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10/02/2022 | FRANCE | N°21LY00846

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 10 février 2022, 21LY00846


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... B... et M. D... B... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés du 23 juillet 2019 par lesquels le préfet de l'Isère leur a refusé la délivrance d'un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2004064-2004065 du 9 novembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour>
Par une requête enregistrée le 16 mars 2021, Mme et M. B..., représentés par Me Vigneron, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... B... et M. D... B... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés du 23 juillet 2019 par lesquels le préfet de l'Isère leur a refusé la délivrance d'un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2004064-2004065 du 9 novembre 2020, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 16 mars 2021, Mme et M. B..., représentés par Me Vigneron, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2004064-2004065 du 9 novembre 2020 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les arrêtés du 23 juillet 2019 par lesquels le préfet de l'Isère a refusé de leur délivrer un titre de séjour et les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, fixant le pays de destination.

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de leur délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de réexaminer leur situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, et dans l'attente de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail dans un délai de deux jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jours de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 34 et 37 de la loi du 10 juillet 1991 à verser directement à leur conseil, sous réserve, dans ce dernier cas, que celui-ci renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Ils soutiennent que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- le jugement est entaché d'une omission à statuer, en omettant de statuer sur la demande tendant à ce que le tribunal use de ses pouvoir d'injonction pour obtenir la communication du rapport médical auprès de l'Office français de l'immigration ;

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

- l'arrêté est entaché d'une incompétence du signataire ;

- la procédure est viciée en l'absence de production du rapport établi par le médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, le Dr A..., le 12 juillet 2018, et de motivation de l'avis rendu par le collège médical de cet office ; la composition du collège de médecins ayant rendu l'avis concernant M. B... était irrégulière ; la compétence du Dr A... n'est pas établie, elle ne fait pas partie de la liste annexée à la décision du 24 septembre 2018 ; l'avis du collège des médecins de l'office a été édicté au-delà du délai de trois mois prévu à l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile entachant celui-ci d'un vice substantiel ;

- le préfet ne justifie pas de l'avis rendu le 15 novembre 2018 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, ni d'un avis actualisé ; il appartient au juge de vérifier que les éléments médicaux pris en compte par le médecin rapporteur correspondent aux éléments médicaux transmis par le demandeur et qui l'ont conduit à estimer que le requérant pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; les prescriptions de l'article R. 4127-76 du code de la santé publique n'ont pas été respectées dans le cadre du rapport établi par le Dr A... ; la cour n'est pas en mesure d'apprécier les motifs qui ont conduit le collège puis le préfet à conclure à l'accès effectif aux soins dans le pays d'origine ;

- la décision édictée plus de 8 mois après l'avis médical est dépourvue d'actualité quant à l'accès effectif aux soins en Algérie ; les pièces produites par le préfet, en anglais, non traduites et anciennes, datant de 2016, n'ont aucune valeur probante et doivent être écartées des débats ; les informations fournies n'apportent aucun élément sur l'accessibilité du traitement ; la preuve que la pathologie neuromusculaire congénitale rare et orpheline dont souffre Zakaria pourrait faire l'objet d'une prise en charge pluridisciplinaire adaptée n'est pas apportée ; son état nécessite le suivi de généticiens et les soins sont particulièrement onéreux ; la prise en charge de la douleur n'existe pas en Algérie ;

- cet avis ne mentionne pas la capacité de Zakaria à voyager ; la possibilité de voyager est appréciée à la date de l'avis ;

- l'irrégularité du rapport médical entache la décision d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le défaut de transmission de cet avis ne permet pas de considérer l'avis comme justifié et partant la décision attaquée ; c'est donc à tort que le tribunal, qui dans ces conditions, ne pouvait exercer son contrôle, a écarté le moyen ; il est de jurisprudence constante que le secret médical n'est pas opposable devant le juge administratif lorsqu'est contestée une décision préfectorale d'éloignement d'un étranger malade ;

- l'impossibilité de bénéficier de manière effective, dans son pays d'origine, d'un traitement médical adapté a été démontrée ; le défaut de prise en charge entrainerait des conséquences d'une gravité exceptionnelle, en méconnaissance des stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui prohibe les traitements inhumains et dégradants et protège le droit à la vie ;

- un retour en Algérie aurait des conséquences dramatiques pour Zakaria, mettant en jeu son pronostic vital ;

- le tribunal n'est pas lié par l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

- l'état de Zakaria ne lui permet pas de voyager sans risque ;

- le refus d'admission au séjour de Zakaria est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :

- elle doit être annulée par voie de conséquence ;

- la décision est entachée d'incompétence du signataire de l'acte ;

- les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues ;

- sa demande n'a pas fait l'objet d'un examen sérieux ;

- la décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle doit être annulée par voie de conséquence ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'écritures en défense.

M. D... B... et Mme C... B... ont été admis conjointement au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 février 2021 et leurs recours tendant à l'obtention d'une seconde admission à l'aide juridictionnelle pour cette procédure d'appel à l'encontre du jugement attaqué a été rejetée par une décision du 9 décembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Conesa-Terrade, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... B..., née le 4 février 1976, entrée en France le 17 mars 2017 selon ses déclarations, avec ses trois enfants mineurs et son fils D... B..., né le 15 juin 2000, ressortissants algériens, relèvent appel des arrêtés du 23 juillet 2019 par lesquels le préfet de l'Isère a rejeté leurs demandes d'admission au séjour sollicitées, respectivement, par Mme C... B... sur le fondement du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé et, s'agissant de M. D... B..., sur le fondement du 7° du même article.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. et Mme B... auraient assorti leurs conclusions à fin d'annulation des arrêtés litigieux d'une demande tendant à ce que le tribunal enjoigne au préfet de communiquer le rapport du médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dès lors, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait entaché d'une omission à statuer en ce qui concerne leurs conclusions tendant au prononcé d'une telle injonction ne peut qu'être écarté.

Sur le moyen commun à l'ensemble des décisions litigieuses :

3. Le moyen tiré de l'incompétence du signataire des arrêtés attaqués doit, pour les mêmes motifs que ceux non sérieusement contestés en appel relevés par le tribunal administratif de Grenoble, être écarté comme manquant en fait.

Sur les moyens dirigés contre les refus de titre de séjour :

4. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié susvisé : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien , qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) 7) au ressortissant algérien Au ressortissant algérien résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (...). ".

5. En mentionnant que l'état de santé de M. D... B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et que l'intéressé peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a suffisamment motivé son avis du 15 novembre 2018, au vu du rapport établi par le médecin agréé.

6. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.

7. Aux termes de l'article 2 de l'arrêté du 5 janvier 2017 fixant les orientations générales pour l'exercice par les médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, de leurs missions, prévues à l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'article R. 313-22 du CESEDA confie, dans le cadre de la procédure de délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé, à un collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) le soin d'émettre un avis au vu d'un rapport médical établi par un médecin du service médical de cet office. Les règles déontologiques communes à tout médecin, telles qu'elles résultent des articles R. 4127-1 et suivants du code de la santé publique, sont applicables à la procédure mentionnée au premier alinéa du présent article. L'avis communiqué au préfet par le collège des médecins de l'OFII ne comporte aucune information couverte par le secret médical, détaillé en annexe I, ni aucun élément susceptible de révéler la pathologie du demandeur. Le rapport médical mentionné au premier alinéa du présent article n'est communicable ni à cette autorité administrative, ni à aucune autre. Les conditions de transmission du certificat médical, telles que prévue dans l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du CESEDA sont assurées dans le respect du secret médical, qui implique que les agents des services préfectoraux ne puissent pas accéder à une information médicale couverte par ce secret. Ces agents ne peuvent faire état d'informations médicales concernant un étranger que celui-ci a, de lui-même, communiquées, que dans le cadre d'une procédure contentieuse. ".

8. Il résulte des dispositions précitées que le collège de médecins de l'OFII, astreint au respect du secret médical qui s'impose à lui, ne saurait divulguer ni les termes, ni même la teneur du rapport médical du médecin du service médical de l'office, à l'autorité administrative compétente ou au juge de l'excès de pouvoir, même avec l'accord du malade. Par suite, il n'appartient pas, contrairement à ce que soutiennent les requérants, au préfet de communiquer le rapport médical dont il ne saurait avoir connaissance, ni, a fortiori, au juge de l'enjoindre de procéder à une telle communication.

9. L'incompétence alléguée du médecin rapporteur et l'irrégularité alléguée de la composition du collège de médecins ayant rendu l'avis prévu par les dispositions de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile concernant M. B... ne ressortent pas des pièces du dossier. Le moyen doit, par suite, être écarté.

10. L'irrégularité de la procédure suivie par les médecins de l'OFII au regard des obligations prévues par l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas établie.

11. Aux termes de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version en vigueur à la date de la décision attaquée et jusqu'au 1er mai 2021 : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. Le médecin de l'office peut solliciter, le cas échéant, le médecin qui suit habituellement le demandeur ou le médecin praticien hospitalier. Il en informe le demandeur. (...) Il transmet son rapport médical au collège de médecins. Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. (...) Le demandeur dispose d'un délai d'un mois à compter de l'enregistrement de sa demande en préfecture pour transmettre à l'Office français de l'immigration et de l'intégration le certificat médical mentionné au premier alinéa. (...) L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission du certificat médical. (...) L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. ".

12. M. B... soutient, sans l'établir, que l'avis aurait été rendu par le collège de médecins de l'OFII dans un délai excédant trois mois à compter de la transmission du certificat médical. Le moyen ne peut qu'être écarté.

13. Aux termes de l'article 3 de l'arrêté susvisé : " L'avis du collège de médecins de l'OFII est établi sur la base du rapport médical élaboré par un médecin de l'office selon le modèle figurant dans l'arrêté du 27 décembre 2016 mentionné à l'article 2 ainsi que des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays dont le demandeur d'un titre de séjour pour raison de santé est originaire. Les possibilités de prise en charge dans ce pays des pathologies graves sont évaluées, comme pour toute maladie, individuellement, en s'appuyant sur une combinaison de sources d'informations sanitaires. L'offre de soins s'apprécie notamment au regard de l'existence de structures, d'équipements, de médicaments et de dispositifs médicaux, ainsi que de personnels compétents nécessaires pour assurer une prise en charge appropriée de l'affection en cause. L'appréciation des caractéristiques du système de santé doit permettre de déterminer la possibilité ou non d'accéder effectivement à l'offre de soins et donc au traitement approprié. Afin de contribuer à l'harmonisation des pratiques suivies au plan national, des outils d'aide à l'émission des avis et des références documentaires présentés en annexe II et III sont mis à disposition des médecins de l'office. ".

14. Aux termes de l'article 4 de l'arrêté précité : " Les conséquences d'une exceptionnelle gravité résultant d'un défaut de prise en charge médicale, mentionnées au 11° de l'article L. 313-11 du CESEDA, sont appréciées sur la base des trois critères suivants : degré de gravité (mise en cause du pronostic vital de l'intéressé ou détérioration d'une de ses fonctions importantes), probabilité et délai présumé de survenance de ces conséquences. Cette condition des conséquences d'une exceptionnelle gravité résultant d'un défaut de prise en charge doit être regardée comme remplie chaque fois que l'état de santé de l'étranger concerné présente, en l'absence de la prise en charge médicale que son état de santé requiert, une probabilité élevée à un horizon temporel qui ne saurait être trop éloigné de mise en jeu du pronostic vital, d'une atteinte à son intégrité physique ou d'une altération significative d'une fonction importante. Lorsque les conséquences d'une exceptionnelle gravité ne sont susceptibles de ne survenir qu'à moyen terme avec une probabilité élevée (pathologies chroniques évolutives), l'exceptionnelle gravité est appréciée en examinant les conséquences sur l'état de santé de l'intéressé de l'interruption du traitement dont il bénéficie actuellement en France (rupture de la continuité des soins). Cette appréciation est effectuée en tenant compte des soins dont la personne peut bénéficier dans son pays d'origine. ".

15. En se bornant à reprendre en appel le moyen tiré de ce que l'avis rendu serait caduc et n'aurait pas pris en compte les spécificités de la pathologie congénitale dont souffre M. B..., ni apprécier l'accès effectif en Algérie aux capacités et infrastructures médicales requises pour sa prise en charge dans son pays d'origine, sans assortir le moyen d'aucun élément nouveau ni même soutenir que sa pathologie aurait défavorablement évolué ou que l'accès effectif à un traitement approprié en Algérie ne serait plus d'actualité, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'arrêté par lequel le préfet de l'Isère a rejeté la demande d'admission au séjour de M. B... à raison de son état de santé serait entaché d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation.

16. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui prohibe les traitements inhumains et dégradants et protègent le droit à la vie, de l'incapacité de M. B... à voyager sans risque, de l'irrégularité du rapport médical sont inopérants à l'égard de la décision de refus d'admission au séjour en France, et doivent, par suite, être écartés.

Sur les moyens dirigés contre les obligations de quitter le territoire français :

17. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet se soit abstenu de procéder à un examen sérieux du dossier de chacun des requérants avant de prendre à l'encontre de chacun d'eux une décision lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Dès lors, ce moyen doit être écarté comme infondé.

18. Si les requérants soutiennent que les décisions leur faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours doivent être annulées par voie de conséquence de l'annulation des décisions portant refus de titre de séjour, méconnaissance des dispositions alors en vigueur de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et erreur manifeste d'appréciation, ces moyens peuvent être écartés par adoption des motifs retenus par les premiers juges, à l'encontre desquels les requérants n'opposent aucune contestation en appel.

Sur les moyens dirigés contre les décisions fixant le pays de destination :

19. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les décisions fixant le pays de destination doivent être annulées par voie de conséquence de l'annulation des décisions portant refus de titre de séjour ou obligation de quitter le territoire français.

20. En second lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales peuvent être écartés par adoption des motifs retenus par les premiers juges à l'encontre desquels les requérants n'opposent en appel aucune contestation.

21. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation doivent être rejetées. Par voie de conséquences, les conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées, ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... B... et M. D... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B..., à M. D... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 20 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Gayrard, président assesseur,

Mme Conesa-Terrade, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 février 2022.

N° 21LY00846 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY00846
Date de la décision : 10/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle CONESA-TERRADE
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : VIGNERON

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-02-10;21ly00846 ?
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