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03/03/2022 | FRANCE | N°19LY02837

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre, 03 mars 2022, 19LY02837


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme B... ont demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1800910 du 21 mai 2019, le tribunal administratif de Lyon a, dans un article 1er, constaté qu'il n'y a pas lieu à statuer sur les conclusions de M. et Mme B... tendant à la décharge, en droits et en pénalités, des cotisatio

ns supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme B... ont demandé au tribunal administratif de Lyon la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1800910 du 21 mai 2019, le tribunal administratif de Lyon a, dans un article 1er, constaté qu'il n'y a pas lieu à statuer sur les conclusions de M. et Mme B... tendant à la décharge, en droits et en pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 à concurrence de la somme de 828 euros, dans un article 2, réduit la base des prélèvements sociaux fixée à M. et Mme B... au titre de l'année 2011 d'une somme de 96 299,60 euros, dans un article 3, réduit la base de l'impôt sur le revenu fixée à M. et Mme B... au titre de l'année 2011 d'une somme de 120 374,50 euros, dans un article 4, déchargé M. et Mme B... A... la cotisation supplémentaire de prélèvements sociaux à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 à hauteur de la réduction de leur base d'imposition définie à l'article 2, ainsi que des pénalités correspondantes, dans un article 5, déchargé M. et Mme B... A... la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 à hauteur de la réduction de leur base d'imposition définie à l'article 3, ainsi que des pénalités correspondantes et, dans un article 6, rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédure devant la cour

Par une requête et deux mémoires, enregistrés les 18 juillet 2019, 15 octobre 2020 et 3 mai 2021, M. et Mme B..., représentés par Me Lichtle, demandent à la cour :

1°) d'annuler l'article 6 du jugement du 21 mai 2019 susvisé et leur accorder la décharge des impositions restant à leur charge en droits et pénalités ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 7 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. et Mme B... soutiennent que :

- la somme de 201 500 euros figurant au crédit du compte courant d'associé de M. B... dans la SARL Marceau Immobilier n'était pas disponible eu égard à la situation de la trésorerie de la société ;

- le crédit de 8 617,50 euros constitue une avance en compte-courant provenant de la liquidation de la société civile de construction-vente Les Jardins de Collonges ;

- le crédit de 12 751 euros correspond au paiement par M. B... d'une quote-part du montant des factures demeurant dû à un fournisseur suite à un contentieux ; le désintéressement de ce créancier étant intervenu en 2010, à supposer qu'il s'agisse d'un revenu, il serait imposable au titre de l'année 2010 ;

- la SARL Marceau Immobilier peut être amenée à consentir des crédits gratuits en vue de favoriser ses ventes et a déjà consenti un tel crédit à une autre cliente pour un montant de 24 555 euros représentant 20,60 % du prix de vente ; dès lors, la facilité de paiement accordée à la SCI Les Samouraï, qui a été formalisée par écrit et représente seulement 5,59 % de prix de vente, ne constitue pas un acte anormal de gestion ;

- le contrat de réservation du 15 mars 2010, dont l'existence est mentionnée dans l'acte de vente en l'état futur d'achèvement du 28 septembre 2010, atteste que les parties ont convenu d'un prix " acte en main " ; dès lors que les frais de la vente étaient à la charge du vendeur, la SARL Marceau Immobilier n'a pas commis un acte anormal de gestion ; en outre, l'omission relevée par l'administration dans l'acte de vente a été corrigée par un acte rectificatif du 22 mai 2017, qui a été enregistré le 8 mars 2018 au service de la publicité foncière ;

- les clefs de l'immeuble vendu à la SCI Baron Chaurand ont été remises à cette dernière avant l'achèvement des travaux ; la liste des travaux atteste qu'ils ont concouru à la réalisation de l'immeuble vendu ; la marge sur cette opération est de 17 % y compris ces travaux ; ces travaux ont ainsi été engagés dans l'intérêt de la SARL Marceau Immobilier ;

- à l'exception d'un voyage à Dubaï, aucune dépense n'a été engagée dans un but étranger à l'activité de la société ; ces revenus n'ont pas été perçus par M. B... mais résultent d'une simple présomption fiscale, alors qu'ils ne se sont pas enrichis ;

- l'administration n'établit pas l'existence d'un manquement délibéré.

Par deux mémoires, enregistrés les 2 avril 2020 et 30 mars 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête et demande à la cour, par la voie de l'appel incident, de réformer partiellement les articles 2, 3, 4 et 5 du jugement attaqué.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. et Mme B... ne sont pas fondés et que le tribunal a, à tort, estimé que l'année d'imposition à retenir pour les factures de travaux prises en charge par la SARL Marceau Immobilier au profit de la SCI Les Samouraïs, dont M. et Mme B... sont actionnaires, au cours des mois de juillet, septembre, octobre et novembre 2010, devait être l'année 2010 en raison de la clôture d'exercice de la SCI Les Samouraïs au 31 décembre.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rémy-Néris, première conseillère,

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public,

- et les observations de Me Ferragu pour les appelants.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de la vérification de comptabilité de la SARL Marceau Immobilier, qui exerce une activité de marchand de biens et dont M. B... est le gérant et associé à hauteur de 99 % du capital, l'administration a, par proposition de rectification du 12 décembre 2014, estimé, que la SARL Marceau immobilier avait distribué des revenus à M. et Mme B..., qu'elle a imposés sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 et du c de l'article 111 du code général des impôts. Ces derniers relèvent appel de l'article 6 du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté le surplus de leur demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011, ainsi que des pénalités correspondantes, et mises à leur charge en conséquence de ces rectifications.

Sur les sommes inscrites au crédit du compte courant d'associé de M. B... :

2. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. (...) ". Il résulte de ces dispositions que les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. La présomption de disponibilité d'une somme inscrite sur un compte courant ne peut être écartée que si le contribuable établit qu'il était dans l'impossibilité juridique de prélever ladite somme ou que la situation de trésorerie de la société rendait tout prélèvement financièrement impossible.

3. M. et Mme B... soutiennent que les sommes de 201 500 euros, 8 617,50 euros et de 12 751 euros inscrites au crédit du compte courant d'associé de M. B... dans les écritures de la SARL Marceau Immobilier ne constituent pas des revenus distribués.

4. Toutefois, s'agissant de la somme de 201 500 euros, correspondant à un virement de la SCI Les Samouraïs le 30 avril 2011, au crédit de ce compte courant d'associé, correspondant selon les requérants, à des recettes liées à la vente en l'état futur d'achèvement consentie à la SCI les Samouraïs par la SARL Marceau Immobilier, si ces derniers soutiennent que ladite somme ne pouvait être considérée à leur disposition dès lors que la trésorerie de la société ne lui permettait pas en 2011 de payer la somme correspondant à ce crédit, ses comptes bancaires étant débiteurs, il résulte de l'instruction que le solde du compte bancaire de la société était 73 778,54 euros au 31 janvier 2011 à la date de l'écriture litigieuse et il n'est pas contesté que le détail des prélèvements opérés en compte courant par M. B... au cours de l'année 2011 s'est élevé à la somme de 119 980,25 euros. Il résulte également de l'instruction que la SARL Marceau Immobilier a, au cours de l'exercice clos en 2011, et ainsi qu'il a été rappelé par un arrêt n°19LY02835 rendu le même jour par la cour, procédé à des actes anormaux de gestion qui ont limité sa trésorerie, et sans lesquels celle-ci aurait été suffisante pour procéder aux distributions en litige, ainsi en atteste la prise en charge des frais de vente incombant à la SCI Les Samouraïs à hauteur de 44 469 euros, le 28 septembre 2010, par la SARL Marceau Immobilier et de travaux au bénéfice de la SCI Baron Chaurand entre septembre 2010 et début 2011 à hauteur de 54 259 euros, sociétés dans lesquelles M. B... est associé. Il n'est également pas sérieusement contesté qu'une facture d'un montant de 300 875 euros émise par la SARL le 2 mars 2011 au nom de la SCI Les Jardins de Felix, dont M. B... détient 99 % des parts, n'a été payée que le 30 juin 2012 par le débit du compte courant d'associé de M. B..., ce qui a privé la SARL Marceau Immobilier d'une recette au titre de l'exercice 2011. Par suite, les requérants ne combattent pas utilement la présomption de disponibilité des revenus instituée par les dispositions précitées.

5. S'agissant du crédit de 8 617,50 euros et du crédit de 12 751 euros portés sur le compte courant d'associé de M. B..., les requérants n'apportent aucun élément nouveau en appel. Il y a lieu d'écarter les moyens réitérés en appel s'agissant de ces crédits par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal aux points 13 et 14 de son jugement.

Sur les sommes imposées en tant qu'avantages occultes :

6. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) / c. Les rémunérations et avantages occultes ; (...) ".

7. En premier lieu, M. et Mme B... réitèrent en appel leur contestation des sommes imposées au titre de revenus distribués sur le fondement des dispositions précitées en leur qualité d'associés à hauteur de 100% de la SCI Les Samouraïs afférentes à l'absence de facturation des intérêts d'un prêt consenti à cette société par la SARL Marceau Immobilier, sans apporter aucun élément nouveau ni critiquer utilement les motifs par lesquels le tribunal a écarté leur moyen. Il y a lieu pour la cour d'écarter ce moyen par adoption des motifs circonstanciés retenus par les premiers juges au point 4 de leur jugement.

8. En second lieu, l'administration a refusé d'admettre en déduction plusieurs factures concernant des travaux d'un montant de 47 006,83 euros effectués dans un immeuble situé rue du Baron Chaurand à Saint-Genis-Laval appartenant à la SCI Baron Chaurand, dont M. et Mme B... sont les seuls actionnaires. M. et Mme B... soutiennent que la SARL Marceau Immobilier a été contrainte d'avancer la remise des clés alors que l'immeuble n'était pas encore achevé afin d'obtenir de la SCI Baron Chaurand, son acquéreur, la trésorerie nécessaire à l'avancement des travaux convenus dans l'acte de vente. Toutefois, s'il résulte de l'instruction que la SARL Marceau Immobilier a cédé par acte notarié du 25 juillet 2008 à cette SCI en l'état futur d'achèvement un groupe de cinq maisons individuelles situées à Saint-Genis Laval pour un prix de 450 000 euros TTC, l'administration indique, sans être contredite, que le montant total des règlements effectués par l'acquéreur entre juillet 2008 et septembre 2009 correspondent précisément à ce prix. En outre, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la date de remise effective des clés a eu lieu le 21 septembre 2009 soit une date postérieure à celle prévue au contrat à savoir le 1er septembre 2009. Il ne saurait être ainsi soutenu que la remise des clés a été effectuée de manière anticipée. Enfin, les requérants ne contestent pas davantage que les travaux en cause ont été comptabilisés le 30 juin 2011 pour des travaux facturés entre le 1er juillet 2010 et le 31 janvier 2011, soit plusieurs mois après la remise des clés, et ils ne produisent aucun élément permettant de rattacher les travaux en cause à l'opération susvisée. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a considéré que le montant TTC de ces travaux a constitué pour M. et Mme B... en leur qualité d'associé de la SCI Baron Chaurand un avantage occulte imposable sur le fondement des dispositions précitées.

9. Toutefois, les avantages consentis à une société de personnes doivent être regardés comme appréhendés par les associés de celle-ci. Lorsqu'un avantage a été versé par une société commerciale à une société de personnes dont les associés sont par ailleurs actionnaires de la société commerciale, cet avantage doit être regardé comme appréhendé par ces associés et donc comme des revenus distribués. En outre, en vertu des dispositions des articles 8 et 12 du code général des impôts, les bénéfices des sociétés de personnes sont soumis à l'impôt sur le revenu entre les mains des associés présents à la date de clôture de l'exercice, qui sont ainsi réputés avoir personnellement réalisé chacun une part de ces bénéfices à raison de leurs droits dans la société à cette date. Il en résulte, ainsi que l'a considéré par le tribunal, que l'avantage occulte constaté par l'administration s'agissant uniquement des travaux dont les factures ont été prises en charge et réglées au cours des mois de juillet, septembre, octobre, novembre 2010 par la SARL Marceau Immobilier, et dont les montants ne sont pas contestés par l'administration, doit être imposé au titre de l'année 2010 dès lors que la SCI Baron Chaurand, bénéficiaire de l'avantage, a clôturé son exercice au 31 décembre 2010. Par suite, le ministre de l'économie, des finances et de la relance n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a déchargé M. et Mme B... des impositions mises à leur charge au titre de l'année 2011 résultant de l'avantage ainsi accordé à la SCI Baron Chaurand par la SARL Marceau Immobilier par la prise en charge de ces factures.

10. S'agissant en revanche des travaux facturés par l'entreprise BRPS le 31 janvier 2011 d'un montant toutes taxes comprises de 2 878,34 euros, imposable au titre de l'année 2011, M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que l'administration a imposé cette somme en tant que revenus distribués sur le fondement des dispositions précitées.

Sur les pénalités :

11. M. et Mme B... réitèrent en appel leur moyen tiré de ce que l'administration ne justifie pas l'application de la pénalité de 40 % pour manquement délibéré prévue par les dispositions de l'article 1729 du code général des impôts sans apporter aucun élément nouveau de fait ou de droit à l'appui de ceux-ci. Il y a lieu pour la cour d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal.

Sur les frais liés au litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. et Mme B... demandent au titre des frais qu'ils ont exposés.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.

Article 2 : L'appel incident du ministre de l'économie, des finances et de la relance est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Délibéré après l'audience du 3 février 2022 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Dèche, présidente assesseure,

Mme Rémy-Néris, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 mars 2022.

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N°19LY02837


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY02837
Date de la décision : 03/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-03-01-01-02 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. - Revenus distribués. - Notion de revenus distribués. - Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Vanessa REMY-NERIS
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SELAS FIDAL - BUREAU DE LYON

Origine de la décision
Date de l'import : 15/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-03-03;19ly02837 ?
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