Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... a demandé au tribunal administratif de Lyon de prononcer la réduction, en droits et pénalités, des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2013, à hauteur de 23 962 euros, et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1908132 du 29 septembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 23 novembre 2020, M. B..., représenté par la Selas Fidal, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la réduction, en droits et pénalités, des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2013, à hauteur de 23 962 euros ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que l'administration fiscale a fait une inexacte application des dispositions de l'article 6 du code général des impôts, relatif à l'imposition commune des personnes mariées vivant sous le même toit, dès lors qu'il a résidé au domicile conjugal au cours de l'année 2013, justifiant l'application d'un quotient familial de 3,5 parts compte tenu de la composition du foyer.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 juillet 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.
Il soutient que le moyen soulevé par le requérant n'est pas fondé, et à titre subsidiaire que le quotient applicable n'est que de 3 parts, la fille aînée du requérant ayant souscrit une déclaration distincte au titre de l'année 2013.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Le Frapper, première conseillère,
- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a omis de souscrire une déclaration de revenus au titre de l'année 2013. A l'issue d'un contrôle sur pièces, l'administration fiscale l'a assujetti, selon la procédure de rectification contradictoire et selon les éléments en sa possession, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu, assorties de majorations, en procédant à une imposition distincte de celle de l'épouse de l'intéressé et en lui appliquant un quotient familial de 1 part. M. B..., qui conteste ce régime d'imposition distincte et le quotient familial appliqué, relève appel du jugement du 29 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la réduction des impositions supplémentaires en litige.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
2. Aux termes de l'article 1A du code général des impôts : " Il est établi un impôt annuel unique sur le revenu des personnes physiques désigné sous le nom d'impôt sur le revenu. Cet impôt frappe le revenu net global du contribuable déterminé conformément aux dispositions des articles 156 à 168 (...) ". Aux termes de l'article 12 de ce code : " L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année ". Aux termes de l'article 6 du même code : " 1. Chaque contribuable est imposable à l'impôt sur le revenu, tant en raison de ses bénéfices et revenus personnels que de ceux de ses enfants et des personnes considérés comme étant à sa charge au sens des articles 196 et 196 A bis. (...) / Sauf application des dispositions du 4 et du second alinéa du 5, les personnes mariées sont soumises à une imposition commune pour les revenus perçus par chacune d'elles et ceux de leurs enfants et des personnes à charge mentionnés au premier alinéa (...). / 3. Toute personne majeure âgée de moins de vingt et un ans, ou de moins de vingt-cinq ans lorsqu'elle poursuit ses études, (...) peut opter, dans le délai de déclaration et sous réserve des dispositions du quatrième alinéa du 2° du II de l'article 156, entre : / 1° L'imposition de ses revenus dans les conditions de droit commun ; / 2° Le rattachement au foyer fiscal dont elle faisait partie avant sa majorité, si le contribuable auquel elle se rattache accepte ce rattachement et inclut dans son revenu imposable les revenus perçus pendant l'année entière par cette personne (...). / 4. Les époux font l'objet d'impositions distinctes : / a. Lorsqu'ils sont séparés de biens et ne vivent pas sous le même toit ; / b. Lorsqu'étant en instance de séparation de corps ou de divorce, ils ont été autorisés à avoir des résidences séparées ; / c. Lorsqu'en cas d'abandon du domicile conjugal par l'un ou l'autre des époux, chacun dispose de revenus distincts. / (...) 6. Chacun des époux, partenaires, anciens époux ou anciens partenaires liés par un pacte civil de solidarité est personnellement imposable pour les revenus dont il a disposé pendant l'année de la réalisation de l'une des conditions du 4, du divorce ou de la dissolution du pacte, ainsi que pour la quote-part des revenus communs lui revenant. A défaut de justification de cette quote-part, ces revenus communs sont partagés en deux parts égales entre les époux, partenaires, anciens époux ou anciens partenaires liés par un pacte civil de solidarité (...) ". Il résulte de l'ensemble de ces dispositions qu'il incombe à la partie qui défend le régime d'imposition distincte, indépendamment de la procédure d'imposition suivie, d'apporter la preuve que les conditions en sont remplies.
3. Pour rejeter la réclamation préalable formée par M. B..., l'administration fiscale s'est exclusivement fondée sur les dispositions du c précité du 4 de l'article 6 du code général des impôts, en estimant qu'il avait abandonné le domicile conjugal depuis 2011 et que les époux disposaient de revenus distincts.
4. En l'espèce, M. B... produit une ordonnance sur tentative de conciliation rendue le 5 décembre 2013 par un juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Lyon, aux termes de laquelle les deux époux ont déclaré résider toujours ensemble au domicile familial, affirmation corroborée par la déclaration des revenus de l'année 2012 de M. B..., déclarant cette même adresse au 1er janvier 2013. Quels qu'en soient les motifs, ce retour au domicile conjugal, qui ne devait prendre fin qu'au 1er janvier 2014, soit postérieurement au 31 décembre 2013, fait obstacle à ce que la condition d'abandon du domicile conjugal puisse être regardée comme remplie au titre de l'année 2013, alors même que les époux, mariés sous le régime de la séparation de biens et n'ayant pas vécu sous le même toit en 2011 et 2012 en raison du départ du requérant du domicile conjugal, ont fait l'objet d'une imposition séparée au titre des années précédentes, en application du a précité du 4 de l'article 6 du code général des impôts. Par ailleurs, si le ministre, qui ne forme au demeurant aucune demande de substitution de motifs, fait valoir qu'il existerait deux logements distincts à l'adresse du domicile du couple, il n'apporte aucun élément probant au soutien de cette allégation, contredite par le requérant. M. B... est ainsi fondé à se prévaloir du régime d'imposition commune des époux au titre de l'année 2013, malgré le dépôt par l'épouse d'une déclaration séparée pour l'année en cause.
5. En revanche, le ministre soutient, sans être contredit, que la fille aînée majeure de l'appelant a souscrit une déclaration de revenus au titre de l'année 2013 en vue de leur imposition dans les conditions de droit commun, de sorte que M. B... n'est pas fondé à se prévaloir d'un quotient familial de 3,5 parts, mais seulement de 3 parts, ainsi que le relève subsidiairement le ministre.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a intégralement rejeté sa demande tendant à la réduction des impositions en litige.
Sur les frais liés au litige :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante, une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon du 29 septembre 2020 est annulé.
Article 2 : M. B... est déchargé de la fraction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2013 excédant celles résultant d'une imposition commune de ses revenus et de l'application d'un quotient familial de trois parts, ainsi que des pénalités correspondantes, dans la limite de la somme de 23 962 euros.
Article 3 : L'Etat versera à M. A... B... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Délibéré après l'audience du 28 avril 2022, à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président de chambre,
Mme Dèche, présidente assesseure,
Mme Le Frapper, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 juin 2022.
La rapporteure,
M. Le Frapper
Le président,
F. Bourrachot
La greffière,
C. Langlet
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 20LY03423
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