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10/02/2022 | FRANCE | N°21LY00930

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 10 février 2022, 21LY00930


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2019 par lequel le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination, d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un certificat de résidence sinon de procéder au réexamen de sa demande, dans le délai de trente jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros

par jour de retard et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 29 octobre 2019 par lequel le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination, d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un certificat de résidence sinon de procéder au réexamen de sa demande, dans le délai de trente jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son conseil, au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 1908584 du 25 février 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 mars 2021, M. B... A... C..., représenté par la SELARL BS2A Bescou et Sabatier avocats associés, agissant par Me Sabatier, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement rendu le 25 février 2021 par le tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler les décisions du préfet du Rhône du 29 octobre 2019 portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français, fixant le délai de départ volontaire et fixant le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un certificat de résidence mention " vie privée et familiale " ou de réexaminer sa demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision portant refus de séjour méconnait l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il s'est marié en Algérie le 4 juillet 2010 avec une compatriote titulaire d'un certificat de résidence de dix ans, qu'il a vainement demandé un visa pour la rejoindre puis le bénéfice du regroupement familial avant d'entrer en France le 11 mars 2016, qu'ils ont eu deux enfants nés en France les 25 juin 2012 et 2 janvier 2017 et qu'il justifie d'une promesse d'embauche ; c'est à tort que le préfet a opposé la possibilité d'un regroupement familial alors que son épouse ne justifie pas de revenus suffisants ;

- la même décision méconnait l'intérêt supérieur de ses enfants au sens de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant de pouvoir vivre auprès de leur père dont l'ainé a été séparé pendant quatre années ;

- la même décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité entachant la décision portant refus de séjour et pour violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité entachant les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français.

M. A... C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 mai 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord franco-algérien ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droits d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gayrard, président assesseur ;

- et les observations de Me Guillaume, représentant M. A... C....

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 29 octobre 2019, le préfet du Rhône a refusé de délivrer un titre de séjour à M. B... A... C..., né en 1978 en Algérie, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de renvoi. Par jugement du 25 février 2021, dont M. A... C... relève appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté son recours en excès de pouvoir contre cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".

3. En premier lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, le préfet pouvait à bon droit retenir que l'intéressé relevait de la catégorie des algériens pouvant bénéficier de la procédure de regroupement familial, nonobstant la circonstance que son épouse ne justifierait pas de revenus suffisants. Il s'ensuit également que le requérant ne peut se prévaloir des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien qui vise le ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories qui ouvrent droit au regroupement familial.

4. En deuxième lieu, M. A... C... fait valoir qu'il s'est marié le 4 juillet 2010 en Algérie avec une compatriote titulaire d'un certificat de résidence de dix ans, qu'il a vainement demandé un visa pour la rejoindre puis le bénéfice du regroupement familial avant d'entrer en France le 11 mars 2016, qu'ils ont eu deux enfants nés en France les 25 juin 2012 et 2 janvier 2017 et qu'il justifie d'une promesse d'embauche. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que, malgré trois refus de visa en 2013 et 2015 et une décision du préfet du Rhône du 25 juillet 2013 portant rejet d'une demande de regroupement familial présentée par son épouse, l'intéressé est néanmoins entré le 11 mars 2016 sur le territoire français au moyen d'un visa délivré par les autorités espagnoles et s'est vu opposer le 10 juin suivant une décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire français à laquelle il n'a pas déféré. S'il fait valoir la durée de son mariage, il est constant que le couple est resté séparé pendant six années et ne justifie d'une communauté de vie que depuis trois ans à la date de l'arrêté querellé. Dès lors que l'ensemble des membres de sa famille ont la nationalité algérienne, rien ne s'oppose à la reconstitution du noyau familial dans son pays d'origine. M. A... C... n'est pas dénué de toute attache familiale en Algérie, pays dans lequel il a vécu jusqu'à l'âge de trente-huit ans. Enfin, la promesse d'embauche dont il se prévaut n'atteste pas suffisamment de son intégration dans la société française. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision portant refus de séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts qu'elle poursuit. Il s'ensuit que le moyen tiré d'une méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales peut être écarté.

5. En troisième lieu, le requérant soutient que la décision portant refus de séjour méconnait l'intérêt supérieur de ses enfants de rester en France avec leur père. Toutefois, comme indiqué au point précédent, rien ne fait obstacle à ce que tous les membres de sa famille puissent aller vivre en Algérie, pays dont ils ont la nationalité. Si le requérant fait valoir que ses deux enfants sont nés en France et y sont scolarisés, il n'est pas établi qu'ils ne pourraient poursuivre leur scolarité en Algérie. Par suite, le moyen tiré d'une violation de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant peut être écarté.

6. En dernier lieu, eu égard aux points précédents ne relevant aucune illégalité entachant la décision portant refus de séjour, le moyen tiré de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français du fait de l'illégalité de la décision précitée ne peut qu'être écarté. Compte tenu des motifs déjà indiqués aux points 4 et 5, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant peuvent être également écartés. Enfin, le requérant ne peut exciper de l'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français au soutien de ses conclusions à fin d'annulation dirigées contre la décision fixant le pays de destination.

7. Il découle de tout ce qui précède que les conclusions de M. A... C... à fin d'annulation de l'arrêté du 29 octobre 2019 du préfet du Rhône doivent être rejetées, ainsi que, par voie de conséquence, celles présentées à titre d'injonction ou au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il s'ensuit que M. A... C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter sa requête en ce compris ses conclusions en fin d'injonction ou présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 20 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Gayrard, président assesseur,

Mme Conesa-Terrade, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 février 2022.

N° 21LY00930 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00930
Date de la décision : 10/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Jean-Philippe GAYRARD
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : SELARL BS2A - BESCOU et SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-02-10;21ly00930 ?
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