La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/06/2022 | FRANCE | N°20LY00554

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 29 juin 2022, 20LY00554


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par deux demandes distinctes, M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 11 juin 2018 et l'arrêté du 27 février 2019 par lesquels le maire de Vaulx-en-Velin lui a infligé une sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours, ainsi que la décision du 30 août 2018 rejetant son recours gracieux, d'enjoindre au maire de Vaulx-en-Velin de procéder à la reconstitution de sa carrière et de ses droits à traitement et à pension sur la

période d'éviction, dans un délai d'un mois à compter de la notification du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par deux demandes distinctes, M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 11 juin 2018 et l'arrêté du 27 février 2019 par lesquels le maire de Vaulx-en-Velin lui a infligé une sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours, ainsi que la décision du 30 août 2018 rejetant son recours gracieux, d'enjoindre au maire de Vaulx-en-Velin de procéder à la reconstitution de sa carrière et de ses droits à traitement et à pension sur la période d'éviction, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement et sous astreinte de 300 euros par jour de retard, et de mettre une somme de 1 500 euros à la charge de la commune de Vaulx-en-Velin au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1807902, 1902107 du 11 décembre 2019, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon, après les avoir jointes, a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 7 février 2020 et 7 juin 2021, M. B..., représenté par Me Dumoulin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 11 décembre 2019 ;

2°) d'annuler la décision du 11 juin 2018 et l'arrêté du 27 février 2019 ;

3°) d'enjoindre au maire de Vaulx-en-Velin de procéder à la reconstitution de sa carrière et de ses droits à traitement et à pension sur la période d'éviction, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 30 euros par jour de retard ;

4°) de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de la commune de Vaulx-en-Velin au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'absence de saisine du conseil de discipline immédiatement après sa suspension à titre conservatoire l'a privé d'une garantie, même si la sanction finalement infligée relève du premier groupe ;

- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, la sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours lui a été infligée par la décision du 11 juin 2018 ; l'arrêté du 27 février 2019 est seulement confirmatif, fixant la date d'exclusion ; la décision du 11 juin 2018 n'est pas motivée ; l'arrêté confirmatif du 27 février 2019 ne satisfait pas lui-même aux exigences de motivation ;

- la sanction qui lui a été infligée a été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors qu'il n'a pas reçu, préalablement à la sanction, communication des procès-verbaux d'audition ;

- la matérialité des faits n'est pas établie ;

- la sanction est entachée d'erreur d'appréciation.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 8 juin 2020 et 19 juillet 2021, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, la commune de Vaulx-en-Velin, représentée par Me Arnould, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge du requérant en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés sont infondés.

Par ordonnance du 27 mai 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 août 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère,

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de M. B..., requérant, et de Me Arnould pour la commune de Vaulx-en-Velin.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., agent de maîtrise titulaire dans les services de la commune de Vaulx-en-Velin, relève appel du jugement du 11 décembre 2019 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours prononcée à son encontre par l'autorité municipale.

Sur la légalité de la sanction :

En ce qui concerne la motivation de la sanction :

2. M. B... reproche au premier juge d'avoir écarté son moyen tiré de l'insuffisante motivation de la sanction en litige en se fondant sur les considérations de droit et de fait assortissant l'arrêté du 27 février 2019, qui est, selon lui, seulement confirmatif de la sanction du 11 juin 2018, mais ne l'a pas remplacée. Toutefois, il résulte à la fois des termes du courrier du 11 juin 2018 que de ceux de l'arrêté qui lui a infligé la sanction en litige, en précisant la date de son exécution, que M. B... a été mis à même, à leur seule lecture, de connaître avec une précision suffisante les motifs de la sanction qui lui a été infligée, alors même qu'ils ne mentionnent pas la date précise des faits et la teneur exacte des propos qui lui sont reprochés. Le moyen tiré de l'absence de motivation doit ainsi être écarté.

En ce qui concerne l'absence de saisine du conseil de discipline :

3. Aux termes de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 : " Aucune sanction disciplinaire autre que celles classées dans le premier groupe par les dispositions statutaires relatives aux fonctions publiques de l'Etat, territoriale et hospitalière ne peut être prononcée sans consultation préalable d'un organisme siégeant en conseil de discipline dans lequel le personnel est représenté ". Aux termes de l'article 30 de cette même loi : " en cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'une infraction de droit commun, l'auteur de cette faute peut être suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit, sans délai, le conseil de discipline ". Aux termes de l'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : Premier groupe : (...) l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours ".

4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que la sanction d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois jours, sanction du premier groupe, n'a pas à être précédée de la consultation du conseil de discipline, quand bien même l'agent aurait fait l'objet d'une mesure de suspension de ses fonctions. Dans ces conditions, contrairement à ce que soutient le requérant, alors même qu'il avait été suspendu à titre conservatoire, la commune de Vaulx-en-Velin n'avait pas à saisir le conseil de discipline eu égard au degré de la sanction finalement retenue.

En ce qui concerne la méconnaissance de l'étendue du droit à communication du dossier :

5. Lorsqu'une enquête administrative a été diligentée sur le comportement d'un agent public ou porte sur des faits qui, s'ils sont établis, sont susceptibles de recevoir une qualification disciplinaire ou de justifier que soit prise une mesure en considération de la personne d'un tel agent, le rapport établi à l'issue de cette enquête, y compris lorsqu'elle a été confiée à des corps d'inspection, ainsi que, lorsqu'ils existent, les procès-verbaux des auditions des personnes entendues sur le comportement de l'agent faisant l'objet de l'enquête, font partie des pièces dont ce dernier doit recevoir communication en application de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983, sauf si la communication de ces procès-verbaux serait de nature à porter gravement préjudice aux personnes qui ont témoigné.

6. M. B... soutient qu'il n'a pas reçu, préalablement à la sanction, communication des procès-verbaux d'audition qu'il était en droit d'obtenir.

7. Toutefois, d'une part, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que l'enquête administrative diligentée suite aux plaintes à l'encontre de M. B... pour harcèlement sexuel aurait donné lieu à l'établissement de procès-verbaux des auditions des témoins. Si un tableau de synthèse de l'enquête administrative récapitulant les réponses apportées par l'ensemble des agents interrogés sur un ensemble de thématiques liées au comportement au travail de leurs collègues, supérieurs hiérarchiques ou subordonnés a été dressé, sa communication aurait été de nature, compte tenu du positionnement hiérarchique de M. B... et de la nature des faits qui lui sont reprochés, à porter gravement préjudice aux personnes concernées. En tout état de cause, M. B... n'établit ni même n'allègue qu'il aurait effectivement exercé son droit à communication du dossier préalablement à l'édiction de la sanction en litige, de sorte qu'il n'est pas fondé à soutenir, dans les circonstances de l'espèce, qu'il aurait été privé d'une garantie à ce titre.

En ce qui concerne le bien-fondé de la sanction :

8. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

9. D'autre part, il ressort du rapport d'enquête administrative que le requérant a tenu à de nombreuses reprises des propos sexuels, sexistes et grivois dans le cadre du service. La matérialité de ces faits n'est pas sérieusement contestée, même si le requérant conteste la qualification de harcèlement sexuel de son comportement. Si M. B... fait valoir que le tableau de synthèse de l'enquête administrative produit en défense n'est pas signé et a été établi deux ans après les faits, les critiques qu'il formule sont sans portée utile à cet égard. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le premier juge a estimé que la matérialité de son comportement professionnel inapproprié était établie.

10. Compte tenu du positionnement hiérarchique de M. B..., qui a banalisé son comportement, et de la dégradation des conditions de travail au sein de l'équipe qu'il a généré, en lui infligeant une sanction du premier groupe, le maire de la commune de Vaulx-en-Velin n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

12. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions de M. B..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent dès lors qu'être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que le requérant demande au titre des frais qu'il a exposés soit mise à la charge de la commune de Vaulx-en-Velin, qui n'est pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... le versement d'une somme de 800 euros au titre des frais exposés par la commune de Vaulx-en-Velin.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : M. B... versera la somme de 800 euros à la commune de Vaulx-en-Velin au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de Vaulx-en-Velin.

Délibéré après l'audience du 14 juin 2022 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Yves Tallec, président,

M. Gilles Fédi, président-assesseur,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 juin 2022.

La rapporteure,

Bénédicte LordonnéLe président,

Jean-Yves Tallec

La greffière,

Sandra Bertrand

La République mande et ordonne au préfet du Rhône en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 20LY00554


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY00554
Date de la décision : 29/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09 Fonctionnaires et agents publics. - Discipline.


Composition du Tribunal
Président : M. TALLEC
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : ARNOULD

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-06-29;20ly00554 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award