Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme B... C..., en sa qualité d'ayant-droit de son époux décédé, a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 2 avril 2019, par laquelle la ministre des armées a refusé de faire droit à la demande de révision de la pension militaire d'invalidité de M. A... C... et de lui reconnaître un droit à pension pour une infirmité nouvelle.
Par un jugement n° 2000012 du 7 octobre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 22 février 2021, Mme C..., représentée par Me Bouhalassa, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 7 octobre 2020 ;
2°) d'annuler la décision du 2 avril 2019 et de faire droit à sa demande de pension ;
3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation par son conseil à la part participative de l'État à l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- si, du fait de la lenteur de l'instruction de sa demande l'expertise médicale n'a pu être réalisée avant le décès de M. C..., l'ensemble des documents médicaux produits au dossier établissent l'aggravation de l'infirmité pensionnée résultant des séquelles de fracture par balle du fémur gauche ;
- l'existence et l'imputabilité au service de l'infirmité nouvelle résultant de corps métalliques étrangers, provenant de projectiles, dans le thorax sont établies par les pièces du dossier.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 novembre 2021, la ministre des armées conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que :
- l'expertise médicale a été empêchée par les aléas de santé de M. C... et non par des lenteurs dans l'instruction de sa demande ;
- Mme C... n'établit pas, comme il lui incombe, le lien entre les infirmités de M. C... et le service, non plus que la réalité du fait générateur de la nouvelle infirmité.
Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 décembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2018-1291 du 28 décembre 2018 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Josserand-Jaillet, président ;
- et les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1 Alors qu'il était incorporé dans le contingent du service national en Algérie, M. C... a été blessé par balle en opération le 1958. Par un arrêté du 24 octobre 2011, lui a été concédée au titre des séquelles de fracture par balle du fémur gauche et d'un état de stress post-traumatique, deux infirmités résultant de cet événement, une pension militaire d'invalidité au taux global de 70 %. M. C... a sollicité, le 27 juin 2016, la révision de cette pension pour l'aggravation de la première de ces infirmités et l'attribution d'une pension au titre d'une infirmité nouvelle. Par une décision du 2 avril 2019, la ministre des armées a rejeté cette demande. Mme C..., en sa qualité d'ayant-droit de son époux décédé le, durant l'instruction de cette dernière, fait appel du jugement du 7 octobre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté son recours contre ce rejet.
2 Aux termes de l'article L. 151-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, qui reprend les dispositions de l'ancien article L. 6 de ce même code : " La pension militaire d'invalidité prévue par le présent code est attribuée sur demande de l'intéressé. L'entrée en jouissance est fixée à la date du dépôt de la demande (...). "
3 Aux termes de l'article L. 2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre, en vigueur à la date de la demande de M. C... : " Ouvrent droit à pension : 1° Les infirmités résultant de blessures reçues par suite d'événements de guerre ou d'accidents éprouvés par le fait ou à l'occasion du service (...). " Aux termes de l'article L. 3 du même code, alors applicable : " Lorsqu'il n'est pas possible d'administrer ni la preuve que l'infirmité ou l'aggravation résulte d'une des causes prévues à l'article L. 2, ni la preuve contraire, la présomption d'imputabilité au service bénéficie à l'intéressé à condition : 1° S'il s'agit de blessure, qu'elle ait été constatée avant le renvoi du militaire dans ses foyers ; 2° S'il s'agit d'une maladie, qu'elle n'ait été constatée qu'après le quatre-vingt-dixième jour de service effectif et avant le soixantième jour suivant le retour du militaire dans ses foyers ; 3° En tout état de cause, que soit établie, médicalement, la filiation entre la blessure ou la maladie ayant fait l'objet de la constatation et l'infirmité invoquée (..). "
4 Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'une pension, s'il ne peut prétendre au bénéfice de la présomption légale d'imputabilité au service, doit rapporter la preuve de l'existence d'un fait précis ou de circonstances particulières de service à l'origine de l'affection qu'il invoque. Cette preuve ne saurait résulter de la seule circonstance que l'infirmité soit apparue durant le service, ni d'une hypothèse médicale, ni d'une vraisemblance, ni d'une probabilité, aussi forte soit-elle.
5 Si Mme C... fait valoir que le décès de son époux, intervenu durant l'instruction de sa demande, a fait inopportunément obstacle à l'expertise médicale, reportée à plusieurs reprises en raison de l'état de santé de l'intéressé, et aussi regrettable que soit cette circonstance, il ne saurait être tiré de cette dernière un renversement de la charge de la preuve des faits à l'origine de l'infirmité invoquée et de l'aggravation de l'infirmité pensionnée qui, ainsi qu'il a été dit au point 4, pèse sur l'intéressé.
6 En premier lieu, s'agissant de la demande de pension militaire d'invalidité pour une infirmité nouvelle, M. C... a fait valoir qu'avec le temps il subissait des séquelles douloureuses et invalidantes d'un corps étranger métallique en projection sur la base droite (du thorax). Toutefois, d'une part, ainsi que le retient la décision en litige dans ses motifs, cette infirmité n'a pas été constatée dans les délais fixés par les dispositions précitées de l'article L. 3 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre. D'autre part, si les certificats médicaux produits au dossier établissent la présence d'un corps étranger métallique dans le thorax de l'intéressé en le qualifiant tantôt " d'éclat de grenade ", tantôt de " balle ", aucun des éléments du dossier ne révèle le constat d'une autre blessure reçue par M. C... le 27 septembre 1958 que celle au fémur gauche. La première mention de ce corps étranger n'apparaît que dans l'expertise médicale effectuée le 26 octobre 1982. Dans ces conditions, et aussi forte que soit la probabilité que M. C... ait pu être atteint par un second projectile dans les circonstances de l'embuscade dans laquelle a été prise son unité et décrites par un rapport du 1er juin 1978, Mme C... n'apporte pas la preuve qui lui incombe du lien entre ce fait de service et l'infirmité au titre de laquelle est demandée la pension.
7 En second lieu, s'agissant de la demande de révision de la pension pour aggravation de l'infirmité n° 1, nonobstant la circonstance que l'expertise n'a pu avoir lieu, d'une part, l'ensemble des éléments médicaux produits par l'intéressé sont antérieurs à la date de l'arrêté du 24 octobre 2011 ayant fixé le taux initial de l'invalidité et, par suite, ne peuvent utilement venir à l'appui de la démonstration d'une aggravation à la date de la demande de révision du 27 juin 2016 en l'absence d'éléments comparatifs postérieurs à octobre 2011. D'autre part, aucun des éléments du dossier n'établit les affirmations de la requérante quant à l'aggravation de l'infirmité résultant des séquelles de la fracture par balle du fémur gauche de M. C....
8 Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Il suit de là que sa requête doit être rejetée, dont les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et à la ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 10 mars 2022 à laquelle siégeaient :
M. Josserand-Jaillet, président ;
M. Seillet, président assesseur ;
Mme Djebiri, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mars 2022.
Le président, rapporteur,
D. Josserand-Jaillet
Le président assesseur,
Ph. Seillet
La greffière,
A. Le Colleter
La République mande et ordonne à la ministre des armées, en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
N° 21LY00564 2
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