Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 9 janvier 2021 par lequel le préfet de l'Isère l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, lui a fixé un pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pendant une durée de deux années, ainsi que l'arrêté pris le même jour l'assignant à résidence, et d'enjoindre au préfet de l'Isère de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter du jugement sous astreinte de 200 euros par jour de retard.
Par un jugement nos 2100150 - 2100151 du 15 janvier 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 8 avril 2021, M. B... A..., représenté par Me Morlat, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement nos 2100150 - 2100151 du 15 janvier 2021 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) d'annuler les décisions du préfet de l'Isère du 9 janvier 2021 portant obligation de quitter le territoire français, interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans et assignation à résidence ;
3°) d'enjoindre à l'administration de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt et sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
4°) de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la signataire de l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français est incompétent ;
- l'arrêté portant assignation à domicile est insuffisamment motivé ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnait son droit au respect de sa vie privée et familiale au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 7 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, de l'article 16-3 de la déclaration universelle des droits de l'homme et de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 dès lors qu'il réside en France depuis plus de vingt ans, qu'il y vit avec son épouse et leurs trois enfants qui sont scolarisés et qu'il est bien inséré dans la société.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mai 2021, le préfet de l'Isère conclut au rejet de la requête :
Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant sont infondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 mars 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Gayrard, président assesseur.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 9 janvier 2021, le préfet de l'Isère a obligé M. B... A..., né le 2 décembre 1978 en Algérie, à quitter le territoire français sans délai, lui a fixé un pays de renvoi et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de deux années. Par arrêté du même jour, le préfet de l'Isère l'a également assigné à résidence. Par jugement du 15 janvier 2021, dont M. A... relève appel, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.
2. En premier lieu, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des actes attaqués, que le requérant reprend en appel sans apporter aucun élément de fait ou de droit nouveau, peut être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par la première juge.
3. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, l'arrêté portant obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retour comporte l'ensemble des circonstances de droit ou de faits sur lesquelles il se fonde. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation ne peut qu'être écarté.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ". Aux termes de l'article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de ses communications. ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant ; (...) 5. Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".
5. Si M. A... soutient qu'il réside en France depuis une vingtaine d'années, il n'apporte aucun justificatif suffisamment probant pour établir un séjour habituel d'une telle durée, ni même d'une durée de dix ans. Il ressort des pièces du dossier qu'il a déjà fait l'objet de mesures d'éloignement en 2016 et 2018 auxquelles il n'a pas déféré. S'il fait valoir qu'il vit en France avec son épouse et leurs trois enfants, celle-ci est également en situation irrégulière et, dès lors que tous les membres de la famille ont la même nationalité, rien ne fait obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue en Algérie, pays dans lequel il n'est pas dénué d'attaches familiales. En produisant une promesse d'embauche ancienne, il ne justifie pas de son insertion dans la société française alors que le préfet soutient sans susciter de réplique qu'il est défavorablement connu des forces de l'ordre pour des faits d'usurpation d'identité, de fausses déclarations auprès d'organismes sociaux et enfin de recel de bien volé. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet a porté une atteinte manifestement disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et ainsi méconnu les stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. L'appelant ne saurait invoquer utilement la Déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948, qui ne fait pas partie des textes diplomatiques ratifiés par la France dans les conditions fixées aux articles 26 de la Constitution de 1946 ou 55 de la Constitution de 1958.
6. En dernier lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, celui-ci n'a pas soulevé en première instance le moyen tiré d'une insuffisance de motivation de l'arrêté portant assignation à résidence. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait entaché d'une omission à statuer en tant qu'il se prononce sur la légalité de cet arrêté doit être écarté. De plus, cet arrêté comportant l'ensemble des circonstances de droit ou de faits sur lesquelles il se fonde, le moyen tiré de son insuffisance de motivation ne peut qu'être écarté.
7. Il découle de tout ce qui précède que les conclusions de M. A... tendant à l'annulation des arrêtés du préfet de l'Isère du 9 janvier 2021 ne peuvent être accueillies, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ou présentées sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information, au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 24 février 2022, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Gayrard, président assesseur,
M. Pin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 mars 2022.
N° 21LY01102 2