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06/01/2022 | FRANCE | N°21LY01869

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre, 06 janvier 2022, 21LY01869


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 15 juillet 2020 par lequel le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi, d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astre

inte de 50 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 15 juillet 2020 par lequel le préfet du Rhône a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de renvoi, d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à verser à son conseil.

Par un jugement n° 2007625 du 12 février 2021, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 juin 2021, M. B..., représenté par Me Dachary, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et ces décisions ;

2°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur le refus de titre de séjour :

- la décision attaquée est entachée d'un vice de procédure en ce que l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'a pas été pris à la suite d'une délibération collégiale, en méconnaissance des dispositions de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 ;

- la procédure est irrégulière en ce que le préfet n'a pas communiqué les documents ayant permis aux médecins d'apprécier les éléments du système de santé en Algérie ;

- les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ont été méconnues ;

- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

- elle est illégale en raison de l'illégalité des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

- les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ont été méconnues.

La requête a été communiquée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 avril 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Pin, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant algérien né le 24 avril 1956, est entré en France le 5 novembre 2016. Il a bénéficié d'un titre de séjour en raison de son état de santé, valable du 15 août 2018 au 14 août 2019, dont il a sollicité le renouvellement. Par un arrêté du 15 juillet 2020, le préfet du Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de quatre-vingt-dix jours et a fixé le pays de destination. Par un jugement du 12 février 2021, dont M. B... relève appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté.

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) 7) Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. ". Selon l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants algériens, dans sa rédaction alors en vigueur : " (...) le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". L'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " (...) Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège ".

3. En premier lieu, si M. B... fait valoir que la décision de refus de titre est entachée d'un vice de procédure dès lors qu'il n'est pas démontré que les médecins composant le collège visé à l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 se soient effectivement réunis et aient rendu leur avis le 20 janvier 2020 de manière collégiale, il ressort des pièces produites au dossier que cet avis rendu par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration concernant l'état de santé de l'intéressé est signé par les trois médecins qui composent ce collège qui indique expressément qu'il a été émis, " après en avoir délibéré ". Aucun élément figurant au dossier n'est de nature à remettre en cause le caractère collégial de cette délibération. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'il a été privé de la garantie tenant au débat collégial du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

4. En deuxième lieu, si M. B... soutient que le préfet ne lui a pas communiqué les éléments ayant permis au collège des médecins de l'Office de considérer que le traitement auquel il est soumis est disponible en Algérie, aucune disposition, en particulier du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de l'arrêté du 27 décembre 2016 visé ci-dessus, ne prévoit une telle communication.

5. En troisième lieu, par un avis du 20 janvier 2020, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé que l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner pour celui-ci des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé en Algérie, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié et voyager sans risque à destination de ce pays. Pour contester l'appréciation du préfet, qui s'est approprié cet avis, M. B... fait valoir qu'il est atteint depuis 2002 d'un lymphome non hodgkinien, dont une rechute au cours de l'année 2016 l'a conduit à venir en France pour bénéficier d'un traitement à base de chimiothérapie non disponible en Algérie, et que sa situation médicale, qui demeure fragile en raison de multiples pathologies dont il est par ailleurs affecté, nécessite un suivi régulier. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, notamment de certificats médicaux du 12 novembre 2020 et du 14 décembre 2020, qu'à la date de la décision contestée, la pathologie cancéreuse dont souffre de M. B... est en phase de rémission et que son état de santé nécessite seulement une surveillance clinique et biologique trimestrielle. M. B... n'apporte aucun élément de nature à établir qu'une telle surveillance périodique ne pourrait pas être assurée dans son pays d'origine. La circonstance, à la supposer établie, qu'une pénurie de certains médicaments affecterait l'Algérie est sans incidence sur la légalité de la décision contestée, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment pas de l'article de presse versé au débat, que les traitements médicamenteux à base d'antidiabétiques, de bétabloquants et d'anticoagulants administrés à M. B... seraient concernés par la pénurie alléguée. Dans ces conditions, le refus de titre de séjour opposé à M. B... n'a pas été pris en méconnaissance des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

6. En dernier lieu, il résulte des circonstances de fait énoncées au point précédent qu'en refusant de délivrer un titre de séjour à M. B..., le préfet du Rhône n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé, et en particulier sur son état de santé.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

7. En premier lieu, il résulte de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de ce refus à l'encontre de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français.

8. En second lieu, le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5.

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

9. Il résulte de l'examen de la légalité de l'obligation de quitter le territoire français que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette mesure d'éloignement à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision désignant le pays de renvoi. Cette dernière décision n'ayant été prise ni en application ni sur le fondement de la décision de refus de titre de séjour, M. B... ne saurait utilement exciper de l'illégalité de ce refus de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi.

10. Ainsi qu'il a été dit au point 5 du présent arrêt, il ressort des pièces du dossier que M. B..., eu égard à son état de santé, peut voyager sans risque à destination de l'Algérie, où il peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié à ses pathologies. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée aurait, pour ce motif, méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, sous astreinte, ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 9 décembre 2021, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Gayrard, président assesseur,

M. Pin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 janvier 2022.

5

N° 21LY01869


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY01869
Date de la décision : 06/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. François-Xavier PIN
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : DACHARY

Origine de la décision
Date de l'import : 18/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-01-06;21ly01869 ?
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