Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 27 mars 2018 par laquelle le directeur du centre hospitalier du Haut-Bugey a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie, ensemble la décision du 11 juin 2018 rejetant son recours gracieux.
Par un jugement n° 1805925 du 6 novembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 7 janvier 2020 et un mémoire enregistré le 17 mai 2021, ce dernier n'ayant pas été communiqué, Mme B..., représentée par Me Brun (association d'avocats à responsabilité professionnelle individuelle Alternatives avocats), avocate, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 6 novembre 2019 ;
2°) d'annuler la décision du 27 mars 2018 par laquelle le directeur du centre hospitalier du Haut-Bugey a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie, ensemble la décision du 11 juin 2018 rejetant son recours gracieux ;
3°) d'enjoindre au centre hospitalier du Haut-Bugey de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge du centre hospitalier du Haut-Bugey une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de la situation de compétence liée dans laquelle le directeur du centre hospitalier a estimé se trouver ;
- la dépression dont elle souffre présente un lien direct avec les fonctions d'infirmière de nuit aux urgences qu'elle a longtemps exercées et ses conditions de travail.
Par un mémoire en défense enregistré le 22 avril 2020, le centre hospitalier du Haut-Bugey, représenté par Me Brocheton (SELARL BCV Avocats), avocat, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de Mme B... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il expose que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 20 avril 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 18 mai 2021.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Sophie Corvellec, première conseillère ;
- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public ;
- les observations de Me Brun, avocate, représentant Mme B..., et de Me Brocheton, avocat, représentant le centre hospitalier du Haut-Bugey ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., infirmière diplômée d'Etat exerçant au centre hospitalier du Haut-Bugey, relève appel du jugement du 6 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du directeur du centre hospitalier du 27 mars 2018 refusant de reconnaître l'imputabilité au service de sa pathologie, ensemble la décision du 11 juin 2018 rejetant son recours gracieux.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Afin de satisfaire au principe de motivation des décisions de justice, rappelé par ces dispositions, le juge administratif doit répondre, à proportion de l'argumentation qui les étaye, aux moyens qui ont été soulevés par les parties auxquelles sa décision fait grief et qui ne sont pas inopérants.
3. Il ressort des écritures de première instance que si, dans sa requête, Mme B... a rappelé que le directeur du centre hospitalier n'était pas lié par l'avis de la commission de réforme, elle a présenté cette circonstance comme un simple argument articulé à l'appui du moyen tiré de l'erreur d'appréciation commise quant à l'imputabilité au service de sa pathologie, avant de le qualifier de moyen dans son mémoire en réplique, sans toutefois apporter de nouvelles précisions à son appui. Par suite, le tribunal administratif y a suffisamment répondu, en précisant seulement que le directeur du centre hospitalier " n'apparaît pas s'être senti tenu par les différents avis rendus " pour écarter le moyen tiré d'une prétendue erreur d'appréciation. Aucune omission à statuer n'entache dès lors le jugement attaqué.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
4. Aux termes de l'article 41 de la loi susvisée du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, dans sa version applicable au présent litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants (...) Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie (...). L'imputation au service (...) de la maladie est appréciée par la commission de réforme ". Il résulte de ces dispositions qu'un fonctionnaire qui souffre d'une maladie contractée ou aggravée en service a droit à un congé de maladie à plein traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite, sauf s'il entre dans les cas prévus pour l'octroi d'un congé de longue maladie ou de longue durée limitant la période de maintien de cette rémunération. L'imputabilité au service de cette maladie est appréciée par la commission de réforme qui rend un avis ne liant pas l'autorité territoriale.
5. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service. Il appartient au juge d'apprécier si les conditions de travail du fonctionnaire peuvent, même en l'absence de volonté délibérée de nuire à l'agent, être regardées comme étant directement à l'origine de la maladie dont la reconnaissance comme maladie professionnelle est demandée.
6. Mme B... soutient que la dépression dont elle souffre depuis le mois d'avril 2015 a pour origine son activité professionnelle et ses conditions de travail. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que Mme B... exerçait alors comme infirmière en service de nuit aux urgences de l'hôpital d'Oyonnax depuis vingt-cinq ans, sans qu'elle ne démontre une évolution de ses conditions de travail, ni aucune dégradation tenant aux différents dysfonctionnements ou contraintes énumérés dans sa demande, pour beaucoup nuancés voire démentis par le rapport établi sur ses conditions de travail par un cadre supérieur de santé le 18 juillet 2017. Il est en outre constant que, depuis 2000, elle n'avait jamais sollicité de changement d'affectation, notamment pour mettre fin à un service de nuit, et qu'à son retour de congés pour maladie au mois de juin 2015, elle a souhaité réintégrer le même service plutôt que d'en rejoindre un autre. Par ailleurs, parmi les pièces médicales produites, seule l'expertise rédigée par le Dr A... le 3 janvier 2018 se prononçait sur l'origine de sa pathologie. Celle-ci conclut expressément à l'absence de lien entre le service et la pathologie, en relevant notamment que l'intéressée a développé une réaction dépressive de type dysthymie avec des troubles de l'adaptation au stress, des symptômes anxieux et des difficultés d'adaptation au changement, qui sont " des aspects de sa personnalité ayant favorisé l'émergence dépressive ". Si cette même expertise, tout comme certains des autres certificats médicaux produits, font état d'un contexte d'épuisement professionnel et de l'amélioration clinique observée pendant l'éloignement de son poste de travail, il ne peut en être déduit que les conditions de travail de l'intéressée seraient directement à l'origine de sa pathologie ou d'une aggravation de celle-ci. Enfin, il est constant que Mme B... a déjà vécu un épisode dépressif en 2012, sans que ne soit invoqué un lien avec son activité professionnelle. Dans ces conditions, il n'est pas établi que l'état dépressif de Mme B... serait en lien direct avec l'exercice de ses fonctions ou des conditions de travail propres à en susciter le développement.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
8. La présente décision rejetant les conclusions à fin d'annulation de Mme B... et n'appelant, dès lors, aucune mesure d'exécution, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier du Haut-Bugey, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par Mme B.... En application de ces mêmes dispositions, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière une somme au titre des frais exposés par le centre hospitalier du Haut-Bugey dans la présente instance.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier du Haut-Bugey au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et au centre hospitalier du Haut-Bugey.
Délibéré après l'audience du 11 janvier 2022, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Yves Tallec, président de chambre,
M. Gilles Fédi, président-assesseur,
Mme Sophie Corvellec, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 janvier 2022.
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N° 20LY00065