Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
L'association Planétaiire a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des droits de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er septembre 2013 au 31 août 2015 et des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1805321 du 17 décembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a déchargé l'association Planétaiire des droits de taxe sur la valeur ajoutée établis au titre de la période du 1er septembre au 31 décembre 2013 et des pénalités correspondantes et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 11 février 2021, l'association Planétaiire, représentée par Me Ben Salem, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à sa demande ;
2°) de prononcer la décharge des impositions et des pénalités correspondantes maintenues à sa charge ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'administration a méconnu l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration faute pour d'avoir fait connaître les motifs de sa décision implicite de rejet ;
- l'administration n'a pas motivé sa décision implicite de rejet à la suite de la réclamation contentieuse introduite le 6 décembre 2017 ;
- l'administration s'est fondée sur une période prescrite, à savoir du 1er septembre 2013 au 31 décembre 2013 pour l'imposer au titre des années 2014 et 2015 ;
- M. B..., adhérent et salarié de l'association, n'a assisté à aucun entretien au cours de la vérification de comptabilité et a été privé de la garantie d'un débat oral et contradictoire afin de défendre ses intérêts et ceux de l'association ;
- l'article L. 57 du livre des procédures fiscales a été méconnu ; l'administration n'a pas produit les pièces justificatives sur lesquelles elle s'est appuyée pour l'imposer ;
- elle ne pouvait faire l'objet d'une taxation d'office à la taxe sur la valeur ajoutée ;
- sa gestion était désintéressée ;
- s'agissant des pénalités, aucune mise en demeure de déposer des déclarations ne lui a été adressée.
Par un mémoire, enregistré le 15 octobre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la requête d'appel est irrecevable en ce qu'elle reproduit purement et simplement le mémoire introductif d'instance devant le tribunal administratif ;
- les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de Mme Vinet, rapporteure publique,
- et les observations de Me Le Viavant, représentant l'association Planétaiire ;
Considérant ce qui suit :
1. L'association Planétaiire, régie par la loi de 1901, dont le siège est à Romans (Isère) a pour objet statutaire de contribuer et développer l'émergence d'une conscience environnementale relationnelle et de mieux être à travers des pratiques participant à la transformation du monde. A l'issue d'une vérification de comptabilité diligentée en 2017 portant sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015, l'administration fiscale, estimant qu'elle devait être assujettie aux impôts commerciaux, l'a taxée d'office à la taxe sur la valeur ajoutée en application de l'article L. 66-3° du livre des procédures fiscales au titre de la période du 1er septembre 2013 au 31 août 2015. Les droits rappelés ont été assortis de la majoration de 10 % prévue au a. de l'article 1728 du code général des impôts encourue en l'absence de déclaration dans le délai prescrit. Par un jugement du 17 décembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a prononcé la décharge des droits de taxe sur la valeur ajoutée réclamés à l'association Planétaiire au titre de la période du 1er septembre au 31 décembre 2013 et des pénalités correspondantes et rejeté le surplus des conclusions de sa demande. L'association Planétaiire relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à sa demande.
Sur le principe de l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée :
2. L'association Planétaiire reprend en appel le moyen qu'elle avait invoqué en première instance, tiré de ce qu'elle serait exonérée dès lors que sa gestion est désintéressée. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus aux points 9 à 12 du jugement du tribunal administratif de Grenoble.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
3. Dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une entreprise a été effectuée, comme il est de règle, dans ses propres locaux, c'est au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat. Il résulte de l'instruction que la vérification de comptabilité de l'association Planétaiire, qui s'est déroulée à son siège social, a donné lieu à plusieurs rencontres sur place entre le vérificateur et la salariée désignée par le président de l'association Planétaiire pour représenter l'association au cours des opérations de contrôle. Dès lors qu'il est constant que M. B... n'a pas été habilité par le représentant légal de l'association, celle-ci ne peut utilement soutenir qu'elle a été privée, du fait de l'absence de M. B..., d'un débat oral avec le vérificateur quand bien même ce dernier a estimé à l'issue du contrôle que l'intéressé était le dirigeant de fait de l'association au cours de la période d'imposition en litige. Il n'est par ailleurs pas allégué que le vérificateur se serait refusé à tout échange de vues avec la représentante de l'association lors de ses interventions sur place. Le moyen tiré de ce qu'elle n'a pas pu bénéficier de la garantie d'un débat oral et contradictoire ne peut dès lors qu'être écarté.
4. Aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : " Sont taxés d'office : (...) / 3° aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes ; (...) ".
5. En matière de taxes sur le chiffre d'affaires, aucune disposition n'impose à l'administration fiscale de mettre le contribuable défaillant en demeure de souscrire ses déclarations avant de mettre en œuvre la procédure de taxation d'office prévue au 3° de l'article L. 66 du livre précité. Il s'ensuit que l'administration n'est pas tenue, lorsqu'elle fait application de la procédure de taxation d'office prévue par les dispositions du 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales précitées, d'adresser préalablement au contribuable une mise en demeure de déposer ses déclarations, et ce même dans le cas d'une " association loi 1901 " dont le caractère non lucratif des activités est remis en cause par le service.
6. L'association Planétaiire, qui a ainsi été régulièrement taxée d'office à la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 20914 au le 31 août 2015, ne peut utilement invoquer la méconnaissance de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dont les dispositions relatives aux propositions de rectification adressées dans le cadre de la procédure contradictoire ne lui étaient pas applicables. Au demeurant, il ressort de l'examen de la proposition de rectification du 23 juin 2017 que celle-ci détaille avec une précision suffisante les bases et éléments ayant servi au calcul de l'imposition d'office et les modalités de détermination de la taxe sur la valeur ajoutée collectée et déductible, satisfaisant ainsi aux exigences de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales seul applicable en l'espèce.
7. S'il incombe à l'administration, en application de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, d'informer le contribuable de l'origine et de la teneur des renseignements qu'elle a pu obtenir auprès de tiers dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, afin qu'il soit mis à même de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que les pièces concernées soient mises à sa disposition, cette obligation n'implique pas de joindre à la proposition de rectification les éléments que le vérificateur a pu recueillir dans le cadre de ses investigations. Par suite, le moyen tiré de ce que la proposition de rectification serait insuffisamment motivée en ce qu'elle ne comporterait pas les éléments obtenus de tiers ne peut qu'être écarté.
8. La circonstance que l'administration omet de motiver la décision par laquelle elle rejette une réclamation tendant à la décharge ou à la réduction d'une imposition est sans influence sur la régularité ou le bien-fondé de cette imposition et a pour seul effet de priver l'administration et, après elle, le juge de l'impôt, de la possibilité d'opposer au contribuable la tardiveté de ses conclusions devant le tribunal administratif. Par suite, les moyens tirés d'une insuffisance de motivation de la décision implicite de rejet de la réclamation de l'association Planétaiire et de la méconnaissance de l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration doivent être écartés comme inopérants.
Sur le bien-fondé des impositions :
9. L'association Planétaiire fait valoir que l'administration s'est fondée sur une période prescrite, à savoir celle du 1er septembre 2013 au 31 décembre 2013, pour l'imposer au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 août 2015. Toutefois, le vérificateur peut contrôler les justificatifs antérieurs à la période dont il a indiqué qu'elle serait vérifiée pour s'assurer que la taxe sur la valeur ajoutée a été à bon droit déduite ou remboursée pendant ladite période. Les droits de taxe sur la valeur ajoutée ont fait l'objet d'un avis de mise en recouvrement du 15 novembre 2017. L'irrégularité de procédure retenue par le tribunal administratif est sans effet sur les impositions établies au titre de la période vérifiée quand bien même l'association clôturait ses exercices le 31 août de chaque année. Par suite, le moyen tiré de ce que l'administration se serait fondée sur une période prescrite ne peut qu'être écarté.
Sur la majoration de retard de 10 % :
10. Aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : a. 10 % en l'absence de mise en demeure ou en cas de dépôt de la déclaration ou de l'acte dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai (...) ".
11. Les droits de taxe sur la valeur ajoutée réclamés à l'association Planétaiire ont été assortis de la majoration prévue au a. du 1. de l'article 1728 du code général des impôts dès lors que l'association n'avait pas déposé ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée au titre des périodes concernées. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que c'est à bon droit que l'administration a assujetti l'association Planétaiire aux impôts commerciaux. Par suite, l'association Planétaiire ne peut soutenir qu'elle ne pouvait faire l'objet de la majoration prévue au a. du 1. de l'article 1728 du code général des impôts.
12. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir invoquée par le ministre, que l'association Planétaiire n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. En conséquence, ses conclusions présentées au titre des frais du litige doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de l'association Planétaiire est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Planétaiire et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 16 juin 2022, à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
Mme Evrard, présidente assesseure,
Mme Caraës, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 juillet 2022.
La rapporteure,
R. A...
Le président,
D. PruvostLa greffière,
M-T. Pillet
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
2
N° 21LY00414