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12/04/2022 | FRANCE | N°21LY00646

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 12 avril 2022, 21LY00646


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Isère lui a refusé le séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office.

Par un jugement n° 2004068 du 9 novembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 1er mars 20

21, Mme B..., représentée par Me Vigneron, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribun...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 23 juillet 2019 par lequel le préfet de l'Isère lui a refusé le séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office.

Par un jugement n° 2004068 du 9 novembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 1er mars 2021, Mme B..., représentée par Me Vigneron, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 9 novembre 2020 en tant qu'il rejette la demande de titre de séjour ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Isère du 23 juillet 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 200 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire de réexaminer sa situation dans un délai de trente jours sous la même astreinte et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail dans un délai de deux jours à compter de la notification de l'arrêt sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros à verser à son conseil, au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 34 et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat.

Elle soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé et est entaché d'erreur de fait et de droit ;

- si la cour estimait que la décision d'éloignement n'est pas abrogée, la décision d'obligation de quitter le territoire français est entachée d'incompétence du signataire de l'acte et méconnait l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision de refus de séjour est entachée d'incompétence ;

- le préfet ne justifie pas de la communication du rapport médical et de la compétence des médecins du collège ;

- le délai de trois mois prévu à l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'a pas été respecté ;

- le préfet ne justifie pas d'un avis motivé et actualisé concernant son état de santé ;

- l'avis du collège de médecins ne mentionne pas la capacité pour la requérante de voyager ;

- elle ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, et de ce fait un retour dans son pays d'origine méconnaîtrait les stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation en raison des risques pour sa santé et de la bonne intégration en France ;

- la décision comporte une erreur car si le préfet note que sa famille est en Angola le pays de destination fixé est la République Démocratique du Congo.

La requête a été communiquée au préfet de l'Isère, qui n'a pas produit de mémoire.

Par une décision du 3 février 2021, le bureau d'aide juridictionnelle a admis Mme B... à l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. François Bodin-Hullin, premier conseiller ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., de nationalité congolaise (RDC), née le 8 mars 1994, est entrée en France à la date déclarée du 24 juin 2015. La demande d'asile présentée par la requérante a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 15 juin 2017 puis par la Cour nationale du droit d'asile le 7 août 2017. Le préfet de l'Isère a pris un arrêté le 23 juillet 2019 par lequel il a refusé de délivrer un titre de séjour à Mme B..., l'a obligée à quitter le territoire français avec un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme B... relève appel du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 9 novembre 2020 en tant qu'il a rejeté sa demande d'annulation de la décision de refus de séjour.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ". En relevant notamment aux points 10 et 13 de son jugement, qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet a procédé effectivement à un examen particulier de la situation de la requérante, le tribunal, qui a par ailleurs suffisamment répondu au moyen tiré de la violation de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a suffisamment motivé le jugement et le jugement est ainsi régulier.

Sur la légalité de l'arrêté du 23 juillet 2019 :

3. Il y a lieu d'adopter les motifs par lesquels le tribunal a écarté le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision de refus de séjour.

4. Mme B... réitère en appel ses moyens de première instance selon lesquels le préfet ne justifie pas d'un avis motivé et actualisé concernant son état de santé et le préfet ne justifie pas de la communication du rapport médical et de la compétence des médecins du collège de médecins. Ces moyens ont été écartés à bon droit par le jugement attaqué, dont il y a lieu d'adopter les motifs.

5. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de cette décision ou s'il a privé les intéressés d'une garantie.

6. La requérante soutient que le délai de trois mois prévu à l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable n'a pas été respecté. Le médecin de l'office français de l'immigration et de l'intégration a établi son rapport le 6 septembre 2018 qui a été transmis au collège de médecins le 28 septembre 2018 et le collège de médecins a émis son avis le 25 janvier 2019. Toutefois si le délai de trois mois entre la transmission des éléments médicaux par la requérante et la date de l'avis du collège des médecins a été méconnu, la requérante n'allègue même pas que l'absence de respect de ce délai l'aurait privée d'une garantie alors qu'elle ne fait pas état d'une évolution de son état de santé. Le moyen ainsi articulé sera écarté.

7. Si la requérante soutient que l'avis du collège de médecins ne mentionne pas la capacité pour la requérante de voyager, il ressort des termes mêmes de l'avis daté du 25 janvier 2019 que " l'état de santé de l'intéressée peut lui permettre de voyager sans risque vers le pays d'origine ". Le moyen sera écarté.

8. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ".

9. Le collège des médecins de l'OFII a considéré dans son avis du 25 janvier 2019 que l'état de santé de Mme B... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'intéressée peut voyager sans risque à destination de son pays d'origine. En versant aux débats plusieurs certificats médicaux attestant de ce qu'elle souffre de problèmes gynécologiques, la requérante n'apporte pas d'éléments probants de nature à infirmer l'appréciation portée par le collège des médecins de l'OFII sur son état de santé. Par suite, le préfet de l'Isère n'a pas méconnu les dispositions de l'article citées au point précédent en refusant de délivrer un titre de séjour à Mme B.... Dès lors que le défaut de traitement ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, la circonstance que Mme B... ne pourrait effectivement bénéficier dans ce pays du traitement dont elle a besoin est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de la décision attaquée. Dans ces conditions, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet de l'Isère aurait fait une inexacte application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou méconnu les articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison des risques encourus.

10. Mme B... soutient, en versant de nombreuses attestations, avoir tissé des liens en France du fait d'activités bénévoles. De nationalité congolaise, la requérante, âgée de vingt-cinq ans à la date de la décision attaquée, est entrée en France en juin 2015. La demande d'asile qu'elle a déposée a été définitivement rejetée le 7 août 2017. Alors qu'elle ne résidait sur le territoire français que depuis quatre ans à la date de la décision attaquée, elle ne justifie pas être dépourvue de toute attache privée et familiale dans son pays d'origine alors même que sa famille résiderait en Angola, ni avoir noué en France des liens personnels d'une intensité particulière. La décision précise que Mme B... sera reconduite à destination du pays dont elle a la nationalité ou tout autre pays où elle est légalement admissible. Dans ces conditions la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet a commis une erreur de fait en fixant son seul pays de nationalité comme pays de destination alors que cette décision n'a pas pour objet de l'empêcher de rejoindre sa famille en Angola. Par suite et compte tenu de ce qui a été dit plus haut au sujet de sa situation médicale, l'arrêté attaqué, en tant qu'il porte refus de séjour, n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

11. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

12. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions dirigées contre l'arrêté du 23 juillet 2019, n'appelle aucune mesure d'exécution. Les conclusions de Mme B... tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 200 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire de réexaminer sa situation dans un délai de trente jours sous la même astreinte et dans l'attente de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail dans un délai de deux jours à compter de la notification de l'arrêt sous la même astreinte ne peuvent dès lors qu'être rejetées.

Sur les frais d'instance :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il en soit fait application à l'encontre de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 22 mars 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Danièle Déal, présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

M. François Bodin-Hullin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 avril 2022.

Le rapporteur,

François Bodin-Hullin

La présidente,

Danièle Déal

La greffière,

Fabienne Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY00646


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00646
Date de la décision : 12/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: M. François BODIN-HULLIN
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : VIGNERON

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-04-12;21ly00646 ?
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