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30/06/2022 | FRANCE | N°20LY03184

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 30 juin 2022, 20LY03184


Vu la procédure suivante :

Par une ordonnance du 4 novembre 2020, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Lyon a transmis à la cour administrative d'appel de Lyon la requête de Mme A... B....

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 16 septembre 2020 et 29 juillet 2021, Mme A... B..., représentée par Me Grisoni, demande à la cour :

1°) d'annuler, en tant qu'il vaut autorisation de construire, l'arrêté du 17 juillet 2020 par lequel le maire de Ferney-Voltaire a délivré à la société Alta Ferney-Voltaire un permis de construire p

ortant sur la construction au sein de la ZAC de Ferney-Genève Innovation, d'un ensem...

Vu la procédure suivante :

Par une ordonnance du 4 novembre 2020, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Lyon a transmis à la cour administrative d'appel de Lyon la requête de Mme A... B....

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 16 septembre 2020 et 29 juillet 2021, Mme A... B..., représentée par Me Grisoni, demande à la cour :

1°) d'annuler, en tant qu'il vaut autorisation de construire, l'arrêté du 17 juillet 2020 par lequel le maire de Ferney-Voltaire a délivré à la société Alta Ferney-Voltaire un permis de construire portant sur la construction au sein de la ZAC de Ferney-Genève Innovation, d'un ensemble commercial, culturel et de loisirs pour une surface de plancher de 63 878 m² ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Ferney-Voltaire la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le permis de construire ne pouvait être délivré sur une fraction de l'unité foncière et le pétitionnaire a opéré une division de l'unité foncière sans permis d'aménager ;

- le dossier de demande aurait dû inclure une demande d'autorisation de travaux s'agissant d'un immeuble de grande hauteur ;

- le permis de construire délivré est illégal en raison, par exception, de l'illégalité du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Ferney-Voltaire dans sa version du 27 février 2020 appliquée au projet issue de la modification n°6 dudit plan ; la procédure d'enquête publique est entachée d'un vice substantiel dans la mesure où le commissaire-enquêteur n'a pas donné d'avis personnel sur les avantages et inconvénients de la modification des dispositions de la zone UX du PLU en matière d'implantation des constructions par rapport aux emprises publiques et en matière de création de places de stationnement dédiées aux deux-roues ;

- en conséquence de la déclaration d'illégalité à prononcer, le projet méconnaît les articles UX 6 et UX 12 du PLU dans sa version du 22 juillet 2016 ;

- le projet méconnaît l'article UX 11 du PLU dans sa version en vigueur au 27 février 2020.

Par deux mémoires, enregistrés les 16 décembre 2020 et 22 octobre 2021, la SNC Alta Ferney-Voltaire, représentée par Me Courrech, conclut au rejet de la requête, à titre subsidiaire à la mise en œuvre de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, et demande à la cour de mettre à la charge de la requérante la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par deux mémoires, enregistrés les 9 avril 2021 et 4 octobre 2021, la commune de Ferney-Voltaire, représentée par Me Landot, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la requérante la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Une ordonnance du 6 octobre 2021 a fixé la clôture de l'instruction au 10 novembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,

- et les observations de Me Courrech pour la SNC Alta Ferney-Voltaire et de Me Polubosko pour la commune de Ferney-Voltaire.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., propriétaire d'une maison d'habitation située sur une parcelle voisine du terrain d'assiette du projet autorisé, demande l'annulation, en tant qu'il vaut autorisation de construire, de l'arrêté du 17 juillet 2020 par lequel le maire de Ferney-Voltaire a délivré à la SNC Alta Ferney-Voltaire un permis de construire portant sur la construction, sur les lots P01-P02 de la ZAC Ferney-Genève Innovation, d'un ensemble commercial, culturel et de loisirs comprenant trois bâtiments à usage de commerce (122 cellules), de restauration (19 cellules) et de loisirs (3 cellules), un multiplex cinématographique ainsi qu'un parc de stationnement de 1 604 places réparties sur 3 niveaux de sous-sol, pour une surface de plancher de 63 878 m².

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 442-1 du code de l'urbanisme : " Ne constituent pas des lotissements au sens du présent titre et ne sont soumis ni à déclaration préalable ni à permis d'aménager : (...) c) Les divisions effectuées par l'aménageur à l'intérieur d'une zone d'aménagement concerté ".

3. Mme B... soutient que la demande de permis de construire déposée par la SNC Alta Ferney-Voltaire ne porte pas sur la totalité des parcelles comprises dans les lots P01 et P02 tels qu'ils ont été divisés par l'aménageur et qu'ainsi, ces parcelles ont dû faire l'objet d'une division, non autorisée par un permis d'aménager, par le pétitionnaire. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, et particulièrement du cahier des charges de cession de terrains, que la ZAC Ferney-Genève Innovation a été divisée par l'aménageur en différentes unités foncières, dont les lots P01 et P02, sur lesquels porte le projet. Il ressort de la demande de permis de construire en litige que la demande a été déposée sur l'intégralité de la surface correspondant aux lots P01 et P02 de la ZAC Ferney-Genève Innovation composées de tout ou partie de nombreuses parcelles. A ce titre, le projet vise une surface de 29 755 m² qui est celle correspondant aux lots cédés par l'aménageur dans le cahier des charges de cession. Si la requérante estime que le projet ne porte que sur une partie des parcelles cadastrées section AN n°140 et n°153, il ressort des pièces versées que ces parcelles ne sont incluses qu'en partie dans les lots cédés. Le pétitionnaire fait valoir à ce titre sans être contesté que la superficie totale des parcelles composant les lots cédés est de 39 682 m². Dans ces conditions, la requérante ne saurait soutenir qu'une division a été opérée à l'intérieur de la ZAC par le pétitionnaire et non par l'aménageur ni que cette division constituerait ainsi un lotissement au sens des dispositions précitées de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme, pour lequel le permis de construire, faute de relever des dispositions du b) de l'article R. 442-1 du même code, aurait dû être précédé d'un permis d'aménager. Par suite, le moyen selon lequel la délivrance du permis de construire aurait dû, pour un tel motif, être précédée d'un permis d'aménager, doit être écarté.

4. Aux termes de l'article L. 122-1 du code de la construction et de l'habitation, dans sa version en vigueur, " Les travaux qui conduisent à la création, à l'aménagement, à la modification ou au changement de destination d'un immeuble de moyenne hauteur ou d'un immeuble de grande hauteur doivent être conformes aux règles de sécurité fixées, pour chacun de ces types d'immeubles, par décret en Conseil d'Etat. / Les travaux qui conduisent à la création, à l'aménagement, à la modification ou au changement de destination d'un immeuble de moyenne hauteur ou d'un immeuble de grande hauteur ne peuvent être exécutés qu'après autorisation de l'autorité chargée de la police de la sécurité, qui vérifie leur conformité aux règles prévues, pour le type d'immeubles concerné, par le décret en Conseil d'Etat mentionné au premier alinéa. / Lorsque ces travaux sont soumis à permis de construire, celui-ci tient lieu de l'autorisation prévue au deuxième alinéa dès lors que sa délivrance a fait l'objet d'un accord de l'autorité chargée de la police de la sécurité. " Aux termes de l'article R. 122-2 du même code dans sa version applicable : " Constitue un immeuble de grande hauteur, pour l'application du présent chapitre, tout corps de bâtiment dont le plancher bas du dernier niveau est situé, par rapport au niveau du sol le plus haut utilisable pour les engins des services publics de secours et de lutte contre l'incendie : (...) -à plus de 28 mètres pour tous les autres immeubles. "

5. Il ressort des pièces versées et n'est pas contesté que le projet litigieux comporte 3 bâtiments dont aucun ne présente au dernier niveau un plancher bas d'une hauteur supérieure à 28 mètres depuis le niveau du sol le plus haut utilisable pour les engins des services publics de secours et de lutte contre l'incendie. A ce titre, le bâtiment A, qui est de format R+4, présente une hauteur de 23,5 mètres entre le plancher bas du dernier niveau et la voie publique et les deux autres bâtiments B et C, de format R+3, des hauteurs respectivement de 18 mètres et 18,5 mètres pour l'application de ces dispositions. Par suite, les bâtiments en cause ne constituant pas des immeubles de grande hauteur au sens des dispositions de l'article R. 122-2 du code de la construction et de l'habitation, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 122-1 du même code ne peut qu'être écarté.

6. En troisième lieu, en vertu de l'article L. 600-1 du code de l'urbanisme, l'illégalité pour vice de forme ou de procédure d'un plan local d'urbanisme peut être invoquée par voie d'exception, après l'expiration d'un délai de six mois à compter de la prise d'effet du document en cause, lorsque le vice de forme concerne, notamment, la méconnaissance substantielle ou la violation des règles de l'enquête publique. Aux termes de l'article R. 123-19 du code de l'environnement : " Le commissaire enquêteur (...) établit un rapport qui relate le déroulement de l'enquête et examine les observations recueillies. / Le rapport comporte le rappel de l'objet du projet, plan ou programme, la liste de l'ensemble des pièces figurant dans le dossier d'enquête, une synthèse des observations du public, une analyse des propositions et contre-propositions produites durant l'enquête et, le cas échéant, les observations du responsable du projet, plan ou programme en réponse aux observations du public. / Le commissaire enquêteur (...) consigne, dans un document séparé, ses conclusions motivées, en précisant si elles sont favorables, favorables sous réserves ou défavorables au projet. / Le commissaire enquêteur (...) transmet à l'autorité compétente pour organiser l'enquête l'exemplaire du dossier de l'enquête déposé au siège de l'enquête, accompagné du ou des registres et pièces annexées, avec le rapport et les conclusions motivées. (...)". En application de ces dispositions, le commissaire enquêteur, sans être tenu de répondre à chacune des observations recueillies, doit indiquer au moins sommairement et en livrant un avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de son avis.

7. Il ressort des pièces du dossier qu'après avoir détaillé le contenu des modifications envisagées par la modification n°6 du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Ferney-Voltaire à savoir deux ajustements concernant l'article UX6 relatif à l'implantation des constructions par rapport aux emprises publiques et l'article UX12 concernant l'obligation de réaliser des aires de stationnement, le commissaire enquêteur a regretté l'absence de mobilisation du grand public et précisé le contexte dans lequel s'inscrivent les modifications proposées à savoir le projet de ZAC Ferney-Genève Innovation appelée à devenir un pôle économique majeur de l'agglomération. Contrairement à ce que prétend la requérante, le commissaire-enquêteur a précisé qu'en ce sens, la portée de l'ajustement envisagé dans la modification concernant le stationnement des vélos devait être bien évaluée. Il a estimé que la modification de l'article UX6 proposée permettait une meilleure optimisation de l'usage de l'espace bâti et de générer un rapport espace public/privé plus " urbain " et émis une critique en relevant que la rédaction de l'alinéa C apparaissait superfétatoire et de nature à rendre incompréhensible l'application de la règle, ce qui a conduit l'autorité compétente à supprimer cet alinéa après remise du procès-verbal de synthèse. S'agissant de la modification apportée à l'article UX12, il a procédé à une analyse concernant l'application de la règle édictée avant et après modification pour estimer que la modification emportera une réduction du nombre de places de stationnement à destination des deux-roues. Cependant, il a relevé que les précisions apportées par l'autorité compétence permettaient de lever ces interrogations notamment compte tenu de l'évolution attendue de la mobilité sur le secteur avec l'arrivée du tramway et le doublement de l'offre de transports notamment. Le commissaire enquêteur a rendu un avis favorable motivé sur le projet en mentionnant les raisons justifiant sa position et a formulé un avis personnel suffisamment motivé dans ses conclusions. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le PLU a été adopté à l'issue d'une procédure irrégulière.

8. En quatrième lieu, dès lors que le moyen soulevé par Mme B... tiré de l'illégalité par exception du PLU de la commune de Ferney-Voltaire est écarté, il n'y a pas lieu d'examiner les moyens tirés de ce que le projet méconnaitrait les articles UX6 et UX12 du PLU de la commune dans sa version antérieure à savoir celle du 22 juillet 2016.

9. En cinquième lieu, l'article UX 11 du règlement du PLU applicable prévoit : " Les autorisations peuvent être refusées ou n'être accordées que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si l'aspect extérieur des constructions est de nature à porter atteinte au caractère du paysage urbain environnant ainsi qu'à la conservation des perspectives paysagères. "

10. Il ressort des pièces du dossier que le projet litigieux s'intégrera dans un environnement disparate au sein d'une vaste zone commerciale incluant au Nord un supermarché à l'enseigne " Carrefour " de près de 11 000 m² d'emprise au sol, accompagné d'un parking d'une superficie équivalente, et une station d'épuration et un centre de gestion des déchets verts, et à l'Ouest un centre de révision automobile, une station-service et des immeubles locatifs de type R+3 à R+8. Si le secteur présente à l'Est plusieurs maisons individuelles, le projet s'intègre dans un vaste espace sans cohérence ni intérêt architectural particulier et se situe en outre à 550 mètres de la piste principale de l'aéroport international de Genève. Le projet, s'il est certes de très grande ampleur, est d'inspiration contemporaine avec des façades présentant des matériaux telle que de la terre cuite émaillée, de l'aluminium et du verre permettant de préserver les perspectives paysagères et ne s'intègre pas, contrairement à ce que soutient la requérante, dans un tissu pavillonnaire. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'il ne s'insèrerait pas dans son environnement et méconnaîtrait les dispositions citées au point 9.

11. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 17 juillet 2020 susvisé en tant qu'il vaut autorisation de construire.

Sur les frais liés à l'instance :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Ferney-Voltaire, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demande Mme B... au titre des frais qu'elle a exposés à l'occasion de cette instance.

13. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière le versement de sommes à la commune de Ferney-Voltaire et à la SNC Alta Ferney-Voltaire au titre des frais exposés par elles dans cette instance.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Ferney-Voltaire et par la SNC Alta Ferney-Voltaire en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., à la SNC Alta Ferney-Voltaire et à la commune de Ferney-Voltaire.

Délibéré après l'audience du 9 juin 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Dèche, présidente,

Mme Le Frapper, première conseillère,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 juin 2022.

La rapporteure,

V. Rémy-Néris

La présidente,

D. Dèche

La greffière,

A-C. Ponnelle

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, à la ministre de la transition écologique et la cohésion des territoires, au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui les concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 20LY03184

ap


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY03184
Date de la décision : 30/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-043 Urbanisme et aménagement du territoire. - Autorisations d`utilisation des sols diverses. - Autorisation d`exploitation commerciale (voir : Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique).


Composition du Tribunal
Président : Mme DECHE
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : GRISONI

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-06-30;20ly03184 ?
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