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06/01/2022 | FRANCE | N°19LY04353

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 06 janvier 2022, 19LY04353


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 20 juin 2016 par lequel le maire de Grenoble a prolongé, pour régularisation, son placement en disponibilité d'office pour raison de santé du 4 mai au 3 novembre 2016 avec maintien de son demi-traitement, d'enjoindre au maire de Grenoble de lui verser son plein traitement à compter du 5 juin 2015 et de condamner la commune à lui verser une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral qu'il estime avoir subi.

Par jugement n° 1604463, 1702676 du 24 septembre 2019, le tribunal administrati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 20 juin 2016 par lequel le maire de Grenoble a prolongé, pour régularisation, son placement en disponibilité d'office pour raison de santé du 4 mai au 3 novembre 2016 avec maintien de son demi-traitement, d'enjoindre au maire de Grenoble de lui verser son plein traitement à compter du 5 juin 2015 et de condamner la commune à lui verser une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral qu'il estime avoir subi.

Par jugement n° 1604463, 1702676 du 24 septembre 2019, le tribunal administratif de Grenoble a, s'agissant de ces demandes, annulé l'arrêté du maire de Grenoble du 20 juin 2016 après avoir écarté l'exception de non-lieu à statuer opposée en défense, et rejeté le surplus des conclusions de M. B....

Procédure devant la cour

Par requête enregistrée le 28 novembre 2019, M. B..., représenté par Me Mebarki, demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 24 septembre 2019 en tant qu'il rejette ses conclusions aux fins d'indemnisation et d'injonction ;

2°) en tout état de cause, d'annuler la décision du maire de Grenoble du 20 juin 2016 ;

3°) d'enjoindre à la commune de Grenoble de lui rétablir son plein traitement à compter du 5 mai 2015 ;

4°) de condamner la commune de Grenoble à lui verser une somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Grenoble une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté du 12 mars 2019 par lequel le maire de Grenoble l'a à nouveau placé en disponibilité d'office du 4 février 2016 au 17 juillet 2017, faute de lui avoir été notifié, n'est pas devenu définitif et par suite ne peut être regardé comme régularisant sa situation ; le tribunal ne pouvait se fonder sur cet arrêté pour rejeter sa demande d'injonction ;

- en tout état de cause l'arrêté du 12 mars 2019 ne couvre pas la période du 5 mai 2015 au 4 février 2016 au titre de laquelle il a formé sa demande d'injonction de versement d'un plein traitement ;

- l'arrêté en litige a été signé par une autorité qui ne justifie pas de sa compétence ;

- l'arrêté en litige méconnaît les articles 4 et 38 du décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

- cette décision, portant sur l'imputabilité de son état de santé au service, ne pouvait intervenir sans consultation de la commission de réforme ;

- l'arrêté en litige méconnaît l'obligation de reclassement ;

- l'illégalité de cet arrêté constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la commune de Grenoble ;

- en ne statuant pas sur sa situation dès la fin de la première période de disponibilité d'office, le 3 mai 2016, mais le 20 juin 2016, la commune lui a créé un préjudice moral.

Par mémoire enregistré le 9 février 2021, la commune de Grenoble, représentée par Me Tissot, conclut au non-lieu à statuer sur les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de la décision du 20 juin 2016, au rejet de la requête, et demande que soit mise à la charge de M. B... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions indemnitaires de M. B... sont irrecevables ;

- il n'y a pas lieu à statuer sur la demande en première instance tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 juin 2016 ;

- les motifs du jugement attaqué ne peuvent conduire au prononcé d'une injonction ;

- aucun des moyens de la demande de M. B... n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Josserand-Jaillet, président ;

- les conclusions de M. Chassagne, rapporteur public ;

- et les observations de Me Punzano, pour la commune de Grenoble ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., assistant administratif titulaire à la commune de Grenoble, a été victime le 20 janvier 2014 d'un accident de trajet qui a été reconnu imputable au service par une décision du maire de Grenoble du 17 mars 2014. A l'issue d'une précédente procédure contentieuse, une décision du maire de Grenoble en date du 10 juin 2015 fixant au 3 février 2015 la date de consolidation de l'état de santé de M. B... dans les suites de cet accident est devenue définitive, tandis qu'une autre décision, en date du 9 février 2016, le plaçant en disponibilité d'office, a été annulée. Parallèlement, par un arrêté du 20 juin 2016, cette disponibilité d'office, avec demi-traitement, a été prolongée du 4 mai au 3 novembre 2016. Par un jugement n° 1604463, 1702676 du 24 septembre 2019, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ce dernier, et a rejeté les demandes de M. B... d'enjoindre au maire de Grenoble de lui verser son plein traitement à compter du 5 juin 2015 et de condamner la commune à lui verser une somme de 5 000 euros en réparation du préjudice moral qu'il estime avoir subi. M. B... demande à la cour l'annulation de ce jugement du 24 septembre 2019 en tant qu'il a rejeté ses demandes aux fins d'indemnisation et d'injonction et l'annulation de la décision du 20 juin 2016.

Sur les conclusions incidentes de la commune de Grenoble opposant une exception de non-lieu à statuer sur les conclusions de la demande de M. B... :

2. Par la voie de l'appel incident, la commune de Grenoble, faisant valoir l'intervention d'un arrêté du 12 mars 2019 revêtant pour partie le même objet que la décision en litige, annulée par le tribunal administratif de Grenoble, oppose une exception de non-lieu à statuer à la demande de première instance de M. B... tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 juin 2016. La commune de Grenoble, en sa qualité d'intimée, doit ainsi être regardée comme demandant l'annulation du jugement attaqué sur ce point.

3. L'arrêté du 20 juin 2016, pris au vu d'un avis du comité médical départemental en séance du 3 juin 2016, et à titre de régularisation pour assurer la continuité de la situation de M. B... ensuite du terme de ses droits à congé maladie ordinaire au 3 février 2016 et de son placement en disponibilité d'office du 4 février 2016 au 3 mai 2016, avait pour objet de prolonger cette dernière du 4 mai 2016 au 3 novembre 2016 avec un demi-traitement.

4. L'arrêté du 12 mars 2019, dont la commune de Grenoble justifie à hauteur d'appel, contrairement aux allégations de l'intéressé, de la notification à M. B... le 16 mars 2019, pris au vu notamment du jugement du 22 décembre 2017, confirmé par un arrêt de la cour du 12 mars 2019, par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 6 février 2016 plaçant M. B... en disponibilité d'office à compter de l'expiration de ses droits statutaires à congés, a pour objet de placer, avec droit à demi-traitement, M. B... " en position de disponibilité d'office à l'expiration de ses droits statutaires à compter du 4 février 2016 jusqu'au 17 juillet 2017 ", consécutivement à un congé de maladie ordinaire du 4 février 2015 au 3 février 2016, en constatant par ailleurs que l'intéressé a repris ses fonctions le 18 juillet 2017.

5. Il suit de là, en premier lieu, que, en l'absence de recours contentieux, à la date du jugement attaqué, le 24 septembre 2019, l'arrêté du 12 mars 2019 avait acquis un caractère définitif. En deuxième lieu, si ce dernier a un objet et une portée plus larges que l'arrêté en litige, il emporte en revanche, avec un effet rétroactif, à titre de régularisation, qui en l'espèce ne réduit pas les droits acquis de l'intéressé non plus que les garanties tirées de la procédure, les mêmes effets que l'arrêté du 20 juin 2016 dans leur entièreté, nonobstant la circonstance qu'il ne procède pas expressément, ainsi que l'a relevé le tribunal, à son retrait ou son abrogation. Enfin, il ressort des mentions mêmes de l'arrêté du 12 mars 2019 que celui-ci est intervenu pour l'exécution de l'injonction à réexaminer la situation de M. B... faite à la commune de Grenoble par le jugement du 22 décembre 2017 assortissant l'annulation de l'arrêté du 9 février 2016 et devenu définitif après le rejet de l'appel.

6. Dans ces conditions, et eu égard notamment à la superposition rétroactive, avec identité, des effets de l'arrêté du 12 mars 2019 sur ceux de l'arrêté en litige, celui-ci, en n'y substituant que la nouvelle procédure au terme de laquelle il est intervenu, a implicitement mais nécessairement emporté le retrait de ce dernier avant la date à laquelle les premiers juges ont statué sur le litige dont il était l'objet.

7. Il résulte de ce qui précède que, nonobstant la circonstance que l'arrêté du 20 juin 2016 ait reçu exécution, la commune de Grenoble est fondée à soutenir que celui-ci avait, à la date du jugement attaqué, disparu de l'ordonnancement juridique et qu'en conséquence il n'y avait plus lieu à statuer sur les mérites du pourvoi formé contre cet acte par M. B... devant le tribunal administratif de Grenoble. Le jugement du 24 septembre 2019, qui a statué sur cette demande après avoir écarté l'exception de non-lieu à statuer opposée en première instance par la commune de Grenoble, doit, dès lors, être annulé dans cette mesure.

8. Il y a lieu d'évoquer les conclusions de M. B... dirigées contre l'arrêté du 20 juin 2016 ainsi devenues sans objet au cours de la procédure de première instance et de constater qu'il n'y a pas lieu d'y statuer.

Sur les conclusions de M. B... à fin d'indemnisation :

9. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative dans sa version alors en vigueur : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision (...) ".

10. Les conclusions de la demande de M. B... tendant à la réparation d'un préjudice né de l'illégalité de l'arrêté du 20 juin 2016 à hauteur de 5 000 euros ont été rejetées par les premiers juges au motif que, pas plus avant l'enregistrement de sa requête qu'en cours de première instance, M. B... n'a présenté de demande préalable à la commune de Grenoble tendant à la réparation d'un préjudice. Dès lors que le requérant ne critique pas le motif d'irrecevabilité que lui a opposé le tribunal et alors qu'il n'appartient pas à la cour de s'interroger d'office sur son bien-fondé, ces conclusions, reprises en appel, doivent être rejetées.

Sur les conclusions de la demande à fin d'injonction :

11. Il n'appartient pas au juge administratif, en dehors des hypothèses prévues aux articles L. 911-1 et L. 911-2 du code de justice administrative, qui lui permettent d'enjoindre à l'administration de prendre les mesures qu'implique nécessairement sa décision, d'adresser des injonctions à l'administration ni d'accueillir des conclusions en déclaration de droits. A supposer que M. B... allègue un droit au versement intégral de son traitement à compter du 5 mai 2015, soit avant la période couverte par l'arrêté du 12 mars 2019 qui débutait le 4 mai 2016, il ne fait état d'aucune décision contre laquelle il dirigerait des conclusions en principal et dont sa demande d'injonction, qui n'est assortie par ailleurs d'aucune précision de nature à permettre d'en apprécier la portée, serait l'accessoire.

12. Enfin, le non-lieu à statuer prononcé par le présent arrêt pour les motifs exposés aux points 2 à 7 et le rejet des conclusions indemnitaires de M. B... n'appellent aucune mesure d'exécution de la part de la commune de Grenoble, notamment s'agissant du versement des rémunérations de M. B... pour la période du 4 mai 2016 au 3 novembre 2016.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Grenoble, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la commune de Grenoble. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme au titre des frais exposés par la commune de Grenoble.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1604463, 1702676 du tribunal administratif de Grenoble du 24 septembre 2019 est annulé en tant qu'il se prononce sur les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Grenoble du 20 juin 2016.

Article 2 : Il n'y a pas lieu à statuer sur les conclusions de la demande de M. B... tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Grenoble du 20 juin 2016.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Grenoble en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la commune de Grenoble.

Délibéré après l'audience du 9 décembre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Josserand-Jaillet, président ;

M. Seillet, président assesseur ;

Mme Djebiri, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 janvier 2022.

N° 19LY04353

al


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19LY04353
Date de la décision : 06/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Congés - Congés de maladie - Accidents de service.

Procédure - Incidents - Non-lieu.


Composition du Tribunal
Président : M. JOSSERAND-JAILLET
Rapporteur ?: M. Daniel JOSSERAND-JAILLET
Rapporteur public ?: M. CHASSAGNE
Avocat(s) : CDMF-AVOCATS AFFAIRES PUBLIQUES

Origine de la décision
Date de l'import : 18/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-01-06;19ly04353 ?
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