Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. F... C... et Mme B... G..., Mme D... C..., Mme E... C... ont demandé au tribunal administratif de Grenoble :
- de donner acte de l'intervention de Mme E... C... ;
- d'annuler la décision du 6 janvier 2017 par laquelle le maire de la commune de Bozel a refusé de faire usage de son pouvoir de police pour assurer la conservation d'une partie d'un chemin rural longeant les parcelles cadastrées H.364 et H.365 ;
- d'enjoindre au maire de la commune de Bozel de prendre toutes mesures afin de rétablir le chemin rural dans sa configuration d'origine, dans un délai de quatre mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
- de condamner la commune de Bozel à leur verser une somme de 10 000 euros au titre du préjudice subi ;
- de mettre à la charge de la commune de Bozel une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1700474 du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée le 7 novembre 2019, et un mémoire enregistré le 14 septembre 2020, M. F... C..., Mme B... G... et Mme E... C..., représentés par Me Milliand, demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement susmentionné n° 1700474 du 3 octobre 2019 du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) d'annuler la décision du 6 janvier 2017 par laquelle le maire de la commune de Bozel a refusé de faire usage de son pouvoir de police pour assurer la conservation d'une partie d'un chemin rural longeant les parcelles cadastrées H.364 et H.365 ;
3°) d'enjoindre au maire de la commune de Bozel de prendre toutes mesures afin de rétablir le chemin rural dans sa configuration d'origine, dans un délai de quatre mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
4°) de condamner la commune de Bozel à leur verser une somme de 10 000 euros au titre du préjudice subi ;
5°) de mettre à la charge de la commune de Bozel une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le jugement contesté sera réformé en ce qu'il a déclaré irrecevable l'intervention volontaire de Mme E... C..., qui a la qualité de nue-propriétaire des parcelles litigieuses et dont l'intervention est donc justifiée ;
- le refus du maire d'user de son pouvoir de police, de restaurer le chemin rural existant à l'Est des parcelles bâties H 364 et H 365 leur appartenant, supprimé par M. A..., qui a créé une piste d'accès privé sans autorisation d'urbanisme de la commune, en aménageant des remblais et en empiétant sur le domaine public, est entaché d'excès de pouvoir ;
- une pente atteignant par endroits 74 % rend de fait le chemin impraticable en véhicule et à pied, ce qui les empêchent, à l'Est, d'accéder directement à ces parcelles depuis la voie communale n° 6 située au Nord : le refus du maire d'agir est donc entaché d'excès de pouvoir dès lors que les travaux réalisés sont un obstacle à la circulation qu'il est tenu de sanctionner conformément aux dispositions notamment des articles L. 161-1 et D. 161-14 du code rural ;
- la commune devra justifier de l'état du chemin, qui est un chemin rural et non un sentier, dont elle est propriétaire avant les travaux de modification, qui était entretenu, qui présentait une pente moyenne de 30 %, et était carrossable et utilisé par tous les riverains en véhicule et à pied ;
- la commune a commis une faute en refusant de restaurer la libre circulation sur ses voies, ce qui engage sa responsabilité ; le maire n'ayant rien fait depuis 2004 pour remédier à la suppression du chemin rural qui les prive de tout accès direct par l'Est aux entrées de leurs bâtiments H 364 et H 365 depuis la voie communale n° 6 ;
- la commune sera condamné à leur verser la somme de 10 000 euros en réparation de leurs préjudices.
La clôture de l'instruction a été fixée au 8 octobre 2020 par une ordonnance du 21 septembre 2020.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rivière ;
- et les conclusions de M. Savouré, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. F... C... et son épouse, Mme B... G..., ont été propriétaires des parcelles cadastrées H.364, H.365 et H.366 au lieudit " Le Ratelard " sur le territoire de la commune de Bozel (73). Depuis un acte du 30 avril 2017 de donation en nue-propriété à leur fille, Mme E... C..., ils conservent l'usufruit de ce tènement immobilier composé d'une partie d'une maison ancienne, cadastrée H 364 et d'une partie d'un bâtiment à usage d'écurie, cadastré H 365 et 366. M. A..., propriétaire des parcelles voisines cadastrées H.388, H.1430 et H.1427, a réalisé en 2003 un nouvel accès à sa propriété. Par un courrier du 20 décembre 2016, les consorts C..., dont les échanges avec leur voisin se sont avérés infructueux, ont demandé au maire de rouvrir la partie du chemin rural, longeant les parcelles cadastrées H.364 et H.365 à l'Est, dont ils imputaient la suppression aux travaux de M. A..., et de les indemniser à hauteur de 10 000 euros en raison du préjudice subi. Par une décision du 6 janvier 2017, le maire de la commune de Bozel a refusé de faire droit à ces demandes. M. C... et autres ont demandé au tribunal administratif de Grenoble, d'une part, l'annulation de cette décision et, d'autre part, de condamner la commune à leur verser cette somme de 10 000 euros. Par un jugement n° 1700474 du 3 octobre 2019, dont les intéressés relèvent appel, ce tribunal a rejeté leur demande.
Sur la régularité du jugement :
2. Si les requérants soutiennent que le jugement doit être réformé pour avoir déclaré irrecevable l'intervention volontaire de Mme E... C..., pourtant nue-propriétaire des parcelles concernées, les premiers juges ont seulement rejeté, à bon droit, cette intervention au motif qu'en méconnaissance de l'article R. 632-1 du code de justice administrative, elle n'a pas été présentée par un mémoire distinct de celui des demandeurs. Leur moyen inopérant de régularité doit être en tout état de cause être rejeté.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. D'une part, aux termes de l'article L. 161-1 du code rural et de la pêche maritime : " Les chemins ruraux sont les chemins appartenant aux communes, affectés à l'usage du public, qui n'ont pas été classés comme voies communales. Ils font partie du domaine privé de la commune. ". Aux termes de l'article L. 161-2 du même code : " L'affectation à l'usage du public est présumée, notamment par l'utilisation du chemin rural comme voie de passage ou par des actes réitérés de surveillance ou de voirie de l'autorité municipale ". Aux termes de l'article L. 161-5 de ce code : " L'autorité municipale est chargée de la police et de la conservation des chemins ruraux.". Aux termes de l'article D. 161-11 de ce code : " Lorsqu'un obstacle s'oppose à la circulation sur un chemin rural, le maire y remédie d'urgence./ Les mesures provisoires de conservation du chemin exigées par les circonstances sont prises, sur simple sommation administrative, aux frais et risques de l'auteur de l'infraction et sans préjudice des poursuites qui peuvent être exercées contre lui. ". Aux termes de l'article D. 161-14 de ce code : " Il est expressément fait défense de nuire aux chaussées des chemins ruraux et à leurs dépendances ou de compromettre la sécurité ou la commodité de la circulation sur ces voies ". Ces dispositions, et notamment celles précitées des articles L. 161-5 et D. 161-11 font obligation au maire de remédier aux obstacles de toute nature s'opposant à la circulation sur un chemin rural.
4. D'autre part, aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : / 1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques (...) ".
5. L'existence du pouvoir de police spéciale attribuée au maire par les articles L. 161-5 et D. 161-11 du code rural et de la pêche maritime ne fait pas obstacle à ce que le maire use des pouvoirs de police générale qu'il tient de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales en vue d'assurer la sûreté et la commodité du passage sur les voies publiques dont font partie les chemins ruraux dès lors que les dispositions précitées au point 4 ne distinguent pas selon l'appartenance des voies concernées au domaine public routier de la commune ou à son domaine privé.
6. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le tronçon du chemin litigieux situé à l'Est des parcelles cadastrées H 364 et H 365 était, avant les travaux de remblaiement réalisés par la SCI Boule de Neige et M. A..., ouvert à la circulation des véhicules, compte tenu notamment de sa configuration et de son état d'entretien, alors même que M. C... indique pour sa part qu'il l'empruntait régulièrement, au moyen toutefois d'un véhicule équipé de quatre roues motrices. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier, en particulier des photographies produites par les requérants, que la circulation piétonnière serait désormais impossible sur cette même partie de chemin, à raison de la réalisation des travaux précités. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le refus du maire de faire usage de son pouvoir de police est entaché d'excès de pouvoir au regard des dispositions citées aux point 3 et 4 et que leur demande d'annulation était fondée. En l'absence d'illégalité fautive imputable au maire, les premiers juges ont également pu rejeter leurs conclusions aux fins de condamnation et d'injonction.
7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité des conclusions présentées en appel par Mme C..., que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté l'ensemble de leurs demandes. Leurs conclusions à fin d'annulation, de condamnation et d'injonction présentées devant la cour doivent par suite être rejetées, de même que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. F... C..., Mme B... G... et Mme E... C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... C..., Mme B... G..., Mme E... C... et à la commune de Bozel. Copie sera adressée au préfet de la Savoie
Délibéré après l'audience du 16 décembre 2021, à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président de chambre,
Mme Michel, présidente-assesseure,
M. Rivière, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 janvier 2022.
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N° 19LY04052