La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/07/2022 | FRANCE | N°21LY02344

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 06 juillet 2022, 21LY02344


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 7 octobre 2020 par lequel la préfète de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2008648 du 2 avril 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 13 juillet 2021, Mme B..., représ

entée par Me Drahy, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté de la p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... épouse C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 7 octobre 2020 par lequel la préfète de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2008648 du 2 avril 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 13 juillet 2021, Mme B..., représentée par Me Drahy, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté de la préfète de l'Ain ;

3°) d'enjoindre à la préfète, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois, à titre subsidiaire et sans délai, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, à verser à son conseil, une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la préfète a cru à tort qu'elle était tenue de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif qu'elle entre dans l'une des catégories ouvrant droit au regroupement familial ;

- le refus de titre de séjour méconnait le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article L. 313-14 de ce code ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité de la décision refusant le titre de séjour et de l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire.

Par un mémoire, enregistré le 18 mars 2022, la préfète de l'Ain conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que :

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant ;

- les autres moyens soulevés par l'appelante ne sont pas fondés.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 juin 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Lesieux, première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante arménienne née en 1998, est entrée en France le 20 octobre 2016 munie d'un visa de court séjour délivré par les autorités italiennes et a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile. Sa demande a été rejetée en dernier lieu par une décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 27 février 2019. Elle a, le 10 juin 2020, sollicité la délivrance d'un titre de séjour en faisant valoir son mariage, le 2 novembre 2019, avec un compatriote en situation régulière sur le territoire national. Mme B... relève appel du jugement du 2 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de la préfète de l'Ain du 7 octobre 2020 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Selon l'article L. 411-1 de ce code : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans ". Il en résulte que l'étranger qui remplit les conditions pour bénéficier du droit au regroupement familial ne peut se voir délivrer la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 précitées.

3. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... est mariée depuis le 2 novembre 2019 à un compatriote qui, à la date de la décision contestée était titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle valable du 2 avril 2020 au 1er avril 2024. Ainsi, en lui opposant la circonstance qu'elle entrait dans l'une des catégories ouvrant droit au bénéfice du regroupement familial, la préfète de l'Ain pouvait légalement sans méconnaître le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui refuser la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier, ni des énonciations de l'arrêté litigieux qui fait état des conditions d'entrée et de séjour en France de Mme B... et précise qu'elle dispose de liens familiaux en France, que son époux peut demander le bénéfice du regroupement familial en sa faveur mais que rien ne fait obstacle, le cas échéant, à ce que la cellule familiale se reconstitue en Arménie, que la préfète de l'Ain n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation et se serait cru, à tort, en situation de compétence liée pour lui refuser la délivrance d'un titre de séjour.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

5. Mme B... fait valoir la durée de sa présence en France depuis 2016, les attaches familiales dont elle dispose et la circonstance qu'une procédure de regroupement familial peut être longue et l'issue incertaine. Il ressort cependant des pièces du dossier que l'intéressée, entrée en France à l'âge de dix-huit ans sous couvert d'un visa de court séjour, s'est maintenue sur le territoire au bénéfice sa demande d'asile, rejetée en dernier lieu le 27 février 2019 par la CNDA. Elle n'a sollicité la régularisation de sa situation administrative qu'en juin 2020, en faisant valoir son mariage avec un compatriote le 2 novembre 2019. Elle ne fait état d'aucune intégration particulière en France et, si elle y dispose d'attaches familiales dont une sœur de nationalité française, il ne ressort pas des pièces du dossier que son autre sœur, son frère et ses parents étaient en situation régulière à la date de la décision contestée. Par ailleurs, la circonstance que son époux réside en France depuis l'âge de seize ans, qu'il y a fait ses études et y travaille sous couvert d'une carte de séjour temporaire pluriannuelle en qualité de salarié, ne constitue pas à soi seule un obstacle à la reconstitution de la cellule familiale en Arménie, pays dont ils ont tous les deux la nationalité. Enfin, rien ne s'oppose à ce que Mme B... reparte seule dans son pays d'origine dans l'attente de l'examen de la demande de regroupement familial que peut déposer son époux. Par suite, en refusant de lui délivrer un titre de séjour et en l'obligeant à quitter le territoire français, la préfète de l'Ain n'a pas porté au droit de Mme B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels ces décisions ont été prises. Elle n'a ainsi pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

6. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme B... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur ni que la préfète de l'Ain a entendu examiner sa situation au regard de ces dispositions. Par suite, le moyen tiré de leur méconnaissance doit être écarté comme inopérant.

7. Il résulte de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé, que Mme B... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français. Elle n'est pas davantage fondée à exciper de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français à l'encontre de la décision fixant le pays de destination.

8. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des frais du litige doivent en conséquence être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 2 juin 2022 à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président,

Mme Evrard, présidente-assesseure,

Mme Lesieux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 6 juillet 2022.

La rapporteure,

S. LesieuxLe président,

D. Pruvost

La greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY02344


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY02344
Date de la décision : 06/07/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: Mme Sophie LESIEUX
Rapporteur public ?: Mme CARAËS
Avocat(s) : DRAHY

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-07-06;21ly02344 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award