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04/08/2022 | FRANCE | N°20LY03078

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 04 août 2022, 20LY03078


Vu la procédure suivante :

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoires enregistrés le 23 octobre 2020 et les 16 avril 2021 et 16 juin 2022 (ce dernier non communiqué), l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et l'association Fédération environnement durable, représentées par Me Monamy, demandent à la cour :

1°) d'annuler les articles 3, 4, 5 et 6 de l'arrêté du 18 août 2020 portant prescriptions complémentaires de l'autorisation d'exploiter l'installation de production d'électricité délivrée,

le 7 juin 2013, à la société Parc éolien des sources du Mistral sur le territoire des ...

Vu la procédure suivante :

Procédure devant la cour

Par une requête et des mémoires enregistrés le 23 octobre 2020 et les 16 avril 2021 et 16 juin 2022 (ce dernier non communiqué), l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et l'association Fédération environnement durable, représentées par Me Monamy, demandent à la cour :

1°) d'annuler les articles 3, 4, 5 et 6 de l'arrêté du 18 août 2020 portant prescriptions complémentaires de l'autorisation d'exploiter l'installation de production d'électricité délivrée, le 7 juin 2013, à la société Parc éolien des sources du Mistral sur le territoire des communes de Sacquenay et Chazeuil ;

2°) de réformer l'article 7 de l'arrêté du 18 août 2020 afin que soit prescrit un bridage inconditionnel et complet des éoliennes du 1er février au 31 mai et du 1er septembre au 30 novembre entre une heure après le lever du soleil et une heure avant son coucher ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- l'arrêté de prescriptions complémentaires méconnaît les dispositions des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l'environnement ;

- cet arrêté est illégal en tant que l'article 7 ne prévoit un bridage que de manière conditionnel.

Par des mémoires enregistrés les 18 février et 5 juillet 2021, la société Parc éolien des sources du Mistral conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et de l'association Fédération environnement durable une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable ;

- subsidiairement, les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

- si la cour estimait que l'arrêté querellé est affecté d'un vice, il lui appartiendrait de surseoir à statuer, en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement et de fixer, en application de l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, une date au-delà de laquelle aucun moyen nouveau ne sera recevable.

Par un mémoire enregistré le 8 juillet 2021, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Elle soutient qu'aucun moyen de la requête n'est fondé.

Par une ordonnance du 2 juin 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 juin 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique:

- le rapport de Mme Djebiri, première conseillère ;

- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;

- et les observations de Me Monamy, pour l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et l'association Fédération environnement durable, ainsi que celles de Me Becue pour la société Parc éolien des sources du Mistral.

Considérant ce qui suit :

Sur les conclusions de la requête :

1. A la suite de la découverte de trois cadavres de milans royaux dans les emprises du parc éolien des sources du Mistral, le préfet de la Côte-d'Or a fixé , par arrêté du 18 août 2020, des prescriptions complémentaires d'exploitation imposant un bridage dynamique expérimental en périodes de migration, un protocole de vérification de l'efficacité et de validation de ce système de bridage, l'organisation d'investigations supplémentaires en cas de constat de mortalité ultérieure et un bridage complet en cas de constat de mortalité ultérieure, de défaillance ou d'indisponibilité du système de bridage dynamique. L'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et l'association Fédération environnement durable demandent l'annulation des articles 3, 4, 5, 6 de cet arrêté et la réformation de son article 7 afin que soit imposé à l'exploitant un bridage diurne complet et inconditionnel en périodes de migration.

2. Aux termes de l'article L. 181-14 du code de l'environnement : " Toute modification substantielle des activités, installations, ouvrages ou travaux qui relèvent de l'autorisation environnementale est soumise à la délivrance d'une nouvelle autorisation (...) / En dehors des modifications substantielles, toute modification notable intervenant dans les mêmes circonstances est portée à la connaissance de l'autorité administrative compétente pour délivrer l'autorisation environnementale (...) / L'autorité administrative compétente peut imposer toute prescription complémentaire nécessaire au respect des dispositions des articles L. 181-3 et L. 181-4 à l'occasion de ces modifications, mais aussi à tout moment s'il apparaît que le respect de ces dispositions n'est pas assuré par l'exécution des prescriptions préalablement édictées ", tandis qu'en vertu des articles L. 411-1, L. 411-2, R. 411-10-1 et R. 410-10-2 combinés du même code, toute dérogation à la destruction ou à la perturbation d'espèces protégées ne peut être accordée que sur demande du pétitionnaire présentée préalablement à la délivrance de l'autorisation d'exploiter, une adaptation à la dérogation pouvant être imposée par voie de prescriptions complémentaires en cours d'exploitation au titulaire d'une dérogation, ce qui suppose qu'une telle dérogation ait été demandée et accordée à l'occasion de l'autorisation d'exploiter originelle.

3. Ces dispositions opèrent une distinction entre, d'une part, les modifications substantielles qui requièrent une nouvelle autorisation environnementale et qui, faisant perdre à l'exploitant les droits qu'il détenait de l'autorisation originelle, l'expose, si nécessaire, à devoir présenter une demande de dérogation à l'interdiction de destruction ou d'altération des espèces protégées, s'il ne l'avait pas présentée préalablement à la délivrance de l'autorisation frappée de caducité et, d'autre part, les modifications de moindre ampleur qui n'appellent que des prescriptions additionnelles qui, hors les conditions qu'elles précisent ou renforcent, n'affectent pas les droits qui s'attachent à l'autorisation d'exploiter délivrée originellement.

4. Les mesures qu'appelaient le recensement de la mortalité de trois spécimens de milan royal sur une période d'exploitation significative, sans modification des caractéristiques du parc éolien ou du milieu naturel d'implantation ont pu être, conformément au 2ème alinéa de l'article L. 181-14 précité du code de l'environnement, regardées par le préfet de la Côte-d'Or comme relevant de prescriptions complémentaires. La société Parc éolien des sources du Mistral bénéficie, en conséquence, du maintien des droits découlant de l'autorisation délivrée le 7 juin 2013 dont celui d'exploiter l'installation en franchise de demande de dérogation et le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué ne pouvait être délivré sans présentation d'une demande de dérogation conforme à l'article L. 411-2 du code de l'environnement doit être écarté comme inopérant.

5. Il y a, dès lors, lieu pour la cour, d'examiner si les prescriptions imposées par l'arrêté attaqué sont nécessaires et proportionnées à l'objectif de protection du milan royal.

6. Les articles 3 à 6 de l'arrêté prescrivent l'installation, pour chaque aérogénérateur, d'un dispositif de détection par caméra déclenchant à l'approche d'un oiseau un système d'effarouchement sonore puis, si nécessaire, de bridage et d'arrêt des pâles. Or, les associations requérantes ne caractérisent pas l'insuffisance d'un tel dispositif pour prévenir les risques de collision en se bornant à relever que l'auteur de l'arrêté a lui-même envisagé l'hypothèse de collisions ultérieures sanctionnées par le bridage complet organisé à l'article 7.

7. En outre, la circonstance que le site soit fréquenté par d'autres espèces d'oiseaux est sans incidence sur la nécessité et la proportionnalité de ces prescriptions dont il n'est pas démontré qu'elles nuiraient à la conservation de ces espèces. Ne saurait tenir lieu d'une telle démonstration, l'invocation des perturbations inhérentes à l'effarouchement sonore qui n'a vocation à se déclencher qu'occasionnellement et très brièvement.

8. Enfin, il résulte de l'instruction, notamment du bilan de fonctionnement du système expérimental, qu'aucune mortalité de milan royal n'a été recensée alors que le protocole de bridage dynamique est toujours susceptible d'évoluer en fonction du suivi ornithologique du secteur. Il suit de là que le principe de subsidiarité du bridage complet organisé par l'article 7 est proportionné à l'impératif de protection recherché et qu'un tel bridage n'a pas à être imposé a priori et inconditionnellement, sans mise en place probatoire du bridage dynamique.

9. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées en défense, que l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et l'association Fédération environnement durable ne sont pas fondées à demander l'annulation ou la réformation de l'arrêté attaqué du 18 août 2020 portant prescriptions complémentaires pour l'exploitation du parc éolien des sources du Mistral. Les conclusions de leur requête doivent être rejetées.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Les conclusions présentées contre l'État par l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et l'association Fédération environnement durable, parties perdantes, doivent être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la société Parc éolien des sources du Mistral contre les associations requérantes.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne et de l'association Fédération environnement durable est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société Parc éolien des sources du Mistral au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association pour la défense du patrimoine et du paysage de la vallée de la Vingeanne, à l'association Fédération environnement durable, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la société Parc éolien des sources du Mistral.

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2022 à laquelle siégeaient :

M. Arbarétaz, président de chambre ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme Djebiri, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 août 2022.

La rapporteure,

C. DjebiriLe président,

Ph. Arbarétaz

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 20LY03078 2

al


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY03078
Date de la décision : 04/08/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

29-035 Energie.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Christine DJEBIRI
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : GREENLAW AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 23/08/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-08-04;20ly03078 ?
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