Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme I... E..., Mme G... F..., M. K... D..., Mme I... D... et Mme C... D... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 17 janvier 2020 par lequel le maire d'Hauteluce a délivré un permis de construire un bâtiment de quatorze logements collectifs à la SAS les chalets, ainsi que la décision rejetant leur recours gracieux
Par un jugement n° 2003865 du 15 juin 2021, le tribunal administratif de Grenoble, après n'avoir pas admis les interventions de Mmes J... et A..., a annulé le permis en tant qu'il autorise la construction d'un troisième niveau sur le rez-de-chaussée ne correspondant pas à de simples combles, mis à la charge de la commune d'Hauteluce la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et rejeté le surplus de la demande.
Procédures devant la cour
I) Par une requête enregistrée le 13 août 2021, sous le n° 21LY02806, et des mémoires en réplique enregistrés les 2 décembre 2021, 19 janvier 2022, 25 janvier 2022 et 22 février 2022, Mme I... E..., Mme G... F..., M. K... D..., Mme I... D..., Mme C... D..., Mme H... J... et Mme B... A..., représentés par la SCP Ducrot Associés DPA, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures :
1°) d'annuler ce jugement du 15 juin 2021, en tant qu'il a partiellement rejeté la demande et en tant qu'il n'a pas admis les interventions de Mme J... et de Mme A... ;
2°) d'annuler ce permis du 17 janvier 2020 ;
3°) d'annuler l'arrêté du 2 décembre 2021 par lequel le maire d'Hauteluce a délivré un permis de construire modificatif à la SAS les chalets afin de régulariser le projet ;
4°) de mettre à la charge de la commune d'Hauteluce et de la SAS les chalets la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- l'intervention de Mme J... et de Mme A..., qui justifient de leur qualité de propriétaire, doit être admise et le jugement doit être réformé sur ce point ;
- c'est à tort que les premiers juges ont fait application de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme, alors que le vice ne pouvait être régularisé sans modifier la nature même du projet ;
- le dossier de demande de permis comporte des insuffisances ou des inexactitudes, s'agissant de l'existence d'une servitude, de l'accès projeté, de la consistance du projet de construction, de l'insertion du projet dans son environnement ;
- le permis méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, s'agissant de l'existence de risques de glissement de terrain, de la mise en œuvre d'un système de rampe d'accès chauffante et de la dangerosité de l'accès projeté ;
- le permis méconnaît l'article U 3 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) ;
- le permis méconnaît l'article U 11 du règlement du PLU ;
- le permis modificatif a été signé par une personne incompétente ;
- le permis de régularisation est illégal dès lors qu'il modifie la nature même du projet, et que la société pétitionnaire aurait dès lors dû déposer une nouvelle demande de permis de construire ;
- le permis modificatif méconnaît les dispositions relatives à la hauteur de l'article U 5 du règlement du nouveau PLU approuvé le 22 septembre 2021.
Par un mémoire en défense enregistré le 21 septembre 2021, et des mémoires en réplique enregistrés les 16 décembre 2021 et 1er février 2022, la SAS les chalets, représentée par Me Sevino, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge solidaire des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête d'appel, qui ne comporte pas de critique du jugement, est irrecevable ;
- la régularisation du vice retenu par le tribunal a donné lieu à la délivrance d'un permis modificatif le 2 décembre 2021 ; ce permis n'ayant modifié que la pente des toitures, les requérants ne peuvent utilement soutenir qu'il méconnaît les dispositions relatives à la hauteur du PLU révisé ; au demeurant, ces nouvelles règles ne leur étaient pas opposables, dès lors qu'ils bénéficiaient d'un certificat d'urbanisme délivré le 30 juin 2021 ;
- aucun des moyens de la requête d'appel n'est fondé.
Par un mémoire enregistré le 21 septembre 2021, la SAS les chalets demande à la cour de condamner les requérants à lui verser la somme de 10 000 euros en application de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme.
Elle soutient que :
- la requête d'appel, qui ne fait que reprendre les arguments avancés en première instance, présente un caractère abusif ;
- au demeurant, la requête n'est justifiée que par volonté des requérants de conserver l'usage d'espaces de stationnement sur lesquels ils ne disposent d'aucun droit ;
- ce recours, qui empêche le lancement des travaux, lui cause préjudice.
Par un mémoire enregistré le 25 novembre 2021, la commune d'Hauteluce, représentée par la Selas Fidal, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête d'appel n'est fondé.
Par des mémoires enregistrés les 2 décembre 2021 et 19 avril 2022, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, les requérants concluent au rejet des conclusions présentées par la SAS les chalets au titre de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme.
Ils soutiennent que :
- leur recours ne présente pas un caractère abusif, dès lors qu'ils justifient d'un intérêt pour agir, en raison de pertes de vue, d'intimité et des difficultés de stationnement que doit engendrer le projet ;
- la requête d'appel présente une critique du jugement ; dès lors qu'elle n'a pas de caractère suspensif, un éventuel retard dans les travaux ne peut leur être imputé.
Par un mémoire enregistré le 19 avril 2022, qui n'a pas été communiqué, Mme E... et autres persistent dans leurs conclusions par les mêmes moyens, en soutenant en outre que :
- la société pétitionnaire ne justifie pas avoir eu qualité pour déposer la demande de permis de construire, ayant entaché de fraude sur ce point sa demande ;
- la demande de permis de construire comportait des informations mensongères sur les conditions de réalisation de la rampe d'accès aux bâtiments ;
- le permis méconnaît les prescriptions du plan de prévention des risques naturels, compte tenu de l'ouverture d'un accès dans le mur du garage de la copropriété le Breithorn.
La clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 20 avril 2022, par une ordonnance en date du 29 mars 2022.
Par courrier en date du 18 mai 2022, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la cour était susceptible de relever d'office le moyen tiré de l'irrecevabilité des nouveaux moyens présentés par mémoire enregistré le 19 avril 2022, après l'expiration du délai de deux mois suivant le premier mémoire en défense.
II) Par une requête enregistrée le 31 janvier 2022 au greffe du tribunal administratif de Grenoble, Mme I... E..., Mme G... F..., M. K... D..., Mme I... D..., Mme C... D..., Mme H... J... et Mme B... A..., représentés par la SCP Ducrot Associés DPA, demandent :
1°) d'annuler l'arrêté du 2 décembre 2021 par lequel le maire d'Hauteluce a délivré un permis de construire modificatif à la SAS les chalets afin de régulariser son projet ;
2°) de mettre à la charge de la commune d'Hauteluce et de la SAS les chalets la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le permis a été signé par une personne incompétente ;
- le permis de régularisation est illégal dès lors qu'il modifie la nature même du projet, et que la société pétitionnaire aurait dès lors dû déposer une nouvelle demande de permis de construire ;
- le permis modificatif méconnaît les dispositions relatives à la hauteur de l'article U 5 du règlement du nouveau PLU approuvé le 22 septembre 2021.
Par des mémoires en défense enregistrés les 3 mars 2022 et 4 mai 2022, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, la SAS les chalets, représentée par Me Sevino, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable, dès lors que la contestation du permis de régularisation devait être portée directement devant le juge d'appel, en application de l'article L. 600-5-2 du code de l'urbanisme ;
- la requête est irrecevable, en l'absence d'intérêt pour agir des requérants ;
- aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par un mémoire enregistré le 3 mars 2022, et un mémoire enregistré le 4 mai 2022, qui n'a pas été communiqué, la SAS les chalets demande à la cour de condamner les requérants à lui verser la somme de 10 000 euros en application de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme.
Elle soutient que :
- la requête, qui est irrecevable et fait suite à une première demande rejetée par le tribunal, présente un caractère abusif ;
- au demeurant, la requête n'est justifiée que par volonté des requérants de conserver l'usage d'espaces de stationnement sur lesquels ils ne disposent d'aucun droit ;
- ce recours, qui empêche le lancement des travaux, lui cause préjudice.
Par ordonnance n° 2200602 du 23 mars 2022, prise sur le fondement de l'article R. 351-3 du code de justice administrative, le président du tribunal administratif de Grenoble a transmis à la cour ce dossier, enregistré sous le n° 22LY00895.
Par un mémoire enregistré le 19 avril 2022 et un mémoire en réplique enregistré le 11 mai 2002, qui n'a pas été communiqué, les requérants persistent dans leurs conclusions.
Ils soutiennent en outre que :
- les conditions d'application de l'article L. 600-5-2 du code de l'urbanisme ne sont pas réunies, dès lors que le permis de régularisation n'avait pas été produit en cours d'instance devant la cour et qu'il n'y a pas totale identité des requérants ;
- compte tenu des justificatifs apportés en défense, ils se désistent de leur moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté attaqué.
Par des mémoires enregistrés le 19 avril 2022, les requérants concluent au rejet des conclusions présentées par la SAS les chalets au titre de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme.
Ils soutiennent que :
- leur recours ne présente pas un caractère abusif, dès lors qu'ils justifient d'un intérêt pour agir, en raison de pertes de vue, d'intimité et des soucis de stationnement que doit engendrer le projet ;
- le permis de régularisation n'ayant pas été produit en cours d'instance devant la cour, ils étaient recevables à le contester devant le tribunal administratif de Grenoble ;
- dès lors que le recours n'a pas de caractère suspensif, un éventuel retard dans les travaux ne peut leur être imputé ; la réalité du préjudice n'est pas établie.
La clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 11 mai 2022, par une ordonnance en date du 26 avril 2022.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Thierry Besse, président-assesseur,
- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,
- les observations de Me Magnon pour Mme E... et autres et celles de Me Ivanova, substituant Me Sevino, pour la SAS les chalets ;
Et après avoir pris connaissance de la note en délibéré présentée pour les requérants, enregistrée le 8 juin 2022 ;
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 17 janvier 2020, le maire de Hauteluce a délivré un permis de construire à la SAS Les chalets pour la réalisation d'un bâtiment de quatorze logements collectifs, dans la station des Saisies. Par un jugement du 15 juin 2021, le tribunal administratif de Grenoble, après n'avoir pas admis les interventions de Mmes J... et A..., a annulé le permis en tant qu'il autorise la construction d'un troisième niveau sur le rez-de-chaussée ne correspondant pas à de simples combles, en faisant application de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme. Mme E... et autres requérants demandent d'annuler ce jugement du 15 juin 2021, en tant qu'il a partiellement rejeté la demande et en tant qu'il n'a pas admis les interventions de Mme J... et de Mme A.... Les requérants, qui ont demandé en cours d'appel l'annulation du permis modificatif du 2 décembre 2021 délivré par le maire d'Hauteluce afin de régulariser le vice retenu par le tribunal, ont saisi également le tribunal administratif de Grenoble d'une demande tendant à l'annulation de ce permis, demande que le président du tribunal administratif a renvoyée à la cour.
2. Les deux requêtes concernent un même projet et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur l'intervention en appel de Mme J... et de Mme A... :
3. L'intervention en appel de Mme J... et de Mme A... au soutien des conclusions des autres requérants, qui n'a pas été présentée par mémoire distinct, en méconnaissance de l'article R. 632-1 du code de justice administrative, ne peut être admise.
Sur la compétence de la cour d'appel concernant l'arrêté du 2 décembre 2021 :
4. Aux termes de l'article L. 600-5-2 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'un permis modificatif, une décision modificative ou une mesure de régularisation intervient au cours d'une instance portant sur un recours dirigé contre le permis de construire, de démolir ou d'aménager initialement délivré ou contre la décision de non-opposition à déclaration préalable initialement obtenue et que ce permis modificatif, cette décision modificative ou cette mesure de régularisation ont été communiqués aux parties à cette instance, la légalité de cet acte ne peut être contestée par les parties que dans le cadre de cette même instance ".
5. Lorsque le juge d'appel est saisi d'un appel contre le jugement du tribunal administratif et qu'un permis modificatif a été délivré aux fins de régulariser les vices du permis relevés par ce jugement, il résulte de l'article L. 600-5-2 du code de l'urbanisme que le bénéficiaire ou l'auteur de cette mesure de régularisation la lui communique sans délai, les parties de première instance comme les tiers, en application de l'article R. 345-1 du code de justice administrative, ne pouvant contester cette mesure que devant lui tant que l'instance d'appel est en cours. Par suite, si un recours pour excès de pouvoir a été formé contre cette mesure de régularisation devant le tribunal administratif, ce dernier la transmet, en application des articles R. 351-3 et, le cas échéant, R. 345-2 du code de justice administrative, à la cour administrative d'appel saisie de l'appel contre le permis initial.
6. Il ressort des pièces du dossier que les premiers juges ont annulé le permis de construire délivré le 17 janvier 2020, en tant seulement qu'il autorise la construction d'un troisième niveau sur le rez-de-chaussée ne correspondant pas à de simples combles. Par arrêté du 2 décembre 2021, pris en cours d'instance d'appel contre le permis initial, le maire de Hauteluce a délivré un permis régularisant ce vice. Dans ces conditions, et sans qu'y fassent obstacle les circonstances que cet arrêté du 2 décembre 2021 n'avait pas été communiqué en cours d'instance d'appel lorsqu'il a été contesté par les requérantes devant le tribunal administratif de Grenoble, et que les deux intervenantes de première instance ont contesté ce permis modificatif devant le tribunal, il appartient à la cour de statuer directement sur la légalité de ce permis modificatif. L'exception d'incompétence opposée par les requérants doit, par suite, être écartée.
Sur l'intervention en première instance de Mme J... et de Mme A... :
7. Il ressort des pièces du dossier que Mme J... et Mme A... n'avaient pas justifié en première instance de leur qualité de propriétaire ou occupante de biens immobiliers situés à proximité du projet. Dans ces conditions, les premiers juges ont pu régulièrement estimer qu'elles ne justifiaient pas d'un intérêt leur donnant qualité pour intervenir et refuser, pour ce motif, d'admettre leur intervention.
Sur les conclusions dirigées contre le jugement du 15 juin 2021 en tant qu'il met en œuvre l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme :
8. Les requérants soutiennent que les premiers juges ne pouvaient faire application de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme et annuler le permis de construire en tant qu'il autorise la construction d'un troisième niveau sur le rez-de-chaussée ne correspondant pas à de simples combles, dès lors que ce vice n'était pas régularisable. Ce vice a toutefois été régularisé par un permis modificatif délivré le 2 décembre 2021, et qui fait l'objet d'une contestation dans la même instance. Dans ces conditions, les conclusions dirigées contre le jugement du 6 avril 2021, en tant qu'il met en œuvre l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme, se trouvent privées d'objet et il n'y a pas lieu d'y statuer.
Sur la légalité du permis de construire du 17 janvier 2020 :
9. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme : " Lorsque le terrain n'est pas directement desservi par une voie ouverte à la circulation publique, le plan de masse indique l'emplacement et les caractéristiques de la servitude de passage permettant d'y accéder. "
10. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du dossier borde la rue du Mirantin et est donc directement desservi par une voie publique. S'il prévoit un accès pour les voitures depuis l'avenue des jeux olympiques par un immeuble voisin, il ressort des pièces du dossier que cet accès, sur la même copropriété, ne nécessite pas de servitude de passage. Par suite, le plan de masse du dossier de demande n'avait pas à faire figurer une servitude de passage et le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme ne peut qu'être écarté.
11. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 431-7 du code de l'urbanisme : " Sont joints à la demande de permis de construire : a) Un plan permettant de connaître la situation du terrain à l'intérieur de la commune (...) ". Aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : (...) 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : (...) f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. " L'article R. 431-10 dudit code dispose : " Le projet architectural comprend également : (...) b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. "
12. Il ressort des pièces du dossier que la demande de permis de construire comprenait un plan de situation permettant de situer la situation du terrain sur le territoire de la commune et les limites de l'unité foncière servant de terrain d'assiette au projet. La notice précisait suffisamment les conditions d'accès au projet, qui apparaissaient sur les documents graphiques joints. La circonstance que ces documents photographiques ont été pris pendant la saison estivale, en l'absence de neige sur les voies, n'a pu être de nature à fausser l'appréciation du service instructeur. Les plans de coupe et de prospect détaillent les différents niveaux et leurs fonctions sans ambiguïté. Enfin, le dossier comprend un document graphique et deux documents photographiques permettant de situer le projet dans son environnement bâti. Les requérants font valoir que, compte tenu des angles de vue retenus, les chalets de dimension plus modestes composant le lotissement du soleil n'apparaissent pas sur ces documents. Toutefois, et alors que le dossier de demande comprend de nombreuses photographies prises depuis plusieurs points de vue, faisant apparaître la majeure partie des bâtiments voisins, la notice faisait état de la présence à proximité de chalets en R+2+combles, gabarit prédominant dans le secteur, y compris dans ce lotissement. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que le dossier de demande aurait été de nature à induire en erreur le service instructeur sur ce point. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance du dossier de demande doit être écarté.
13. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme : " Par dérogation à l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, et sans préjudice de l'application de l'article R. 613-1 du même code, lorsque la juridiction est saisie d'une requête relative à une décision d'occupation ou d'utilisation du sol régie par le présent code, ou d'une demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant une telle décision, les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense. Cette communication s'effectue dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 611-3 du code de justice administrative. ".
14. Il ressort des pièces de la procédure juridictionnelle de la présente instance que le premier mémoire en défense a été communiqué aux requérants le 22 septembre 2021. Dès lors, les requérants, qui s'étaient bornés à faire état dans leur requête d'appel de ce que le terrain d'assiette du projet faisait partie d'une copropriété, n'étaient pas recevables à soulever pour la première fois, par mémoire enregistré le 19 avril 2022, que la société pétitionnaire n'avait pas qualité pour déposer sa demande de permis de construire, ni que la demande de permis était entachée de fraude dans les conditions de réalisation de la rampe d'accès aux stationnements. Est également irrecevable le moyen tiré de la méconnaissance des prescriptions du plan de prévention des risques naturels imposant que les façades exposées au risque de ruissellement restent aveugles.
15. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. "
16. Il ressort des pièces du dossier que la demande d'autorisation contient un document établi le 17 septembre 2019 par un géotechnicien, qui atteste avoir vérifié que le projet, qui est situé sur une forte pente, dans une zone d'aléa moyen de glissement de terrain dans le plan d'indexation en z de la commune, ne mettra pas en péril, par son implantation, sa conception ou ses dimensions, la stabilité de l'unité foncière et des propriétés voisines. Les requérants n'apportent aucun élément de nature à contredire cette étude et à établir que le projet présenterait un risque à cet égard. De même, il ne ressort pas des pièces du dossier que la réalisation d'un accès chauffant serait de nature à aggraver les ruissellements sur le terrain d'assiette ou en aval dans des proportions qui ne pourraient être traitées. Il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que la création de dix-huit places de stationnement le long de la rue du Mirantin serait de nature à faire obstacle à la circulation publique sur cette voie en impasse, d'une largeur permettant le croisement des véhicules, ni qu'elle empêcherait son déneigement ou l'accès des véhicules de secours. Enfin, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir des difficultés générales de circulation et de stationnement qu'engendrerait le projet dans le secteur, lesquelles sont sans incidence sur la légalité du permis de construire. Par suite, le moyen selon lequel le permis de construire est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des risques ainsi décrits doit être écarté.
17. En quatrième lieu, aux termes de l'article U 3 du règlement du plan local d'urbanisme : " 3.1 - Dispositions concernant les accès : Les accès sur les voies publiques sont réglementés en application des articles R. 111-2 et R. 111-4 du code de l'urbanisme. (...) / Tout terrain enclavé est inconstructible à moins que son propriétaire ne produise une servitude de passage suffisante, instituée par acte authentique, par voie judiciaire ou par autorisation du propriétaire du fond. / (...) / Elles peuvent être également refusées si les accès présentent un risque pour la sécurité des usagers des voies publiques, ou pour celle des personnes utilisant ces accès. Cette sécurité doit être appréciée compte tenu, notamment de la position des accès, de leur configuration, ainsi que de la nature et de l'intensité du trafic. "
18. Ainsi que l'ont relevé les premiers juges, par des motifs qu'il y a lieu d'adopter, l'accès à la voie publique depuis le parc de stationnement s'effectue au sein d'une copropriété, de sorte que la société pétitionnaire n'avait pas à justifier d'une servitude de passage. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que l'avenue des jeux olympiques sur laquelle donne l'accès, commun avec celui de la propriété le Breithorn, est une voie large et que l'accès offre une très bonne visibilité. Si cet accès se trouve à proximité d'un rond-point, il ne ressort pas de la configuration des lieux, que cet accès, déjà existant, présenterait un danger particulier. Enfin, si l'accès nécessite le passage par un porche peu large puis une rampe d'accès de quatre mètres de large, présentant une courbe et une pente de 14 %, il ressort des pièces du dossier que plusieurs mètres séparent la voie publique du porche et de la rampe, de sorte que des véhicules pourraient attendre momentanément le passage de véhicules sortant du parc de stationnement souterrain sans obstruer la voie publique. Par suite, le projet ne méconnaît pas les dispositions de l'article U 3 du règlement du PLU ni n'est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, s'agissant des accès.
19. En cinquième lieu, aux termes de l'article U 11 du règlement du PLU " (...) Implantation et volume : L'implantation, le volume et les proportions des constructions dans tous leurs éléments doivent être déterminés en tenant compte de l'environnement et en s'y intégrant le mieux possible, en particulier par leur adaptation au terrain naturel (sans modification importante des pentes de celui-ci) et par leurs aménagements extérieurs, notamment du point de vue des perceptions lointaines et dominantes de ladite construction (...) ".
20. Il ressort des pièces du dossier que le projet, au regard de son style montagnard et de son gabarit, s'insère dans son environnement bâti, composé de bâtiments de style et d'orientation identiques, et de gabarits variables mais souvent imposants, à l'exception des chalets individuels, toutefois souvent assez hauts, du lotissement situé à l'amont du projet. Dans ces conditions, le projet s'insère dans son environnement bâti. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article U 11 du règlement du PLU doit être écarté.
Sur la légalité du permis modificatif du 2 décembre 2021 :
21. En premier lieu, le permis modificatif a pour effet de modifier la pente de la toiture, portée de 35 à 42 %, afin de transformer le dernier étage en combles, de modifier des menuiseries en façade et de ramener la surface de plancher de 1 611 à 1 501 m2. Compte tenu de l'ampleur limitée de ces modifications, ce nouveau permis n'a pas eu pour effet de modifier la nature même du projet. Par suite, le moyen selon lequel la société pétitionnaire ne pouvait régulariser son projet qu'en présentant une nouvelle demande de permis de construire ne peut qu'être écarté.
22. Enfin, aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 410-10 du code de l'urbanisme : " Lorsqu'une demande d'autorisation ou une déclaration préalable est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d'un certificat d'urbanisme, les dispositios d'urbanisme, le régime des taxes et participations d'urbanisme ainsi que les limitations administratives au droit de propriété tels qu'ils existaient à la date du certificat ne peuvent être remis en cause à l'exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique./ Lorsque le projet est soumis à avis ou accord d'un service de l'Etat, les certificats d'urbanisme le mentionnent expressément. Il en est de même lorsqu'un sursis à statuer serait opposable à une déclaration préalable ou à une demande de permis. Le certificat d'urbanisme précise alors expressément laquelle ou lesquelles des circonstances prévues aux deuxième à sixième alinéas de l'article L. 424-1 permettraient d'opposer le sursis à statuer. "
23. Il ressort des pièces du dossier que le maire d'Hauteluce a délivré le 30 juin 2021 à la société pétitionnaire un certificat d'urbanisme portant sur les parcelles en litige. Si les requérants indiquent qu'un sursis à statuer pouvait être opposé à cette date, ainsi que ce certificat en fait d'ailleurs mention, ils n'indiquent pas même que le projet était susceptible de compromettre l'exécution du futur plan et n'assortissent pas leur moyen de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé. La délivrance de ce certificat d'urbanisme ayant eu dans ces conditions pour effet de cristalliser les règles d'urbanisme applicables pendant une durée de dix-huit mois, la demande de permis de construire modificatif déposée le 4 août 2021 et à laquelle il a été fait droit le 2 décembre 2021 devait être examinée au regard des dispositions du PLU en vigueur à la date du 30 juin 2021, et non du nouveau plan local adopté par délibératon du 22 septembre 2021. Par suite, les requérants ne peuvent utilement soutenir que le permis de régularisation méconnaît les règles de hauteur fixées pour la zone Us par l'article U 5 du nouveau règlement. Le permis modificatif ayant par ailleurs pour effet de transformer en combles le dernier niveau, il régularise le vice retenu par les premiers juges.
24. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées en défense, que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a partiellement rejeté leur demande ni à soutenir que l'arrêté du 2 décembre 2021 délivrant un permis de construire à la SAS les chalets est entaché d'illégalité et à en demander l'annulation.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme :
25. Aux termes de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme : " Lorsque le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager est mis en œuvre dans des conditions qui traduisent un comportement abusif de la part du requérant et qui causent un préjudice au bénéficiaire du permis, celui-ci peut demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l'auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts. La demande peut être présentée pour la première fois en appel. "
26. Alors que la SAS les chalets n'a obtenu la délivrance du permis modificatif régularisant le permis initial que le 2 décembre 2021, et que les requérants, qui justifient d'un intérêt pour agir, ont contesté en appel tant le principe que la légalité de ce permis modificatif, il ne résulte pas de l'instruction que le recours en appel de Mme E... et autres aurait été mis en œuvre dans des conditions traduisant un comportement abusif de leur part. Dans ces conditions, les conclusions indemnitaires présentées par la SAS les chalets doivent être rejetées.
27. De même, la demande présentée devant le tribunal administratif de Grenoble et renvoyée à la cour par ordonnance de son président, est dirigée contre le permis modificatif régularisant le vice affectant le permis initial, n'était pas irrecevable et est assortie de moyens. Il ne résulte pas de l'instruction qu'elle présenterait un caractère abusif. Par suite, les conclusions indemnitaires présentées à ce titre par la SAS les chalets doivent également être rejetées.
Sur les frais d'instance :
28. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions des requérants, qui sont la partie perdante, tendant au remboursement des frais non compris dans les dépens qu'ils ont exposés. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge des requérants les sommes globales de 1 500 euros à verser à la commune d'Hauteluce, d'une part, et à la SAS les chalets, d'autre part, au titre des frais non compris dans les dépens qu'elles ont exposés.
DÉCIDE :
Article 1er : L'intervention en appel de Mme A... et de Mme J... n'est pas admise.
Article 2 : Les requêtes de Mme E... et autres sont rejetées.
Article 3 : Les requérants verseront à la commune d'Hauteluce, d'une part, et à la SAS les chalets, d'autre part, la somme de 1 500 euros chacune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la SAS les chalets au titre de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme I... E..., pour les requérants, à la commune d'Hauteluce, à la SAS les chalets, à Mme H... J... et à Mme B... A....
Délibéré après l'audience du 7 juin 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Danièle Déal, présidente de chambre,
M. Thierry Besse, président-assesseur,
M. François Bodin-Hullin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 juin 2022.
Le rapporteur,
Thierry BesseLa présidente,
Danièle Déal
La greffière,
Fabienne Prouteau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, en ce qui les concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
2
N° 21LY02806, 22LY00895