La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/03/2022 | FRANCE | N°21LY01139

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 10 mars 2022, 21LY01139


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler l'arrêté du 8 mars 2021 par lequel le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français de deux ans ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 mars 2021 par lequel le préfet de l'Isère l'a assigné à résidence ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-

1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2101514 du 12 mars 2021, le tribunal administ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler l'arrêté du 8 mars 2021 par lequel le préfet du Rhône l'a obligé à quitter le territoire français, a fixé le pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français de deux ans ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 mars 2021 par lequel le préfet de l'Isère l'a assigné à résidence ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2101514 du 12 mars 2021, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 10 avril 2021, M. B..., représenté par Me Sonko, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement susmentionné du 12 mars 2021 du tribunal administratif de Grenoble et les arrêtés précités du 8 mars 2021 du préfet du Rhône et du 8 mars 2021 du préfet de l'Isère ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- en ce qui concerne les moyens communs aux décisions contestées :

. elles ne sont pas motivées ;

. elles n'ont pas été précédées d'un examen particulier de sa situation personnelle ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision refusant de lui octroyer un délai de départ volontaire a été prise en violation de l'article L. 511-1, II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an méconnait l'article L. 511-1, III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, revêt un caractère disproportionné, et viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Rivière.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 8 mars 2021, le préfet du Rhône a obligé M. A... B..., ressortissant sénégalais, à quitter le territoire français, a fixé le pays de destination en cas d'éloignement d'office et l'a interdit de retour sur le territoire français pendant deux ans. Par un arrêté du même jour, le préfet de l'Isère l'a assigné à résidence. L'intéressé a demandé au tribunal administratif de Grenoble l'annulation de ces décisions. Par un jugement n° 2101514 du 12 mars 2021, dont il relève appel, ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur les moyens communs aux décisions contestées :

2. En premier lieu, les décisions contestées comportent les considérations de droit et de fait qui les fondent et sont, par suite, suffisamment motivées.

3. En second lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que les décisions attaquées n'aient pas été précédées d'un examen particulier de la situation personnelle de l'intéressé.

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".

5. Il ressort des pièces du dossier que M. B... déclare être entré en France en novembre 2010, muni de son passeport revêtu d'un visa long séjour étudiant et soutient avoir obtenu au titre de l'année 2012/2013 un master sciences et technologies à finalité recherche, mention physique, spécialité " optique et photonique, signal et image " et en 2016 un master sciences et technologies à finalité professionnelle, mention physique, spécialité " instrumentation optique et laser ". Toutefois, et alors qu'il ne justifie pas être titulaire de tels diplômes, ses études ne lui donnaient pas vocation à rester en France. Il se maintient sur le territoire national en dépit d'un refus de séjour, motivé notamment par l'absence de progression dans le cadre des études suivies en France, assorti d'une obligation de quitter le territoire français, prononcé à son encontre le 28 septembre 2016 par le préfet des Bouches-du-Rhône et confirmé par un jugement n° 1609316 du 27 mars 2017 du tribunal administratif de Marseille. S'il vit en concubinage avec une compatriote titulaire d'une carte de séjour temporaire d'un an portant la mention " travailleur temporaire " valable jusqu'au 30 janvier 2022, qui occupe un emploi contractuel d'assistante de recherche clinique au sein du centre hospitalier universitaire de Grenoble, qui est la mère de leur enfant né en France le 2 février 2018, rien ne fait obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue au Sénégal, où il n'est pas établi que sa conjointe ne pourrait pas y poursuivre une vie privée et familiale normale. M. B... n'établit d'ailleurs pas être dépourvu d'attaches familiales dans ce pays alors qu'il ne justifie pas d'une intégration particulière en France. Ainsi, compte tenu de la durée et des conditions du séjour en France de M. B..., la décision contestée ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Elle ne méconnait dès lors pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale.

Sur la légalité de la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :

6. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. - L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...)/ d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement (...). ".

7. Ainsi qu'il a été dit précédemment, M. B... s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement. Par suite, et alors même qu'il a remis son passeport, qui est au demeurant expiré depuis le 3 mars 2020, et qu'il est hébergé chez sa concubine, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que la décision attaquée a été prise en violation de l'article L. 511-1, II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an :

8. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".

9. Dès lors que la décision contestée fait suite à l'absence d'octroi d'un délai de départ volontaire à l'intéressé, que ce dernier n'allègue ni ne justifie d'une circonstance humanitaire et eu égard à ce qui a été dit au point 5, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an méconnait l'article L.511-1, III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est entaché d'une erreur d'appréciation, et viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

10. Il résulte de tout de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

11. Ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent par suite qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet du Rhône et au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 10 février 2022, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président de chambre,

Mme Michel, président-assesseur,

M. Rivière, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 mars 2022.

2

N° 21LY01139


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY01139
Date de la décision : 10/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: M. Christophe RIVIERE
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : SONKO

Origine de la décision
Date de l'import : 22/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-03-10;21ly01139 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award