Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 4 août 2020 par lequel le préfet de la Loire a refusé de l'admettre au séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi de cette mesure d'éloignement.
Par un jugement n° 2006136 du 31 décembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 25 janvier 2021, M. A..., représenté par Me Idchar, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 31 décembre 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Loire du 4 août 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Loire, à titre principal, de lui délivrer un premier titre de séjour portant la mention " salarié " ou " vie privée et familiale ", à titre subsidiaire, de lui délivrer un récépissé l'autorisant à travailler et de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le refus de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il justifie de motifs exceptionnels justifiant la délivrance d'un premier titre de séjour " salarié " ou " vie privée et familiale " ;
- le refus de régulariser sa situation ne procède pas d'un réexamen sérieux de sa situation ;
- ce refus procède d'une erreur manifeste d'appréciation ; son emploi d'aide monteur en échafaudage figure dans la liste des métiers pour lesquels la situation de l'emploi n'est pas opposable ;
- l'obligation de quitter le territoire français viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 9 février 2021, la préfète de la Loire conclut au rejet de la requête.
Elle s'en remet aux écritures de première instance.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., ressortissant tunisien né en 1977, est entré en France le 29 décembre 2015, muni d'un visa de court séjour. Au bénéfice d'une promesse d'embauche en qualité de pâtissier, il a sollicité le 4 août 2017 la délivrance d'un premier titre de séjour portant soit la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", soit la mention " vie privée et familiale " sur le fondement des articles 7 quater et 3 de l'accord franco-tunisien ou, le cas échéant, la régularisation de sa situation sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un jugement du 23 juin 2020, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 8 octobre 2019 du préfet de la Loire pris en réponse à cette demande, faute pour le préfet de s'être prononcé sur le droit au séjour de M. A... au regard des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien et lui a enjoint de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour. Par un nouvel arrêté du 4 août 2020, le préfet de la Loire a refusé d'admettre au séjour M. A..., lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement. M. A... relève appel du jugement du 31 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté du 4 août 2020 :
2. En premier lieu, M. A... soutient que le préfet a réexaminé sa situation au regard de la seule promesse d'embauche du 31 mai 2017 produite à l'appui de sa demande de titre de séjour du 4 août 2017, sans mention de sa situation professionnelle à la date du réexamen, nécessairement portée à la connaissance du préfet dans le cadre de la demande d'autorisation de travail de la société Pro-Tech Echafaudage. Si le requérant produit un formulaire Cerfa de demande d'autorisation de travail pour conclure un contrat de travail avec un salarié étranger complétée, ainsi qu'un courrier du 25 juin 2020 l'accompagnant, il ne justifie nullement de la réception en préfecture de ces éléments, de sorte que, comme l'ont relevé les premiers juges, le requérant ne peut se prévaloir, à ce titre, d'un défaut de réexamen sérieux de sa demande.
3. En deuxième lieu, l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile fixe notamment les conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant tunisien souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-tunisien. Toutefois, bien que cet accord ne prévoie pas de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un titre de séjour à un ressortissant tunisien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit et il dispose à cette fin d'un pouvoir discrétionnaire pour apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.
4. Après avoir substitué aux dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile le pouvoir général de régularisation du préfet comme base légale de l'arrêté attaqué, les premiers juges ont considéré qu'au regard du caractère limité des activités salariées de M. A... en qualité d'aide monteur en échafaudage de janvier 2018 à juin 2019 et en l'absence de qualification particulière de l'intéressé, qui s'était prévalu à l'appui de sa demande de titre de séjour d'une qualification en pâtisserie, le préfet de la Loire n'avait pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant la régularisation de sa situation par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ". En se bornant à indiquer que son emploi figurerait dans la liste des métiers pour lesquels la situation de l'emploi n'est pas opposable, le requérant ne critique pas utilement la motivation ainsi retenue par les premiers juges pour écarter ce moyen.
5. En troisième lieu, l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants tunisiens en vertu de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien, dispose par ailleurs, dans sa rédaction alors applicable, que : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".
6. M. A... est entré sur le territoire français le 29 décembre 2015, à l'âge de 38 ans, accompagné de son épouse et de ses deux enfants, après avoir passé l'essentiel de son existence en Tunisie. Il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire national à l'expiration de son visa de court séjour en octobre 2015 et jusqu'en août 2017, date à laquelle il a sollicité son admission au séjour. Si trois des quatre enfants de M. A..., dont deux sont nés en France en 2016 et en 2019 sont scolarisés sur le territoire français, il ressort des pièces du dossier que l'épouse du requérant est également en situation irrégulière, de sorte que le couple peut poursuivre sa vie privée et familiale en Tunisie avec leurs enfants, qui pourront y être scolarisés. En l'absence d'obstacle avéré à ce que la cellule familiale de M. A... se reconstitue dans son pays d'origine, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive en méconnaissance des dispositions précitées.
7. En quatrième lieu, pour les motifs énoncés plus haut, M. A... n'établit pas qu'en refusant la régularisation de sa situation par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", le préfet de la Loire aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
8. Pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point précédent, il n'est pas davantage fondé à soutenir que la mesure d'éloignement litigieuse aurait été prise en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
9. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
10. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions dirigées de M. A..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent dès lors qu'être rejetées.
Sur les frais d'instance :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il en soit fait application à l'encontre de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète de la Loire.
Délibéré après l'audience du 14 décembre 2021 à laquelle siégeaient :
M. Gilles Fédi, président-assesseur assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère,
Mme Sophie Corvellec, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 janvier 2022.
5
N° 21LY00257