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12/01/2022 | FRANCE | N°19LY03498

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre, 12 janvier 2022, 19LY03498


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de l'Ain a rejeté sa demande d'abrogation de l'arrêté du 21 décembre 2004 portant approbation du plan de prévention des risques naturels prévisibles (PPRN) inondations, crues torrentielles et mouvements de terrain de la commune de Dagneux et d'enjoindre au préfet de l'Ain de procéder à une nouvelle instruction du plan de prévention en litige ou, à tout le moins, de retirer l'arrêté du 21 dé

cembre 2004.

Par un jugement n° 1801561 du 11 juillet 2019, le tribunal admini...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de l'Ain a rejeté sa demande d'abrogation de l'arrêté du 21 décembre 2004 portant approbation du plan de prévention des risques naturels prévisibles (PPRN) inondations, crues torrentielles et mouvements de terrain de la commune de Dagneux et d'enjoindre au préfet de l'Ain de procéder à une nouvelle instruction du plan de prévention en litige ou, à tout le moins, de retirer l'arrêté du 21 décembre 2004.

Par un jugement n° 1801561 du 11 juillet 2019, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 11 septembre 2019 et un mémoire en réplique, enregistré le 17 décembre 2020, qui n'a pas été communiqué, M. A..., représenté par Me Sevino, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 11 juillet 2019 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 21 décembre 2004 portant approbation du PPRN inondations, crues torrentielles et mouvements de terrain de la commune de Dagneux en tant qu'il classe en zone rouge les parcelles cadastrées section A nos 852 à 855, ainsi que la décision implicite de rejet de sa demande d'abrogation ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Ain de procéder à une nouvelle instruction du plan de prévention en litige ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif, qui a entaché son jugement d'irrégularité à ce titre, n'a pas exercé sur le classement des parcelles cadastrées section A n° 852 et 855 en " rouge " inconstructible du PPRN, un contrôle de proportionnalité entre les objectifs poursuivis et l'atteinte au droit de propriété du requérant ;

- les premiers juges ont commis une erreur de droit en validant ce classement au regard du seul caractère boisé de ces parcelles, alors que le degré de l'aléa " glissement de terrain " est surestimé ;

- pour les mêmes motifs, le classement contesté est entaché d'une illégalité, ayant entraîné une rupture d'égalité devant les charges publiques alors que des parcelles dans la même situation sont classées en zone bleue.

Par un mémoire en défense enregistré le 27 novembre 2020, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés sont infondés.

Par ordonnance du 30 novembre 2020, la clôture d'instruction a été fixée en dernier lieu au 30 décembre 2020.

Par un courrier du 24 novembre 2021, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de relever d'office l'irrecevabilité des conclusions, nouvelles en appel, de M. A... tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 décembre 2004 portant approbation du PPRN.

M. A... a répondu à ce courrier par un mémoire rectificatif, enregistré le 29 novembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère,

- les conclusions de M. Samuel Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me Ivanova pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A... relève appel du jugement du 11 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus implicite du préfet de l'Ain d'abroger le plan de prévention des risques naturels prévisibles d'inondations, de crues torrentielles et de mouvements de terrain (PPRN) couvrant le territoire de la commune de Dagneux approuvé par un arrêté du 21 décembre 2004.

Sur la régularité du jugement :

2. Si le requérant soutient que c'est à tort que le tribunal a considéré qu'il devait exercer un contrôle limité à l'erreur manifeste d'appréciation, attentatoire au droit de propriété sur le classement des parcelles en litige en en zone " rouge " du PPRN et reproche aux premiers juges d'avoir commis une erreur de droit, ces moyens, en dépit de leur présentation, relèvent du bien-fondé du jugement attaqué, et non de sa régularité.

Sur la légalité de la décision portant refus d'abrogation :

3. Aux termes de l'article L. 562-1 du code de l'environnement : " I.- L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations (...). II.- Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : 1° De délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles, pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures ".

4. En premier lieu, pour contester le classement en zone " rouge " inconstructible des parcelles en litige, lui appartenant, situées lieu-dit " Les Entremonts " à Dagneux, M. A... se prévaut, d'une part, du rapport du bureau d'étude Ain Géotechnique réalisé sur sa demande le 28 juin 2010 aux termes duquel ce classement n'est pas justifié par un risque avéré de mouvement de sol, d'autre part, du rapport du centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema) Centre-Est sollicité par la direction départementale des territoires de l'Ain pour émettre un avis sur le zonage de l'aléa " mouvements de terrain " de sa propriété. Après une visite sur place réalisée le jeudi 20 septembre 2018 en présence du requérant et en connaissance du rapport du bureau d'études Ain Géotechnique, le Cerema conclut dans son rapport détaillé et circonstancié que le degré de l'aléa " glissement de terrain " est surestimé dans la zone d'aléa fort et recommande une modification du degré de l'aléa dans la zone concernée, proposant notamment un aléa moyen pour la partie centrale des parcelles en litige située entre les cotes NGF 232 et 258.

5. Il résulte toutefois des dispositions citées au point 3 que le contenu des PPRN, et notamment les interdictions de construire qu'ils peuvent prévoir, résulte du croisement des données relatives aux niveaux d'aléas observés pour un risque naturel défini avec les enjeux existants, qu'ils soient humains, environnementaux ou économiques et que la distinction dans les PPRN entre les zones constructibles et les zones inconstructibles n'est pas exclusivement dépendante de l'intensité du risque observé. Le règlement du PPRN en litige prévoit ainsi, en page 12, que " le zonage rouge Rg concerne les zones exposées aux mouvements de terrains, en particulier les glissements de terrains sur la cotière, qu'il convient de conserver comme telles pour les raisons suivantes : • elles sont exposées à des aléas mouvements de terrains très forts en raison de l'intensité des paramètres physiques (conjonction degré de pente/nature des sols, existence de passages d'eau comme les sources, les résurgences) et pour lesquels, en l'état actuel de la connaissance du site, il est difficile d'affirmer qu'il existe des mesures de protection et de prévention économiquement opportunes pour y permettre l'implantation de nouvelles constructions ; / • elles sont boisées et exposées à des aléas mouvements de terrain moyens ou faibles mais leur déboisement et/ou leur urbanisation reviendraient par effet cumulatif à aggraver les risques sur ces zones et/ou sur les zones déjà urbanisées en pied de versant ; / • elles constituent autant de possibilités de rétention (infiltration) et de diminution du temps de concentration des eaux de ruissellement pluvial lors d'épisodes pluviométriques longs et/ou intenses à l'origine des crues torrentielles affectant des zones urbaines ".

6. Il résulte de ce qui précède que, quand bien même elles ne seraient pas soumises à un aléa fort mais seulement sujettes à un aléa faible ou moyen, l'arrêté en litige pouvait, sans erreur de droit, inclure les parcelles en litige, qui sont situées dans la zone d'enjeux " espaces boisés " du plan de prévention, en zone rouge du PPRN.

7. En deuxième lieu, il résulte du rapport du Cerma dont se prévaut le requérant que les parcelles en litige, compte tenu notamment de la nature du sol, sont directement exposées au risque de glissement de terrain, même moyen ou faible. Par ailleurs, il n'est pas sérieusement contesté que des constructions, si elles y étaient autorisées, pourraient aggraver ce risque. Il ressort à cet égard du rapport de présentation du PPRN que " l'essentiel des espaces agricoles ou boisés soumis aux aléas, quelle que soit leur intensité, est classé en Zone Rouge Inconstructible puisque ces espaces constituent un moyen non négligeable d'infiltrer voir de ralentir les eaux de pluie alimentant le réseau hydrographique (lors des crues) et favorisant le déclenchement des mouvements de terrain ". Dans ces circonstances, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le classement de ses parcelles cadastrées section A nos 852 à 855 en zone " rouge " inconstructible du plan de prévention en litige procède d'une erreur manifeste d'appréciation.

8. En troisième lieu, le classement en zone rouge des parcelles litigieuses ne reposant pas, ainsi qu'il a été dit, sur une appréciation manifestement erronée, le requérant ne peut utilement faire valoir que d'autres parcelles, dont il n'est pas établi au dossier qu'elles seraient dans la même situation que celles du requérant, ont été classées en zone constructible. Par suite, le moyen tiré d'une rupture d'égalité devant les charges publiques doit être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la demande de première instance, que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus que le préfet de l'Ain a opposé à sa demande d'abrogation du PPRN en litige.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Le présent arrêt confirme le rejet des conclusions de M. A... dirigées contre la décision de refus d'abrogation en litige et n'appelle ainsi aucune mesure d'exécution.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il en soit fait application à l'encontre de l'Etat, qui n'est pas partie perdante.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la ministre de la transition écologique.

Délibéré après l'audience du 14 décembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Gilles Fédi, président-assesseur assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

Mme Bénédicte Lordonné, première conseillère,

Mme Sophie Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 janvier 2022.

2

N° 19LY03498


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY03498
Date de la décision : 12/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

44-05-08 Nature et environnement. - Divers régimes protecteurs de l`environnement. - Prévention des crues, des risques majeurs et des risques sismiques.


Composition du Tribunal
Président : M. FEDI
Rapporteur ?: Mme Bénédicte LORDONNE
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : ASEA - CABINET ALDO SEVINO ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 25/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-01-12;19ly03498 ?
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