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17/02/2022 | FRANCE | N°21LY00936

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre, 17 février 2022, 21LY00936


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 8 octobre 2020 du préfet de la Drôme portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignation du pays de renvoi.

Par un jugement n° 2006779 du 22 février 2021, ce tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 22 mars 2021, M. A..., représenté par Me Gay, demande à la cour :

1°) d'annu

ler ce jugement et cet arrêté ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Drôme, sous astreinte de 50 euros par jo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 8 octobre 2020 du préfet de la Drôme portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignation du pays de renvoi.

Par un jugement n° 2006779 du 22 février 2021, ce tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 22 mars 2021, M. A..., représenté par Me Gay, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et cet arrêté ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Drôme, sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer un titre de séjour ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des frais du litige.

Il soutient que :

- le préfet a commis une erreur de droit en n'examinant pas sa situation au regard de l'ensemble des critères définis à l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

- il est donc fondé à exciper de l'illégalité de cette décision pour demander l'annulation par voie de conséquence de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense enregistré le 1er juin 2021, le préfet de la Drôme, qui s'en rapporte à ses écritures de première instance, conclut au rejet de la requête.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme Michel ayant été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A..., ressortissant ivoirien, arrivé en France en 2017 et pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance de la Drôme jusqu'à sa majorité, relève appel du jugement du 22 février 2021 du tribunal administratif de Grenoble rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 octobre 2020 par lequel le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a assorti ce refus de décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi en cas d'exécution d'office.

2. Aux termes de l'article L. 313-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, dont les dispositions ont été reprises à l'article L. 435-3 de ce code : " À titre exceptionnel et sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire prévue aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 portant la mention " salarié " ou la mention " travailleur temporaire " peut être délivrée, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, à l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle, sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Le respect de la condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigé ".

3. Lorsqu'il examine une demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de "salarié" ou "travailleur temporaire", présentée sur le fondement de ces dispositions, le préfet vérifie tout d'abord que l'étranger est dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, qu'il a été confié à l'aide sociale à l'enfance entre l'âge de seize ans et dix-huit ans, qu'il justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle et que sa présence en France ne constitue pas une menace pour l'ordre public. Il lui revient ensuite, dans le cadre du large pouvoir dont il dispose, de porter une appréciation globale sur la situation de l'intéressé, au regard notamment du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur l'insertion de cet étranger dans la société française. Il appartient au juge administratif, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation ainsi portée.

4. Les dispositions de l'article L. 313-15 n'exigent pas que le demandeur soit isolé dans son pays d'origine. Par suite, en se fondant pour refuser de délivrer un titre de séjour à M. A... sur le fondement de ces dispositions sur la circonstance qu'il n'était pas dépourvu d'attaches en Côte-d'Ivoire, le préfet de la Drôme a commis une erreur de droit.

5. Le préfet s'est également fondé sur le motif tiré de ce que le dossier de M. A... était incomplet en l'absence de production de l'avis des services de l'aide sociale à l'enfance sur son comportement pendant sa minorité et son intégration. S'il ressort des pièces du dossier que le courrier par lesquels les services de la préfecture ont invité l'intéressé à produire ce document a été envoyé par lettre recommandée du 23 octobre 2019 à une adresse autre que celle qu'il avait communiquée et que l'accusé de réception du pli a été retourné avec la mention " Destinataire inconnu à l'adresse ", ce courrier a été remis en mains propres le 6 janvier 2020 à M. A... qui n'établit pas qu'il aurait vainement sollicité le document manquant au service de l'aide sociale à l'enfance de la Drôme. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction que le préfet aurait pris la même décision à son égard s'il ne s'était fondé que sur le motif tiré du caractère incomplet du dossier de demande, dès lors que la délivrance du titre doit procéder, ainsi qu'il a été dit au point 3, d'une appréciation globale sur la situation de la personne concernée au regard du caractère réel et sérieux du suivi de sa formation, des liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur son insertion dans la société française.

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête, que M. A... est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque et de la décision portant refus de titre de séjour, ainsi que de celle portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, prise sur le fondement du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et de celle fixant le pays de renvoi.

7. L'exécution du présent arrêt n'implique pas d'enjoindre au préfet de la Drôme de délivrer à M. A... le titre de séjour sollicité mais seulement de lui enjoindre, en application de l'article L. 614-16 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il soit à nouveau statué sur sa situation, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il y ait lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à M. A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2006779 du tribunal administratif de Grenoble du 22 février 2021 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 8 octobre 2020 du préfet de la Drôme est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Drôme de réexaminer la situation de M. A... dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans l'attente, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour.

Article 4 : L'État versera à M. A... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 27 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, présidente assesseure,

Mme Duguit-Larcher, première conseillère.

Lu en audience publique le 17 février 2022.

2

N° 21LY00936


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00936
Date de la décision : 17/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Céline MICHEL
Rapporteur public ?: M. SAVOURE
Avocat(s) : GAY

Origine de la décision
Date de l'import : 01/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-02-17;21ly00936 ?
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