, annexée au règlement (CE) n° 539/2001 (...) des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l'obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des États membres, qui résident régulièrement à Mayotte sous couvert d'un titre de séjour n'autorisant que le séjour à Mayotte et qui souhaitent se rendre dans un autre département doivent obtenir un visa. Ce visa est délivré (...) par le représentant de l'État à Mayotte (...) ". Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article R. 832-2 du même code : " L'étranger qui sollicite le visa prévu à l'article L. 832-2 présente son document de voyage, le titre sous couvert duquel il est autorisé à séjourner à Mayotte, les documents permettant d'établir les conditions de son séjour dans le département de destination (...) / Sauf circonstances exceptionnelles, ce visa ne peut lui être délivré pour une durée de séjour excédant trois mois (...) ". Enfin, Les Comores figurent sur la liste établie à l'annexe 1 au règlement communautaire n° 539/2001 des États dont les ressortissants sont assujettis à l'obligation de visa au franchissement des frontières extérieures de l'espace Schengen.

4. Sous la qualification de " visa ", ces dispositions instituent une autorisation spéciale, délivrée par le représentant de l'État à Mayotte, que doit obtenir l'étranger titulaire d'un titre de séjour délivré à Mayotte dont la validité est limitée à ce département, lorsqu'il entend se rendre dans un autre département. La délivrance de cette autorisation spéciale, sous conditions que l'étranger établisse les moyens d'existence lui permettant de faire face à ses frais de séjour et les garanties de son retour à Mayotte, revient à étendre la validité territoriale du titre de séjour qui a été délivré à Mayotte, pour une durée qui ne peut en principe excéder trois mois. Les dispositions de l'article L. 832-2, qui subordonnent ainsi l'accès aux autres départements de l'étranger titulaire d'un titre de séjour délivré à Mayotte à l'obtention de cette autorisation spéciale, font obstacle à ce que cet étranger, s'il gagne un autre département sans avoir obtenu cette autorisation, puisse prétendre dans cet autre département à la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions de droit commun et en particulier de plein droit de la carte de séjour temporaire telle que prévue aux dispositions alors codifiées au 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

5. Il s'ensuit que la préfète de l'Allier a pu, sans méconnaître l'article L. 832-2 précité du code, refuser à Mme B... une carte de séjour temporaire en qualité de mère de Français au motif qu'elle ne détenait pas de visa de court séjour délivré à Mayotte.

6. D'autre part, aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 6° A l'étranger (...) qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans (...) / Lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent, en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, justifie que ce dernier contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du même code, ou produit une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant ".

7. En vertu de ces dispositions, la demande de titre présentée par Mme B... devait être appuyée soit des justificatifs de la contribution effective du père français aux besoins matériels et éducatifs de son enfant soit d'une décision de justice réglant les modalités de cette contribution et, à défaut, soumise à l'appréciation de l'incidence d'un refus sur la vie privée et familiale et l'intérêt supérieur de l'enfant.

8. Or, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté attaqué, les manifestations d'intérêt du père français sont inexistantes et qu'il ne contribue pas aux besoins matériels et moraux de l'enfant qu'il a reconnu, aucune décision de justice n'étant produite. Il est, dès lors, sans incidence sur l'appréciation de l'intensité des liens entretenus qu'il soit le père biologique de l'enfant qu'il a reconnu ou bien encore que l'administration se soit trompée sur le nombre les reconnaissances de paternité dont il serait l'auteur. Enfin, Mme B... ne se prévaut pas de liens d'une particulière intensité sur le territoire tandis qu'elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-sept ans aux Comores où elle a nécessairement conservé des liens. Enfin, la quasi-inexistence des liens entre l'enfant et son père français ne permet pas d'en déduire une lésion de l'intérêt supérieur de cet enfant. Il s'ensuit que la préfète de l'Allier n'a pas méconnu les dispositions citées au point 6.

9 Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande à fin d'annulation, d'injonction et d'astreinte. Les conclusions de sa requête tendant aux mêmes fins doivent être rejetées.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

10. Les conclusions présentées par Mme B..., partie perdante, doivent être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2022 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme Burnichon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 août 2022.

Le président, rapporteur,

Ph. Arbarétaz

Le président assesseur,

Ph. Seillet

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 22LY00576

al


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY00576
Date de la décision : 04/08/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: M. Philippe ARBARETAZ
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : CAP-AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-08-04;22ly00576 ?
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