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31/03/2022 | FRANCE | N°20LY00246

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 31 mars 2022, 20LY00246


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

- de rectifier la cédule d'imposition de la somme versée par le club F. C. Nantes afin de l'imposer dans la catégorie des traitements et salaires et d'admettre l'application du système du quotient prévu par l'article 163-0-A du code général des impôts ;

- de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1721420 du 12 novembre 2

019, le tribunal administratif de Lyon a estimé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon :

- de rectifier la cédule d'imposition de la somme versée par le club F. C. Nantes afin de l'imposer dans la catégorie des traitements et salaires et d'admettre l'application du système du quotient prévu par l'article 163-0-A du code général des impôts ;

- de prononcer la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à sa charge au titre de l'année 2012.

Par un jugement n° 1721420 du 12 novembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a estimé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête à concurrence des dégrèvements de cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales prononcés au titre de l'année 2012 (article 1er), a déchargé M. A... des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu correspondant à la majoration d'assiette de 25 % appliquée à la somme de 69 706 euros perçue au titre de l'année 2012 (article 2) et a rejeté le surplus de sa demande (article 3).

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire enregistrés les 14 janvier 2020 et 19 août 2020, M. A..., représenté par Me Andrieu, avocat, demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 12 novembre 2019 ;

2°) à titre principal, de lui accorder la décharge de l'intégralité des droits et pénalités mis à sa charge en matière d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2012, pour un montant de 78 175 euros ;

3°) à titre subsidiaire, de dire qu'il est en droit d'obtenir que les droits mis à sa charge soient recalculés compte tenu du rattachement des sommes litigieuses à la cédule des traitements et salaires, avec application du système du quotient prévu par les dispositions de l'article 163 0 A du code général des impôts ;

4°) en tout état de cause, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu résultant de l'application de la majoration prévue au 2° du 7 de l'article 158 du code général des impôts aux sommes de 4 182 euros correspondant aux intérêts de retard et de 6 971 euros, correspondant à la majoration pour défaut de déclaration ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a considéré le tribunal, ses conclusions portaient sur " l'abandon des redressements envisagés (...) d'un montant de 78 175 euros au titre de l'année 2012 " ; ainsi, sa demande de décharge est recevable en appel dès lors qu'elle ne porte pas sur un montant supérieur à celui figurant dans sa réclamation préalable ;

- l'indemnité versée par le club F. C. Nantes sur le fondement de l'annexe à la transaction qui constitue le prolongement de l'indemnité transactionnelle, a été engagée dans l'intérêt du club et ne saurait être imposée dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, au titre d'une distribution occulte ;

- subsidiairement, l'imposition de cette indemnité, dans sa globalité, doit être rattachée à la catégorie des traitements et salaires et il doit pouvoir bénéficier de l'application du système du quotient.

Par un mémoire enregistré le 17 juillet 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la demande du requérant devant les premiers juges portait seulement sur la décharge des cotisations supplémentaires d'imposition mises à sa charge en tant qu'elles résultaient de l'application de la majoration d'assiette de 25 % prévue par l'article 158-7-2° du code général des impôts ; ainsi ses conclusions en décharge totale des impositions litigieuses ne sont pas recevables ;

- subsidiairement, il demande par substitution de base légale que la somme de 69 706 euros correspondant aux droits pris en charge par le club F. C. Nantes soit imposée dans la catégorie des traitements et salaires ;

- le restant de la somme versée par le club F. C. Nantes ne correspondant à aucune contrepartie pour ce dernier, doit être imposé en tant qu'avantages occultes ou, subsidiairement en tant que traitements et salaires par substitution de base légale ;

- la demande du requérant tendant à l'application du système du quotient n'est pas recevable.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, présidente assesseure ;

- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Le 24 février 2009, M. A..., footballeur professionnel, a conclu un protocole transactionnel avec son ancien employeur, la société Football Club de Nantes (F.C. Nantes) par lequel il s'engageait à se désister de son action devant le conseil de prud'hommes, à renoncer à toute autre action contre le club et à respecter une obligation de confidentialité sur tous les événements ayant conduit à la rupture de son contrat. En contrepartie, le protocole transactionnel prévoyait le versement par le F.C. Nantes à M. A... d'une indemnité de 180 000 euros. En 2011, M. A... a fait l'objet d'un contrôle à l'issue duquel il a été assujetti à une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à raison de l'imposition dans la catégorie des traitements et salaires de la somme de 180 000 euros qu'il n'avait pas déclarée. En application de l'annexe au protocole d'accord transactionnel du 24 février 2009, le F.C. Nantes a remboursé à M. A..., en 2012, la somme de 80 859 euros, correspondant au montant total des impositions et pénalités qu'il avait acquittées, incluant une somme de 69 706 euros correspondant aux droits pris en charge par la société, une somme de 4 182 euros au titre d'intérêts de retard et une somme de 6 971 euros au titre d'une majoration de 10 %. Au cours de l'année 2015, la société Football Club de Nantes a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, à l'issue de laquelle l'administration a estimé que la somme de 80 859 euros ne constituait pas une charge déductible des résultats de la société et a considéré que cette somme constituait, pour M. A..., un avantage occulte imposable au titre des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement du c) de l'article 111 du code général des impôts. Par un jugement du 12 novembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a estimé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. A... à concurrence des dégrèvements de cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales prononcés au titre de l'année 2012 (article 1er), a déchargé M. A... des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu correspondant à la majoration d'assiette de 25 % appliquée à la somme de 69 706 euros perçue au titre de l'année 2012 (article 2) et a rejeté le surplus de sa demande (article 3). M. A... demande à la cour de réformer ce jugement et, à titre principal, de lui accorder la décharge de l'intégralité des droits et pénalités mis à sa charge en matière d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2012, pour un montant de 78 175 euros, à titre subsidiaire, de dire qu'il est en droit d'obtenir que les droits mis à sa charge soient recalculés compte tenu du rattachement des sommes litigieuses à la cédule des traitements et salaires, avec application du système du quotient prévu par les dispositions de l'article 163-0 A du code général des impôts et, en tout état de cause, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu résultant de l'application de la majoration prévue au 2° du 7 de l'article 158 du code général des impôts aux sommes de 4 182 euros correspondant aux intérêts de retard et de 6 971 euros, correspondant à la majoration pour défaut de déclaration.

Sur la recevabilité des conclusions tendant à la décharge totale des impositions en litige :

2. Devant le tribunal administratif, M. A... n'a demandé que la décharge des cotisations supplémentaires d'imposition mises à sa charge en tant qu'elles résultaient de l'application de la majoration d'assiette de 25 % prévue par le 2° du 7 de l'article 158 du code général des impôts et que son imposition soit établie dans la catégorie des traitements et salaires. En appel, il demande la décharge de l'intégralité des droits et pénalités mis à sa charge en matière d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre de l'année 2012, pour un montant de 78 175 euros. Ces conclusions, nouvelles en appel, sont irrecevables. Il y a lieu, par suite, d'accueillir la fin de non-recevoir soulevée par l'administration et de rejeter, pour ce motif, ces conclusions.

Sur le bien-fondé du surplus des impositions :

3. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ".

4. Lorsqu'une société a pris en charge des dépenses incombant normalement à un tiers sans que la comptabilisation de cette opération ne révèle, par elle-même, l'octroi d'un avantage, il appartient à l'administration, si elle entend faire application des dispositions précitées du c de l'article 111 du code général des impôts pour imposer, dans les mains du tiers, cette somme, d'établir, d'une part, que la prise en charge de cette dépense ne comportait pas de contrepartie pour la société, et d'autre part, qu'il existait une intention, pour celle-ci, d'octroyer, et pour le tiers, de recevoir, une libéralité.

5. En premier lieu, le ministre demande, par substitution de base légale, que la somme de 69 706 euros correspondant aux rappels de droits pris en charge par le F.C. Nantes, et qui trouve son origine dans le contrat de travail de l'intéressé, demeure taxée au nom de M. A... dans la catégorie des traitements et salaires. Une telle substitution de base légale est possible dès lors qu'elle n'a pas pour effet de priver le contribuable d'une garantie. L'imposition de cette somme litigieuse peut ainsi partiellement être maintenue, en droits et pénalités, sur le fondement de l'article 82 du code général des impôts, à concurrence de ce qu'implique sa qualification de traitements et salaires en lieu et place de la qualification de revenus distribués.

6. En second lieu, l'administration a imposé dans la catégorie des revenus mobiliers les sommes de 4 182 euros et de 6 971 euros correspondant respectivement au remboursement par le F.C. Nantes à M. A... des intérêts de retard et de la majoration de 10 % auxquels il a été assujetti du fait du défaut de déclaration de la somme de 180 000 euros au titre de ses revenus, au motif que le versement de ces sommes était dépourvu de contrepartie et n'a pas été engagé dans l'intérêt direct de la société concernée. Toutefois, ainsi qu'il a été dit précédemment, le ministre a reconnu que le remboursement par le F.C Nantes de la somme de 69 706 euros correspondant au montant des droits qui lui ont été réclamés par l'administration à l'issue de la procédure de rectification dont M. A... a fait l'objet, ne constituait pas un avantage occulte pouvant être imposé dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. Ce faisant, le ministre ne saurait être regardé comme établissant que le remboursement des pénalités et intérêts de retard lié à cette somme serait dépourvu de toute contrepartie pour la société, en se bornant à faire valoir que l'annexe du protocole du 24 février 2009, intitulée " garantie sociale " qui comportait une clause prévoyant que le F.C. Nantes prendrait à sa charge toute somme qui pourrait être réclamée à M. A... au titre de l'impôt sur le revenu sur le versement de la somme de 180 000 euros, ne prévoyait pas expressément le remboursement des pénalités et intérêts appliqués dans l'éventualité d'un redressement fiscal. Toutefois, subsidiairement, le ministre demande par substitution de base légale, que lesdites sommes demeurent taxées au nom de M. A... dans la catégorie des traitements et salaires. Une telle substitution de base légale est possible dès lors qu'elle n'a pas pour effet de priver le contribuable d'une garantie. L'imposition de cette somme litigieuse peut ainsi partiellement être maintenue, en droits et pénalités, sur le fondement de l'article 82 du code général des impôts, à concurrence de ce qu'implique sa qualification de traitements et salaires en lieu et place de la qualification de revenus distribués.

Sur la demande d'application de l'article 163-0 A du code général des impôts :

7. Aux termes de l'article 163-0 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - Lorsqu'au cours d'une année un contribuable a réalisé un revenu qui par sa nature n'est pas susceptible d'être recueilli annuellement et que le montant de ce revenu exceptionnel dépasse la moyenne des revenus nets d'après lesquels ce contribuable a été soumis à l'impôt sur le revenu au titre des trois dernières années, l'intéressé peut demander que l'impôt correspondant soit calculé en ajoutant le quart du revenu exceptionnel net à son revenu net global imposable et en multipliant par quatre la cotisation supplémentaire ainsi obtenue. (...) "

8. Il résulte de l'instruction et notamment des écritures présentées par l'administration devant les premiers juges que la moyenne des revenus nets d'après lesquels l'intéressé a été soumis à l'impôt sur le revenu au titre des trois années précédentes s'établit au montant non contesté de 149 343 euros. Il en résulte que le montant du revenu exceptionnel de 80 859 euros versé à l'intéressé en 2012 apprécié conformément aux règles posées par l'article 163-0 A du code général des impôts ne dépassait pas la moyenne des revenus nets d'après lesquels le contribuable avait été soumis à l'impôt sur le revenu au titre des trois dernières années. Dès lors que les conditions tenant au montant du revenu ne sont pas pas remplies, les règles dérogatoires posées par l'article 163-0 A du code général des impôts pour le calcul de l'impôt ne peuvent recevoir application.

9. Il résulte de ce qui précède que M. A... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon n'a pas prononcé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu litigieuses, en tant qu'elles résultent de l'application de la majoration d'assiette de 25 % prévue par le 2° du 7 de l'article 158 du code général des impôts, à hauteur de ce qu'implique la requalification en traitements et salaires des sommes de 69 706 euros, 4 182 euros et 6 971 euros.

Sur les frais liés au litige :

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante dans la présente instance, la somme de 2 000 euros à verser à M. A..., au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : M. A... est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2012, en tant qu'elles résultent et à hauteur de l'application de la majoration d'assiette de 25 % prévue par le 2° du 7 de l'article 158 du code général des impôts, à hauteur de ce qu'implique la requalification en traitements et salaires des sommes de 69 706 euros, 4 182 euros et 6 971 euros.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Lyon est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : l'Etat versera à M. A... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2022 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Le Frapper, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mars 2022.

La rapporteure,

P. Dèche

Le président,

F. Bourrachot

La greffière,

C. Langlet

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance, en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 20LY00246

lc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20LY00246
Date de la décision : 31/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-02-01-02 Contributions et taxes. - Règles de procédure contentieuse spéciales. - Questions communes. - Pouvoirs du juge fiscal.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : MARCE ANDRIEU MAQUENNE CARAMEL CREPIN

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-03-31;20ly00246 ?
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