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14/06/2022 | FRANCE | N°20LY03298

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 14 juin 2022, 20LY03298


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 4 septembre 2017 par laquelle le maire de Roussillon a rejeté leur demande tendant à engager une procédure de modification simplifiée du plan local d'urbanisme afin de reclasser leurs parcelles en zone UX ou, à titre subsidiaire, à soumettre au conseil municipal une délibération portant sur l'abrogation du plan local d'urbanisme en tant qu'il procède à ce classement.

Par un jugement n° 1706078

du 17 septembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la décision du 4 septembre 2017 par laquelle le maire de Roussillon a rejeté leur demande tendant à engager une procédure de modification simplifiée du plan local d'urbanisme afin de reclasser leurs parcelles en zone UX ou, à titre subsidiaire, à soumettre au conseil municipal une délibération portant sur l'abrogation du plan local d'urbanisme en tant qu'il procède à ce classement.

Par un jugement n° 1706078 du 17 septembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 4 septembre 2017 et a enjoint au maire de Roussillon d'inscrire la question de l'abrogation des dispositions illégales du plan local d'urbanisme à l'ordre du jour d'une réunion du conseil municipal.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 13 novembre 2020 et le 18 novembre 2021, la commune de Roussillon, représentée par Me Senegas, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 17 septembre 2020 ;

2°) de rejeter les conclusions de la demande des intimés ;

3°) de mettre à la charge des consorts B... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le conseil municipal de Roussillon est incompétent pour procéder à l'abrogation des dispositions illégales du plan local d'urbanisme à la suite du transfert de compétences en matière d'élaboration de plans d'urbanisme à la communauté de communes entre Bièvre et Rhône, intervenu le 1er janvier 2019 ;

- c'est à tort que le tribunal a retenu que le classement des terrains était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 20 juillet 2021 et le 23 novembre 2021, M. et Mme B..., représentés par Me Cozon, concluent au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au président de la communauté de communes entre Bièvre et Rhône d'inscrire à l'ordre du jour d'une réunion du conseil communautaire la question de l'abrogation partielle du PLU dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 250 euros par jour de retard, et à ce que la commune requérante leur verse la somme de 2 325 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la requête d'appel est irrecevable, en l'absence d'habilitation du maire à agir au nom de la commune ;

- les moyens soulevés par la commune de Roussillon ne sont pas fondés.

Par un mémoire en intervention enregistré le 20 octobre 2021, la communauté de communes entre Bièvre et Rhône, représentée par Me Pyanet, conclut à l'annulation du jugement du 17 septembre 2020 du tribunal administratif de Grenoble.

Elle déclare s'associer aux écritures de la commune de Roussillon.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. François Bodin-Hullin, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Jean Simon Laval, rapporteur public ;

- les observations de Me Millet pour la commune de Roussillon, de Me Teyssier pour la communauté de communes entre Bièvre et Rhône et de Me Cozon pour M. et Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Par délibération du 26 janvier 2016, le conseil municipal de Roussillon a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune, qui a classé des parcelles appartenant à M. et Mme B..., qui abritent le siège de leurs activités professionnelles, en zone future d'urbanisation AUxp. Par courrier du 3 juillet 2017, M. et Mme B... ont demandé au maire de Roussillon d'abroger le plan local d'urbanisme en tant qu'il procède au classement de ces parcelles et d'engager une procédure simplifiée de modification du plan local d'urbanisme ou, à titre subsidiaire, d'inscrire cette question à l'ordre du jour d'une réunion du conseil municipal et de reclasser leurs parcelles en zone urbaine UX. Par courrier du 4 septembre 2017, le maire de de Roussillon a rejeté cette demande. Par jugement du 17 septembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cette décision et a enjoint au maire de Roussillon d'inscrire la question de l'abrogation des dispositions illégales du plan local d'urbanisme à l'ordre du jour d'une réunion du conseil municipal. La Commune de Roussillon relève appel de ce jugement.

Sur l'intervention de la communauté de communes entre Bièvre et Rhône :

2. La communauté de communes entre Bièvre et Rhône sur le territoire de laquelle s'implantent les parcelles litigieuses et désormais compétente en matière d'élaboration du plan local d'urbanisme a intérêt à l'annulation du jugement attaqué. Dès lors, son intervention est recevable.

Sur la recevabilité de la requête d'appel :

3. Il ressort des pièces du dossier que, par délibération du 18 juin 2020, le conseil municipal de Roussillon a habilité son maire à agir en justice au nom de la commune, en vertu du 16° de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales. Par suite, la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel doit être écartée.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

4. Aux termes de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme : " Les zones à urbaniser sont dites " zones AU ". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs destinés à être ouverts à l'urbanisation. Lorsque les voies ouvertes au public et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone et que des orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement en ont défini les conditions d'aménagement et d'équipement, les constructions y sont autorisées soit lors de la réalisation d'une opération d'aménagement d'ensemble, soit au fur et à mesure de la réalisation des équipements internes à la zone prévus par les orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement. Lorsque les voies ouvertes au public et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU n'ont pas une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone, son ouverture à l'urbanisation est subordonnée à une modification ou à une révision du plan local d'urbanisme comportant notamment les orientations d'aménagement et de programmation de la zone ".

5. Il est de la nature de toute réglementation d'urbanisme de distinguer des zones où les possibilités de construire sont différentes, ainsi que des zones inconstructibles. Il appartient aux auteurs d'un PLU de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

6. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles litigieuses, qui ne sont pas couvertes par une opération d'aménagement et de programmation, ont été classées en zone AUxp correspondant à un secteur destiné à être ouvert à l'urbanisation après réalisation d'une opération d'ensemble ou au fur et à mesure de la réalisation d'équipements internes à la zone, pour des constructions principalement destinées à l'artisanat, à l'industrie ou au commerce. Il ressort des pièces du dossier que ce classement est justifié au rapport de présentation du PLU par l'insuffisance des équipements internes à la zone et que le règlement dispose que pourront y être réalisées des opérations d'ensemble après réalisation totale ou partielle des équipements manquants. Il ressort des pièces du dossier que les parcelles en litige, d'une superficie de 5 000 m², sont situées à l'entrée nord de la commune, sont bordées par la RN 7 et par la route de Vienne et s'inscrivent dans un secteur déjà urbanisé. Si la commune de Roussillon fait valoir que l'accès à ces parcelles ne peut être envisagé sur la RN 7, compte tenu de la configuration des lieux et de l'importance du trafic routier, il ressort des pièces du dossier qu'elles disposent également d'un accès sur la route de Vienne. Cette route est suffisamment large pour permettre un accès satisfaisant des véhicules, y compris des poids lourds issus des sociétés de transport routier implantées dans le secteur, sans que la commune ne justifie de la nécessité d'entreprendre un aménagement routier ni ne précise les travaux routiers qui seraient envisagés sur le secteur pour en améliorer la sécurité. Alors que le règlement de la zone envisage la possibilité d'un assainissement individuel, il ne ressort pas des pièces du dossier que des travaux d'extension ou de renforcement du réseau d'assainissement collectifs seraient nécessaires ni au demeurant qu'ils seraient envisagés. Enfin, les parcelles disposent aussi d'un accès au réseau d'eau potable. Si la commune de Roussillon fait valoir que la pression de ce réseau serait insuffisante pour permettre une intervention efficace dans le secteur des services d'incendie et de secours, elle n'établit pas que les deux hydrants situés à proximité, qui assure pour le plus proche une pression de 3,1 bars et un débit de 21 m3/ heure, ne permettraient pas de respecter les préconisations du service d'incendie et de secours, alors que la commune de Roussillon ne fait état d'aucun projet de renforcement des réseaux d'eau potable dans ce secteur déjà urbanisé. Dans ces conditions, et ainsi que l'ont relevé les premiers juges, le classement en zone AUxp des parcelles en litige, déjà urbanisées, justifié au PLU par la nécessité de renforcer les réseaux, est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

7. Il résulte de ce qui précède que la Commune de Roussillon n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision de son maire du 4 septembre 2017.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

8. La commune de Roussillon fait valoir que le conseil municipal est incompétent pour procéder à l'abrogation des dispositions illégales du plan local d'urbanisme à la suite du transfert de compétences à la communauté de communes entre Bièvre et Rhône intervenu le 1er janvier 2019. Dans ces conditions, il y a lieu d'annuler le jugement, en ce qu'il enjoint au maire de Roussillon d'inscrire à l'ordre du jour d'un conseil municipal la question de l'abrogation des dispositions illégales du plan local d'urbanisme et, compte tenu de ce qui a été dit au point 6, de faire injonction au président de la communauté de communes entre Bièvre et Rhône d'inscrire la question de l'abrogation des dispositions illégales du plan local d'urbanisme de la commune, en ce qu'elles classent les parcelles cadastrées section ... en zone future d'urbanisation, à l'ordre du jour d'une réunion du conseil communautaire, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la commune de Roussillon demande au titre des frais qu'elle a exposés soit mise à la charge de M. et Mme B..., qui ne sont pas partie perdante. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la commune de Roussillon une somme de 2 000 euros à verser à M. et Mme B... au titre des frais qu'ils ont exposés.

D E C I D E :

Article 1er : L'intervention de la communauté de communes entre Bièvre et Rhône est admise.

Article 2 : L'article 2 du jugement n° 1706078 du 17 septembre 2020 du tribunal administratif de Grenoble est annulé.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la commune de Roussillon est rejeté.

Article 4 : Il est enjoint au président de la communauté de communes entre Bièvre et Rhône d'inscrire la question de l'abrogation des dispositions illégales du plan local d'urbanisme de Roussillon, s'agissant du classement des parcelles cadastrées section ..., à l'ordre du jour d'une réunion du conseil communautaire, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 5 : La commune de Roussillon versera à M. et Mme B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Roussillon, à la communauté de communes entre Bièvre et Rhône et à M. et Mme B....

Délibéré après l'audience du 24 mai 2022 à laquelle siégeaient :

M. Thierry Besse, président-assesseur,

M. François Bodin-Hullin, premier conseiller,

Mme Christine Psilakis, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 juin 2022.

Le rapporteur,

François Bodin-Hullin

Le président,

Thierry Besse

La greffière,

Fabienne Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et à la ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 20LY03298


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20LY03298
Date de la décision : 14/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01 Urbanisme et aménagement du territoire. - Plans d'aménagement et d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. BESSE
Rapporteur ?: M. François BODIN-HULLIN
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : COZON

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-06-14;20ly03298 ?
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