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02/06/2022 | FRANCE | N°21LY02002

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 02 juin 2022, 21LY02002


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 28 décembre 2020 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de renvoi et d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un certificat de résidence, sinon de réexaminer sa situation, dans un délai de deux mois à compter du jugement à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de r

etard.

Par un jugement n° 2100541 du 1er juin 2021, le tribunal administratif de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 28 décembre 2020 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de renvoi et d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un certificat de résidence, sinon de réexaminer sa situation, dans un délai de deux mois à compter du jugement à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 2100541 du 1er juin 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 17 juin 2021, M. A... C..., représenté par la SELARL BS2A Bescou et Sabatier avocats associés, agissant par Me Sabatier, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2100541 du 1er juin 2021 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler les décisions du 28 décembre 2020 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour, sinon de réexaminer sa situation, ce dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour est entachée d'un vice de procédure tiré de l'absence de saisine de la commission du titre de séjour eu égard à son séjour d'une durée d'au moins dix ans ;

- elle méconnait les stipulations de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien au vu des justificatifs produits ;

- elle méconnait l'article 6-5 de cet accord et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il est père de deux enfants nés et scolarisés en France sur lesquels il exerce l'autorité parentale et bénéficie d'un droit de visite ;

- elle viole l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de séjour et pour méconnaissance de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Gayrard, président assesseur.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 28 décembre 2020, le préfet du Rhône a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A... C..., né le 26 mai 1986 en Algérie, et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de renvoi. Par un jugement du 1er juin 2021, dont M. C... relève appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa requête tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision portant refus de séjour :

2. D'une part, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1. au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant. (...) / 5. au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de 1'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

4. Enfin, en application de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable, le préfet est tenu de saisir la commission du titre du séjour du seul cas des algériens qui remplissent effectivement les conditions prévues par l'accord franco-algérien auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les demandeurs qui se prévalent de ces stipulations.

5. Si M. C... fait valoir qu'à la date de la décision attaquée, il résidait habituellement en France depuis plus de dix ans, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ait demandé la délivrance d'un certificat de résidence sur un tel fondement. Au surplus, le requérant n'établit pas le caractère habituel de sa résidence en France depuis plus de dix ans à la date de la décision querellée, les pièces produites les plus anciennes remontant à fin 2012 et en l'absence de justificatifs probants pour la quasi-totalité de l'année 2013. Il ressort des pièces du dossier que M. C... est le père de deux enfants nés en France respectivement le 8 mars 2014 et le 5 mars 2015, dont il a reconnu la paternité par anticipation les 19 décembre 2013 et 16 décembre 2014, qu'il a eu avec Mme B..., compatriote titulaire d'un certificat de résidence de dix ans, dont il a divorcé selon jugement du tribunal de grande instance d'Annecy du 19 décembre 2019. Cette décision a constaté l'exercice conjoint de l'autorité parentale sur les deux enfants, qui résident chez la mère, M. C... exerçant un droit de visite en journée les weekends et la moitié des vacances scolaires et n'étant soumis à aucune obligation alimentaire. Les quelques justificatifs produits ne permettent pas d'établir qu'il participe effectivement à l'entretien et à l'éducation de ses deux enfants. En outre, la décision portant refus de séjour n'a ni pour objet, ni pour effet, de séparer M. C... de ses enfants et de l'empêcher d'exercer son autorité parentale ou son droit de visite. Le requérant ne se prévaut d'aucun lien familial en dehors de ses deux enfants alors qu'il n'est pas dénué d'attaches familiales dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à au moins l'âge de vingt-huit ans. Enfin, l'intéressé ne fait état d'aucun élément d'intégration dans la société française. Dans ces conditions, la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour opposé à M. C... n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris et n'a pas méconnu l'intérêt supérieur de ses enfants. Cette décision n'a, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien, ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Pour les mêmes motifs, la décision attaquée n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée y compris au regard de son pouvoir de régularisation pour tenir compte de circonstances humanitaires ou de motifs exceptionnels. Il s'ensuit que le préfet n'était pas tenu de réunir préalablement la commission du titre de séjour avant de statuer sur la demande de l'intéressé et que le moyen tiré d'un vice de procédure tenant à un défaut de saisine de cette commission ne peut, dès lors, qu'être écarté.

Sur les autres décisions :

6. D'une part, M. C... ne peut exciper de l'illégalité de la décision portant refus de séjour au soutien de ses conclusions à fin d'annulation dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français. Comme indiqué au point 5, il ne peut justifier d'une durée de dix ans de résidence habituelle en France lui permettant d'obtenir de plein droit un certificat de résidence sur le fondement de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien. Enfin, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, les moyens tirés d'une violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés.

7. D'autre part, M. C... ne peut exciper de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ou de celle portant obligation de quitter le territoire français au soutien de ses conclusions à fin d'annulation dirigées contre la décision fixant le pays de destination.

8. Il découle de tout ce qui précède que les conclusions de M. C... tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône du 20 décembre 2020 ne peuvent être accueillies, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ou présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 12 mai 2022, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Gayrard, président assesseur,

M. Pin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 juin 2022.

Le rapporteur,

J.-P. GayrardLe président,

F. Pourny

La greffière,

F. Abdillah

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 21LY02002 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY02002
Date de la décision : 02/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Jean-Philippe GAYRARD
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : SELARL BS2A - BESCOU et SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 14/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-06-02;21ly02002 ?
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